Télétravail : 29 juin 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 21/01856

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Télétravail : 29 juin 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 21/01856
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29 juin 2023
Cour d’appel d’Orléans
RG n°
21/01856

C O U R D ‘ A P P E L D ‘ O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE – A –

Section 1

PRUD’HOMMES

Exp +GROSSES le 29 JUIN 2023 à

Me Estelle GARNIER

la SCP LAVAL – FIRKOWSKI

FCG

ARRÊT du : 29 JUIN 2023

MINUTE N° : – 23

N° RG 21/01856 – N° Portalis DBVN-V-B7F-GMUV

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE BLOIS en date du 21 Juin 2021 – Section : ACTIVITÉS DIVERSES

APPELANT :

Monsieur [L] [D]

né le 03 Juillet 1989 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Catherine LESIMPLE-COUTELIER de la SELARL LESIMPLE-COUTELIER & PIRES, avocat au barreau de TOURS,

ayant pour avocat plaidant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d’ORLEANS

ET

INTIMÉE :

Association OGEC INSTITUTION PRIVEE [6] DE [Localité 4] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL – FIRKOWSKI, avocat au barreau d’ORLEANS

ayant pour avocat plaidant Me Amandine PEROCHON de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS,

Ordonnance de clôture : 5 avril 2023

Audience publique du 02 mai 2023 tenue par Mme Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller, et ce, en l’absence d’opposition des parties, assistée lors des débats de Mme Karine DUPONT, Greffier.

Après délibéré au cours duquel Mme Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller a rendu compte des débats à la Cour composée de :

Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre, président de la collégialité,

Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, conseiller

Puis le 29 Juin 2023, Monsieur Alexandre DAVID, président de Chambre, assisté de Mme Karine DUPONT, Greffier a rendu l’arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 19 août 2015, l’OGEC [6] a engagé M. [L] [D] en qualité de responsable de division, catégorie cadre, de la convention collective nationale des salariés des établissements privés du 7 juillet 2015.

Par courrier du 8 mars 2018, l’OGEC [6] a notifié à M. [L] [D] une dispense d’activité avec maintien de sa rémunération pour 4 mois au motif de son placement sous contrôle judiciaire et de l’interdiction qui lui était faite « d’exercer toute activité professionnelle au contact avec des mineurs, ainsi que de l’interdiction de se rendre dans son établissement scolaire ».

Par courrier du 13 juillet 2018, l’OGEC [6] a notifié à M. [L] [D] le maintien de sa dispense d’activité mais l’arrêt du versement de sa rémunération.

Par courrier du 23 janvier 2019, l’OGEC [6] a convoqué M. [L] [D] à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Par courrier du 14 février 2019, l’OGEC [6] a notifié à M. [L] [D] son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le 21 novembre 2019, M. [L] [D] a saisi le conseil de prud’hommes de Blois aux fins de contester son licenciement, le considérant comme abusif et afin de voir condamner l’OGEC [6] aux dépens et au paiement de diverses sommes.

L’OGEC [6] a demandé au conseil de prud’hommes de débouter M. [L] [D] de ses demandes et de le condamner aux dépens et au paiement de la somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 21 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Blois a rendu le jugement suivant auquel il est renvoyé pour plus ample exposé du litige:

Déboute M. [L] [D] de l’ensemble de ses demandes.

Condamne M. [L] [D] à payer la somme de 1000 € à l’OGEC [6] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [L] [D] aux dépens.

Par déclaration adressée par voie électronique au greffe de la cour du 6 juillet 2021, M. [L] [D] a relevé appel de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe le 26 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en application de l’article 455 du code de procédure civile, aux termes desquelles M. [L] [D] demande à la cour de:

Sans s’arrêter ni avoir égard aux moyens, fins et conclusions contraires,

‘ DÉCLARER recevable et bien-fondé Monsieur [L] [D] en son appel, ses demandes et y faire droit.

‘ INFIRMER le jugement prononcé par le Conseil de Prud’hommes de Blois en date du 21 juin 2021 en ce qu’il a débouté Monsieur [L] [D] de l’ensemble de ses demandes.

‘ INFIRMER le jugement prononcé par le Conseil de Prud’hommes de Blois en date du 21 juin 2021 en ce qu’il a condamné Monsieur [L] [D] à régler à l’OGEC INSTITUTION PRIVÉE [6] la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

STATUANT A NOUVEAU,

‘ DÉCLARER dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à l’encontre de Monsieur [L] [D],

‘ DÉCLARER que l’OGEC INSTITUTION PRIVÉE [6] a commis un manquement grave dans l’exécution du contrat de travail de Monsieur [L] [D],

‘ DÉCLARER que l’OGEC INSTITUTION PRIVÉE [6] est bien redevable des rappels de salaires et congés payés afférents à Monsieur [L] [D],

‘ DÉCLARER que l’OGEC INSTITUTION PRIVÉE [6] a violé l’obligation de garantie d’emploi prévu par la Convention Collective,

‘ CONDAMNER l’OGEC INSTITUTION PRIVÉE [6] à régler à Monsieur [L] [D], les sommes suivantes :

Dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse : 13 395,05 €

Dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail: 30 000 €

Indemnité compensatrice de préavis: 4 364,52 €

– Congés payés afférents: 436,45 €

– Rappel de salaire juillet 2018: 590,50 €

– Rappel de salaire août 2018: 1 164,82

– Rappel de salaire septembre 2018 à février 2019: 14 734,50 €

– Congés payés afférents: 1 473,45 €

– Article 700 du Code de Procédure Civile: 4 000 €

‘ DÉCLARER l’OGEC INSTITUTION PRIVÉE [6] irrecevable en son appel incident, en tous cas, mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions et l’en débouter.

‘ CONDAMNER l’OGEC INSTITUTION PRIVÉE [6] aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel, en ce compris les frais d’exécution et frais d’huissier.

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe le 19 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en application de l’article 455 du code de procédure civile, aux termes desquelles, l’OGEC [6] demande à la cour de:

de rejeter l’appel de Monsieur [D] et de confirmer le jugement entrepris par le Conseil de Prud’hommes de BLOIS en ce qu’il a :

Débouté Monsieur [D] en l’ensemble de ses demandes.

Et faisant droit à l’appel incident de l’OGEC de l’infirmer en ce qu’il a :

Débouté l’OGEC [6] de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Très subsidiairement, pour le cas ou par impossible la Cour retiendrait l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, voir limiter l’indemnité allouée à 3 mois de salaires bruts soit 8037,03 Euros et rejeter toutes demandes plus amples ou contraires.

En tout état de cause,

Débouter Monsieur [D] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamner Monsieur [D] à verser à l’OGEC [6] la somme de 4 500 € au titre des frais d’appel.

Condamner Monsieur [D] à verser à l’OGEC [6] la somme de

3 000 € au titre des frais de première instance sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamner Monsieur [D] aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le bien-fondé du licenciement

Il résulte de l’article L.1232-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Le motif inhérent à la personne du salarié doit reposer sur des faits objectifs, matériellement vérifiables et qui lui sont imputables.

L’article L.1235-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement du 14 février 2019, qui fixe les limites du litige, énonce : « (‘). Vous avez été placé le 2 mars 2018, sous contrôle judiciaire dans le cadre d’une instruction pénale, concernant des faits graves impliquant notamment des élèves de l’établissement. Cette mesure vous interdit, d’une part de recevoir, de rencontrer et d’entrer en relation de quelque façon que ce soit avec les victimes et les membres de leur famille, et d’autre part d’exercer toute activité professionnelle en contact habituel avec des mineurs, ainsi que l’interdiction de se rendre dans l’établissement scolaire Collège [6] de [Localité 4].

Par conséquent, cette mesure de contrôle judiciaire vous empêche donc d’exécuter votre contrat de travail, même pendant le temps du préavis.

Par courrier en date du 13 juillet 2018, puis du 22 janvier 2019, nous vous avons demandé les suites données à ce contrôle judiciaire. Nos courriers sont restés sans réponse de votre part. Vous ne nous avez informé d’aucune levée partielle de votre contrôle judiciaire, ce qui vous empêche toujours d’exécuter votre contrat de travail.

Aussi, si nous avons pu depuis votre mise sous contrôle judiciaire pallier à votre remplacement provisoire à votre poste de responsable de division, la solution mise en place temporairement ne peut plus perdurer.

Par conséquent, au regard de l’ensemble de ces éléments et dans la mesure où vous ne pouvez plus exécuter votre prestation de travail, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.

La date de première présentation de ce courrier marque le point de départ de votre préavis que vous ne pouvez pas exécuter compte tenu de votre interdiction de vous rendre dans nos locaux et d’exercer une activité professionnelle avec des mineurs. (‘). »

L’OGEC [6] soutient que le licenciement repose ainsi sur une cause réelle et sérieuse, le salarié s’étant trouvé dans l’impossibilité d’exécuter son contrat de travail en raison de la mesure de contrôle judiciaire prise à son encontre et qui perdurait à la date de notification du licenciement. Selon elle, elle n’a pas sanctionné la mise sous contrôle judiciaire mais ses conséquences.

M. [L] [D] fait valoir que le contrôle judiciaire est une mesure temporaire qui prend fin par décision du juge et que l’employeur ne pouvait pas procéder à son licenciement de ce seul fait. Il ajoute qu’il avait la possibilité d’exécuter son activité professionnelle par télétravail, quitte à réduire son volume horaire de travail.

M. [L] [D] exerçait les fonctions de responsable de division consistant à coordonner les différentes actions administratives et pédagogiques menées au sein d’une section mais également des fonctions d’enseignement.

M. [L] [D] a été placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de recevoir, de rencontrer et d’entrer en relation de quelque façon que ce soit avec les victimes et les membres de leur famille, exercer toute activité professionnelle au contact avec des mineurs, ainsi que l’interdiction de se rendre dans son établissement scolaire.

L’avis adressé le 12 mars 2018 au directeur d’établissement scolaire précise que « en raison de la nature des faits reprochés ou des circonstances de la commission, pour mettre fin ou prévenir un trouble à l’ordre public, ou pour assurer la sécurité des personnes ou des biens », l’employeur peut prendre « les mesures de nature à faire cesser ou suspendre l’exercice de l’activité de la personne concernée ».

Le placement d’un salarié sous contrôle judiciaire entraîne la suspension du contrat de travail (Soc., 31 mai 2012, pourvoi n° 10-16.810, Bull. 2012, V, n° 165), le salarié étant présumé innocent et l’obstacle mis à l’exécution de son contrat de travail ne lui étant pas imputable.

Le contrat de travail étant suspendu, la mesure de licenciement ne saurait être fondée sur une impossibilité d’exécution de la prestation de travail.

Il est exact que l’employeur et le salarié peuvent, à tout moment, convenir de recourir au télétravail par un accord. M. [L] [D] n’a jamais sollicité un tel accord qui n’a pas été formalisé. En outre, les activités telles que définies dans la fiche de poste signé par M. [L] [D] sont incompatibles avec un télétravail en permanence, interdiction ayant été faite au salarié de se rendre dans l’établissement scolaire. En effet, les fonctions du salarié impliquaient qu’il soit présent aussi bien pour les élèves, leurs familles que pour les membres de l’équipe éducative.

Cependant, le licenciement d’un salarié ne pouvant plus exercer son travail, au surplus en l’espèce de manière temporaire, n’est justifié que si son absence entraîne la nécessité pour l’employeur de procéder à son remplacement définitif par l’engagement d’un autre salarié.

L’OGEC [6] ne justifie d’aucun trouble dans l’organisation et le fonctionnement de l’établissement en raison de l’absence de M. [L] [D]. En effet, elle produit comme unique pièce un contrat de travail à durée déterminée à temps complet du 26 mars 2018 au 7 juillet 2018 conclu pour un motif tiré du « remplacement de M. [L] [D] dispensé de travail ». Il n’est versé aucun contrat relatif à l’engagement d’un salarié après le 7 juillet 2018 ou à compter de septembre 2018. Il n’est pas justifié de l’engagement d’un salarié postérieurement au licenciement prononcé le 14 février 2019.

Il est reproché au salarié dans la lettre de licenciement de n’avoir pas tenu informé l’employeur des suites de son placement sous contrôle judiciaire malgré les demandes réitérées en ce sens. Cependant, l’employeur ne s’est pas placé sur le terrain disciplinaire mais sur une cause objective de licenciement tirée de l’impossibilité d’exécuter le contrat de travail dans laquelle était placé le salarié.

Il y a lieu de relever que le tribunal correctionnel de Blois, le 1er décembre 2020, a relaxé M. [L] [D] pour les faits qualifiés de violence sans incapacité sur mineur de 15 ans par un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime à l’égard de quatre jeunes garçons et pour les faits qualifiés de harcèlement sexuel sur un mineur de 15 ans- propos ou comportements à connotation sexuelle imposés de façon répétée à l’égard d’une jeune fille, a déclaré M. [L] [D] coupable des faits qui lui sont reprochés de violence sans incapacité sur un mineur de 15 ans par un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime à l’égard de deux jeunes garçons, et l’a condamné à un emprisonnement délictuel de deux mois assortis du sursis total. Ce jugement n’a prononcé aucune interdiction d’exercer, aucune peine d’emprisonnement ferme, aucune mention au bulletin n°2 du casier judiciaire, aucune interdiction de contact avec des mineurs.

Par voie d’infirmation du jugement, il y a lieu de dire que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.

Si M. [L] [D] demande de dire que son employeur a violé l’obligation de garantie d’emploi prévue par la convention collective, il ne forme aucune demande à ce titre et n’avance aucun moyen de fait ou de droit à l’appui de cette prétention, dont il ne pourra qu’être débouté.

Sur les conséquences pécuniaires de licenciement

Le salarié ne peut prétendre au paiement d’une indemnité pour un préavis qu’il est dans l’impossibilité d’exécuter (Soc., 28 novembre 2018, pourvoi n° 17-13.199, publié).

M. [L] [D] qui se trouvait dans cette situation du fait du contrôle judiciaire est donc débouté de sa demande de paiement d’une indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents.

Les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du travail, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l’ancienneté du salarié et qui prévoient que, dans les cas de licenciements nuls, le barème ainsi institué n’est pas applicable, permettent raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi.

Le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l’employeur est également assuré par l’application, d’office par le juge, des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail.

Les parties s’accordent à considérer que M. [L] [D] peut prétendre à l’indemnité prévue pour un salarié ayant acquis une ancienneté de quatre années complètes au moment de la rupture et travaillant au service d’une personne morale employant habituellement au moins onze salariés. Le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est compris entre 3 et 5 mois de salaire.

Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont ainsi de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT (Soc., 11 mai 2022, pourvoi n° 21-14.490, FP-B+R).

Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, il y a lieu de condamner l’employeur à payer à M. [L] [D] la somme de 8100 euros brut à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande de rappel de salaire

M. [L] [D] soutient que l’employeur devait lui maintenir sa rémunération du 8 juillet 2018 jusqu’à la notification de son licenciement le 14 février 2019.

L’employeur réplique que la mise sous contrôle judiciaire du salarié avec interdiction de toute relation avec son employeur, l’exonère du versement du salaire.

Du fait de son placement sous contrôle judiciaire, le salarié ne pouvait plus travailler pour son employeur et le contrat de travail était suspendu (Soc., 31 mai 2012, pourvoi n° 10-16.810, Bull. 2012, V, n° 165). L’employeur n’était donc pas tenu de maintenir la rémunération.

Il y a lieu de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a débouté M. [L] [D] de sa demande de rappel de salaire.

Sur la demande de dommages-intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail

M. [L] [D] se plaint d’avoir été dispensé de toute activité professionnelle à compter du 8 mars 2018 jusqu’à son licenciement en février 2019. Il ajoute que l’employeur a fait valoir des faits de violences dont il serait l’auteur, en a informé ses collègues par courrier puis à l’occasion de réunions successives, sans qu’il puisse s’exprimer, ses collègues et les parents d’élèves. Il verse également l’attestation de son épouse selon laquelle il lui est redevable de 40’000 € celle-ci ayant seule financé les charges de la communauté. Il impute sa situation financière à l’inexécution fautive et déloyale du contrat par l’employeur dont il demande réparation.

L’employeur n’a fait que se soumettre à une décision pénale qui lui faisait obligation de veiller à ce que l’intéressé n’entre pas en contact avec les victimes et leur famille, exerce une activité professionnelle en contact avec les mineurs et se rende dans l’établissement scolaire.

Le contrat de travail étant suspendu, c’est à juste titre que l’employeur a cessé de maintenir la rémunération.

M. [L] [D] ne démontre pas que son employeur a diffusé des informations sur sa situation dont le contenu constituerait une faute lui ayant causé un préjudice.

L’employeur n’a commis aucune faute dans l’exécution du contrat de travail. M. [L] [D] est donc débouté de sa demande à ce titre.

Sur l’article L. 1235-4 du code du travail

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner le remboursement par l’OGEC [6] aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à M. [L] [D] du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite d’un mois d’indemnités de chômage.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dépens de première instance et d’appel sont à la charge de l’employeur, partie succombante. Il y a lieu de préciser que le sort des éventuels frais d’exécution forcée sera réglé dans le cadre des procédures civiles d’exécution mises en oeuvre.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné le salarié à verser à l’employeur la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge du salarié l’intégralité des sommes avancées par lui et non comprises dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel. L’employeur est débouté de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe;

Infirme le jugement déféré mais seulement en ce qu’il a débouté M. [L] [D] de ses demandes tendant à ce que son licenciement soit considéré comme sans cause réelle et sérieuse et à l’allocation de dommages-intérêts à ce titre et en ce qu’il l’a condamné à payer à l’OGEC [6] la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Dit que le licenciement de M. [L] [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne l’OGEC [6] à payer à M. [L] [D] la somme de 8100 euros brut à titre d’indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Ordonne le remboursement par l’OGEC [6] aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à M. [L] [D] du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite d’un mois d’indemnités de chômage ;

Condamne l’OGEC [6] à payer à M. [L] [D] la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et déboute l’employeur de sa demande à ce titre ;

Condamne l’OGEC [6] aux dépens de première instance et d’appel.

Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre et par le greffier

Karine DUPONT Alexandre DAVID

 


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