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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRÊT DU 01 JUILLET 2022
(n°111, 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 20/18670 – n° Portalis 35L7-V-B7E-CC2ZJ
Décision déférée à la Cour : jugement du 16 novembre 2020 – Tribunal de commerce de PARIS – 15ème chambre – RG n°2018016470
APPELANTES AU PRINCIPAL et INTIMEES INCIDENTES
S.A. QAPA, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 1]
[Localité 11]
Immatriculée au rcs de [Localité 11] sous le numéro 533 208 161
S.A.S.U. QAPA INTERIM, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 1]
[Localité 11]
Immatriculée au rcs de [Localité 11] sous le numéro 818 188 096
Représentées par Me Nicolas URBAN de l’AARPI ALMATIS, avocat au barreau de PARIS, toque P 560
INTIMEES AU PRINCIPAL et APPELANTES INCIDENTES
S.A.R.L. CONSEIL MANAGEMENT HOLDING, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 12]
[Localité 3]
Immatriculée au rcs de [Localité 5] sous le numéro 540 022 902
S.A.R.L. CONSEIL MANAGEMENT EMPLOI, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 4]
[Localité 2]
Immatriculée au rcs de [Localité 5] sous le numéro 484 692 058
S.A.R.L. CONSEIL MANAGEMENT SANTE, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 12]
[Localité 3]
Immatriculée au rcs de [Localité 5] sous le numéro 798 374 260
S.A.R.L. CONSEIL MANAGEMENT MOBILITE, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 12]
[Localité 3]
Immatriculée au rcs de [Localité 5] sous le numéro 528 758 014
Représentées par Me Charles BENATAR, avocat au barreau de PARIS
Assistées de Me Diane TRICOIRE plaidant pour la SELARL CASTAGNON, avocate au barreau de BORDEAUX, case 821
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mme Laurence LEHMANN a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
Mme Isabelle DOUILLET, Présidente, désignée pour compléter la Cour
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement contradictoire rendu le 16 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Paris,
Vu l’appel interjeté le 18 décembre 2020 par la société Qapa et la société Qapa Interim,
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 6 décembre 2021 par la société Qapa et la société Qapa Interim, appelantes et incidemment intimées,
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 7 septembre 2021 par les sociétés Conseil Management Holding, Conseil Management Emploi, Conseil Management Santé et Conseil Management Mobilité (les sociétés Transicia), intimées et appelantes incidente,
Vu l’ordonnance de clôture du 20 janvier 2022.
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
Les sociétés Conseil Management Emploi (CME), Conseil Management Santé (CMS) et Conseil Management Mobilité (CMM) exercent une activité d’agence, de placement et d’intérim dans le secteur tertiaire de l’industrie et de la santé. Elles sont établies dans la région bordelaise.
Elles utilisent à titre de nom commercial et d’enseigne le signe Transicia.
La société Conseil Management Holding (CMH) est la holding du Groupe Transicia.
La société Qapa est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris depuis le 27 juin 2011 avec notamment pour activité la création et l’exploitation d’un site internet.
La société Qapa intérim, société filiale de la société Qapa créée et inscrite au registre du commerce et des sociétés de Paris depuis le 2 février 2016, est une agence d’intérim, de placement et de mise à disposition temporaire de personnel, remplissant les obligations légales d’une telle activité, et exerçant son activité uniquement sous forme digitale, en ligne.
Les sociétés Qapa exposent que ses fondateurs ont créé un logiciel de traitement de données (ci-après dénommé «l’Outil de Matching») issu de bases de données relationnelles dans le domaine du recrutement, composé d’un ensemble complexe de programmes sous forme de codes sources et exécutables, qui, grâce à cette technique de matching et l’algorithme QAPA qu’ils ont créés, analyse une correspondance entre des personnes en recherche d’emploi avec des entreprises qui offrent des emplois et permet ainsi d’affiner les recherches respectives et de les mettre en relations.
Cet outil de matching fonctionne à travers le site Web, www.http://qapa.fr, et sur application mobile disponible sur les plateformes Ios et Android.
La société Qapa était donc, à l’origine, ce qui est communément appelé un site d’emploi ou «job board». La mise en ligne d’annonces tant par les sociétés souhaitant recruter que par les demandeurs d’emploi est gratuite.
Le modèle économique du service originel de mises en relation entre les candidats et les recruteurs pour des CDD/CDI s’articule autour de deux axes :
– des revenus publicitaires avec la diffusion de bannières publicitaires sur les pages du site,
– des services payants particuliers pour les entreprises comme par exemple des annonces premium illimitées, des intégrations de contenus plus riches, la mise en avant des annonces et leur rafraichissement régulier.
En 2016, la société Qapa a modifié ce modèle économique pour s’orienter exclusivement vers le marché de l’intérim en créant la société Qapa Interim, agence d’intérim 100% en ligne, devenant propriétaire et exploitante du site «qapa.fr», alors que la société Qapa devenait une holding.
Les articles de presse et communiqués internet produits au débat montrent qu’une large publicité a été faite de ces modifications et de la création de Qapa intérim.
La société Conseil Management Holding indique avoir durant les années 2015, 2016 et 2017 investi des sommes importantes, soit un montant total de 91.875 euros dans la constitution de sa base de données d’offres d’emploi et de candidats.
Elles allèguent qu’à compter de la création de l’agence d’intérim Qapa intérim en 2016, devenue dès lors concurrente à leur activité, les sociétés Qapa et Qapa intérim ont détourné au profit de cette dernière les annonces des recruteurs déposées sur le site internet.
Par courrier de mise en demeure de leur conseil du 1er décembre 2017 puis du 3 janvier 2018, elles reprochaient aux sociétés Qapa des faits de contrefaçon de leur marque TRANSICIA sur le fondement des dispositions du code de la propriété intellectuelle ainsi que des faits de concurrence déloyale, de pratiques commerciales trompeuses et de parasitisme.
En réponse, la société Qapa intérim, par courrier du 12 février 2017, précisait avoir constaté qu’une personne d’une société Transicia était inscrite sur le site et avait ainsi pu avoir accès gratuitement aux services du site pour déposer des offres d’emploi et avoir accès à la Cvthèque Qapa. Elle ajoutait que pour satisfaire la demande des sociétés Transicia elle supprimait de son site toutes les annonces liées à Transicia.
Par acte en date du 14 mars 2018, les sociétés Transicia faisaient assigner les sociétés Qapa devant le tribunal de commerce de Paris en concurrence déloyale et parasitisme.
Le jugement du 16 novembre 2020, dont appel, au bénéfice de l’exécution provisoire, a :
– dit que les sociétés Qapa se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale par confusion,
– dit que les sociétés Qapa ne se sont pas rendues coupables d’actes de concurrence parasitaire par détournement d’annonces et de candidatures,
– déboute les sociétés Transicia de leurs demandes de dommages-intérêts pour agissements de concurrence déloyale, et pour agissements de concurrence parasitaire,
– déboute les sociétés Transicia de leurs demandes d’interdiction d’imiter, d’utiliser ou de reproduire les dénominations sociales des sociétés,
– déboute les sociétés Transicia de leur demande de publication du jugement,
– condamne solidairement les sociétés Qapa et Qapa Interim à payer aux sociétés Conseil Management Holding, Conseil Management Emploi, Conseil Management Santé et Conseil Management Mobilité, la somme de 5.000 euros chacune à titre de dommages et intérêts, dit que cette somme porte intérêt au taux légal à de la date de la signification du présent jugement avec anatocisme et déboute les sociétés Transicia du surplus de leur demande ;
– déboute les sociétés Qapa et Qapa Interim de leur demande reconventionnelle relative au paiement d’une amende civile,
– condamne solidairement les sociétés Qapa et Qapa Interim à payer aux demanderesses la somme globale de 10.000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile,
– condamne in solidum les sociétés Qapa et Qapa Interim aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 167,30 euros dont 27,67 euros de TVA,
– déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
– ordonne l’exécution provisoire.
Il est à préciser que 7 autres procédures ont été diligentées par des groupes de sociétés d’intérim à l’encontre des sociétés Qapa et Qapa intérim.
Six jugements, tous rendus le 28 septembre 2020, ont débouté les sociétés d’intérim demanderesses de leur demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme, un seul a fait l’objet d’un appel et a été confirmé par une autre chambre de la cour de céans.
Un autre jugement a été rendu le 6 juillet 2020 faisant, comme dans la présente procédure, partiellement droit aux prétentions au titre de la concurrence déloyale sur le seul fondement de la confusion.
Les sociétés Transicia demandent à la cour de juger que les sociétés Qapa ont commis à leur préjudice des actes de concurrence déloyale par usurpation de dénomination sociale créant ainsi une confusion et par détournement de clientèle, ainsi que des actes parasitaires.
Elles sollicitent la confirmation du jugement en ce qu’il a dit que les sociétés Qapa se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale par confusion et en ses condamnations prononcées au titre des frais irrépétibles et des de’pens de l’instance.
Elles demandent l’infirmation du jugement pour le surplus et sollicitent de la cour :
– de juger que les sociétés Qapa se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme à l’encontre des sociétés du groupe Transicia,
– la condamnation des sociétés Qapa a` payer solidairement la somme de 26.903,72 euros en réparation de leur préjudice matériel et 30.000 euros pour le préjudice moral à chacune des sociétés Conseil Management Emploi, Conseil Management Santé et Conseil Management Mobilité,
– la condamnation des sociétés Qapa à payer solidairement la somme totale de 151.996 euros à la société Conseil Management Holding,
– la communication sous astreinte des/de la copie de l’ensemble des candidatures ayant répondu aux 44 offres d’emploi présentées sur les 23 annonces attribuées à Transicia et constatées entre le mois de juillet et le mois de novembre 2017 sur le site qapa.fr et la cessation et l’interdiction de toute reproduction des annonces et du nom commercial Transicia sur le site qapa.fr ou sur tout autre support,
– des mesures de publicité de l’arrêt,
– leur condamnation solidaire à leur payer la somme de 18.000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile et aux dépens en ce compris les frais de constats d’huissier de justice des 11 juillet, 12 juillet, 16 novembre et 27 novembre 2017.
La cour rappelle que la demande en concurrence déloyale et parasitaire présente un fondement délictuel et qu’il incombe en conséquence aux sociétés Transicia de rapporter la preuve d’un agissement fautif des sociétés Qapa commis à leur préjudice.
Les sociétés Transicia produisent quatre procès-verbaux établis par huissier de justice les 11 juillet, 12 juillet puis les 16 novembre et 27 novembre 2017 sur le site internet qapa.fr.
Le constat établi le 11 juillet 2017 a montré la présence de 22 annonces Transicia sur le site. Lors de ce constat, l’huissier de justice a sélectionné une offre Transicia présente sur le site, a rempli un formulaire d’inscription comme s’il était un potentiel candidat, [Y] [T]. Une première tentative l’a conduit à un message «envoyer ma candidature sur le site du recruteur» puis «terminer ma candidature sur le site du recruteur» qui s’avère non fonctionnel. Dans une seconde tentative, le candidat reçoit une réponse lui indiquant : «Vous avez postulé à une mission Qapa Intérim. Nous aurons besoin d’informations complémentaires concernant ces missions. Découvrez les dernières offres et missions pour vous». Il procède ensuite à une inscription cette fois en qualité de recruteur, l’Ehpad la [10] correspondant au profil de [Y] [T].
Lors du second constat du 12 juillet 2017, l’huissier de justice constate que l’Ehpad la [10] a bien été informée du profil de [Y] [T] et termine ses opérations de constat.
Le troisième constat du 16 novembre 2017 permet de constater l’existence d’une annonce Transicia sur le site Qapa et que le même message «Vous avez postulé à une mission Qapa Intérim. Nous aurons besoin d’informations complémentaires concernant ces missions. Découvrez les dernières offres et missions pour vous» constaté lors du premier constat apparaît lorsqu’un candidat postule à une annonce.
Le quatrième constat du 27 novembre 2017 permet de préciser que si la société recruteuse décide d’embaucher le candidat, elle peut soit utiliser les services de Qapa Interim et payer 15% sur salaires, soit procéder elle-même directement à l’embauche et s’acquitter d’une somme forfaitaire de 3.000 euros.
Les sociétés Qapa versent quant à elles au débat trois procès-verbaux établis par huissier de justice le 3 septembre 2018 portant pour le premier sur l’inscription d’un recruteur et le fonctionnement de la Cvthèque, pour le second sur l’inscription d’un candidat et pour le troisième sur la mise en relation entre le recruteur et le candidat.
Elles produisent également un quatrième constat, en date du 9 juin 2018, justifiant de l’inscription des sociétés du groupe Transicia sur le site Qapa.fr de la création de quatre comptes recruteurs «[Courriel 9]» en février 2017, «[Courriel 8] » en janvier 2012 puis actualisé en janvier 2016 et «[Courriel 6]» en août 2011 puis actualisé en janvier 2016, et «[Courriel 7]» en février 2016. Ces comptes sont mentionnés comme actifs.
Les sociétés du groupe Transicia fondent essentiellement leurs reproches et demandes formulées à l’encontre des sociétés Qapa sur le postulat qu’elles ne seraient pas à l’origine des annonces trouvées sous leur dénomination Transicia sur le site Qapa et que celles-ci auraient été dupliquées et captées depuis d’autres sites par les sociétés Qapa sans accord des sociétés Transicia.
Pour autant la cour constate à la lecture attentive des pièces du débat et notamment des constats d’huissier produits par les sociétés Transicia, comme l’avaient justement retenu les premiers juges, qu’une telle preuve n’est pas rapportée.
Les sociétés Transicia reprochent au jugement d’avoir opéré un renversement de la charge de la preuve en leur demandant de prouver un fait négatif, à savoir qu’elles n’ont pas déposé des annonces litigieuses sur le site Qapa.
Or comme précédemment rappelé, il appartient bien aux sociétés Transicia de supporter la charge de la preuve des agissements fautifs des sociétés Qapa commis à leur préjudice dont elles demandent réparation et dès lors, c’est sans inversion de la charge de la preuve qu’il leur est demandé de justifier de la captation frauduleuse alléguée.
Sur l’appel principal relatif aux condamnations liées à des actes de concurrence déloyale par utilisation de la dénomination sociale Transicia et confusion
Le jugement entrepris a retenu, par des motifs que la cour adopte, qu’il n’était pas démontré que les sociétés Qapa soient à l’origine de l’usurpation de la dénomination sociale Transicia puisque, comme ci-dessus rappelé, il n’est pas établi qu’elles sont à l’origine de la présence sur son site des annonces Transicia litigieuses.
Les premiers juges ont en revanche retenu une concurrence déloyale par confusion du fait de la réception ci-dessus décrite d’un message par l’internaute répondant à une annonce sur le site Qapa.fr, même s’agissant d’une annonce postée par une société Transicia, que son «inscription sur Qapa est validée» et qu’il a «postulé à une mission Qapa Intérim».
Comme ci-dessus précisé le message reçu par le candidat tel que constaté par l’huissier de justice mandaté par les sociétés Transicia est rédigé «Vous avez postulé à une mission Qapa Intérim. Nous aurons besoin d’informations complémentaires concernant ces missions. Découvrez les dernière offres et missions pour vous».
La cour rappelle qu’il incombe aux sociétés Transicia de rapporter la preuve d’un agissement fautif des sociétés Qapa commis à son préjudice par la création d’un risque de confusion.
Or s’il apparaît que ce message est peu explicite, il n’est pas suffisamment justifié qu’il aurait volontairement été conçu pour créer une confusion entre les sociétés Qapa et les sociétés Transicia, ni qu’une telle confusion soit avérée, ni encore qu’elle aurait causé un préjudice à l’une ou l’autre des sociétés intimées.
En effet, en répondant à une annonce trouvée sur le site qapa.fr, dont il n’est pas justifié qu’elle n’aurait pas été déposée par une des sociétés Transicia, il est légitime que l’internaute reçoive un message d’annonce mentionnant son inscription sur le site de Qapa.
Si le second message peut laisser croire qu’il a «postulé à une mission Qapa Intérim» et non à une proposition Transicia est imprécis, voir erroné, alors qu’il a répondu, sur le site de Qapa à une mission proposée par Transicia, il n’est pas justifié que l’internaute se méprenne sur le fait qu’il a répondu à Transicia sur le site de Qapa, ni que cela ait pour objet ou effet un quelconque détournement au préjudice de Transicia.
Dès lors le jugement est infirmé en ce qu’il a déclaré les sociétés Qapa coupables d’actes de concurrence déloyale par confusion et les a condamnés solidairement de ce chef.
Sur l’appel incident relatif au parasitisme et à la désorganisation illicite allégués par les sociétés Transicia
Le jugement entrepris n’a en revanche pas fait droit aux reproches de parasitisme fondés sur un détournement des annonces et des candidatures et de désorganisation et discrédit des sociétés Qapa au préjudice des sociétés du groupe Transicia.
Le parasitisme est un comportement fautif d’un opérateur économique consistant à tirer profit d’une valeur économique d’autrui lui procurant un avantage concurrentiel injustifié, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements, en se plaçant dans son sillage et en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
Or les sociétés Transicia ne justifient d’aucun savoir-faire ou travail intellectuel spécifique ni même d’investissements dans le fait de passer des annonces sur le site Qapa.fr.
Elles allèguent seulement que leurs annonces et les postulants répondant à leurs annonces sur le site Qapa auraient été détournés.
Sur le détournement des annonces
Comme ci-dessus rappelé, il n’est pas démontré que les sociétés Qapa sont à l’origine de la présence d’annonces Transicia sur son site, et ce d’autant qu’il n’est pas contesté que quatre comptes Transicia ont bien été ouverts et étaient actifs.
Sur le détournement de candidatures
A titre liminaire, la cour observe que les sociétés Transicia qui allèguent un détournement de candidature ne précisent nullement quels candidats auraient été détournés. Il est également observé que les candidats qui se seraient inscrits sur le site Qapa, même si sur ce site ils répondent à des annonces Transicia, ne peuvent être considérés comme des clients de la société Transicia.
Seules les sociétés qui contractent avec une agence d’intérim pour qu’il leur soit trouvé des postulants aux emplois qu’ils recherchent ou les salariés qui ont effectivement contracté avec l’agence d’intérim peuvent être considérés comme clients’de celle-ci.
De plus, et comme retenu par les premiers juges, les sociétés ne justifient d’aucun client, ou même candidat qui aurait été effectivement détourné et le seul fait allégué de la réception par le candidat s’inscrivant via le site internet Qapa qu’il serait «inscrit» et aurait «postulé à une mission Qapa Intérim» ne justifie pas d’un tel détournement.
Les éléments versés au débat montrent que si les procédures de contact sont menées à terme sur le site qapa.fr, elles permettent une mise en contact avec le postulant.
Ainsi le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté les sociétés Transicia de leurs demandes fondées sur des actes de concurrence déloyale parasitaires.
La désorganisation illicite alléguée par les sociétés Transicia qui serait imputable aux sociétés Qapa n’est pas non plus explicitée, ni démontrée par les éléments au débat.
Le jugement qui a dit que les sociétés Qapa ne se sont pas rendues coupables d’actes de concurrence parasitaire par détournement d’annonces et de candidatures sera confirmé.
Sur les autres demandes
Les sociétés Transicia déboutées de leurs demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire seront aussi déboutées de leurs demandes indemnitaires et d’interdiction et de publication.
Le sens de l’arrêt conduit à infirmer les dispositions du jugement relatives à la condamnation des sociétés Qapa aux dépens de l’instance et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés Transicia seront condamnées aux dépens de première instance et d’appel et, en équité, à payer à chacune des sociétés Qapa et Qapa intérim la somme de 10.000 euros, soit 20.000 euros au total, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il n’a pas prononcé d’amende civile à l’encontre de quiconque.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a dit que les sociétés Qapa ne se sont pas rendues coupables d’actes de concurrence parasitaire par détournement d’annonces et de candidatures et dit n’y avoir lieu à amende civile,
Y ajoutant et y substituant,
– dit que les sociétés Qapa ne se sont pas rendues coupables d’actes de concurrence déloyale par confusion et déboute les sociétés Conseil Management Holding, Conseil Management Emploi, Conseil Management Santé et Conseil Management Mobilité de l’ensemble de leurs demandes,
– condamne in solidum les sociétés Conseil Management Holding, Conseil Management Emploi, Conseil Management Santé et Conseil Management Mobilité à payer à chacune des sociétés Qapa la somme de 10.000 euros, soit 20.000 euros au total, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamne les sociétés Conseil Management Holding, Conseil Management Emploi, Conseil Management Santé et Conseil Management Mobilité aux dépens de première instance et d’appel.
La Greffière La Conseillère,
Faisant Fonction de Présidente