10 janvier 2018
Cour de cassation
Pourvoi n°
16-13.310
SOC.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 janvier 2018
Rejet
M. CHAUVET, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 15 F-D
Pourvoi n° Y 16-13.310
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par Mme Frédérique Y…, épouse Z…, domiciliée […] ,
contre l’arrêt rendu le 6 janvier 2016 par la cour d’appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l’opposant à Mme Laurence A…, domiciliée […] ,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 28 novembre 2017, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbé, conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, M. Boyer, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Barbé, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de Mme Y…, de la SCP Lesourd, avocat de Mme A…, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 6 janvier 2016), que Mme A… a été engagée le 5 octobre 2010 par Mme Y…, exerçant la profession d’avocat, en qualité de secrétaire juridique ; que placée en arrêt maladie le 3 février 2012 et faisant l’objet d’un avis d’inaptitude du 12 novembre 2012 émis par le médecin du travail, Mme A… a été licenciée pour inaptitude par lettre du 26 décembre 2012 ; qu’estimant que son inaptitude avait été causée par des faits de harcèlement moral, la salariée a saisi, le 8 avril 2013, la juridiction prud’homale ;
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de dire que la salariée a été victime de harcèlement moral, de déclarer nul son licenciement, de le condamner à payer à la salariée des dommages- intérêts pour harcèlement moral et pour licenciement nul, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur des connaissances personnelles ou le résultat de ses propres investigations ; que pour dire que Mme A… aurait été victime de harcèlement moral, la cour d’appel s’est notamment fondée sur l’enquête préliminaire relative aux plaintes déposées par Mme Y…, quand il résultait des propres énonciations de l’arrêt que cette enquête lui a été directement communiquée par le procureur général ; qu’en se fondant ainsi sur des éléments de preuve qui n’avaient pas été produits par les parties, et qui étaient hors débats, la cour d’appel a violé l’article 7 du code de procédure civile, ensemble l’article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que la cour d’appel a énoncé que « par lettre du 29 septembre 2015, le président de la chambre a invité les parties à prendre connaissance de ces documents » ; que cette lettre du 29 septembre 2015 a été adressée au précédent conseil de Mme Y…, de sorte que celle-ci n’en a pas eu connaissance, et n’a pas pu en débattre contradictoirement ; qu’en fondant pourtant sa décision sur une pièce dont l’exposante n’avait pas eu connaissance, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile, ensemble l’article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu qu’il résulte de l’arrêt que la cour d’appel, qui a reçu du procureur général communication de l’enquête préliminaire ouverte à la suite de la plainte déposée par l’employeur, a invité les parties à en prendre connaissance en précisant qu’elle serait débattue à l’audience et que l’employeur a sollicité le versement de nouvelles pièces sans demander que celles relatives à l’enquête préliminaire soient écartées des débats, en sorte que la cour d’appel n’a pas violé les articles 7 et 16 du code de procédure civile, ni l’article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que le moyen n’est pas fondé ;