30 novembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
16-18.025
SOC.
JT
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 30 novembre 2017
Rejet non spécialement motivé
M. Chauvet, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 11237 F
Pourvoi n° Y 16-18.025
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Pharmacie X… Z…, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 31 mars 2016 par la cour d’appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l’opposant à Mme Catherine Y…, domiciliée […] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 24 octobre 2017, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Depelley, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Pharmacie X… Z…, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de Mme Y… ;
Sur le rapport de Mme Depelley, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Pharmacie X… Z… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Pharmacie X… Z… à payer la somme de 3 000 euros à Mme Y… ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Becker, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de la décision le trente novembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Pharmacie X… Z…
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir requalifié le contrat de travail à temps partiel de Mme Y… en contrat de travail à temps plein et d’avoir, en conséquence, condamné la société X… Z… à lui payer les sommes de 113.991,43 euros à titre de rappel de salaire et congés payés pour la période de décembre 2007 à avril 2012, 1.000 euros à titre de dommages-intérêts pour dépassement des seuils légaux et conventionnels d’horaires de travail et 6.308,28 euros à titre de complément d’indemnité de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE, sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et ses conséquences, il est constant que Mme Y… était engagée dans le cadre d’un contrat de travail à temps partiel à raison de 15 heures par semaine, dont la répartition était précisée dans le contrat de travail ; que Mme Y… sollicite la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet aux motifs que le contrat de travail ne comporte pas les mentions légales relatives au cas de modification éventuelle de la répartition des heures de travail et aux limites dans lesquelles peuvent être accomplies les heures complémentaires, ce qui la mettait dans l’impossibilité de prévoir à l’avance son rythme de travail, que le recours aux heures complémentaires a porté la durée du travail au delà de la durée légale ; que sur le défaut de mentions légales, l’article L. 3123-14 du code du travail prévoit que le contrat de travail à temps partiel doit comporter certaines mentions, notamment les cas dans lesquels une modification éventuelle de la répartition des heures de travail peut intervenir ainsi que la nature de cette modification et les limites dans lesquelles le salarié peut effectuer des heures complémentaires ; qu’il est cependant de principe que l’absence de mention des limites de recours aux heures complémentaires ne constitue pas en soi une cause de requalification du contrat de travail, cette situation privant seulement l’employeur de la possibilité de recourir aux heures complémentaires ; qu’il en est de même de l’absence de prévision des circonstances pouvant justifier une modification de la durée du travail, l’employeur se voyant seulement privé de la possibilité de modifier ces heures et s’exposant, s’il passe outre, au refus du salarié et à une rupture à l’initiative de celui-ci ; que sur le dépassement de la durée légale, il résulte des dispositions des articles L. 3123-17 et L. 3123-14 du code du travail et d’une jurisprudence constante que lorsque le recours à des heures complémentaires a pour effet de porter la durée du travail d’un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale ou conventionnelle, le contrat de travail à temps partiel doit, à compter de la première irrégularité, être requalifié en contrat de travail à temps plein ; que la salariée produit aux débats un relevé hebdomadaire des heures travaillées sur la période de 2000 à période de 2007 à 2011, non atteinte par la prescription, Mme Y… a travaillé au-delà de 35 heures : – en 2007 : 3 semaines, chacune durant 49 heures, – en 2008 : 5 semaines, dont deux semaines à 51 heures, – en 2009 : 4 semaines, chacune durant 51 heures, – en 2010 : 3 semaines, chacune durant 51 heures, – en 2011 : 3 semaines, chacune durant 51 heures ; qu’il ressort de ces éléments de nombreux dépassements de la durée légale de travail, dans des proportions au surplus importantes, ayant même conduit la salariée a travailler au-delà de la limite de 48 heures autorisée pour les salariés à temps plein ; que les nécessités de remplacement durant les périodes de congés invoquées par l’employeur ne peuvent justifier ces dépassements, aucune circonstance n’autorisant le dépassement du plafond prévu par l’article L. 3123-17 du code du travail ; qu’il s’ensuit que la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein est encourue, et ce à compter du premier dépassement constaté dans la période non prescrite soit à compter de décembre 2007 ; que la salariée a effectué un décompte très précis de la rémunération versée par l’employeur et de celle dont elle aurait du bénéficier en qualité de salariée à temps complet, aboutissant à un rappel de salaire exactement chiffré à 113.991,43 euros, congés payés inclus sur la période de décembre 2017 à avril 2012 ; que sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect des seuils conventionnels et légaux, Mme Y… s’est vue imposer à plusieurs reprises chaque année une modification de ses horaires de travail non prévue par le contrat de travail et a effectué des heures au-delà de la limite légale applicable aux heures complémentaires et même au-delà du seuil applicable aux salariés à temps plein ; que le préjudice en résultant sera justement indemnisé par une somme de 1 000 euros ;
ALORS QUE si la requalification est encourue en cas de recours à des heures complémentaires portant la durée du travail accompli au niveau de la durée légale ou conventionnelle pendant un temps limité, il ne peut en résulter l’obligation de payer des heures non travaillées ; qu’en décidant néanmoins le contraire, la cour d’appel a porté une atteinte disproportionnée aux biens de l’employeur et alloué des sommes indues à la salariée, en violation de l’article 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne des droits de l’homme.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir dit que le motif économique du licenciement n’était pas établi, que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, que l’employeur n’avait pas satisfait à son obligation de reclassement et d’avoir condamné la société X… Z… à payer à Mme Y… la somme de 25.000 euros ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement est ainsi motivée « la société Z… A… qui vous employait jusqu’au 14 décembre 2011 a été contrainte de se regrouper avec une autre pharmacie, la société X…, à effet du 15 février. Ce regroupement de deux fonds de commerce de pharmacie en une seule structure s’est avéré nécessaire afin de sauvegarder la compétitivité de nos deux petites structures, dont la baisse importante de chiffre d’affaires respectives atteignait -50.000 euros pour la société X…en 2011 par rapport à -2010 et -100.000 euros pour la société Z… A…. Ces petites structures pharmaceutiques sont menacées par la concurrence subie par de grosses structures concurrentes sur la secteur, dont les chiffres d’affaires avoisinent ou dépassent les deux millions d’euros annuels, leur permettant d’obtenir de leur fournisseur des prix d’achat plus compétitifs, assurant ainsi le développement et une fréquentation accrue de leur clientèle au détriment des petites structures comme les nôtres, dont la viabilité et la survie sont compromises à court terme, à défaut de se regrouper et de se réorganiser. Ces menaces sur notre compétitivité et notre survie nous contraignent aujourd’hui à poursuivre notre restructuration et notre réorganisation afin d’anticiper de manière préventive les risques et les difficultés présents et à venir, en adaptant nos structures et notre effectif à l’évolution du marché et de la concurrence active afin de pouvoir faire face au remboursement de nos emprunts, pour : – une synergie au point de vue des achats, – une rationalisation des charges du personnel sur un seul site, – la modernisation de notre société pour optimiser la surface de vente et être économiquement plus attractive pour la clientèle. Nous avons préalablement recherché toute possibilité de reclassement, sans pouvoir identifier de poste. Nous sommes contraints de procéder à votre licenciement et de supprimer deux postes d’assistantes pharmaciennes, dont le vôtre » ; qu’il ressort de cette lettre que le licenciement de la salariée est exclusivement motivé par la nécessité après regroupement de l’officine employant celle-ci avec une autre officine également déficitaire, de poursuivre la restructuration de cette nouvelle entité pour préserver sa compétitivité ; que la réorganisation de l’entreprise constitue, indépendamment de l’existence de difficultés économiques, un motif de licenciement si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ; qu’en l’espèce, il convient d’emblée d’observer que la sauvegarde de la compétitivité a été le motif du regroupement de la société Z… A… et de la société X…; qu’il appartient en conséquence à la société X… Z… de démontrer que cette compétitivité n’était pas suffisamment assurée par ce regroupement et imposait le licenciement de Mme Y… ; que la société X… Z… se borne à produire à cet égard un article de presse faisant état des difficultés rencontrées par les professionnels de la pharmacie, lié au trop grand nombre d’officines et à la concurrence des grandes surfaces, et préconisant le recours à des regroupements d’officines ; que ces considérations générales sur le secteur d’activité ne sauraient suffire à établir la réalité d’une menace sur la compétitivité de la société X… Z… alors qu’elle ne donne aucune information sur le nombre et la localisation des autres officines sur le plan local, étant observé qu’un tableau figurant dans l’un des articles de presse présente la région Nord Pas de Calais comme l’une de celles ayant la plus faible densité de pharmacies en France ; que cette menace est d’autant moins caractérisée que la société X… Z… est devenue du fait du regroupement opéré en février 2011 une structure conséquente (qualifiée de « grosse structure » dans la lettre même de licenciement) et qu’elle a enregistré au 31 mars 2012 une progression de l’ordre de 32 % de son chiffre d’affaires (de 892.000 à 1.104.000 euros) et un résultat net toujours excédentaire, malgré des emprunts importants réalisés pour financer des travaux d’aménagement, significatifs de l’impact positif du regroupement opéré ;qu’il convient en conséquence, par ces motifs et ceux non contraires du premier juge, de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu’employée dans une entreprise occupant moins de dix salariés, Mme Y… doit être indemnisée en fonction de son préjudice, en application de l’article L. 1235-5 du code du travail ; qu’en considération notamment de son ancienneté (12 ans), de son âge (née […] ), de son salaire, après requalification, (3.279 euros) et de sa situation après la rupture, ce préjudice sera justement indemnisé par une somme de 25.000 euros ; qu’il lui revient en outre un complément d’indemnité de licenciement, exactement chiffré à 6.308,28 euros dans ses écritures ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, vu l’article L. 1233-15 du code du travail qui stipule que lorsque l’employeur décide de licencier un salarié pour motif économique, qu’il s’agisse d’un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, il lui notifie le licenciement par lettre recommandée avec avis de réception ; que cette lettre ne peut être expédiée moins de sept jours ouvrables à compter de la date prévue de l’entretien préalable de licenciement auquel le salarié a été convoqué ; que ce délai est de quinze jours ouvrables pour le licenciement individuel d’un membre du personnel d’encadrement mentionné au 2° de l’article L. 1441-3 ; que vu l’article L. 1233-16 qui stipule que la lettre de licenciement comporte l’énoncé des motifs économiques invoqués par l’employeur ; qu’elle mentionne également la priorité de réembauche prévue par l’article L. 1233-45 et ses conditions de mise en oeuvre ; que vu l’article L. 1233-45 qui stipule que le salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche durant un délai d’un an à compter de la date de rupture de son contrat s’il en fait la demande au cours de ce même délai ; que dans ce cas, l’employeur informe le salarié de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification ; qu’en outre, l’employeur informe les représentants du personnel des postes disponibles et affiche la liste de ces postes ; que le salarié ayant acquis une nouvelle qualification bénéficie également de la priorité de réembauche au titre de celle-ci, s’il en informe l’employeur ; que vu l’article L. 1233-39 du code du travail qui stipule que l’employeur notifie au salarié le licenciement pour motif économique par lettre recommandée avec avis de réception ; que la lettre de notification ne peut être adressée avant l’expiration d’un délai courant à compter de la notification du projet de licenciement à l’autorité administrative ; que ce délai ne peut être inférieur à : 1° Trente jours lorsque le nombre des licenciements est inférieur à cent ; 2° Quarante-cinq jours lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ; 3° Soixante jours lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à deux cent cinquante ; qu’une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir des délais plus favorables aux salariés ; que vu l’article L. 1233-3 qui stipule que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; que les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l’une des causes énoncées au premier alinéa ; que vu l’article L. 1233-10 du code du travail qui stipule que l’employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la réunion prévue à l’article L. 1233-8, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif ; qu’il indique : 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; 2° Le nombre de licenciements envisagés ; 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l’ordre des licenciements ; 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l’établissement ; 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; 6° Les mesures de nature économique envisagées ; que vu l’article L. 1233-42 du code du travail qui stipule que la lettre de licenciement comporte l’énoncé des motifs économiques invoqués par l’employeur ; qu’elle mentionne également la priorité de réembauchage prévue à l’article L. 1233-45 et ses conditions de mise en oeuvre ; que vu l’article L. 1235-1 du code du travail qui stipule qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié ; que vu l’article 12 du code de procédure civile qui stipule que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, qu’il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, que les éléments constitutifs de la cause réelle et sérieuse du licenciement pour motif économique est de ne pas être inhérent à la personne du salarié et d’avoir pour origine notamment des difficultés économiques, des mutations technologiques et des réorganisations; qui entraînent la transformation, ou la suppression de l’emploi du salarié ou la modification d’un élément essentiel du contrat de travail qui aboutissent à un licenciement lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés, et que le reclassement sur un emploi équivalent ou, à défaut, sur un emploi d’une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l’établissement, de l’entreprise et du groupe ; que si le législateur a pris le soin de mentionner le mot « notamment », c’est que la liste des difficultés de l’entreprise n’est pas exhaustive et qu’il lui appartient de motiver le motif économique ; que si le motif économique invoqué est une réorganisation pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise, il convient à l’entreprise de démontrer la source des difficultés présentes et futures ; qu’en l’espèce, Mme Y… a été convenablement convoquée par lettre recommandée accusé de réception à un entretien préalable à son licenciement économique pour le 16 janvier 2012 ; que les motifs du licenciement lui ont été expliqués par lettre recommandée accusé réception en date du 26 janvier 2012 ; que cette lettre est motivée comme suit : « la société Z… A… qui vous employait jusqu’au 14 décembre 2011 a été contrainte de se regrouper avec une autre pharmacie, la société X…, à effet du 15 février. Ce regroupement de deux fonds de commerce de pharmacie en une seule structure s’est avéré nécessaire afin de sauvegarder la compétitivité de nos deux petites structures, dont la baisse importante de chiffre d’affaires respectives atteignait -50.000 euros pour la société X…en 2011 par rapport à -2010 et -100.000 euros pour la société Z… A…. Ces petites structures pharmaceutiques sont menacées par la concurrence subie par de grosses structures concurrentes sur la secteur, dont les chiffres d’affaires avoisinent ou dépassent les deux millions d’euros annuels, leur permettant d’obtenir de leur fournisseur des prix d’achat plus compétitifs, assurant ainsi le développement et une fréquentation accrue de leur clientèle au détriment des petites structures comme les nôtres, dont la viabilité et la survie sont compromises à court terme, à défaut de se regrouper et de se réorganiser. Ces menaces sur notre compétitivité et notre survie nous contraignent aujourd’hui à poursuivre notre restructuration et notre réorganisation afin d’anticiper de manière préventive les risques et les difficultés présents et à venir, en adaptant nos structures et notre effectif à l’évolution du marché et de la concurrence active afin de pouvoir faire face au remboursement de nos emprunts, pour : – une synergie au point de vue des achats, – une rationalisation des charges du personnel sur un seul site, – la modernisation de notre société pour optimiser la surface de vente et être économiquement plus attractive pour la clientèle. Nous avons préalablement recherché toute possibilité de reclassement, sans pouvoir identifier de poste. Nous sommes contraints de procéder à votre licenciement et de supprimer deux postes d’assistantes pharmaciennes, dont le vôtre » ; que suite à son interrogation quant aux difficultés économiques de son employeur alors qu’il réalise des travaux, Mme Y… le saisit par courrier du 28 juin 2012 le saisit par courrier du 28 juin 2012 qui lui répond en date du 26 juillet 2012 en ces termes : «
votre étonnement semble indiquer que vous n’êtes pas très au fait des réalités économiques de la profession puisque les chiffres d’affaires de la majorité des officines du Nord Pas de Calais sont actuellement en baisse et ce depuis le mois de juillet 2011. Notre officine n’échappe pas à la règle et nous rencontrons actuellement des difficultés à tenir les chiffres prévus dans nos études prévisionnelles. Quant aux travaux réalisés dans l’officine, il va sans dire qu’ils étaient nécessaires pour garder une certaine attractivité vis-à-vis de la clientèle et que ceux-ci ont été financés par un emprunt bancaire que nous sommes actuellement en train de rembourser
» ; que le simple fait de souligner que la profession rencontre des difficultés économiques ne peut suffire à caractériser les difficultés économiques effectivement rencontrées par la société X… Z… ; qu’en effet, affirmer à la barre que « la cour des comptes préconise la suppression de 23 % des pharmacies existantes » pour justifier la dégradation du contexte économique et des résultats pour justifier un licenciement économique ne saurait caractériser l’état financier des deux pharmacies en question ; qu’en conséquence, il convient d’analyser les éléments comptables et financiers des deux structures avant le rapprochement et de la structure nouvellement créée avant de caractériser le licenciement d’économique ou non ; que le conseil ne constate la présence au dossier de la société X… Z…, défenseur au dossier, que des bilans, comptes de résultat détaillés et solde intermédiaire de gestion de la société Z…A…, structure avant rapprochement, sur les exercices arrêtés au 30 juin 2011 et 2010 et aucun autre élément relatif aux structures société X…avant rapprochement et société X… Z… après rapprochement et défenseur au dossier ; qu’il constate au dossier de Mme Y…, la demanderesse, les principaux indicateurs d’un bilan et compte de résultat, issus d’une consultation sur le site « www.société.com », de la société X… Z… sur les exercices arrêtés au mars 2010, 2011 et 2012, à peine suffisants pour caractériser une situation économique, car ne correspondant pas à un bilan et compte de résultat détaillé nécessaires pour une analyse détaillée des postes relatifs à la masse salariale constituées des salaires et traitements et des charges sociales ; que le conseil déplore que la partie défenderesse, la société X… Z…, n’apporte qu’un justificatif comptable et financier partiel pour apprécier les difficultés économiques ; qu’il devra donc se satisfaire des éléments synthétiques et sommaires apportés par Mme Y…, la partie demanderesse, pour éclairer judicieusement son jugement ; qu’à l’analyse des données comptables et financières, le conseil constate que la société Z…A… dégage un résultat d’exploitation, seul indicateur pertinent pour constater l’activité économique, en baisse passant de 58.675 euros en 2010 à 47.572 euros en 2011, soit – 11,103 euros et – 18,92 %; que la société X… Z… dégage un résultat d’exploitation de 57.100 euros en 2010 à 51.500 euros en 2011, en baisse très légère ; que par ailleurs, le résultat net de la société Z…A… baisse en passant de 46.256 euros en 2010 à 31.597 en 2011 ; que pour autant le taux de marge commercial s’est amélioré passant de 28,86 % en 2010 à 30,02 % en 2011 ; que le résultat net de la société X… Z… passe de 35.700 euros en 2010 à 33.500 euros en 2011, soit une très légère baisse ; que ces baisses, même légères, s’expliquent par une baisse du chiffre d’affaires ; que pour la société Z…A… passant de 1.030.962 euros en 2010 à 944.436 euros en 2011 et pour la société X… Z… passant de 948.400 euros en 2010 à 892.500 euros en 2011 ; qu’en outre, le conseil constate qu’après le rapprochement des deux officines, les indicateurs de la société X… Z… sont les suivants : un chiffre d’affaires au 31 mars 2012 de 1.104.500 euros, un résultat d’exploitation de – 8.600 euros et un résultat net de +18.700 euros ; que ces résultats sont pour autant le reflet d’une hausse considérable du poste dette financière au passif de la société X… Z… qui s’explique par un emprunt d’au moins 1.000.000 euros pour financer des travaux d’aménagement dans le magasin comme le précise le défenseur dans son courrier à Mme Y… en date du 26 juillet 2012 pour garder l’attractivité vis-à-vis des clients ; qu’en d’autres termes, le rapprochement des deux officines a nécessité des travaux importants qui ont alourdi le total du bilan et chargé à la baisse le résultat net sans pour autant compromettre la rentabilité économique et financière de la structure ; que l’analyse des capitaux propres et des liquidités n’apporte aucune plus value au débat dans la mesure où ces deux éléments ne constituent pas des indicateurs mesurant le ralentissement de l’activité, ni les difficultés économiques subies par l’entreprise mais seulement des indicateurs financiers constitutifs de la vie antérieure de l’entreprise permettant peut être d’amortir les effets de la crise mais ne devant en aucun cas être mis en oeuvre avec un caractère obligatoire ; qu’à l’appui des éléments ci-dessus, produits au dossier, le conseil dit que les éléments avancés, à l’appui de la présente demande, ne suffisent pas à caractériser les difficultés économiques, ni les menaces sur la compétitivité de la société X… Z… ; qu’en conséquence, le Conseil dit que le motif économique du licenciement n’est pas établi et que le licenciement de Mme Y… est sans cause réelle et sérieuse ; que sur l’obligation de reclassement, même si l’obligation de reclassement est une obligation de moyens pas de résultat, il n’en demeure pas moins vrai que l’employeur doit apporter la preuve de la mise en oeuvre des moyens ; qu’en l’espèce, même si le transfert de deux pharmacies en une seule dénommée la société X… Z… a rationnalisé les postes de travail en supprimant dans chaque structure le poste d’assistant pharmacien ainsi que le poste d’administratif, occupé par le conjoint de chaque pharmacien titulaire, il n’en demeure pas moins vrai qu’elle n’apporte aucun élément pour établir ses tentatives de reclassement ; que cela se confirme dans la lettre de licenciement en date du 26 janvier 2012 qui stipule « …Nous avons préalablement recherché toute possibilité de reclassement, sans pouvoir identifier de poste de reclassement, faute d’emploi disponible, même inférieur à votre statut et emploi actuel…. » ; qu’en conséquence, le conseil dit que la société X… Z… n’a pas satisfait à ses obligations de reclassement ;
1°) ALORS QUE le juge ne peut se substituer à l’employeur quant aux choix que ce dernier effectue dans la mise en oeuvre de la réorganisation de l’entreprise ; qu’en l’espèce, l’employeur faisait valoir que le regroupement des deux officines en une seule structure avait été décidé pour le maintien de la compétitivité de l’entreprise et que la rationalisation des postes de travail constitués par quatre pharmaciens dans le cadre d’une activité distincte de deux pharmacies amenait nécessairement l’activité regroupée à supprimer les deux postes de pharmaciens assistants (concl., p. 11) ; qu’en imposant pourtant à l’employeur de démontrer que la compétitivité de l’entreprise n’était pas suffisamment assurée par le regroupement et imposait le licenciement de Mme Y… (arrêt, p. 5 § 4), tandis que les suppressions d’emploi résultaient directement des mesures de réorganisation engagées pour le maintien de la compétitivité, la cour d’appel a contrôlé le choix effectué par l’employeur dans la mise en oeuvre de la réorganisation, violant ainsi l’article L. 1233-3 du code du travail ;
2°) ALORS QU’ en excluant la réalité d’une menace sur la compétitivité de la société X… Z… aux motifs que l’employeur invoquait des considérations générales sur le secteur d‘activité (arrêt, p. 5 § 6), sans rechercher, comme elle y était invitée, si la compétitivité des sociétés Z…A… et Pharmacie X…était menacée du fait de leur proximité immédiate l’une de l’autre (concl., p. 9 § 7) et de leur appartenance à un secteur très fortement concurrentiel (concl., p. 9 § 2 et 3), ce qui justifiait leur regroupement et les licenciements subséquents des deux pharmaciens assistants, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 233-4 du code du travail ;
3°) ALORS QUE le motif de licenciement s’apprécie à la date du licenciement, de sorte qu’il faut se placer à cette date pour apprécier les exigences de compétitivité qui fondent la réorganisation ; qu’en l’espèce, pour juger que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a retenu que « du fait du regroupement, la société X… Z… est devenue une structure conséquente et qu’elle a enregistrée au 31 mars 2012 une progression de 32 % de son chiffre d’affaires » (arrêt, p. 5 § 7) ; qu’en appréciant la menace sur la compétitivité de la société X… Z… postérieurement au licenciement de Mme Y… intervenu plus de deux mois auparavant, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-4 du code du travail ;
4°) ALORS QU’ aux termes de la lettre de licenciement notifiée à Mme Y… le 26 janvier 2012 : « la société Z… A…, qui vous employait jusqu’au 14 décembre 2011, a été contrainte de se regrouper avec une autre pharmacie, la société X…(
). Ces petites structures pharmaceutiques sont, en effet, durement affectées et menacées par la concurrence subie par de grosses structures concurrentes dont les chiffres d’affaires avoisinent ou dépassent les deux millions d’euros annuels, leur permettant d’obtenir de leurs fournisseurs des prix d’achats plus compétitifs, assurant ainsi un développement et une fréquentation accrue de leur clientèle au détriment des petites structures comme les nôtres » ; qu’en relevant, pour juger que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, que « du fait du regroupement, la société X… Z… est devenue une structure conséquente, qualifiée de « grosse structure » dans la lettre même de licenciement » (arrêt, p. 5 § 7), la cour d’appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre de licenciement et ainsi violé l’article 1134 du code civil ;
5°) ALORS QUE satisfait à son obligation de reclassement l’employeur qui établit qu’il n’existait aucun poste disponible dans l’entreprise, ou au sein du groupe auquel celle-ci appartient, et que de ce fait le reclassement était impossible ; qu’en l’espèce, la société X… Z… faisait valoir qu’aucun poste n’était disponible dans l’entreprise de taille réduite (concl., p. 11 § 13) et en justifiait en produisant le registre du personnel de la société du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012 (pièce n°17) ; qu’en affirmant que l’employeur avait manqué à son obligation de reclassement, en retenant que ce dernier n’apportait aucun élément pour établir ses tentatives de reclassement et que cela se confirmait par la lettre de licenciement, aux termes de laquelle il indiquait : « nous avons préalablement recherché toute possibilité de reclassement, sans pouvoir identifier de poste de reclassement, faute d’emploi disponible, même inférieur à votre statut et emploi actuel
» (jugement, p. 10 § 5 et 6), sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., p. 11 § 13), si le reclassement était en tout état de cause impossible, faute de tout poste disponible susceptible d’être proposé à la salariée au sein de l’entreprise, au vu du registre du personnel régulièrement versé aux débats, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article L. 1233-4 du code du travail.
Le greffier de chambre