10 octobre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n°
18-20.866
CIV. 2
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 octobre 2019
Cassation
M. PRÉTOT, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1236 F-P+B+I
Pourvoi n° 18-20.866
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
CASSATION sur le pourvoi formé par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de l’Artois, dont le siège est […] , contre le jugement rendu le 14 mai 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d’Arras, dans le litige l’opposant à la société Pharmacie O… B…, dont le siège est […],
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 11 septembre 2019, où étaient présents : M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Fischer, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vieillard, conseiller, Mme Besse, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Le Fischer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois, l’avis de Mme Ceccaldi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu que les règles de prescription des médicaments et produits pharmaceutiques sont au nombre des règles de tarification ou de facturation des actes, prestations et produits dont l’inobservation peut donner lieu à recouvrement d’un indu en application de ce texte ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, et les productions, qu’à l’issue d’un contrôle portant sur la facturation de certains médicaments relevant des listes I et II ou classés comme stupéfiants, par la société Pharmacie O… B… (la pharmacie), la caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois (la caisse) a, le 17 décembre 2013, réclamé à celle-ci le remboursement d’un indu correspondant à la délivrance, auprès d’un seul assuré, entre le 1er septembre 2009 et le 31 août 2011, de spécialités contenant du buprénorphine haut dosage ; que la pharmacie a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour accueillir ce recours, le jugement retient essentiellement qu’il est établi, d’une part, que la pharmacie a dispensé des médicaments ayant dans leur composition de la buprénorphine haut dosage, prescrits par un cabinet médical sur des ordonnances non sécurisées, en méconnaissance de l’article R. 5132-5 du code de la santé publique et de l’arrêté du 31 mars 1999 modifié, d’autre part, que certaines de ces ordonnances ne comportaient pas le nom du pharmacien chargé de la délivrance, en violation des dispositions de l’article L. 162-4-2 du code de la sécurité sociale et de l’arrêté du 1er avril 2008 pris pour son application ; que le Buprenorp Teva 2 mg qui a été délivré par la pharmacie aux lieu et place du Subutex prescrit par le cabinet médical figure sur la liste des prestations remboursables ; qu’il résulte de la combinaison des articles 1235 et 1376 anciens du code civil et de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale que l’action en recouvrement de l’indu qui est ouverte à l’organisme de prise en charge ne peut tendre qu’à la restitution par le praticien concerné des sommes qu’il a perçues à tort ; que ces dispositions n’assimilent donc pas la mesure à une pénalité ; que le non-respect par les pharmacies des obligations légales et réglementaires ci-dessus mentionnées est constitutif de manquements à leurs obligations déontologiques et est en outre susceptible d’engager leur responsabilité civile dans l’hypothèse où le mésusage ou un usage détourné ou abusif des médicaments délivrés aurait entraîné des conséquences dommageables pour leurs utilisateurs ; que la caisse ne prétend, ni ne démontre, que la facturation par la pharmacie des médicaments délivrés n’aurait pas été conforme au prix de ces produits ou qu’en raison de la faute commise par l’officine, ces produits auraient été utilisés par d’autres personnes que les patients auxquels ils avaient été prescrits ou encore qu’ils auraient été consommés dans des conditions différentes de la posologie prévue par le médecin prescripteur ; que dès lors, la caisse ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un indu ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que les médicaments litigieux avaient été délivrés sur la base d’ordonnances non conformes aux dispositions législatives et réglementaires, de sorte que les règles de facturation n’ayant pas été respectées, la caisse était fondée à poursuivre le recouvrement de l’indu contre la pharmacie ayant exécuté ces ordonnances, le tribunal a violé le texte susvisé ;