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30 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/03882
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 11
ARRET DU 30 MARS 2023
(n° , pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/03882
N° Portalis 35L7-V-B7F-CDGB2
Décision déférée à la Cour : jugement du 29 janvier 2021 – tribunal judiciaire de PARIS – RG n° 19/02639
APPELANT
Monsieur [B] [P]
[Adresse 6]
[Localité 11]
Représenté par Me Eric DE CAUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1368
Assisté par Me Jean-Baptiste LOOS, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
Monsieur [V] [H]
[Adresse 5]
[Localité 9]
n’a pas constitué avocat
S.A. PACIFICA
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représentée et assistée par Me Laure ANGRAND de la SARL MANDIN – ANGRAND AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0435
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE D’INDRE ET LOIRE
[Adresse 4]
[Localité 13]
n’a pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 08 décembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre
Madame Nina TOUATI, présidente de chambre
Madame Dorothée DIBIE, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Nina TOUATI, présidente de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE
Greffier lors de la mise à disposition : Mme Emeline DEVIN
ARRET :
– réputé contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Emeline DEVIN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 7 octobre 2014 à [Localité 12] (87), M. [B] [P] qui conduisait un véhicule assuré auprès de la société Groupama, a été victime d’un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule conduit par M. [V] [H] et assuré auprès de la société Pacifica.
Une expertise amiable contradictoire de M. [P] a été réalisée par les Docteurs [Z] et [N] qui ont établi leur rapport le 2 novembre 2017.
Par exploits des 28 décembre 2018, 8 janvier 2019 et 26 février 2019, M. [P] a fait assigner M. [H], la société Pacifica ainsi que la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre-et-Loire (la CPAM) devant le tribunal de grande instance de Paris afin d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices.
Par jugement du 29 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :
– dit que le véhicule conduit par M. [H] et assuré par la société Pacifica est impliqué dans la survenance de l’accident du 7 octobre 2014,
– dit que le droit à indemnisation de M. [P] des suites de cet accident de la circulation est entier,
– condamné M. [H] et la société Pacifica in solidum à payer à M. [P] à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittance, provision de 500 euros non déduite, les sommes suivantes en réparation de ses préjudices :
– incidence professionnelle : 10 000 euros
– déficit fonctionnel temporaire : 841,10 euros
– souffrances endurées : 3 000 euros
– déficit fonctionnel permanent : 3 700 euros
– préjudice d’agrément : 1 000 euros
ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,
– débouté M. [P] de sa demande au titre des pertes de gains professionnels futurs,
– condamné in solidum M. [H] et la société Pacifica à payer à M. [P] les intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur le montant de l’indemnité allouée, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 20 mars 2018 et jusqu’au jour du jugement devenu définitif,
– déclaré le présent jugement commun à la CPAM,
– condamné in solidum M. [H] et la société Pacifica aux dépens et à payer à M. [P] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,
– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement à concurrence des deux tiers de l’indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 2 mars 2021, M. [P] a interjeté appel de ce jugement en critiquant expressément ses dispositions relatives à l’indemnisation de l’incidence professionnelle, au rejet de sa demande formée au titre de la perte de gains professionnels futurs et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions de M. [P], notifiées le 15 novembre 2022, aux termes desquelles il demande à la cour de :
Vu la loi n°85-677 du 5 juillet 1985,
Vu les articles L. 211-9 et L. .211-13 du code des assurances,
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 29 janvier 2021 en ce qu’il a :
* condamné M. [H] et la société Pacifica in solidum à payer à M. [P] à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittance, provision de 500 euros non déduite, les sommes suivantes en réparation de ses préjudices :
– incidence professionnelle : 10 000 euros
* débouté M. [P] de sa demande au titre des pertes de gains professionnels futurs
– condamné in solidum M. [H] et la société Pacifica aux dépens et à payer à M. [P] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,
Et statuant à nouveau :
– condamner la société Pacifica et M. [H], in solidum, à payer à M. [P] la somme de 241 906,24 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice de perte de gains professionnels futurs subi du 22 décembre 2015 au 2 novembre 2021,
– condamner la société Pacifica et M. [H], in solidum, à payer à M. [P] la somme de 227 109,20 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice de perte de gains professionnels futurs subi à compter du 2 novembre 2021,
– condamner la société Pacifica et M. [H], in solidum, à payer à M. [P] la somme de 3 898,64 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice d’incidence professionnelle subi à compter du 2 novembre 2021 jusqu’au mois de juillet 2022,
– condamner la société Pacifica et M. [H], in solidum, à payer à M. [P] la somme de 8 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, somme à parfaire au jour de l’audience,
– déclarer l’arrêt à intervenir commun et opposable à la société Pacifica et à la CPAM,
– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris du 29 janvier 2021 pour le surplus.
Vu les dernières conclusions de la société Pacifica, notifiées le 1er décembre 2022, aux termes desquelles elle demande à la cour de :
Vu l’article 9 du code de procédure civile,
Vu l’article 1353 du code civil,
– rejeter des débats les pièces et conclusions signifiées par M. [P] le «15 décembre 2022» [en réalité le 15 novembre 2022] et le déclarer irrecevable en ses dernières conclusions, au visa des articles 15 et 16 du code de procédure civile,
– à tout le moins, ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture «du 13 octobre 2011» en application des articles 783 et 784 du code de procédure civile,
– admettre les présentes écritures,
– recevoir la société Pacifica en ses écritures et l’y dire bien fondée,
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 29 janvier 2021 en ce qu’il a condamné M. [H] et la société Pacifica à payer à M. [P] à titre de réparation de son préjudice corporel les sommes suivantes :
– incidence professionnelle : 10 000 euros
– déficit fonctionnel temporaire : 841 euros
– souffrances endurées : 3 000 euros
– déficit fonctionnel permanent : 3 700 euros
– préjudice d’agrément : 1 000 euros
– les intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur le montant de l’indemnité allouée à compter du 20 mars 2018 et jusqu’au jour du jugement devenu définitif,
– frais irrépétibles : 1 500 euros,
– déclarer irrecevable toute réponse à venir de M. [P] à l’appel incident formé par la société Pacifica le 14 juin 2021,
Statutant de nouveau,
– fixer les préjudices de M. [P] dans les termes suivants :
– incidence professionnelle : néant
– perte de gains professionnels actuels : 4 838,60 euros
– déficit fonctionnel temporaire : 647 euros
– déficit fonctionnel permanent : 3 200 euros
– souffrances endurées : 2 200 euros,
– débouter M. [P] de toutes demandes plus amples ou contraires,
– condamner M. [P] aux dépens en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, dont distraction faite au profit de la SARL Mandin-Angrand.
M. [H] ainsi que la CPAM, auxquels la déclaration d’appel a été signifiée respectivement les 9 avril 2021 et 14 avril 2021, par actes séparés délivrés repectivement à personne et à personne habilitée, n’ont pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes de la société Pacifica tendant à voir écarter des débats les pièces et conclusions de M. [P] notifiées le 15 novembre 2022 et à tout le moins, de voir ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture
Par ordonnance du 8 décembre 2022, le conseiller de la mise en état a révoqué l’ordonnance de clôture rendue le 1er décembre 2022 et prononcé la clôture du dossier au 8 décembre 2022.
La demande de révocation de l’ordonnance de clôture présentée par la société Pacifia est dès lors devenue sans objet.
Il n’y pas lieu d’écarter des débats les conclusions de M. [P] notifiées le 15 novembre 2022 et les pièces qui y sont annexées, dès lors que la société Pacifia a été en mesure d’y répondre dans ses dernières écritures notifiées le 1er décembre 2022 avant la date de la clôture.
Sur les postes du préjudice corporel de M. [P] discutés devant la cour
Les experts amiables, les Docteurs [Z] et [N], indiquent dans leur rapport du 20 octobre 2017 que M. [P] a présenté à la suite de l’accident du 7 octobre 2014 une «contusion dorso lombalgie» et qu’il conserve les séquelles de cette dorso lombalgie droite para-vertébrale à l’origine d’un syndrome rachidien, sans syndrome radiculaire, avec une limitation de mobilité et une contrainte thérapeutique légère consistant en la prise de Doliprane.
Ils concluent leur rapport ainsi qu’il suit :
– arrêt temporaire des activités professionnelles du 8 octobre 2014 au 20 décembre 2014 et du 10 janvier 2015 au 31 mai 2015,
– pas de déficit fonctionnel temporaire (il n’y a pas d’hospitalisation)
– déficit fonctionnel temporaire partiel :
* de classe II du 7 octobre 2014 au 20 décembre 2014,
* de classe I du 21 décembre 2014 au 17 août 2015
– consolidation au 18 août 2015
– souffrances endurées de 2/7
– déficit fonctionnel permanent de 3 %
– préjudice esthétique permanent nul
– préjudice d’agrément : reprise du vélo impossible
– activités professionnelles : incidence professionnelle au sens d’une pénibilité accrue avec maintien de l’emploi,
– vie sexuelle : pas de préjudice allégué,
– soins médicaux après consolidation et frais futurs : néant.
Ce rapport constitue, sous les amendements qui suivent, une base valable d’évaluation du préjudice corporel subi, à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l’âge de la victime née le [Date naissance 3] 1971, de son activité antérieure à l’accident de technico-commercial, de la date de consolidation, afin d’assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion de ceux à caractère personnel sauf s’ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.
Par ailleurs, l’évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue ; le barème de capitalisation utilisé sera celui publié par la Gazette du Palais du 15 septembre 2020 avec un taux d’intérêts de 0 % qui est le plus approprié comme s’appuyant sur les données démographiques, économiques et monétaires les plus pertinentes.
Enfin, M. [P] ne formulant aucune prétention au titre d’une perte de gains professionnels antérieure à la consolidation, il n’y a pas lieu de se prononcer sur l’évaluation de ce poste de préjudice que la société Pacifica propose de fixer à la somme de 4 838,60 euros.
Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)
– Perte de gains professionnels futurs
Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l’invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.
M. [P] fait valoir qu’il a fait l’objet à la suite de l’accident d’un licenciement pour inaptitude le 22 décembre 2015, le médecin du travail ayant conclu à l’issue de deux visites de reprise réalisées les 4 et 19 juin 2015 qu’il était inapte à son poste de commercial itinérant dans la mesure où il ne pouvait effectuer de déplacement important mais qu’il était apte à un poste sédentaire.
Il soutient qu’il existe un lien de causalité direct et certain entre l’accident et la perte de son emploi et qu’il ne peut lui être opposé le fait qu’il ait refusé les trois propositions de reclassement formulées par son employeur alors que la victime n’est pas tenue de minimiser son préjudice dans l’intérêt du responsable.
Il ajoute que son refus s’explique par le fait que le premier poste de reclassement portait sur un emploi à temps partiel et que les deux autres étaient localisés en région parisienne alors qu’il est domicilié à [Localité 11] (37).
Il conteste avoir décidé avant son licenciement pour inaptitude de se reconvertir sur le plan professionnel et précise que ce n’est qu’après la perte de son emploi qu’il a créé en 2016 une société de vente d’ameublement et de mobilier de jardin qui n’a malheureusement pas prospéré et a été mise en redressement judiciairement le 4 septembre 2018 puis en liquidation judiciaire le 28 mai 2019.
Il expose que compte tenu de son âge, il a rencontré des difficultés pour retrouver un emploi, en dépit de l’envoi de nombreuses lettres de candidature demeurées sans réponse, et qu’il a finalement été embauché à compter du 2 novembre 2021 par la société Laboratoire Phytogers, il précise que son revenu actuel est inférieur à celui qui était le sien avant l’accident.
Il affirme qu’il a subi une perte de gains professionnels totale entre la date de son licenciement pour inaptitude le 22 décembre 2015 et le 1er novembre 2021, perte qu’il évalue à la somme de 241 906,24 euros .
Il chiffre sa perte de revenus à compter du 2 novembre 2021, à la somme de 227 109,20 euros, correspondant à la différence entre son salaire net antérieur à l’accident d’un montant de 41 279 euros et son salaire net actuel moyen de 23 132,04 euros, capitalisée jusqu’à la date prévisible de son départ à la retraite, à l’âge de 62 ans.
La société Pacifica rappelle que les deux experts, y compris le médecin-conseil de la victime, ont conclu qu’il n’existait pas de lien de causalité entre l’accident et le licenciement de M. [P] et relève que la CPAM qui a pris en charge l’accident au titre de la législation sur les accidents du travail n’a alloué aucune indemnisation au titre d’un préjudice professionnel postérieur à la consolidation.
Elle fait valoir que le licenciement prononcé résulte de la décision de M. [P] de ne pas accepter les offres de reclassement qui lui étaient proposées et ajoute que les conséquences de l’exercice de ce libre choix ne sauraient être mises à la charge du tiers responsable.
La société Pacifica soutient qu’il résulte des déclarations faites par M. [P] aux praticiens qui l’ont suivi médicalement qu’il avait dès l’année 2014 la volonté de quitter son emploi pour constituer sa propre société et a effectué des démarches en ce sens avant même qu’il ne soit reconnu inapte par la médecine du travail.
Elle avance que si la société d’ameublement de M. [P] n’a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés que le 13 mars 2016, il ne fait aucun doute que les démarches en vue de sa constitution ont été initiées bien en amont.
Elle ajoute que si cette société a été placée en redressement judiciaire le 4 septembre 2018 puis en liquidation judiciaire le 28 mai 2019, l’échec de cette activité économique n’est pas imputable à l’accident.
Elle critique enfin l’évaluation faite par M. [P] du salaire de référence antérieur à l’accident qui intègre des frais professionnels et relève que les bulletins de paie les plus récents relatifs à son nouvel emploi attestent de 63 heures d’absence par mois, alors que cette activité partielle est sans lien avec l’accident.
Elle conclut ainsi à la confirmation du jugement qui a débouté M. [P] de sa demande d’indemnisation au titre de la perte de gains professionnels futurs.
Sur ce, M. [P] qui travaillait à temps complet à la date de l’accident comme « technico commercial» au sein de la société Ales groupe France a fait l’objet à la suite de l’accident d’un premier arrêt de travail entre le 7 octobre 2014 et le 20 décembre 2014 à la suite duquel il été déclaré apte à reprendre son poste de travail avec restrictions, le médecin du travail relevant la nécessité pour le salarié de disposer d’un véhicule adapté aux séquelles de l’accident d’octobre 2014 et recommandant une diminution de la taille de son secteur de travail.
M. [P] a été de nouveau placé en arrêt de travail du 10 janvier 2015 au 31 mai 2015 en raison d’une résurgence de ses douleurs dorso-lombaires.
Lors de la première visite de reprise du 4 juin 2015, le médecin du travail a émis l’avis suivant : « inapte au poste, apte à un autre : inapte au poste de commercial itinérant ; ne peut effectuer de déplacement important ; peut avoir une activité de commercial sédentaire ».
A l’issue de la deuxième visite de reprise du 19 juin 2015, le médecin a confirmé son avis d’inaptitude.
La société Ales groupe France ayant demandé au médecin du travail de préciser ce qu’il entendait par déplacement important et par activité commerciale sédentaire, celui-ci a indiqué que les déplacements importants étaient des déplacements de plus de 100 km, deux fois par semaine, et qu’une activité commerciale sédentaire correspondait à une situation de télétravail ou à une activité sur un stand.
M. [P] ayant refusé les propositions de reclassement qui lui étaient faites, il a fait l’objet le 22 décembre 2015 d’un licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Si les experts ont estimé qu’aucun lien de causalité n’était établi entre l’accident et le licenciement de M. [P], leur avis repose sur une appréciation qui n’est pas d’ordre médical de l’existence de projets de reconversion professionnelle antérieurs au licenciement et sur le fait qu’en droit de la sécurité sociale, le médecin conseil de la CPAM a estimé que les séquelles de l’ accident du travail et de sa rechute n’étaient pas indemnisables.
Sur le plan strictement médical, leurs constatations ne permettent pas de remettre en cause l’avis du médecin du travail selon lequel M. [P] n’était plus apte à occuper son poste de commercial itinérant en raison de l’impossibilité d’effectuer des déplacements importants de plus de 100 km deux fois par semaine.
Les experts qui ont admis l’imputabilité à l’accident de la dorso lombalgie droite para-vertébrale dont souffre la victime et rappelé les doléances de M. [P] concernant les douleurs déclenchées par les trajets en voiture, n’ont d’ailleurs à aucun moment affirmé que les séquelles de l’accident lui permettaient de réaliser de tels déplacements.
Contrairement à ce qu’avance la société Pacifica, le fait que M. [P] ait refusé les trois offres de reclassement qui lui étaient proposées, la première sur un poste à temps partiel, 14 heures par semaine, et les deux autres sur des postes localisés en région parisienne alors qu’il est domicilié à [Localité 11] (37) ne permet nullement de retenir que la rupture de son contrat de travail résulte d’un choix personnel.
Par ailleurs, si M. [P], lorsqu’il a consulté en décembre 2014 le Professeur [D] au CHU de [Localité 13] pour ses lombalgies, a indiqué à ce praticien que la probabilité de la poursuite de son ancienne activité était de 50 % et qu’il envisageait un changement d’activité professionnelle, il convient de relever que ce praticien, après avoir rappelé que le patient présentait une lombalgie post-traumatique à la suite d’un accident de trajet-travail a lui même envisagé une possible inaptitude professionnelle ; il a ainsi mentionné dans son compte-rendu qu’il était « possible que cet accident douloureux lombaire dans un tel contexte puisse générer un processus chronique conduisant à l’inaptitude», ce qui a finalement été le cas.
Il est ainsi établi, nonobstant l’avis contraire des experts, l’existence d’un lien de causalité direct et certain entre la perte de son emploi par M. [P] et l’accident du 7 octobre 2014 sans la survenance duquel il ne serait pas devenu inapte à son poste de travail et aurait continué à percevoir les revenus que cet emploi lui procuraient.
Si M. [P] n’est pas devenu inapte à tout emploi et pouvait ainsi que l’a relevé le médecin du travail exercer une activité commerciale sédentaire, il résulte des justificatifs produits (bulletins de paie, avis d’imposition, compte de résultat de la société d’ameublement immatriculée le 15 mars 2016) que son licenciement pour inaptitude a entraîné une diminution de ses revenus, sa perte de gains correspondant à la différence entre le montant des salaires et primes qu’il aurait perçu sans la survenance de son licenciement pour inaptitude et les revenus qu’il a effectivement perçus.
Au vu des bulletins des 12 mois précédant l’accident, il apparaît que M. [P] a perçu au cours de cette période des salaires et primes d’un montant net de 33 627,41 euros, déduction faite des frais professionnels ou « frais de route » qui ne constituent pas un élément de sa rémunération.
Après son licenciement, M. [P] a créé avec son épouse une société dénommée « Maisons et demeure by Flamant » afin d’exploiter un fonds de commerce d’ameublement et de mobilier de jardin situé à [Localité 13] (37).
Selon l’extrait Kbis versé aux débats, cette société a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 15 mars 2016.
Il résulte du bail commercial en date du 4 avril 2016 et du contrat de prêt souscrit le 21 mai 2016 que la société Maisons et demeure by Flamant a loué des locaux commerciaux bruts dont elle a financé l’aménagement au moyen des fonds prêtés et qu’elle a débuté son activité en juin 2016.
Il ne peut être reproché à M. [P], d’avoir tenté de créer sa propre entreprise à la suite de la perte de son emploi consécutive à l’accident, même si ce projet commercial compatible avec ses séquelles n’a pas prospéré.
Il convient toutefois de tenir compte dans l’évaluation de la perte de gains professionnels futurs de la victime des revenus générés par cette activité avant le placement en liquidation judiciaire de la société par jugement du 28 mai 2019.
M. [P], n’a retrouvé un emploi qu’à compter du 2 novembre 2021en tant que « responsable grand compte » au sein de la société Laboratoire Phytogers, ce qui ne peut lui être reproché compte tenu de son âge et de la situation économique défavorable
Il justifie au vu des bulletins de paie versés aux débats que sa rémunération actuelle est inférieure à celle qu’il percevait avant son licenciement, ce qui s’explique par une diminution du niveau des primes.
En revanche, M. [P] étant médicalement apte à travailler à temps complet sur un poste commercial sédentaire, il convient de réintégrer dans son salaire les heures d’absence pour activité partielle qui procèdent d’un choix personnel et sont sans lien avec l’accident.
La perte de gains professionnels futurs de M. [P] entre la date de son licenciement le 22 décembre 2015 et la date de la liquidation s’établit de la manière suivante :
– du 22 décembre 2015 au 31 décembre 2015
* 33 627,41 euros / 365 jour x 10 jours = 921,30 euros
– année 2016
* 33 627,41 euros – 19 186 euros= 14 441,41 euros
– année 2017
* 33 627,41 euros – 25 077 = 8 550,41 euros
– année 2018
* 33 627,41 euros – 8 424 euros = 25 203,41 euros
– année 2019
* 33 627,41 euros – 0 euro = 33 627,41 euros
– année 2020
* 33 627,41 euros – 0 euro = 33 627,41 euros
– année 2021
* 33 627,41 euros – 4 305,82 euros = 29 321,59
– année 2022
* 33 627,41 euros – 23 559 euros (revenu moyen réintégrant les heures d’absence pour activité partielle) = 10 068,41 euros
– du 1er janvier 2023 à la date du présent arrêt
* (33 627,41 euros / 12 mois x 3 mois) – (23 559 euros / 12 mois x 3 mois) = 2 517,10 euros
Soit un total de 158 278,45 euros.
La perte de gains professionnels à échoir doit être évaluée sur la base d’une perte de gains annelle de 10 068,41 euros jusqu’à la date prévisible de départ à la retraite de M. [P] à l’âge de 62 ans :
* 10 068,41 euros x 10,605 (euro de rente temporaire prévu par le barème retenu par la cour pour un homme âgé de 51 ans à la date de la liquidation) = 105 775,49 euros.
Le poste de préjudice de la perte de gains professionnels futurs s’élève à la somme totale de 265 053,94 euros (158 278,45 euros + 105 775,49 euros).
Au vu du décompte définitif de la CPAM en date du 13 juin 2018, cet organisme n’a servi aucune prestation devant s’imputer sur ce poste de préjudice, M. [P] n’ayant perçu ni d’indemnités journalières après la date de consolidation ni de rente d’accident du travail.
L’indemnité de 265 053,94 euros lui revient ainsi intégralement.
Le jugement sera infirmé.
– Incidence professionnelle
Ce chef de dommage a pour objet d’indemniser non la perte de revenus liée à l’invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d’une chance professionnelle ou de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi qu’elle occupe imputable au dommage, ou encore l’obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d’une autre en raison de la survenance de son handicap.
M. [P] conclut à l’infirmation du jugement qui a évalué ce poste de préjudice à la somme de 10 000 euros et réclame une somme inférieure d’un montant de 3 898,64 euros.
Il expose que dans la mesure où il n’a pu, en dépit des nombreuses lettres de candidature envoyées, retrouver un emploi à proximité de son domicile à [Localité 11] en Indre-et-Loire, il a été contraint d’élargir ses recherches en dehors de cette zone géographique, que la société Laboratoire Phytogers pour laquelle il travaille depuis le 2 novembre 2021 étant implantée dans la commune de [Localité 10] dans le Gers, il a été contraint de louer un pied-à-terre à proximité de son lieu de travail, sa vie familiale étant établie à [Localité 11] et son épouse ne pouvant déménager sans perdre son emploi.
Il fait valoir que les frais liés à la location d’un studio situé [Adresse 2]) et les frais d’électricité exposés pendant 8 mois jusqu’à ce qu’il soit hébergé à titre gratuit par le frère de son employeur, constituent des dépenses qu’il n’aurait pas eu à engager si l’accident n’avait pas eu lieu et dont il est bien fondé à obtenir l’indemnisation à hauteur de 3 898,64 euros.
La société Pacifica conclut au rejet de la demande, faute pour M. [P] d’établir un lien de causalité entre ces dépenses et l’accident.
Elle fait observer en outre que les factures d’électricité produites sont établies au nom de tiers et qu’elle mentionnent comme lieu de consommation « 1er étage, maison LUST, [Adresse 1] ».
Sur ce, les frais de location d’un pied-à-terre à proximité de son nouveau lieu de travail que M. [P] a été contraint d’exposer, dans la mesure où il est domicilié à [Localité 11], constituent des dépenses rendues nécessaires par l’accident et le licenciement pour inaptitude qu’il a entraîné.
M. [P] verse aux débats le contrat de location meublé du 13 décembre 2021 aux termes duquel il a pris à bail un studio situé [Adresse 2]) moyennant un loyer mensuel de 350 euros par mois, outre 30 euros de charges.
Il produit également les quittances de loyer dont il résulte qu’il a réglé la somme globale de 2 880 euros, soit 220 euros pour la période du 13 au 31 décembre 2021, et 380 euros par mois de janvier à juillet 2022 inclus.
En revanche, M. [P] ne justifie pas avoir exposé personnellement des frais d’électricité, les factures qu’il produit étant établies au nom de tiers et mentionnant un lieu de consommation ne correspondant pas à l’adresse des lieux loués.
M. [P] n’invoquant aucune autre incidence professionnelle de l’accident dont il a été victime, la société Pacifica sera condamnée à lui verser la somme de 2 880 euros.
Le jugement sera infirmé.
Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)
– Déficit fonctionnel temporaire
Ce poste de préjudice indemnise l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, y compris le préjudice d’agrément temporaire et le préjudice sexuel.
Eu égard à l’incapacité fonctionnelle subie par M. [P] et aux troubles apportés à ses conditions d’existence avant la date de consolidation, ce poste de préjudice a été justement évalué par le tribunal à la somme de 841,10 euros en retenant conformément à la demande de la victime une base journalière d’indemnisation de 26 euros pour un déficit total.
Le jugement sera confirmé.
– Souffrances endurées
Ce poste de préjudice indemnise les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés que la victime endure pendant la maladie traumatique.
Il convient de prendre en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par M. [P] en raison du traumatisme initial, des douleurs dorso-lombaires ainsi que des séances de kinésithérapie ; coté 2/7 par l’expert, ce poste de préjudice a été justement évalué par le tribunal à la somme de 3 000 euros réclamée par M. [P].
Le jugement sera confirmé.
Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)
– Déficit fonctionnel permanent
Ce poste de préjudice vise à indemniser, pour la période postérieure à la consolidation, les atteintes aux fonctions physiologiques, les souffrances chroniques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence personnelles, familiales et sociales.
Les experts amiables, les Docteurs [Z] et [N], ont relevé que la victime conservait les séquelles d’une dorso lombalgie droite para-vertébrale à l’origine d’un syndrome rachidien, sans syndrome radiculaire, avec une limitation de mobilité et une contrainte thérapeutique légère consistant en la prise de Doliprane, justifiant un taux d’AIPP (DFP) de 3 %.
Au vu des séquelles constatées et des troubles induits dans les conditions d’existence de M. [P], qui était âgé de 43 ans à la date de consolidation, le tribunal a justement évalué ce poste à de préjudice à la somme de 3 700 euros réclamée par ce dernier.
Le jugement sera confirmé.
– Préjudice d’agrément
Le préjudice d’agrément est constitué par l’impossibilité pour la victime de continuer de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et inclut la limitation de la pratique antérieure.
M. [P] conclut à la confirmation du jugement qui lui a alloué 1 000 euros pour l’abandon du vélo et verse aux débats plusieurs attestations justifiant, selon lui, de sa pratique régulière du vélo avant l’accident.
La société Pacifica qui conclut au rejet de la demande estime que les attestations produites ne permettent pas d’établir une pratique effective et spécifique du cyclisme et qu’elles décrivent bien plus une pratique ponctuelle et familiale correspondant aux joies usuelles de l’existence d’ores et déjà indemnisée au titre du déficit fonctionnel permanent.
Sur ce, M. [P] justifie par les deux attestations qu’il produit qu’il effectuait régulièrement du vélo avant l’accident, étant observé qu’il s’agit d’un activité de loisir indemnisable au titre du préjudice d’agrément.
Les experts ayant retenu que la pratique du vélo n’était plus possible, il convient de confirmer le jugement qui a justement évalué ce poste de préjudice à la somme de 1 000 euros sollicitée par la victime.
Récapitulatif
Les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux de M. [P] s’établissent de la manière suivante :
– perte de gains professionnels futurs : 265 053,94 euros (infirmation)
– incidence professionnelle : 2 880 euros (infirmation)
– déficit fonctionnel temporaire : 841,10 euros (confirmation)
– souffrances endurées : 3 000 euros (confirmation)
– déficit fonctionnel permanent :3 700 euros (confirmation)
– préjudice d’agrément : (confirmation)
Sur le doublement du taux de l’intérêt légal en application des articles L. 211-9 et L.211-13 du code des assurances
Le tribunal a condamné in solidum M. [H] et la société Pacifica à payer à M. [P] les intérêts au double du taux légal sur le montant de l’indemnité allouée, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 20 mars 2018 jusqu’au jour du jugement devenu définitif.
La société Pacifica qui conclut à l’infirmation du jugement fait valoir que selon les dispositions du dernier alinéa de l’article L. 211-9 du code des assurances, « En cas de pluralité de véhicules, et s’il y a plusieurs assureurs, l’offre doit être faite par l’assureur mandaté par les autres », qu’en l’espèce l’assureur mandaté était la société Groupama, de sorte que l’éventuel retard dans la communication de l’offre d’indemnisation à M. [P] ne lui est pas imputable.
Elle ajoute qu’en tout état de cause, les intérêts au double du taux légal ne pourraient courir que du 20 mars 2018 au 30 juillet 2018, date de l’envoi par la société Groupama de l’offre d’indemnisation à M. [P].
M. [P] conclut pour sa part à la confirmation du jugement en relevant que la société Pacifica a été informée de la date de consolidation de son état dès le 20 octobre 2017, date du rapport d’expertise et que pour autant aucune offre d’indemnisation définitive ne lui a été transmise.
Sur ce, en application de l’article L. 211-9 du code des assurances, l’assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d’un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime, lorsque la responsabilité, n’est pas contestée, et le dommage entièrement quantifié, une offre d’indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d’indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n’est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n’a pas été entièrement quantifié, l’assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.
Une offre d’indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximal de huit mois à compter de l’accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l’assureur n’a pas, dans les trois mois de l’accident, été informé de la consolidation de l’état de la victime et l’offre définitive d’indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l’assureur a été informé de cette consolidation.
A défaut d’offre dans les délais impartis, étant précisé que le délai applicable est celui qui est le plus favorable à la victime, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge, produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal, en vertu de l’article L.211-13 du même code, à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l’assureur.
Il convient de rappeler en premier lieu que l’offre d’indemnisation prévue par l’article L. 211-9 du code des assurances susvisé incombe à l’assureur du véhicule impliqué et non à son assuré, de sorte que c’est à tort que le tribunal a condamné M. [H] au paiement des intérêts au taux doublé.
Ceci étant rappelé, seul est discuté le respect par la société Pacifica de son obligation de formuler une offre d’indemnisation définitive dans le délai de cinq mois suivant la date à laquelle elle a été informée de la consolidation, obligation à laquelle elle ne pouvait se soustraire en se prévalant d’une convention entre assureurs qui n’est pas opposable aux victimes qui n’y sont pas parties.
En l’espèce, la société Pacifica ne conteste pas que la société Groupama, mandatée pour formuler une offre d’indemnisation en application d’une convention entre assureurs, a été informée de la date de consolidation dès le 20 octobre 2017.
Une offre d’indemnisation définitive devait ainsi être adressée à M. [P] au plus tard le 20 mars 2018.
La société Pacifica justifie que sa mandataire, la société Groupama, a adressé à M. [P] une offre d’indemnisation définitive par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 31 juillet 2018, après l’expiration du délai de cinq mois qui lui était imparti.
Cette offre d’indemnisation définitive dont il n’est pas allégué qu’elle était incomplète ou manifestement insuffisante, constitue le terme de la pénalité encourue par la société Pacifica et son montant, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, en constitue l’assiette.
Il convient ainsi de condamner la société Pacifica à payer à M. [P] Bekhti les intérêts au double du taux légal à compter du 21 mars 2018 et jusqu’au 31 juillet 2018, sur le montant de l’offre du 31 juillet 2018 avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées.
Sur les demandes annexes
Il n’y a pas lieu de déclarer le présent arrêt commun et opposable à la CPAM et à la société Pacifica qui sont en la cause.
Les dispositions du jugement relatives aux dépens doivent être confirmées et celles relatives aux frais irrépétibles infirmées.
L’équité commande d’allouer à M. [P] en application de l’article 700 du code de procédure civile une indemnité globale de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en premier instance et devant la cour.
La société Pacifica et M. [H] qui succombent partiellement dans leurs prétentions et qui sont tenus à indemnisation supporteront la charge des dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe,
Et dans les limites de l’appel,
– Infirme le jugement sur les postes de préjudice de M. [B] [P] liés à la perte de gains professionnels futurs et à l’incidence professionnelle ainsi qu’en ses dispositions relatives à la pénalité de doublement du taux de l’intérêt légal prévue à l’article L. 211-13 du code des assurances,
– Le confirme pour le surplus,
Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
– Condamne in solidum M. [V] [H] et la société Pacifica à payer à M. [B] [P] les sommes suivantes, provisions et sommes versées au titre de l’exécution provisoire non déduites, au titre des postes de préjudice ci-après :
– perte de gains professionnels futurs : 265 053,94 euros
– incidence professionnelle : 2 880 euros
– Condamne la société Pacifica à payer à M. [B] [P] les intérêts au double du taux légal à compter du 21 mars 2018 et jusqu’au 31 juillet 2018, sur le montant de l’offre du 31 juillet 2018 avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées,
– Condamne in solidum M. [V] [H] et la société Pacifica à payer à M. [B] [P] en application de l’article 700 du code de procédure civile la somme globale de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d’appel,
– Condamne in solidum M. [V] [H] et la société Pacifica aux dépens d’appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE