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24 février 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
22/05806
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
2ème CHAMBRE CIVILE
————————–
ARRÊT DU : 24 FEVRIER 2023
N° RG 22/05806 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-NBGH
S.A.S. IAD FRANCE
c/
[N] [X] [O] VEUVE [S] (DECEDEE)
[L] [P]
[H] [S]
[V] [S]
S.C.I. AF IMMO
Nature de la décision : DÉFÉRÉ
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : ordonnance rendue le 08 décembre 2022 par le magistrat chargé de la mise en état de la 2ème chambre civile du conseiller de la mise en état de [Localité 7] (RG : 22/01179) suivant conclusions portant requête en date du 21 décembre 2022
DEMANDEUR :
S.A.S. IAD FRANCE, [Adresse 9]
Représentée par Me Bérangère ADER, avocat au barreau de BORDEAUX
Représentée par Me Véronique DAGONET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, présente lors des débats,
DÉFENDEURS :
[N] [X] [O] VEUVE [S], décédée le 28.10.2022, née le 18 Avril 1953 à [Localité 10] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me Fabrice PASTOR-BRUNET de la SELARL PASTOR-BRUNET FABRICE, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me SUVIERI Ornella, avocat au barreau de Bordeaux
[L] [P], née le 14 Avril 1990 à LE [Localité 6], de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]
Représentée par Me Grégory BELLOCQ de la SELARL GREGORY BELLOCQ, avocat au barreau de BORDEAUX
[H] [S], tant en son nom personnel que venant aux droits de Madame [N] [X] [O] veuve [S] décédée le 28 octobre 2022 à LISTRAC MEDOC (33), né le 13 Avril 1994 à [Localité 8] ([Localité 5]), de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Fabrice PASTOR-BRUNET de la SELARL PASTOR-BRUNET FABRICE, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me SUVIERA Ornella, avocat au barreau de Bordeaux
[V] [S] tant en son nom personnel que venant aux droits de Madame [N] [X] [O] veuve [S] décédée le 28 octobre 2022 à LISTRAC MEDOC (33), née le 01 Septembre 1979 à [Localité 7] (33), de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]
Représentée par Me Fabrice PASTOR-BRUNET de la SELARL PASTOR-BRUNET FABRICE, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me SUVIERA Ornella, avocat au barreau de Bordeaux
S.C.I. AF IMMO, [Adresse 2]
Représentée par Me Didier LE MARREC de la SELARL AVITY, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 27 janvier 2023 en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Véronique LEBRETON, première présidente de chambre
Monsieur Eric VEYSSIERE, président de chambre
Madame Nathalie PIGNON, présidente de chambre
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Julie LARA,
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
Exposé du litige
Par jugement en date du 11 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
– débouté la SCI AF Immo de l’ensemble de ses demandes dirigées contre Mme [N]-[X] [O], M. [H] [S] et Mme [V] [S] et Mme [L] [P],
– condamné la SAS IAD France à payer à la SCI AF Immo la somme de 10 940 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance,
– débouté la SAS IAD France de son action en appel en garantie introduite à l’encontre de Mme [P],
– débouté Mme [N]-[X] [O], M. [H] [S] et Mme [V] [S] de leur demande reconventionnelle,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions,
– condamné la SAS IAD France à payer à la SCI AF Immo la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l`article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SCI AF IMMO à payer à Mme [N]-[X] [O], M. [H] [S] et Mme [V] [S], ensemble, la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté Mme [P] de sa demande au titre des frais irrépétibles,
– condamné la SAS IAD France aux entiers dépens de l’instance qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Le 8 mars 2022, la SAS IAD France (la société IAD) a relevé appel de ce jugement.
Elle a notifié ses conclusions au greffe le jeudi 9 juin 2022, postérieurement au délai de 3 mois, à compter de la déclaration d’appel, qui lui était imparti pour le faire par l’article 908 du code de procédure civile.
Par des conclusions d’incident en date du 14 juin 2022, Mme [X] [O] veuve [S], M.[H] [S], et Mme [V] [S] ont demandé au conseiller de la mise en état de prononcer la caducité de la déclaration d’appel et de condamner la SAS IAD France à leur verser la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’instance.
La SCI AF immo et Mme [P] ont conclu dans le même sens.
La société IAD a demandé au magistrat chargé de la mise en état d’écarter la sanction encourue à l’article 908 du code de procédure civile, de dire qu’il n’y a pas lieu de prononcer la caducité de la déclaration d’appel effectuée le 8 mars 2022 et de débouter la SCI AF Immo, Mme [O] veuve [S], M. [S] et Mme [V] [S] de l’intégralité de leurs demandes formulées à son encontre en faisant valoir qu’un événement de force majeure n’a pas permis à son conseil, exerçant seul, de conclure dans le délai, celui-ci ayant été testé positif à la Covid 19 le 27 mai 2022 et contraint à l’isolement jusqu’au 11 juin 2022, à la fois pour des raisons sanitaires mais également pour avoir ressenti de forts symptômes très invalidants.
Par ordonnance en date du 8 décembre 2022 le magistrat chargé de la mise en état a constaté la caducité de la déclaration d’appel et le dessaisissement de la cour. Il a dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et condamné la société IAD France aux dépens de l’incident avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Pour adopter cette décision l’ordonnance du magistrat chargé de la mise en état a retenu que :
Il est constant qu’ayant interjeté appel le 8 mars 2022, la société Iad France se devait de conclure à peine de caducité de sa déclaration d’appel avant le 8 juin 2022, ce qu’elle n’a pas fait.
Si la société Iad France justifie effectivement de la période d’isolement imposée à son conseil du 27 mai 2022 au 11 juin 2022 du fait de la positivité à la Covid 19, couvrant la date butoir du 8 juin ou devait avoir conclu , il n’est pas justifié que d’un point de vue médical, son conseil présentait des symptômes invalidants de cette affection qui lui auraient rendu impossible de travailler, le cas échéant selon le moyen désormais bien éprouvé du télétravail, le seul isolement sanitaire ne constituant pas une circonstance insurmontable pour la société Iad France à conclure dans les délais, alors qu’il faut l’observer l’appelante a finalement signifié ses conclusions d’appelante le 9 juin 2022 au lieu du 8, mais pourtant avant l’expiration de sa période d’isolement prévue pour le 11 juin, ce dont il ressort que celle ci ne constituait pas un obstacle à récupérer sa clé USB, ni à travailler à son domicile, contrairement à ce que déclarait l’assuré dans ses attestations d’isolement.
Le 21 décembre 2022 la société IAD a notifié une requête en déféré par laquelle elle demande à la cour de débouter ses adversaires de l’intégralité des demandes qu’ils ont formées contre elle, de prononcer l’annulation de l’ordonnance en date du 8 décembre 2022 rendue après l’interruption de l’instance par le décès de Mme [X] [O] veuve [S] tel que notifié à la cour selon acte déclaratif du 14 novembre 2022, à défaut d’infirmer l’ordonnance attaquée et en conséquence de dire n’y avoir lieu de prononcer la caducité de la déclaration d’appel effectuée par elle le 8 mars 2022, de déclarer son appel recevable et bien fondé, de procéder à son examen au fond et de condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle fait valoir que par acte déclaratif du 14 novembre 2022, le conseil des consorts [S] a informé la cour du décès de Mme [X] [O] veuve [S] survenu le 28 octobre 2022, que conformément à l’article 370 du code de procédure civile, l’instance a été interrompue par la notification du décès et que l’ordonnance rendue après l’interruption de l’instance doit être annulée. Elle soutient en outre qu’à défaut d’être annulée l’ordonnance doit être infirmée, que contrairement à ce qu’a retenu le conseiller de la mise en état, elle justifie d’un point de vue médical que son conseil postulant présentait des symptômes invalidants qui n’ont pas permis la mise en place immédiate d’un travail à distance, la clef RPVA étant restée sur le lieu de travail qui se situe à 45 km du lieu de la résidence de l’avocat postulant, lequel était dans l’impossibilité physique de conduire et de sortir de son domicile et que les circonstance de l’espèce caractérisent un cas de force majeure justifiant que la sanction prévue à l’article 908 du code de procédure civile soit écartée.
Dans leurs conclusions notifiées le 3 janvier 2023, M. [H] [S] et Mme [V] [S] agissant tant à titre personnel et comme venant aux droits de Mme [X] [O] veuve [S], ont demandé à la cour de déclarer recevable mais mal fondée la requête en déféré de la société IAD, de débouter celle-ci de ses demandes, fins et conclusions, de confirmer l’ordonnance du 8 novembre 2022 en ce qu’elle a constaté la caducité de la déclaration d’appel et de condamner la société IAD à leur verser une indemnité de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils maintiennent que l’ordonnance du 8 décembre 2022 n’est pas nulle dans la mesure où l’incident a été plaidé à l’audience du 26 octobre 2022 du conseiller de la mise en état, alors que le décès de Mme [O] est intervenu 2 jours plus tard le 28 octobre 2022.Ils soulignent que la force majeure n’est pas caractérisée ainsi que l’a justement retenu l’ordonnance attaquée dont ils reprennent la motivation.
Par conclusions remises au greffe le 13 janvier 2023, la société AF Immo demande à la cour de confirmer l’ordonnance déférée en faisant valoir d’une part, que cette décision n’encourt pas la nullité en raison du décès de Mme [S] dés lors qu’en application de l’article 371 du code de procédure civile l’instance n’est pas interrompue lorsque le décès d’une partie intervient après l’ouverture des débats et d’autre part, que la contamination par le virus de la Covid 19 et l’isolement en résultant ne rendaient pas insurmontable la remise des conclusions dans les délais impartis.
Motifs de la décision
Sur la demande de nullité de l’ordonnance du magistrat chargé de la mise en état
L’article 372 du code de procédure civile prévoit que les jugements même passés en force de chose jugée, obtenus après l’interruption de l’instance, sont réputés non avenus à moins qu’ils ne soient expressément ou tacitement confirmés par la partie au profit de laquelle l’interruption est prévue.
Toutefois, selon l’article 371 du code de procédure civile, l’instance n’est pas interrompue si l’événement survient ou est notifié après l’ouverture des débats.
En l’espèce l’audience du magistrat de la mise en état, au cours de laquelle l’incident tiré de la caducité de l’appel a été discuté, s’est tenue le 26 octobre 2022 alors que le décès de Mme [X] [O] veuve [S], partie intimée, est survenu le 28 octobre et la notification de celui-ci, le 14 novembre 2022.
Il en résulte que ce décès intervenu après l’ouverture des débats n’a pu interrompre l’instance et que la nullité de l’ordonnance n’est pas encourue.
La demande de nullité sera, en conséquence, rejetée.
Sur la force majeure et la caducité de l’appel
Selon l’article 908 du code de procédure civile, à peine de caducité relevée d’office, l’apellant dispose d’un délai de 3 mois à compter de la déclaration d’appel pour remettre ses conclusions au greffe.
En application de l’article 910-3 du dit code, en cas de force majeur le conseiller de la mise en état peut écarter la sanction prévue à l’article 908.
Pour que la maladie constitue un cas de force majeure, celle-ci doit présenter un caractère imprévisible et irrésistible lors de l’acte à accomplir.
En l’espèce, la période durant laquelle les conclusions d’appelante de la société IAD pouvaient être remises s’étend du 8 mars au 8 juin 2022. S’il résulte des pièces du dossier que le conseil de la société IAD a subi une période d’isolement liée à la Covid 19 du 27 mai au 2 juin 2022, aucun élément médical ne vient cependant étayer l’existence alléguée de symptômes invalidants et la société ne rapporte pas la preuve de l’impossibilité dans laquelle se trouvait son avocat de travailler et d’utiliser sa clef RPVA alors que celui-ci a déposé ses conclusions le 9 juin 2022.
Dés lors, la société IAD, sur qui repose la charge de la preuve, n’établit pas que la mesure d’isolement imposée à son conseil au titre de la Covid 19 présentait un caractère irrépréssible et imprévisible.
C’est donc à juste titre que le conseiller de la mise en état a rejeté le moyen tiré de la force majeure et a prononcé la caducité de la déclaration d’appel après avoir constaté que la société IAD avait déposé ses conclusions d’appel une fois le délai de l’article 908 du code de procédure civile expiré.
L’ordonnance déférée sera donc confirmée.
L’équité ne commande pas de faire droit aux demandes d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La société IAD, partie perdante, supportera la charge des dépens.
PAR CES MOTIFS
Confirme l’ordonnance déférée,
Y ajoutant,
Rejette les demandes d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société IAD France aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Véronique LEBRETON, présidente, et par Julie LARA, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, Le président,