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3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°510
N° RG 22/01947 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SS52
M. [S] [C]
C/
S.E.L.A.R.L. ERWAN FLATRES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me CORMIER
Me FURET
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, rapporteur
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Guillaume FRANCOIS, Conseiller, désigné par ordonnance de M. le premier président par intérim de la cour d’appel de Rennes en date du 12 septembre 2022,
GREFFIER :
Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats, et Madame Julie ROUET, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 13 Septembre 2022
ARRÊT :
contradictoire, prononcé publiquement le 18 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [S] [C]
né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Guillaume CORMIER de la SELARL SYNELIS AVOCATS, plaidant/postulant, avocat au barreau de LORIENT
INTIMÉE :
S.E.L.A.R.L. ERWAN FLATRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ECLATS DU MONDE inscrite au RCS de LORIENT sous le n° 824 532 899, suivant jugement du tribunal de commerce de LORIENT du 03 décembre 2019
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Marc LE ROUX substituant Me Luc FURET, plaidant/postulant, avocats au barreau de LORIENT
FAITS ET PROCEDURE :
Le 14 février 2017, la société à résponsabilité limitée Eclats du Monde France (la société Eclats du Monde), représentée par M. [C], son gérant, a acquis auprès de la société L’Atelier d’or un fonds de commerce de fabrication, vente de tous articles de bijouterie, orfèvrerie, joaillerie, horlogerie et tous produits connexes.
Le 31 août 2018, la société Eclats du Monde a été placée en redressement judiciaire. L’ouverture de cette procédure a fait l’objet d’une publication au BODACC le 6 septembre 2018.
Le 3 décembre 2019, la société Eclats du Monde a été placée en liquidation judiciaire et un plan de cession au profit de la société La Poudre d’or a été arrêté. La société Erwan [I], prise en la personne de M. [I], a été désignée liquidateur.
Par requête du 4 février 2020, la société [I], ès qualités, a demandé l’autorisation de vendre aux enchères publiques les actifs mobiliers de la liquidation judiciaire.
Estimant que des pierres lui appartenant figuraient dans ces actifs, M. [C] s’est opposé à cette vente devant le juge commissaire.
Par ordonnance du 4 juin 2020, le juge commissaire du tribunal de commerce de Lorient a :
– Ordonné la vente aux enchères publiques des actifs mobiliers résiduels dépendant de la liquidation judiciaire de la société Eclats du monde France non compris dans le jugement de cession du 03 décembre 2019,
– Commis à cet effet Mme [M] [V], commissaire-priseur judiciaire
– Dit que l’ordonnance sera notifiée à M. [C].
– Dit que l’ordonnance sera communiquée à la société [I] es qualité de liquidateur.
M. [C] a interjeté appel de cette décision le 24 juin 2020.
Par ordonnance du 3 septembre 2020, la cour d’appel de Rennes a prononcé la caducité de cet appel.
Le 16 juillet 2020, M. [C] a déposé une requête en revendication des pierres litigieuses.
Par ordonnance du 8 octobre 2020, le juge commissaire du tribunal de commerce de Lorient a :
– Débouté M. [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions, l’action en revendication étant faite hors délai,
– Dit que l’ordonnance sera notifiée à M. [C],
– Dit que l’ordonnance serait communiquée à la société [I], ès qualités,
– Dit que les dépens de l’ordonnance sont à la charge de M. [C].
Sur recours de M. [C], par jugement du 24 janvier 2022, le tribunal de commerce de Lorient a :
– Confirmé l’ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Lorient en date du 8 octobre 2020,
En conséquence :
– Constaté la forclusion de M. [C],
– Dit que la requête en revendication de M. [C] est irrecevable;
– Condamné M. [C] à payer à la société [I], ès qualités, la somme de 1.500 euros au titre de |’article 700 du code de procédure civile,
– Débouté M. [C] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamné M. [C] aux entiers dépens de l’instance,
– Dit toutes autres demandes, fins et conclusions des parties injustifiées et en tout cas mal fondées, les en a déboutée.
M. [C] a interjeté appel le 22 mars 2022.
Les dernières conclusions de M. [C] sont en date du 9 mai 2022. Les dernières conclusions de la société [I], ès qualités, sont en date du 1er juin 2022.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 juillet 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS :
M. [C] demande à la cour de :
– Infirmer le jugement en ce qu’il a :
-Confirmé l’ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Lorient en date du 8 octobre 2020,
– Constaté la forclusion de M. [C],
– Dit que la requête en revendication de M. [C] est irrecevable,
– Condamné M. [C] à payer à la société [I] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Eclats du Monde la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Débouté M. [C] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamné M. [C] aux entiers dépens d’instance,
– Dit toutes autres demandes, fins et conclusions des parties injustifiées et en tout cas mal fondées, les en a déboutées,
Statuant à nouveau :
– Juger M. [C] recevable et bien fondé en ses demandes,
En conséquence :
– Débouter la société [I] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– Juger qu’il ne dépend pas de l’actif de la liquidation de l’Eurl Eclats du monde les pierres précieuses suivantes, indûment saisies par Mme [V] lors de son inventaire du 4 décembre 2019, à savoir :
– une monture acier ressort de présentation pierres précieuses
– une aigue-marine de Madagascar taille coussin rectangle type Santa-Maria de 13 carats
– une aigue-marine de Madagascar taille baguette de 8,08 carats
– une aigue-marine du Brésil taille ovale de 5.35 carats
– une aigue-marine de Madagascar taille coussin de 4,85 carats
– une améthyste de Zambie taille rond certifiée
– une améthyste de Madagascar taille coussin de 8 carats
– une citrine madère du Brésil taille ovale de 12 carats
– une calcédoine d’Inde taille ovale cabochon de 3 carats
– un grenat rhodolite de Madagascar taille rond certifié de 3,15 carats
– une héliodore du Brésil taille coussin rectangle de 23,25 carats
– une opale boulder d’Australie de 113 carats
– une opale blanche d’Ethiopie taille coussin briolette de 9,25 carats
– une opale de feu du Mexique taille ovale orange vif
– une opale de feu du Mexique taille ovale orange clair
– une opale bleue du Pérou taille rond cabochon de 3,06 carats
– un péridot du Pakistan de 1,95 carats
– un péridot du Pakistan taille rond de 1,75 carats
– un lot de perles d’onyx (perles noires)
– un lot de perles d’eau douce (perles blanches)
– un lot de pierres sur papier (diamants, rubis, saphirs, émeraudes, opales, aigues-marines, topazes
– un lot de pierres de réparation dans deux boîtes en plastiques (diamants de différents poids, saphirs et autres pierres tout venant)
– un lot de pièces d’Ivoire
– un jade
– une monture en or jaune sans pierre de centre de 6 grammes
– un appairage de diamants taille princesse sur papier de 0.20 carats
– un appairage de saphirs verts taille ovale sur papier
– une émeraude translucide taille ovale cabochon sur papier
– un lot de saphirs fantaisie taille ovale sur papier
– un lot de saphirs fantaisie taille rond sur papier
– un lot d’opales blanches et d’opales de feu sur papier
– un lot de saphirs, rubis, émeraudes petites dimensions toutes formes sur papier
– une bague en or blanc sertie d’un saphir bleu taille ovale et diamants calibrés 10 grammes de vieil or jaune à la casse,
– Ordonner la remise à M. [C] des pierres précieuses indûment saisies par M. [V] lors de son inventaire du 4 décembre 2019, à savoir :
– une monture acier ressort de présentation pierres précieuses
– une aigue-marine de Madagascar taille coussin rectangle type Santa-Maria de 13 carats
– une aigue-marine de Madagascar taille baguette de 8,08 carats
– une aigue-marine du Brésil taille ovale de 5.35 carats
– une aigue-marine de Madagascar taille coussin de 4,85 carats
– une améthyste de Zambie taille rond certifiée
– une améthyste de Madagascar taille coussin de 8 carats
– une citrine madère du Brésil taille ovale de 12 carats
– une calcédoine d’Inde taille ovale cabochon de 3 carats
– un grenat rhodolite de Madagascar taille rond certifié de 3,15 carats
– une héliodore du Brésil taille coussin rectangle de 23,25 carats
– une opale boulder d’Australie de 113 carats
– une opale blanche d’Ethiopie taille coussin briolette de 9,25 carats
– une opale de feu du Mexique taille ovale orange vif
– une opale de feu du Mexique taille ovale orange clair
– une opale bleue du Pérou taille rond cabochon de 3,06 carats
– un péridot du Pakistan de 1,95 carats
– un péridot du Pakistan taille rond de 1,75 carats
– un lot de perles d’onyx (perles noires)
– un lot de perles d’eau douce (perles blanches), un lot de pierres sur papier (diamants, rubis, saphirs, émeraudes, opales, aigues-marines, topazes
– un lot de pierres de réparation dans deux boîtes en plastiques (diamants de différents poids, saphirs et autres pierres tout venant)
– un lot de pièces d’Ivoire
– un jade
– une monture en or jaune sans pierre de centre de 6 grammes
– un appairage de diamants taille princesse sur papier de 0.20 carats
– un appairage de saphirs verts taille ovale sur papier
– une émeraude translucide taille ovale cabochon sur papier
– un lot de saphirs fantaisie taille ovale sur papier
– un lot de saphirs fantaisie taille rond sur papier
– un lot d’opales blanches et d’opales de feu sur papier
– un lot de saphirs, rubis, émeraudes petites dimensions toutes formes sur papier
– une bague en or blanc sertie d’un saphir bleu taille ovale et diamants calibrés
– 10 grammes de vieil or jaune à la casse,
– Condamner la société [I], ès qualités, à payer à M. [C] la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la société [I] aux entiers dépens d’instance.
La société [I], ès qualités, demande à la cour de :
– Confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
– Débouter M. [C] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
– Condamner M. [C] à payer à la société [I], ès qualités, la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner M. [C] aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
DISCUSSION :
Dès l’ouverture de la procédure collective un inventaire du patrimoine du débiteur est dressé :
Article L622-6 code de commerce :
Dès l’ouverture de la procédure, il est dressé un inventaire du patrimoine du débiteur qui constitue le gage de ses créanciers professionnels ainsi que des garanties qui le grèvent. Cet inventaire, remis à l’administrateur et au mandataire judiciaire, est complété par le débiteur par la mention des biens qu’il détient susceptibles d’être revendiqués par un tiers. Le débiteur entrepreneur y fait en outre figurer les biens détenus dans le cadre de l’activité à raison de laquelle la procédure a été ouverte qui sont compris dans un autre de ses patrimoines et dont il est susceptible de demander la reprise dans les conditions prévues par l’article L. 624-19.
Le débiteur remet à l’administrateur et au mandataire judiciaire, pour les besoins de l’exercice de leur mandat, la liste de ses créanciers, du montant de ses dettes et des principaux contrats en cours. Il les informe des instances en cours auxquelles il est partie.
L’administrateur ou, s’il n’en a pas été nommé, le mandataire judiciaire peut, nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, obtenir communication par les administrations et organismes publics, les organismes de prévoyance et de sécurité sociale, les établissements de crédit, les sociétés de financement, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement ainsi que les services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de paiement, des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation patrimoniale du débiteur.
Lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, l’inventaire est dressé en présence d’un représentant de l’ordre professionnel ou de l’autorité compétente dont, le cas échéant, il relève. En aucun cas l’inventaire ne peut porter atteinte au secret professionnel si le débiteur y est soumis.
L’absence d’inventaire ne fait pas obstacle à l’exercice des actions en revendication ou en restitution.
Un décret en Conseil d’Etat fixe les conditions d’application du présent article.
La propriété de meubles existant en nature dans le patrimoine du débiteur peut être revendiquée, dans les trois mois de la date de publication du jugement d’ouverture de la procédure :
Article L624-9 code commerce :
La revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure.
En l’espèce, la procédure collective a été ouverte le 31 août 2018. Un inventaire a été réalisé le 12 septembre 2018. Cet inventaire mentionne comme appartenant à M. [C] une bague « art déco » monture ancienne sertie d’un diamant à 1,12 carat et un lot de diverses pierres de différentes tailles et couleurs. Certaines de celles-ci étaient exposées en vitrine mais la liste des articles de ce lot n’a pas été fournie à Mme [V], commissaire priseur chargé de l’inventaire.
Après la conversion de la procédure en liquidation judiciaire, un nouvel inventaire a été réalisé les 16, 17 et 19 octobre 2019. Lors de cet inventaire, la commissaire priseur a isolé dans un tableau les articles dont M. [C] indiquait être propriétaire. Ce sont ces biens qu’il revendique aujourd’hui.
Il ne peut qu’être constaté que les biens revendiqués par M. [C] constituent un lot de pierres de différentes tailles et couleurs, ces pierres étant parfois rassemblées ou pour partie montées. Ces biens constituent donc un lot de diverses pierres de différentes tailles et couleurs tel que décrit lors de l’inventaire du 12 septembre 2018. M. [C] ne justifie pas que les biens qu’il revendique aujourd’hui aient rejoint les locaux de la société depuis la date de ce précédent inventaire. Il apparaît ainsi que les biens revendiqués étaient déjà présents dans les locaux de la société lors de l’établissement de l’inventaire du 12 septembre 2018.
M.[C] disposait d’un délai de trois mois à compter de la date de la publication du jugement ouvrant la procédure pour les revendiquer, soit trois mois à compter du 6 septembre 2018.
A supposer que les biens revendiqués aujourd’hui n’aient pas été ceux mentionnés dans l’inventaire du 12 septembre 2018, ils sont apparus dans celui réalisé les 16, 17 et 19 octobre 2019 à l’occasion de la conversion de la procédure en liquidation judiciaire prononcée le 3 décembre 2019 et publiée au BODACC le 6 décembre 2019.
M. [C] est en tout état de cause forclos en sa revendication en date du 16 juillet 2020 fondée sur les dispositions de l’article L622-9 du code de commerce.
La cour est saisie comme juge d’appel dans le cadre d’une telle procédure. La demande présentée par M. [C] sur le fondement de droit commun des articles 544, 2234 et 2276 du code civil est irrecevable.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de M. [C] alors qu’il convient de les déclarer irrecevables.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de condamner M. [C] aux dépens d’appel et à payer à la société [I], ès qualités, la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour :
– Infirme le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de restitution de M. [C],
-Confirme le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
– Déclare irrecevable la demande de restitution présentée par M. [C],
– Condamne M. [C] à payer à la société Erwan [I], prise en la personne de M. [I], en sa qualité de liquidateur de la société Eclats du Monde France, la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamne M. [C] aux dépens d’appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT