Production Audiovisuelle : 4 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05677

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Production Audiovisuelle : 4 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05677

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRET DU 04 JANVIER 2023

(n° 2023/ , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05677 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCJH3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Juillet 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 18/07827

APPELANT

Monsieur [K] [G]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Armelle GRANDPEY, avocat au barreau de PARIS, toque : G0673

INTIMÉE

Association CIDR PAMIGA

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Lionel PARIENTE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0372

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

L’association CIDR Pamiga qui a pour objet de contribuer au développement de la micro-finance en Afrique et de participer à l’amélioration durable des conditions de vie des populations défavorisées par l’accès à des services financiers, a employé M. [K] [G], né en 1976, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er février 2012 en qualité de directeur d’investissement.

A côté de ses fonctions salariées au sein de l’association CIDR Pamiga, M. [G] exerçait aussi un mandat d’administrateur du conseil d’administration de la société anonyme Pamiga finance (PFSA).

Deux avenants ont été conclus le 1er janvier 2015 puis le 1er juin 2017 ; au terme de ce dernier, les parties ont convenu que M. [G] travaillait, à temps plein, pour un forfait jours de 218 jours.

M. [G] était en dernier lieu directeur des investissements et sa rémunération mensuelle brute moyenne s’élevait à la somme de 8 967 €.

Par lettre notifiée le 28 septembre 2017, M. [G] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 13 octobre 2017.

M. [G] a ensuite été licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre notifiée le 26 octobre 2017 ; la lettre de licenciement indique :

« Dès le mois de décembre 2015, nous avions à déplorer des carences importantes de votre part. Lors de l’entretien annuel d’évaluation, nous vous avons fait part de notre inquiétude sur votre manque de motivation et votre baisse d’implication dans vos fonctions. Nous vous avions à cette occasion alerté sur différents points :

– Les délais de signature avec les différents investisseurs n’étaient pas respectés ;

– Manque de communication avec les équipes ;

– Absence de proposition et de préconisations sur les projets d’investissements ;

– Absence de contrôle des dépenses.

Soucieux de trouver des solutions opérationnelles, nous avions répondu favorablement à l’ensemble de vos demandes.

Hélas, en dépit de notre volonté d’avancer conjointement sur un même projet, nous n’avions constaté aucune amélioration dans votre comportement et, plus grave encore, votre implication s’avérait bien en deçà de nos attentes.

Cette situation était d’autant plus délicate au regard du contexte particulièrement sensible qui était le nôtre, alors même que nous considérions que votre expertise devait constituer un atout majeur afin de mener à bien les opérations qui s’imposaient.

Dans les mois qui suivirent, nous constations, à regret, qu’aucune amélioration n’intervenait.

L’année 2017 ne sera marquée par aucune amélioration notable en dépit de nos alertes.

Plus grave encore, alors que vos fonctions, votre positionnement et votre expertise auraient dû vous inciter à la plus grande discrétion, vous avez utilisé des événements survenus à l’occasion du Conseil d’administration de la société PAMIGA Finance pour adopter une communication interne et externe totalement déplacée.

Pour mémoire, le 11 mai 2017 se tenait le Conseil d’administration de la société PAMIGA Finance. À cette occasion, vous deviez préalablement adresser à cette structure partenaire les états financiers afin que les membres du Conseil d’administration puissent en toute connaissance de cause, adopter les résolutions adaptées. Malheureusement, les administrateurs ne recevaient que très tardivement l’ensemble des éléments financiers sollicités ce qui suscita de nombreux doutes sur la qualité du travail de PAMIGA Association alors même que nous sommes les partenaires exclusifs en tant que structure support de PAMIGA Finance.

Vous ne pouviez ignorer l’importance capitale de ce travail auprès des investisseurs de PAMIGA Finance et des administrateurs de cette structure, qui ont pu légitimement s’étonner de la légèreté avec laquelle le travail avait été réalisé.

Ce manque d’implication évident fut d’autant plus grave que nous avons dû faire face à vos insinuations infondées sur l’existence d’un prétendu conflit d’intérêt entre PAMIGA Association et PAMIGA Finance.

Vos propos, réitérés à de nombreuses reprises, sont particulièrement déstabilisantes et traduisent une volonté de discréditer notre structure alors que vous ne pouviez ignorer que notre organisation, nos processus de décision, notre gestion et les relations que nous sommes amenées à nouer avec des partenaires institutionnels sont strictement et rigoureusement étudiées et validées par des autorités indépendantes, des organismes privés dotés de leur service juridique, auquel il convient d’ajouter le travail conséquent des différents experts juridiques, qui sont justement missionnés pour valider l’orthodoxie de notre travail et la stricte et rigoureuse application des réglementations nationales et internationales en la matière.

Cette question est d’autant plus grave que nous intervenons sur le secteur sensible de l’aide au développement par la micro-finance voulue par des bailleurs de fond, des structures institutionnelles, des investisseurs soucieux de démontrer par notre association que les investissements financiers peuvent s’avérer vertueux lorsqu’ils utilisent des mécanismes financiers identifiés et connus au profit d’actions de développement en Afrique.

En mettant en cause par vos insinuations, l’intégrité de nos pratiques, vous avez sciemment voulu instiller dans l’esprit de nos interlocuteurs un doute sur notre propre intégrité, et de fait sur la qualité de leur engagement.

Nous avons fait preuve de patience et de compréhension et avons tenté de vous alerter sur les répercussions d’un tel manque d’implication.

Plutôt que de modifier votre comportement, vous persistiez dans cette voie mettant en cause à plusieurs reprises la légitimité de la Directrice Générale.

De plus, en juillet 2017, alors que le mandat que vous détenez au sein du Conseil d’Administration de PAMIGA Finances n’était pas renouvelé, vous utilisiez cet événement pour aggraver la situation par une communication inadéquate.

En effet vous n’aviez pas à utiliser votre titre de Directeur d’Investissement pour vous adresser directement aux investisseurs et bailleurs de fonds institutionnels avec lesquels nous avions travaillé.

Vous avez alors ainsi décidé de communiquer au sujet de votre sortie du Conseil d’administration de PAMIGA Finance en posant à nouveau la question de risques éventuels quant à la légalité des engagements signés, ce qui a causé un trouble certain

Cette communication réalisée en votre qualité de Directeur d’Investissement, intervenait sans aucune concertation préalable avec notre association qui se trouve être votre employeur et les parties prenantes de PAMIGA Finance qui se trouvent être les bénéficiaires du travail que nous réalisons à son profit.

Vous avez d’une part outrepassé vos fonctions, et d’autre part communiqué des informations confidentielles alors même que vous ne pouviez ignorer qu’une telle communication supposait la validation de votre supérieur eu égard au caractère sensible de ces informations.

Cette communication constitue en outre une violation de votre devoir de réserve et témoigne de votre absence de discernement au regard des enjeux financiers.

Cette communication ne pouvait que renvoyer une image particulièrement fragile à nos investisseurs et plus généralement à nos partenaires.

Ce comportement a eu de graves répercussions et a discrédité notre image conduisant ainsi les partenaires financiers à s’interroger sur l’opportunité de poursuivre les partenariats envisagés.

Au demeurant, une telle situation aurait pu avoir de graves conséquences sur la poursuite de notre activité puisque sans l’agrément des investisseurs financiers, la société PAMIGA Finance ne pouvait perdurer.

Pour toute explication, vous avez émis des dénégations malheureusement contredites par les correspondances dont nous détenons les copies.

Par ces agissements et devant de tels constats, la poursuite de notre collaboration n’est plus envisageable, d’autant que vous avez ostensiblement témoigné lors de l’entretien préalable des divergences profondes que vous nourrissez quant à notre stratégie.

Votre absence d’implication manifeste, votre communication inappropriée, vos initiatives inacceptables, ainsi que la manifestation de votre divergence quant à l’orientation de notre structure nous contraignent à mettre fin à notre collaboration. Nous sommes donc au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif personnel. (‘) ».

La lettre de licenciement mentionne en substance :

– le manque d’implication de M. [G] ;

– la communication interne et externe inappropriée de M. [G] ;

– la divergence de M. [G] quand à l’orientation de l’association CIDR Pamiga.

A la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, M. [G] avait une ancienneté de 5 ans et 8 mois et l’association CIDR Pamiga occupait à titre habituel moins de onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités consécutivement à la rupture de son contrat de travail, M. [G] a saisi le 18 octobre 2018 le conseil de prud’hommes de Paris pour former les demandes suivantes :

« JUGER que le licenciement de M. [G] est sans cause réelle et sérieuse ;

JUGER que la convention de forfait en jours de M. [G] lui est inopposable et qu’en conséquence M. [G] est bien fondé à solliciter le paiement d’heures supplémentaires ;

JUGER que l’Association PAMIGA a manqué à son obligation de sécurité de résultat et a exécuté déloyalement le contrat de travail entraînant un préjudice pour M. [G] ;

En conséquence,

CONDAMNER l’association PAMIGA à payer à M. [G] les sommes suivantes :

– 53.802 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit 6 mois de salaire ; et à titre subsidiaire 8.967 €, soit un mois de salaire, au titre de l’irrégularité de procédure liée à l’absence d’évocation lors de l’entretien préalable de certains griefs énoncés dans la notification de licenciement ;

– 30.000 € en réparation du préjudice distinct pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l’obligation de sécurité de résultat ;

– 219.778,60 € au titre des heures supplémentaires et 21.977,86€ au titre des congés payés y afférents.

CONDAMNER l’Association PAMIGA à remettre à M. [G] les documents afférents à la rupture et bulletins de paie conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

CONDAMNER l’association PAMIGA à payer à M. [G] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; ainsi qu’aux entiers dépens. »

Par jugement du 24 juillet 2020 auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes a débouté M. [G] de l’ensemble de ses demandes et l’association CIDR Pamiga de ses demandes reconventionnelles et condamné M. [G] aux dépens.

M. [G] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par RVPA le 27 août 2020.

La constitution d’intimée de l’association CIDR Pamiga a été transmise par RVPA le 10 septembre 2020.

La clôture a été fixée à la date du 6 septembre 2022.

L’affaire a été appelée à l’audience du 8 novembre 2022.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 2 avril 2021, M. [G] demande à la cour de :

« INFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [G] de l’ensemble de ses demandes ;

CONFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté l’Association au titre des dispositions des articles 32-1 et 700 du code de procédure civile ;

Statuer à nouveau :

DECLARER recevable et bien-fondé M. [G] en ses présentes écritures, y faisant droit ;

JUGER que le licenciement de M. [G] est sans cause réelle et sérieuse ;

JUGER que la convention de forfait en jours de M. [G] lui est inopposable et qu’en conséquence M. [G] est bien fondé à solliciter le paiement d’heures supplémentaires ;

JUGER que l’Association PAMIGA a manqué à son obligation de sécurité de résultat et a exécuté déloyalement le contrat de travail entraînant un préjudice pour M. [G] ;

En conséquence,

CONDAMNER l’association PAMIGA à payer à M. [G] les sommes suivantes :

– 53.802 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit 6 mois de salaire ; et à titre subsidiaire 8.967 €, soit un mois de salaire, au titre de l’irrégularité de procédure liée à l’absence d’évocation lors de l’entretien préalable de certains griefs énoncés dans la notification de licenciement ;

– 30.000 € en réparation du préjudice distinct pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l’obligation de sécurité de résultat ;

– 219.778,60 € au titre des heures supplémentaires et 21.977,86€ au titre des congés payés y afférents.

CONDAMNER l’Association PAMIGA à remettre à M. [G] les documents afférents à la rupture et bulletins de paie conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

DIRE ET JUGER que toutes les sommes mises à la charge de l’association PAMIGA ayant une nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de saisine du Conseil de prud’hommes, avec capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;

DEBOUTER l’Association PAMIGA de ses demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNER l’association PAMIGA à payer à M. [G] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; ainsi qu’aux entiers dépens. »

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 6 janvier 2021, l’association CIDR Pamiga s’oppose à toutes les demandes de M. [G] et demande à la cour de :

« Dire et Juger recevable et non fondé Monsieur [G] en ses demandes,

Dire et Juger que le licenciement est pourvu d’une cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [G] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté l’Association CIDR PAMIGA de sa demande au titre des dispositions des articles 32-1 et 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau,

Condamner Monsieur [G] au paiement d’une somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner Monsieur [G] au paiement d’une indemnité de 4000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’au paiement des entiers dépens d’instance comprenant les frais d’exécution du jugement à intervenir. »

Lors de l’audience présidée selon la méthode dite de la présidence interactive, le conseiller rapporteur a fait un rapport et les conseils des parties ont ensuite plaidé par observations et s’en sont rapportés pour le surplus à leurs écritures ; l’affaire a alors été mise en délibéré à la date du 4 janvier 2023 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC)

MOTIFS

Sur le licenciement

Il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que M. [G] a été licencié pour les faits suivants :

– son manque d’implication

– sa communication interne et externe inappropriée

– la divergence de M. [G] quand à l’orientation de l’association CIDR Pamiga.

Il ressort de l’article L. 1235-1 du code du travail qu’en cas de litige, le juge à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; si un doute subsiste il profite au salarié.

M. [G] soutient que son licenciement est abusif et fait valoir pour chaque grief qu’ils sont prescrits et mal fondés outre que seul le grief relatif à son mandat a été évoqué lors de l’entretien préalable. Il soutient aussi que le véritable motif de son licenciement est qu’il fallait l’évincer pour faire de la place à son remplaçant.

L’association CIDR Pamiga réplique que le licenciement n’est pas disciplinaire, que la cause réelle et sérieuse consiste en une insuffisance professionnelle tenant au manque d’implication et à la communication inappropriée de M. [G] et précise que son remplaçant avait été recruté en réalité pour un autre poste.

L’insuffisance professionnelle consiste dans l’inaptitude du salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante. Elle résulte des échecs, des erreurs ou autres négligences imputables au salarié, sans pour autant revêtir un caractère fautif. Le licenciement pour insuffisance professionnelle échappe donc au droit disciplinaire.

L’insuffisance professionnelle peut motiver un licenciement à condition qu’elle soit établie par l’employeur.

Il résulte de l’examen des pièces versées aux débats et des moyens débattus que l’association CIDR Pamiga apporte suffisamment d’éléments de preuve pour établir la cause réelle et sérieuse du licenciement relative au manque d’implication de M. [G] comme cela ressort des 5 relances qui ont dû être faites à son intention entre le 17 mai 2017 et le 22 juin 2017 dans le dossier « revue KYC 2017 – 511623 » (pièce employeur n° 29) et des attestations de MM. et Mmes [C], [Y], [R], [J], [U] (pièces employeur n° 22, 24, 27, 25 et 23) qui établissent ses absences régulières quand sa supérieure hiérarchique n’était pas présente dans les bureaux, le caractère régulièrement insatisfaisant des rapports qu’il exécutait et qui présentaient des non-conformités, son manque de diligence et ses retards réguliers dans le travail en méconnaissance des délais requis pour répondre aux demandes malgré les relances.

Il résulte de l’examen des pièces versées aux débats et des moyens débattus que l’association CIDR Pamiga apporte aussi suffisamment d’éléments de preuve pour établir la cause réelle et sérieuse du licenciement relative à la communication interne et externe inappropriée de M. [G] comme cela ressort des attestations de MM. et Mmes [C], [Y], [R], [J], [U] (pièces employeur n° 22, 24, 27, 25 et 23) qui établissent que M. [G] était arrogant et irrespectueux à l’égard de sa supérieure hiérarchique, et des courriers électroniques qu’il a adressés le 19 juillet 2017 à 3 groupes de destinataires, les partenaires bancaires de l’association CIDR Pamiga, les équipes et les investisseurs (pièces salarié n° 29 à 31 bis) en violation de son devoir de loyauté et de discrétion et qui ont, de ce fait, suscité des troubles portant atteinte à l’image de l’entreprise (pièces employeur n° 30, 3, 32) et justifié une réponse officielle de l’entreprise (pièce employeur n° 33).

Et c’est en vain que M. [G] fait valoir que les faits sont prescrits ou n’ont pas tous été évoqués lors de l’entretien préalable au motif d’une part que le licenciement n’est pas disciplinaire en sorte que les règles sur la prescription ne sont pas applicables et au motif d’autre part que l’absence d’évocation lors de l’entretien préalable de l’un des faits retenus dans la lettre de licenciement ne prive pas celui-ci de cause réelle et sérieuse.

C’est aussi en vain que M. [G] fait valoir qu’il conteste les faits et produit des éléments de preuve contraires au motif que les attestations qu’il produit (pièces salarié n° 43, 44, 45, 46) de MM. [X], [D], [S] et [E] ne suffisent pas à contredire les faits retenus par la cour à l’encontre de M. [G] relativement à son manque d’implication et à sa communication interne et externe inappropriée.

C’est enfin en vain que M. [G] soutient que le véritable motif de son licenciement est qu’il fallait l’évincer pour faire de la place à son remplaçant M. [L] [B] au motif que son recrutement avait été prévu en réalité pour un autre poste, le poste de directeur d’investissement Equity comme cela ressort de son attestation non contredite sur ce point (pièce employeur n° 28).

A l’examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour dispose d’éléments suffisants pour retenir que ces faits relatifs au manque d’implication et à la communication interne et externe inappropriée de M. [G] caractérisent une cause réelle et sérieuse justifiant un licenciement au sens de l’article L. 1235-1 du code du travail au motif que M. [G] n’exécutait plus son travail de façon satisfaisante faute d’implication et faute de volonté de collaborer avec sa supérieure hiérarchique.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a jugé que le licenciement de M. [G] était justifié par une cause réelle et sérieuse.

Par voie de conséquence le jugement déféré est aussi confirmé en ce qu’il a débouté M. [G] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour non-respect de la procédure

M. [G] demande à titre subsidiaire la somme de 8.967 €, soit un mois de salaire, au titre de l’irrégularité de procédure liée à l’absence d’évocation lors de l’entretien préalable de certains griefs énoncés dans la notification de licenciement.

L’association CIDR Pamiga s’oppose à cette demande et fait valoir que les notes manuscrites que M. [G] invoque (pièce salarié n° 33) sont dépourvues de valeur probante.

Aux termes de l’article L1232-3 du code du travail « au cours de l’entretien préalable, l’employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié ».

La cour rappelle que les griefs retenus dans la lettre de licenciement doivent nécessairement avoir fait l’objet d’une discussion lors de l’entretien. La présence de motifs dans la lettre de licenciement qui n’auraient pas été évoqués à l’entretien constitue une irrégularité de procédure.

A l’examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que M. [G] est mal fondé dans sa demande au motif que la pièce 33 qu’il produit et qui est intitulée « minutes entretien par MM » est dépourvue de valeur probante sur la teneur de l’entretien préalable dès lors qu’il s’agit d’une note manuscrite informelle non signée, qui n’a pas date certaine et n’est pas susceptible compte tenu de ces caractéristiques de constituer un élément de preuve suffisant sur la teneur de l’entretien préalable.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a débouté M. [G] de sa demande formées à titre subsidiaire à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure.

Sur la convention de forfait en jours

M. [G] soutient que la convention de forfait jours ne lui est pas opposable au motif qu’aucun entretien portant sur la charge de travail, l’organisation du travail dans l’entreprise, la rémunération ainsi que l’articulation entre l’activité professionnelle, la vie professionnelle et familiale n’a été réalisé alors que le régime du forfait en jours lui était appliqué.

L’employeur considère que le forfait en jours est opposable au salarié : jusqu’au 1er juin 2017 M. [G] travaillait à temps partiel ; à partir du 1er juin 2017, il a effectivement été établi une convention de forfait jours de 218 jours stipulant que M. [G] travaillait à hauteur de 20 % à son domicile (pièce employeur n° 3) étant ajouté qu’il exigeait aussi de ne pas travailler plus de 80 % de son temps de travail salarié (pièces employeur n° 39 et 40).

Il résulte des dispositions des articles L3121-43 et suivants du code du travail, dans la rédaction applicable à la date des faits, que les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre les horaires collectifs peuvent conclure une convention de forfait en jours sur l’année, dans la limite de la durée annuelle de travail qui ne peut excéder 218 jours.

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires.

L’article L 3121-65 du même code dans sa rédaction applicable à la date des faits prévoit qu’un entretien annuel individuel est organisé par l’employeur avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.

En l’espèce, aux termes de son contrat de travail M. [G] bénéficiait d’une convention de forfait en jours étant précisé que le nombre de jours travaillés dans l’année était fixé dans le dernier avenant du 1er juin 2017 à 218 jours (pièce employeur n° 3) après avoir été fixé à 109 jours dans le contrat de travail du 1er février 2012 (pièce employeur n° 1), à 174 dans l’avenant du 1er janvier 2015 (pièce employeur n° 2).

L’employeur devait donc organiser un entretien individuel annuel portant sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.

Or, l’association CIDR Pamiga ne justifie pas avoir organisé cet un entretien individuel annuel.

Il y a donc lieu de constater que la mise en ‘uvre du forfait jours n’a pas fait l’objet d’un suivi régulier par l’employeur afin de veiller à ce que la charge de travail du salarié ne soit pas excessive.

Par conséquent, la convention de forfait jours se trouve privée d’effet, et le salarié, se trouvant dès lors soumis à la durée légale du travail, peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires.

Sur les heures supplémentaires

M. [G] demande à la cour de lui allouer les sommes de 219.778,60 € au titre des heures supplémentaires et 21.977,86 € au titre des congés payés y afférents.

Aux termes de l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n’incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l’employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l’espèce, M. [G] invoque des attestations (pièces salarié n° 43, 42 et 46), des tableaux récapitulatifs des heures supplémentaires effectuées en 2014, 2015, 2016 et 2017 et de 2014 à 2017 (pièces salarié n° 7 à 10 et 40, et des courriers électroniques (pièces salarié n° 58 et 68) et soutient qu’il « démontre son amplitude horaire (emails très tôt le matin et tard le soir) et justifie de son travail les jours chômés (certains samedis, dimanches et jours fériés) » (sic).

M. [G] produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l’employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

En défense, l’association CIDR Pamiga expose que :

– M. [G] travaillait à temps partiel dans le cadre de chacun de ses contrats jusqu’au 1er juin 2017 ;

– les tableaux produits par M. [G] révèlent que les amplitudes ont été fixées en fonction des heures d’envoi des courriers électroniques par le salarié, ce qui ne justifie en rien de ce qu’il a effectué entre le premier et le dernier envoi compte tenu de l’absence de contrôle possible par l’employeur ;

– ces tableaux révèlent que M. [G] ne travaillait effectivement en 2017 que 98 jours en lieu et place des 174 et/ou des 218 jours contractuellement prévus, 137 jours en 2016 et 153 jours en 2015 ;

– l’employeur produit des attestations de Mme [C] et de M. [R] qui contredisent le fait que M. [G] a effectué des heures supplémentaires (pièces employeur n° 26 et 27) ;

– M. [G] a aussi exercé son activité pour l’association CIDR Pamiga dans le cadre d’un contrat de portage (pièce employeur n° 38) pour lequel ses prestations ont été facturées et payées 8 400 € en mars 2014 et à nouveau en juin 2014 (pièce employeur n° 41), pour se limiter aux factures correspondantes à la période litigieuse ;

– il ne voulait pas travailler à temps plein dans le cadre du salariat (pièces employeur n° 38 et 39).

A l’examen des éléments produits de part et d’autre, et sans qu’il soit besoin d’une mesure d’instruction, la cour a la conviction que M. [G] n’a pas effectué les heures supplémentaires alléguées.

Sa demande relative aux heures supplémentaires doit par conséquent être rejetée.

Par suite, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a débouté M. [G] de ses demandes formées au titre des heures supplémentaires.

Sur le harcèlement moral

M. [G] demande à la cour de lui allouer la somme de 30 000 € de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l’obligation de sécurité de résultat ; il invoque à l’appui de cette demande des faits de harcèlement moral.

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L’article L.1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l’espèce, M. [G] invoque les faits suivants :

– il a dépassé le nombre de jours prévus par la convention de forfait en jours en dépit de sa réticence à travailler autant

– il a travaillé bien au-delà de la durée légale du temps de travail et a travaillé jours, nuits, week-end et jours fériés ou pendant ses arrêts maladie afin d’effectuer le travail qui était attendu, et à la demande de sa hiérarchie (pièces salarié n° 7 à 10 et 16)

– il a alerté son employeur qui a mené une politique de déstabilisation et de harcèlement à son égard (pièces salarié n° 11 à 15 et 46)

– par suite, il a fait un burn out (pièces salarié n° 17 à 20 et 46).

M. [G] établit ainsi l’existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral à son encontre.

En défense, l’association CIDR Pamiga fait valoir :

– l’entretien annuel d’évaluation 2015 contredit l’allégation de harcèlement moral (pièce salarié n° 21) ;

– ce n’est qu’en « réponse » à l’avertissement du 19 juillet 2017 qu’il signale pour la première fois sa souffrance au travail ; concomitamment il est placé en arrêt de travail pour maladie à compter du 25 juillet 2017 ne reprendra dès lors plus son travail ;

– M. [G] n’a pas effectué d’heures supplémentaires ni travaillé au-delà de la durée légale de travail ni plus de jours que ce qui était convenu ;

– l’employeur produit des attestations de Mme [C] et de M. [R] (pièces employeur n° 26 et 27) qui contredisent les allégations de M. [G].

La cour rappelle qu’elle a jugé plus haut que M. [G] n’a pas effectué les heures supplémentaires alléguées.

A l’examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que l’association CIDR Pamiga démontre que les faits présentés par M. [G] sont contredits par les éléments de preuve produits par l’employeur et ne sont pas constitutifs de harcèlement moral.

Les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées.

Par suite, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a débouté M. [G] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l’obligation de sécurité de résultat.

Sur la délivrance de documents

M. [G] demande la remise de documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte.

Il est constant que les documents demandés lui ont déjà été remis ; il n’est cependant pas établi qu’ils ne sont pas conformes ; la demande de remise de documents est donc rejetée et le jugement déféré est confirmé de ce chef.

Sur la demande reconventionnelle en dommage et intérêts pour procédure abusive

La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formulée par l’association CIDR Pamiga est rejetée, le fait d’exercer son droit d’agir en raison des litiges opposant les parties n’étant pas en soi abusif.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a débouté l’association CIDR Pamiga de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les autres demandes

La cour condamne M. [G] aux dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile.

Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;

Ajoutant,

DÉBOUTE l’association CIDR Pamiga de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [G] aux dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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