ARRÊT N°
MW/LZ
COUR D’APPEL DE BESANÇON
– 172 501 116 00013 –
ARRÊT DU 05 JUILLET 2023
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
Audience publique du 03 Mai 2023
N° RG 22/00944 – N° Portalis DBVG-V-B7G-EQUB
S/appel d’une décision du Tribunal de Commerce de BELFORT en date du 08 mars 2022 [RG N° R.21-1006]
Code affaire : 50B- Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix
S.A.S. PSB NEGOCE C/ S.A.R.L. COURTAGE AUTO
PARTIES EN CAUSE :
S.A.S. PSB NEGOCE
RCS de Belfort n°793 108 622
sise [Adresse 2]
Représentée par Me Françoise PEQUIGNOT, avocat au barreau de BESANCON
Représenté par Me Pierre LAUGERY, avocat au barreau d’ANGERS
APPELANTE
ET :
S.A.R.L. COURTAGE AUTO
RCS du Mans n°825 206 198
sise [Adresse 1]
Représentée par Me Alexandre BERGELIN, avocat au barreau de MONTBELIARD
INTIMÉE
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats :
MAGISTRAT RAPPORTEUR : Monsieur Michel WACHTER, Président de Chambre, conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, avec l’accord des Conseils des parties.
GREFFIER : Madame Leila Zait, Greffier.
Lors du délibéré :
Monsieur Michel WACHTER, Président de Chambre, a rendu compte conformément à l’article 786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats :
Monsieur Jean-François LEVEQUE et Monsieur Cédric SAUNIER, conseillers.
L’affaire, plaidée à l’audience du 03 mai 2023 a été mise en délibéré au 05 juillet 2023. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
**************
En octobre 2020, souhaitant acquérir un véhicule automobile Ford Mustang, la SAS PSB Négoce a fait appel aux services de la SARL Courtage Auto.
Par exploit du 1er avril 2021, la société PSB Négoce a fait assigner la société Courtage Auto devant le tribunal de commerce de Belfort en paiement de la somme de 42 190 euros. Elle a exposé au soutien de sa prétention :
– que son choix s’était porté sur un véhicule d’un prix de 40 990 euros proposé par un vendeur allemand ; que la société Courtage Auto lui avait adressé le 14 octobre 2020 un exemplaire du contrat comportant les références bancaires du vendeur, et qu’elle-même avait alors procédé au paiement du prix ; que le 19 octobre 2020, la société Courtage Auto l’avait avisée que le vendeur avait fait l’objet d’un piratage informatique et que les coordonnées bancaires communiquées le 14 octobre 2020 n’étaient pas les siennes ; que le recours exercé par la société PSB Négoce auprès de sa banque étaient restées vaines, les fonds ayant été retirés du compte bénéficiaire du versement ;
– qu’en sa qualité d’intermédiaire entre le vendeur et l’acquéreur, la société Courtage Auto avait manqué à ses obligations contractuelles en ne vérifiant pas les informations relatives à la transaction, en particulier l’exactitude des coordonnées bancaires du vendeur ; qu’elle devait en conséquence l’indemniser du préjudice subi, consistant dans la somme de 40 990 euros qu’elle avait perdue, augmentée de celle de 1 200 euros correspondant au prix de la rémunération de la prestation de la société Courtage Auto.
La société Courtage Auto s’est opposée aux demandes formées contre elle, au motif qu’elle n’était intervenue qu’en qualité de prestataire administratif dans l’opération de vente conclue entre la demanderesse et le vendeur allemand, et que n’ayant d’autre obligation que de mettre les parties en relation, il ne lui incombait pas de vérifier la véracité des coordonnées bancaires fournies. Elle a ajouté avoir agi avec diligence en informant sa cliente dès qu’elle avait eu connaissance des difficultés portées à sa connaissance.
Par jugement du 8 mars 2022, le tribunal de commerce a :
– dit et jugé que la société Courtage Auto n’a pas commis de faute à l’égard de la société PSB Négoce et que sa responsabilité contractuelle n’est pas engagée ;
– débouté la société PSB Négoce de sa demande de dommages et intérêts ;
– condamné la société PSB Négoce à payer à la société Courtage Auto la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a déboutée du surplus de sa demande ;
– constaté l’exécution provisoire du présent jugement en application de l’article 514 du code de procédure civile dans sa version postérieure au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 ;
– condamné la société PSB Négoce à supporter les dépens de la présente instance, dont les frais de greffe qui s’élèvent à la somme de 69,59 euros ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes, fins et moyens.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :
– que le contrat soumis par la société Courtage Auto à la société PSB Négoce répondait bien à la qualification de contrat de courtage ;
– que la société Courtage Auto n’était pas tenue d’entrer en négociation avec le vendeur allemand pour le compte de la société PSB Négoce ; que cette demière avait, en tout état de cause, fait preuve d`un manque de prudence en procédant au règlement du vendeur sans attendre le retour du bon de commande signé par ce dernier et rendant la vente parfaite ; que la société Courtage Auto n’était pas partie à la vente et n’était pas tenue de vérifier la qualité de l’acte juridique liant la société PSB Négoce au vendeur ;
– que le tribunal s’étonnait que le bon de commande établi et signé par le vendeur allemand, professionnel de la vente automobile, puisse comporter des coordonnées bancaires différentes s’agissant de copies d’un même document portant la signature et le cachet de la société PSB Négoce ;
– que la société Courtage Auto avait démontré sa bonne foi en informant la société PSB Négoce des difficultés rencontrées par le vendeur allemand.
La sociét PSB Négoce a relevé appel de cette décision le 10 juin 2022.
Par conclusions n°2 transmises le 21 décembre 2022, l’appelante demande à la cour :
Vu l’article 1231-1 du code civil,
Vu les articles 1984 et suivants du code civil,
– de dire et juger la société PSB Négoce recevable et bien fondée en son appel et ses demandes ;
En conséquence
– d’infirmer le jugement dont appel et statuant à nouveau,
– de condamner la société Courtage Auto à verser à la société PSB Négoce la somme de 42 190 euros en réparation de son préjudice subi ;
– de condamner la société Courtage Auto à payer à la société PSB Négoce la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– de condamner la société Courtage Auto à supporter les entiers dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de
procédure civile.
Par conclusions n°2 notifiées le 4 janvier 2023, la société Courtage Auto demande à la cour :
Vu les articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil,
– de confirmer dans toutes ses dispositions le jugement déféré ;
– de condamner la société PSB Négoce à verser à la société Courtage Auto la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile concernant la présente procédure d’appel, outre les entiers dépens.
La clôture de la procédure a été prononcée le 12 avril 2023.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l’exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.
Sur ce, la cour,
L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L’article 1231-1 du même code énonce que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
C’est à celui qui se prévaut d’une inexécution contractuelle qu’il incombe de la caractériser.
En l’espèce, le contrat intitulé ‘Pack Europe et Suisse à 1 200 €’ liant les parties détaille ainsi qu’il suit ‘la mission précise de Courtage Auto’ :
‘- contact de vendeurs étrangers et prise de renseignements par téléphone.
– demande des pièces administratives aux vendeurs par retour mail.
– retour au client des informations récoltées et envoi des éléments par mail.
– possibilité de mise en relation avec un expert (voir CGV pour les pays concernés).
– possibilité de mise en relation avec un transporteur (sur demande du client).
– préparation du dossier des WW provisoires. (coût non compris)’
Les conditions générales de vente précisent que ‘ le client devra nous faire parvenir des liens sur lesquels Courtage Auto se renseignera et réalisera la demande du vendeur des éléments administratifs se rapportant aux véhicules en question (…) L’achat se réalise entre le vendeur étranger et le client directement, Courtage Auto ne passe en aucun cas propriétaire du dit véhicule. Aucun fonds lié à ce futur achat ne transitera par Courtage Auto. La société n’est en rien responsable d’une quelconque indisponibilité de véhicule, d’un quelconque problème mécanique ou d’un quelconque problème de paiement.’
Il ressort de l’économie de ce contrat que Courtage Auto n’est pas chargée d’acquérir un véhicule pour le compte de son client, ni même de rechercher un véhicule pour celui-ci, mais uniquement de prendre contact avec le vendeur étranger dont un véhicule a été sélectionné sur un site internet quelconque par le client, de se faire communiquer par ce vendeur les pièces administratives, et de les répercuter au client. La mission de l’intimée se limite ainsi à la mise en relation entre l’acquéreur et le vendeur, ainsi qu’à la transmission entre ceux-ci des documents nécessaires à la finalisation de la vente, en permettant en particulier d’aplanir les obstacles liés aux problèmes de maîtrise de la langue et des formalités administratives étrangères.
Il n’est pas contesté que la société Courtage Auto a rempli ses obligations s’agissant de la transmission des documents administratifs relatifs au véhicule, la difficulté survenue dans le cadre de la vente résultant exclusivement du caractère erroné des coordonnées bancaires communiquées par le vendeur.
Or, comme l’ont à juste titre retenu les premiers juges, le contrat ne met pas à la charge de la société Courtage Auto d’obligation de vérifier l’exactitude des coordonnées bancaires communiquées par le vendeur en vue de la transaction, alors au demeurant que celles-ci étaient concordantes avec le numéro de compte indiqué sur l’exemplaire du contrat signé par le vendeur et l’acquéreur, tel que produit par l’appelante (sa pièce 5bis), de sorte qu’il n’apparaissait pas d’incohérence manifeste entre les pièces transmises, susceptible d’interroger la société Courtage Auto sur leur sincérité.
Le manquement contractuel n’étant pas démontré, la décision déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.
La société PSB Négoce sera condamnée aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à l’intimée la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs
Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 mars 2022 par le tribunal de commerce de Belfort ;
Y ajoutant :
Condamne la SAS PSB Négoce aux dépens d’appel ;
Condamne la SAS PSB Négoce à payer à la SARL Courtage Auto la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Ledit arrêt a été signé par Monsieur Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et par Madame Leila Zait, greffier.
Le greffier, Le président,