Production Audiovisuelle : 15 juin 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/02522

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Production Audiovisuelle : 15 juin 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/02522

N° RG 20/02522 – N° Portalis DBV2-V-B7E-IQ5K

COUR D’APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 15 JUIN 2022

AVANT DIRE DROIT

DÉCISION DÉFÉRÉE :

15/00867

Tribunal de grande instance de Dieppe du 29 juin 2020

APPELANTE :

Sa SMA venant aux droits de la Sa SAGENA

RCS de Paris 332 789 296

[Adresse 16]

[Localité 14]

représentée par Me Valérie GRAY de la Selarl GRAY SCOLAN, avocat au barreau de Rouen et assistée par Me Emmanuelle DUVAL de la Sarl LEXO Avocats, avocat au barreau de Lisieux

INTIMES :

Madame [J] [R] agissant tant en son nom personnel, qu’en sa qualité d’ayant droit de [S] [R]

née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 21]

[Adresse 20]

[Localité 4]

représentée et assistée par Me Virginie LE BIHAN, avocat au barreau de Dieppe substituée par Me Renaud DE BEZENAC, avocat au barreau de Rouen

Madame [D] [R]

agissant tant en son nom qu’en sa qualité d’ayant droit de

[S] [R]

née le [Date naissance 3] 1977 à [Localité 17]

[Adresse 11]

[Localité 5]

représentée et assistée par Me Virginie LE BIHAN, avocat au barreau de Dieppe substituée par Me Renaud DE BEZENAC, avocat au barreau de Rouen

Madame [W] [R]

agissant tant en son nom qu’en sa qualité d’ayant droit de

[S] [R]

née le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 18]

[Adresse 9]

[Localité 8]

représentée et assistée par Me Virginie LE BIHAN, avocat au barreau de Dieppe substituée par Me Renaud DE BEZENAC, avocat au barreau de Rouen

Monsieur [H] [V]

né le [Date naissance 6] 1959 à [Localité 19]

[Adresse 12]

[Localité 15]

représenté et assisté par Me Franck LANGLOIS de la Scp BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU PUY DE DÔME venant aux droits de la Caisse de Sécurité Sociale des Travailleurs Indépendants (anciennement RSI)

[Adresse 10]

[Localité 13]

représentée par Me Aline BAUTERS, avocat au barreau de Dieppe et assistée de Me Frédéric FORVEILLE, avocat au barreau de Caen

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 23 mars 2022 sans opposition des avocats devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER,

DEBATS :

A l’audience publique du 23 mars 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 juin 2022.

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Rendu publiquement le 15 juin 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 16 août 2006, M. [S] [R], artisan, exécutait des travaux d’isolation dans un immeuble construit par la Sarl [V], entreprise générale dont le gérant est M. [H] [V] ce, pour la Sci Androgée. Il a fait une chute du premier étage dans la trémie d’un escalier non protégé. Gravement blessé, notamment victime d’un traumatisme crânien, il était hospitalisé dans un état végétatif et est décédé le [Date décès 7] 2017.

Par jugement du 20 juillet 2010, le tribunal correctionnel de Dieppe a relaxé

M. [V] du chef de défaut de mesure de protection contre les chutes pour l’accès à une construction non livrable mais condamné pour l’élaboration d’un projet de bâtiment ou génie civil sans établissement d’un plan général de coordination en matière de sécurité et de santé et blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de trois mois.

Par jugement sur intérêts civils du 22 avril 2011, le tribunal correctionnel de Dieppe a essentiellement ordonné un partage de responsabilité de l’ordre de 80 % à la charge de M. [V] et de 20 % à la charge de M. [R], condamné alors la Sagena à garantir M. [V] des conséquences indemnitaires à hauteur des deux tiers des condamnations à intervenir, condamné M. [V] à payer à M. [R] une provision de 20 000 euros, avec exécution provisoire, déclaré le jugement opposable au Rsi.

Par arrêt du 30 janvier 2012, la cour d’appel de Rouen a déclaré recevables les appels formés et irrecevable l’intervention volontaire de la Sarl [V], infirmé partiellement le jugement entrepris et déclaré M. [V] responsable des conséquences dommageables de l’accident à hauteur de 75 % et décidé que sur la part de responsabilité imputée à M. [V], 2/3 correspondaient à sa responsabilité en qualité de gérant de la Sarl [V] constructeur (soit par déduction 1/3 à sa responsabilité en qualité de gérant de la Sci [V], maître d’ouvrage), et condamné M. [V] à payer à Mme [J] [R], épouse de la victime la somme de 5 000 euros, confirmé le jugement pour le surplus, l’arrêt étant opposable au Rsi et à la Sagena.

L’expert judiciaire a déposé son rapport médical le 20 mars 2012 et proposé une date de consolidation fixée au 15 février 2012.

Par arrêt du 26 février 2013, la chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt susvisé en ses seules dispositions ayant fixé à deux tiers la part de responsabilité incombant à M. [V] en tant gérant de la société éponyme sans renvoi au motif que la juridiction répressive n’avait pas compétence pour statuer sur un partage de responsabilité s’agissant des deux qualités de M. [V], gérant constructeur et gérant maître d’ouvrage.

Par acte d’huissier du 17 juillet 2015, puis des 19, 21 avril et 4 mai 2016, M. et Mme [R], en son nom personnel puis titulaire du pouvoir confié par le juge des tutelles par décision du 17 juillet 2015, de représenter son époux, leurs enfants, Mmes [D] et [W] [R] ont fait assigner M. [V], la Sma et le Rside Basse-Normandie en indemnisation.

M. [R] est décédé en cours de procédure.

Par jugement contradictoire du 29 juin 2020, le tribunal judiciaire de Dieppe a :

– dit régulière et recevable l’assignation délivrée les 19, 21 avril et 4 mai régularisant l’assignation délivrée le 17 juillet 2015,

– débouté la Sma de sa prétention tendant à voir prononcer l’irrecevabilité de la demande,

– dit que la Sma devait garantir les conséquences dommageables qui sont mises à la charge de M. [V] en sa qualité de gérant de la Sarl [V],

– retenu une responsabilité exclusive de M. [H] [V] en qualité de gérant de la Sarl [V],

– fixé les préjudices de M. [S] [R] comme suit :

Postes de préjudice

Montant du préjudice

Montant indemnisable par M. [V]

Part de M. [R]

Part du RSI

Dépenses de santé actuelles

894 965

671 224

0

671 224

Perte de gains professionnels actuels

4 973

3 729

0

3 729

Perte de gains professionnels futurs

102 287

76 715

0

76 715

Déficit fonctionnel temporaire

49 283

36 962

36 962

0

Souffrances endurées

65 000

48 750

48 750

0

Préjudice esthétique temporaire

7 000

7 000

7 000

0

Déficit fonctionnel permanent

293 232

219 924

219 924

0

Préjudice esthétique permanent

30 000

22 500

22 500

0

Préjudice d’agrément

0

0

0

0

Préjudice sexuel

15 000

11 250

11 250

0

Préjudice d’établissement

15 000

11 250

11 250

0

Préjudice permanent exceptionnel

0

0

0

0

Totaux

1 446 741

1 109 306

357 636

751 669

– condamné in solidum M. [V] et la Sma à verser à Mmes [J] [X] veuve [R], [D] [R] et [W] [R] en leur qualité d’ayants droits de M. [S] [R] les sommes suivantes :

. au titre du déficit fonctionnel temporaire, la somme de 36 962,25 euros

. au titre des souffrances endurées, la somme de 48 750 euros

. au titre du préjudice esthétique temporaire, la somme de 7 000 euros

. au titre du déficit fonctionnel permanent, la somme de 219 924,64 euros

. au titre du préjudice esthétique permanent, la somme de 22 500 euros

. au titre du préjudice sexuel, la somme de 11 250 euros

. au titre du préjudice d’établissement, la somme de 11 250 euros

– condamné in solidum M. [V] et la Sma à verser à la Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants agissant pour le compte de la caisse RSI de Basse-Normandie les sommes de :

. au titre des dépenses de santé actuelles, la somme de 671 224,09 euros

. au titre de la perte des gains professionnels actuelle, la somme de 3 729,76 euros

. au titre de la perte des gains professionnels future, la somme de 76 715,36 euros

– dit que les sommes sus-mentionnées porteraient intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement ;

– débouté Mmes [J] [X] veuve [R], [D] [R], [W] [R] en leur qualité d’ayants droit de M. [R] de leurs prétentions formulées au titre du préjudice d’agrément, du préjudice permanent exceptionnel et des frais divers ;

– condamné in solidum M. [V] et la Sma à payer à Mme [J] [X] veuve [R] les sommes de :

. au titre des frais divers (frais de transport), la somme de 33 750 euros

. au titre de son préjudice d’affection, la somme de 22 500 euros

. au titre de son préjudice extra-patrimonial exceptionnel, la somme de 30 000 euros

– condamné in solidum M. [V] et la Sma à payer à Mmes [D] [R] et [W] [R] les sommes de :

. au titre de leur préjudice d’affection, la somme de 15 000 euros chacune

. au titre de leur préjudice extra-patrimonial exceptionnel, la somme de 7 500 euros chacune,

– débouté les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

– condamné M. [H] [V] et la Sma in solidum aux dépens, dont distraction au profit de la Sci Catarsi et Brument,

– condamné in solidum M. [V] et la Sa Sma à payer :

. à Mmes [J] [X] veuve [R], [D] [R], [W] [R] la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles,

. à la Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles et la somme de 1 080 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion,

– ordonne l’exécution provisoire à concurrence des deux tiers des sommes allouées.

Par déclaration reçue au greffe le 5 août 2020, la Sa Sma a formé appel du jugement.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 2 février 2022, la Sma demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et de :

à titre principal

– débouter Mmes [J] [R], Mmes [W] et [D] [R] de l’ensemble de leurs demandes,

– débouter la Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de ses poursuites en condamnation financière de la Sma pour l’accident,

– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes de :

. Mme [J] [R] et Mmes [D] [R] et [W] [R] pour préjudice esthétique temporaire, préjudice d’agrément, préjudice exceptionnel et indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

. M. [V] en ce qu’il poursuit la condamnation intégrale de la Sma à le garantir,

. la Caisse primaire d’assurance maladie du Puy de Dôme pour les dépenses de santé postérieurement à la consolidation de l’état de santé de M. [R] pour

408 284,55 euros, soit

après partage de responsabilité 306 213,42 euros,

– rejeter les appels incidents,

– condamner in solidum entre elles Mmes [J], [W] et [D] [R] et la Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants à payer à la Sma sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile une indemnité de 15 000 euros,

– condamner in solidum entre elles Mme [J], [W] et [D] [R] et la Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants en tous les dépens et autoriser Me [U] [G] à en poursuivre le recouvrement conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire

– fixer la part de responsabilité de M. [V] ès qualités de gérant de la Sarl [V] que la Sma doit garantir à 50 % sur la part de 75 % imputée à M. [H] [V] par le juge pénal,

à titre très subsidiaire

– fixer la part de responsabilité de M. [V] ès qualités de gérant de la Sarl [V] que la Sma doit garantir au maximum des 2/3 de 75 % imputée à

M. [V] par le juge pénal conformément à la demande de Mmes [R],

– rejeter ou réduire à de plus justes proportions les indemnités qui seraient allouées aux consorts [R], en déduire les provisions versées pour 20 000 et 5 000 euros.

Par dernières conclusions notifiées le 26 janvier 2021, M. [H] [V] demande à la cour de :

sur la garantie de la Sma

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

. dit que la Sma doit garantir les conséquences dommageables qui sont mises à sa charge en sa qualité de gérant de la Sarl [V],

. retenu sa responsabilité exclusive en qualité de gérant de la Sarl [V],

en conséquence,

. condamner la Sma à le garantir intégralement contre toutes les condamnations susceptibles d’être prononcées à son encontre tant au profit des ayants droit de

M. [R] qu’au profit des consorts [R] et de la Cpam, tant en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais et accessoires,

. débouter la Sma de l’intégralité de ses demandes visant à exclure ou réduire sa garantie,

sur les demandes des ayants droit de M. [R]

– sur les dépenses engagées pour terminer les chantiers et clôturer l’entreprise :

. confirmer le jugement rendu et débouter les ayants droit de M. [R] de leur demande,

– sur le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, le préjudice esthétique temporaire et le préjudice esthétique permanent,

. infirmer le jugement rendu et réduire les prétentions des ayants droit de M. [R] à de plus justes proportions en considération de la jurisprudence habituelle de la cour d’appel et des propositions de la Sma,

– sur le déficit fonctionnel permanent,

. infirmer le jugement rendu et réduire les prétentions des ayants droit de

M. [R] à de plus justes proportions en considération de la jurisprudence habituelle de la cour d’appel et des propositions de la Sma et déduire du montant qui sera alloué l’intégralité du montant de la pension et des arrérages versés par le Rsi,

– sur le préjudice d’agrément,

. confirmer le jugement rendu et débouter les ayants droit de M. [R] de leur demande,

– sur le préjudice sexuel,

. infirmer le jugement rendu et débouter les ayants droit de M. [R] de leur demande,

– sur le préjudice d’établissement,

. infirmer le jugement rendu et réduire les prétentions des ayants droit de

M. [R] à de plus justes proportions en considération de son âge, de la jurisprudence habituelle de la cour d’appel et des propositions de la Sma,

– sur le préjudice permanent exceptionnel,

. confirmer le jugement rendu et débouter les ayants droit de M. [R] de leur demande,

sur les demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens

. infirmer le jugement rendu et débouter les ayants droit de M. [R] de leur demande,

sur les demandes d’indemnisation de Mmes [J], [D] et [W] [R]

– sur les frais exposés pour rendre visite à M. [R],

. infirmer le jugement rendu et débouter Mmes [R] de leur demande,

. à titre subsidiaire, réduire le montant de leur demande en considération de la jurisprudence habituelle de la cour d’appel et des propositions de la Sma,

– sur le préjudice d’affection,

. confirmer le jugement rendu et débouter Mmes [R] du surplus de leur demande,

– sur les préjudices extrapatrimoniaux exceptionnels,

. infirmer le jugement rendu et débouter Mmes [R] de leur demande,

– sur les demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens,

. infirmer le jugement rendu et débouter Mmes [R] de leur demande,

sur les demandes de la Cpam du Puy-de-Dôme

. infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions et débouter la Cpam de l’intégralité de ses demandes,

sur l’application d’un abattement de 25 %

. dire et juger qu’en application de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rouen le 30 janvier 2012, tous les postes de préjudice mis à la charge de M. [V] feront l’objet d’un abattement de 25 %.

Par dernières conclusions notifiées le 9 décembre 2020, Mme [J] [R] et ses filles Mmes [W] et [D] [R], à titre personnel et ès qualités d’ayants droit de M. [R] demandent à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a :

– débouté la Sma de sa demande d’irrecevabilité,

– condamné la Sma à garantir les conséquences dommageables mises à la charge de M. [V] en sa qualité de gérant et retenu la responsabilité exclusive de

M. [V] dans l’accident survenu le 16 août 2006,

– condamné in solidum M. [V] et la Sma à leur payer en qualité d’ayants droit diverses sommes (DFT, SE, DF, PEP, Préjudice sexuel, préjudice d’établissement) et

. à l’épouse des frais de transport et divers, un préjudice d’affection et un préjudice extra-patrimonial exceptionnel,

. à chacune des filles du défunt un préjudice d’affection et un préjudice extra-patrimonial exceptionnel outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

et statuant à nouveau,

– condamner M. [V] et la Sma à leur payer

. au titre du préjudice temporaire : 15 000 euros

. au titre du préjudice d’agrément : 80 000 euros

. au titre du préjudice permanent exceptionnel : 250 000 euros

. au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 4 000 euros outre les dépens dont distraction au profit de la Selarl Nomos Avocats.

Par dernières conclusions notifiées le 25 janvier 2021, la Caisse primaire d’assurance maladie du Puy de Dôme venant aux droits de Caisse de sécurité sociale des indépendants demande à la cour de :

– constater son intervention aux droits de la Caisse de sécurité sociale des indépendants,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

. débouté la Sma de sa demande d’irrecevabilité,

. condamné la Sma à garantir les conséquences dommageables mises à la charge de M. [H] [V] en sa qualité de gérant de la Sarl [V] et retenu la responsabilité exclusive de M. [V] en sa qualité de gérant de la Sarl [V],

. condamné in solidum M. [V] et la Sma à verser à la Caisse :

* les dépenses de santé actuelles : 671 224 euros,

* la perte de gains professionnels actuels : 3 729 euros,

* les pertes de gains professionnels futurs : 76 715 euros,

. condamné in solidum M. [V] et la Sma à verser à la Caisse la somme de

1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et la somme de 1 080 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion,

– infirmer le jugement pour le surplus des demandes présentées par l’organisme social,

en conséquence,

– constater que la Cpam a pris en charge des dépenses de santé postérieurement à la consolidation de l’état de santé de M. [R] fixée au 15 février 2012 jusqu’à son décès survenu le [Date décès 7] 2017 au titre du poste dépenses de santé futures pour un montant de 408 284,55 euros,

– condamner in solidum M. [V] et la Sma à lui verser les sommes dues au titre de ce poste dans la limite de la part de responsabilité mise à la charge de

M. [V] soit 306 213,42 euros,

y ajoutant,

– condamner M. [V], in solidum avec la Sma, au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Ainsi, les parties ne discutent pas de :

– l’intervention à la procédure de la Sma en sa qualité d’assureur de la Sarl [V], constructeur,

– le partage de responsabilité entre M. [R] (25 %) et M. [V] (75 %)

mais débattent de :

– la répartition au titre de la part de 75 % imputée à M. [V] en sa qualité de gérant de société, entre la Sci Androgée maître d’ouvrage d’une part et la Sarl [V], constructeur d’autre part,

– la quasi-totalité des postes indemnisés.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 2 mars 2022.

MOTIFS

La Sma ne soulève aucune fin de non-recevoir en cause d’appel par infirmation du jugement dans le dispositif de ses conclusions, sur moyen nouveau ou non. Elle expose que le tribunal judiciaire de Dieppe a statué ultra petita en retenant que

100 % de la quote-part imputable à M. [V] soit en sa qualité de gérant de la Sarl [V], son assuré alors que par arrêt de la cour d’appel de Rouen, en sa chambre correctionnelle, la juridiction avait retenu une responsabilité du maître de l’ouvrage d’un tiers en raison de l’absence de plan général de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé suivant obligation faite par les articles L. 4531-1 et suivants L. 4532-1 du code du travail.

Elle soutient comme elle l’a fait en première instance qu’en réalité, le défaut d’initiative du maître d’ouvrage quant à ce plan est à l’origine de l’accident et justifie l’exclusion de toute responsabilité imputable à M. [V] en sa qualité de gérant de la société assurée, la Sarl [V] et à tout le moins, la réduction de sa part de responsabilité.

M. [V] demande à être couvert par la garantie de l’assureur sur l’intégralité de la condamnation.

Les consorts [R] et la Cpam ne remettent pas en cause la décision entreprise.

Par arrêt du 26 février 2013, la Cour de cassation a cassé et annulé par voie de retranchement les dispositions de l’arrêt de la cour d’appel de Rouen statuant sur les dispositions ayant fixé à deux tiers la part de responsabilité incombant à

M. [V] en tant que gérant de la société éponyme de sorte que la disposition définitive applicable en exécution de l’arrêt de la cour du 30 janvier 2012 est la suivante :

Déclare [H] [V] responsable des conséquences dommageables de l’accident survenu le 16 août 2006 sur la personne de [S] [R], dans la proportion de 75 %’.

Postérieurement à cet arrêt, dans leurs dernières conclusions récapitulatives notifiées le 12 novembre 2018 devant le tribunal judiciaire de Dieppe, les consorts [R] ont expressément demander de :

‘En conséquence, consacrer à hauteur des 2/3 la responsabilité de Monsieur [H] [V], en qualité de maître d’oeuvre dans l’accident survenu au préjudice de Monsieur [R], le 16 août 2006 et en conséquence la responsabilité de Monsieur [V] à hauteur de 1/3 en sa qualité de gérant de la Sci ANDROGEE, maître de l’ouvrage.’ soit 100 % des 75 % retenu à l’encontre du prévenu condamné par le tribunal correctionnel.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 6 mars 2019 devant le tribunal, M. [H] [V] ne contestait pas à titre principal cette demande des consorts [R] en ne discutant à leur encontre que le montant des préjudices allégués, en sollicitant ensuite l’application d’un abattement de 25 % correspondant à la part de responsabilité du défunt puis la garantie intégrale de la Sma en sa qualité de gérant de la Sarl [V].

L’assureur ne couvre l’assuré que dans les limites du risque déterminé notamment sur la base des demandes des victimes des dommages et non au-delà. Or, il résulte expressément de la demande des victimes que l’action conduite par les consorts [R] contre M. [V] se limitait aux deux tiers du taux de 75 % en sa qualité de gérant de la Sarl [V], part couverte par la Sma. Le tribunal a cependant condamné au-delà de cette demande M. [V], ès qualités.

Le dossier met en évidence deux difficultés procédurales majeures :

– l’absence de mise en cause des sociétés concernées par les condamnations, la Sci Androgée et la Sarl [V] alors qu’il ne ressort de la procédure engagée tant en première instance qu’en appel qu’une constitution de M. [V] à titre personnel, et non en sa qualité de gérant, sans qu’il ne soit d’ailleurs justifié de cette qualité actuelle,

– un conflit d’intérêt manifeste entre M. [V] qui recherche la couverture intégrale de la Sma aux dépens de la Sarl [V] s’agissant du principe de la responsabilité et donc au bénéfice de la Sci Androgée, non assurée, nonobstant les demandes limitées des consorts [R].

Compte tenu des intérêts en présence, il convient, après réouverture des débats d’inviter la Sma à mettre en cause les Sarl [V] et Sci Androgée, après avoir justifié de leur statut et ainsi de leur représentant légal par un extrait K bis auprès de la cour et d’inviter ainsi les parties à conclure sur les demandes au regard de ces observations.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, avant dire droit,

Ordonne la réouverture des débats et la révocation de l’ordonnance de clôture du 2 mars 2022,

Invite la Sma à mettre en cause les Sarl [V] et Sci Androgée avant le 30 septembre 2022, après avoir communiqué à la cour et aux parties pour le 15 juillet 2022 les extraits K Bis de ces sociétés,

Ordonne dès à présent le renvoi de l’affaire à l’audience de plaidoiries du mercredi 4 janvier 2023 à 14 heures,

Réserve les dépens.

Le greffier,La présidente de chambre,

 


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