Salarié de l’audiovisuel en instance de mutation
Salarié de l’audiovisuel en instance de mutation

Y compris dans le secteur audiovisuel, le recours aux CDD n’est pas autorisé en cas d’absence mais uniquement pour les causes d’absences visées par le Code du travail. L’employeur ne peut notamment pas conclure un contrat à durée déterminée en remplacement d’un salarié « en instance de mutation ».


REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour de cassation

30 mai 2007

Pourvoi n° 06-40.691

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a été engagé en qualité de monteur, du 28 février au 3 avril 1983, par la Société nationale de télévision France 3, selon contrat à durée déterminée conclu pour remplacer « Mme Y… en instance de mutation » ; que ce premier contrat a été suivi par d’autres contrats à durée déterminée motivés par des remplacements de salariés absents ou des surcroîts d’activité ; qu’ayant vainement demandé son intégration au sein de l’effectif permanent de l’entreprise, le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 4 février 2003 pour obtenir la requalification de ses contrats en un contrat à durée indéterminée, ainsi que le paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la Société nationale de télévision France 3 fait grief à l’arrêt d’avoir requalifié la relation contractuelle ayant existé entre elle et M. X… en contrat à durée indéterminée, à temps plein, avec une ancienneté au 28 février 1983, d’avoir en conséquence dit que le salarié avait une qualification B21-1 N10-2 ans 8 mois, condamné la société à verser au salarié une indemnité de requalification de 3 500 et ordonné une expertise pour établir les comptes entre les parties, alors, selon le moyen :

1 / que la proposition faite à un salarié travaillant sous contrat à durée déterminée de conclure, pour l’avenir, un contrat à durée indéterminée avec reprise d’une partie seulement de l’ancienneté ne vaut pas, en elle-même, reconnaissance par l’employeur de l’existence d’une cause légale de requalification rétroactive de l’intégralité de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée ; qu’en retenant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil et l’article L. 122-3-13 du code du travail ;

2 / que l’article I.1 de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle dispose, d’une part, qu’  » il peut être fait appel à des salariés engagés par contrats à durée déterminée, conformément à l’article L. 122-1 du code du travail  » (1.a), d’autre part que  » par ailleurs, pour les métiers qui sont énumérés dans l’annexe1, les parties reconnaissent, outre les dispositions de l’alinéa précédent, pour des activités temporaires, la possibilité de recourir à des contrats à durée déterminée en adaptant au cas particulier de ces contrats les règles prévues par l’article L. 122-1″ (1.b) ; qu’au titre des adaptations apportées aux règles prévues par l’article L. 122-1, le même texte dispose, à l’égard seulement de cette deuxième catégorie d’hypothèse de recours au contrat à durée déterminée, que  » la succession de contrats ayant des objets différents ne peut dépasser une durée globale de collaboration dans une même entreprise de cent quarante jours travaillés sur une période de cinquante-deux semaines consécutives » ; que l’article I.1 ne limite pas précisément en revanche le recours au contrat à durée déterminée conclu  » conformément à l’article L. 122-1 du code du travail  » pour des  » activités temporaires  » ; qu’en l’espèce, M. X… ne contestait pas avoir été recruté par contrats à durée déterminée en remplacement de salariés absents ou pour faire face à un surcroît temporaire d’activité et non pas au titre de l’annexe 1 de la convention collective ; qu’en appliquant à ces contrats, pour en prononcer la requalification en contrat à durée indéterminée, la limite de 140 jours fixée par la convention collective pour les seuls contrats conclus au titre de l’annexe 1, la cour d’appel a violé l’article I.1 de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle ;

3 / que les juges du fond ne peuvent soulever d’office un moyen sans inviter les parties à formuler leurs observations sur ce point ;

qu’en l’espèce, il ne résulte d’aucune mention de la décision attaquée, ni des conclusions du salarié ou de sa note en délibéré, que ce dernier ait soulevé la prétendue irrégularité du motif du contrat à durée déterminée en date du 28 février 1983 ; qu’en soulevant d’office ce moyen, sans à aucun moment inviter l’employeur à s’en expliquer, la cour d’appel a violé l’article 16 du nouveau code de procédure civile ;

4 / que toute absence d’un salarié de son poste de travail, quelle qu’en soit la cause, autorise la conclusion d’un contrat à durée déterminée en vue de son remplacement ; que l’employeur peut donc notamment conclure un contrat à durée déterminée en remplacement d’un salarié en instance de mutation, cette double référence au remplacement et à la mutation du salarié visant nécessairement l’absence de celui-ci de son poste de travail ; qu’en décidant que le contrat conclu pour  » remplacer Mme Y… en instance de mutation  » ne se référait pas à l’absence de la salariée, la cour d’appel a violé l’article L. 122-1-1 du code du travail ;

Mais attendu d’abord qu’en matière de procédure sans représentation obligatoire, les moyens retenus par le juge sont présumés, sauf preuve contraire non rapportée en l’espèce, avoir été débattus contradictoirement à l’audience ;

Attendu ensuite qu’abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et deuxième branches, la cour d’appel qui a retenu que le motif du contrat conclu le 28 février 1983 ne constituait pas un cas d’absence tel qu’envisagé par l’article L. 122-1 du code du travail, en sa rédaction alors applicable, a, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature, à lui seul, de permettre l’admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société nationale de télévision France 3 aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la Société nationale de télévision France 3 à payer à M. X… la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille sept.

LE CONSEILLER RAPPORTEUR LE PRESIDENT

LE GREFFIER DE CHAMBRE

 


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