Convention collective Syntec : 24 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/01226

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Convention collective Syntec : 24 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/01226

24 mai 2023
Cour d’appel de Lyon
RG
20/01226

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 20/01226 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M3WH

Société ESI GROUP

C/

[E]

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Lyon

du 30 Janvier 2020

RG : 18/02456

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 24 MAI 2023

APPELANTE :

Société ESI GROUP

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Jonathan KOCHEL, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Emmanuel CHRETIENNOT, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

[N] [E]

né le 03 Mai 1978 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Charlotte PICHELINGAT, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Mars 2023

Présidée par Anne BRUNNER, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Joëlle DOAT, présidente

– Nathalie ROCCI, conseiller

– Anne BRUNNER, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 24 Mai 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant contrat de travail à durée indéterminée, M. [E] a été embauché à compter du 15 mars 2012, en qualité de Technicien Développeur R&D en informatique, statut ETAM, position 1.1, coefficient 95 de la convention SYNTEC, par la société PICVIZ.

Par avenant du 16 juillet 2012, M. [E] a été promu ingénieur-développeur R&D en informatique, statut cadre position 1.2, coefficient 100.

A la suite d’un rachat de la société PICVIZ, le contrat de travail de M. [E] a été transféré à compter du 31 mars 2015 à la société ESI Group, entreprise spécialisée dans les logiciels et services de prototypage virtuel.

M. [V], anciennement co-fondateur de la société PICVIZ, est devenu le supérieur hiérarchique de M. [E].

En dernier lieu, M. [E] occupait les fonctions d’Ingénieur Développeur R&D, statut cadre, position 2.1, coefficient 115, moyennant une rémunération brute mensuelle moyenne de 3 502,09 euros.

M. [E] a été placé en arrêt de travail du 15 février au 27 février 2017.

Du 3 au 19 mai 2017, puis à compter du 9 juin 2017, M. [E] a été à nouveau placé en arrêt maladie.

Par courrier en date du 26 juin 2017, M. [E] a été convoqué par son employeur à un entretien en vue de son éventuel licenciement, fixé le 5 juillet 2017. Le salarié, en arrêt maladie, ne s’y est pas rendu.

Par courrier recommandé en date du 11 juillet 2017, M. [E] a été licencié en ces termes :

« (‘) Nous vous rappelons que vous avez été engagé par la société PICVIZ LABS en qualité de Technicien Développeur R&D en Informatique le 22 mars 2012, puis avez intégré lors de l’acquisition de cette société, ESI GROUP sur le poste d’Ingénieur Développeur, statut Cadre à compter du 31 mars 2015. Vous reportez directement à Monsieur [B] [V].

Dans le cadre de vos fonctions et de votre ancienneté sur le poste, vous aviez notamment pour mission de développer des composants Qt de l’application principale, des librairies dans les domaines de la visualisation, du calcul scientifique, etc. Vous devez également assurer la documentation de vos travaux et en communiquer les résultats à vos collègues et responsable. Vous assurez une vieille technologique et assurez la maintenance des applications, corrections des bogues en lien avec votre hiérarchie. Enfin, et depuis le 15 mars 2013, vous avez la responsabilité de l’architecture « bas niveau » du code développé par les équipes de recherche et de développement.

Il s’avère que depuis plusieurs mois, nous avons fait le constat de réelles insuffisances de votre part au titre des fonctions que vous occupez

Les motifs principaux pour lesquels nous sommes contraints de prendre cette décision résident, en effet, dans le constat opéré par votre manager, et établissant que, malgré des alertes réitérées, vous ne respectez pas les directives de votre hiérarchie et, qu’en outre, vous avez été dans l’incapacité d’exécuter vos tâches d’une manière conforme.

Si votre supérieur vous avait déjà, depuis quelques mois, alerté sur la nécessité d’exécuter vos fonctions dans le cadre de ses directives afin de parvenir à une réalisation conforme, eu égard à votre niveau, des tâches qui vous étaient confiées, il s’est avéré qu’au cours de ces dernières semaines, ces difficultés se sont amplifiées.

Ainsi, et sans que ces exemples soient exhaustifs, force a été, pour votre manager, de constater une incapacité de votre part, à réaliser les tâches qui vous avaient été confiées, marquées, en sus, par une claire absence de prise en compte par vos soins des directives qui vous étaient données, ainsi :

Lors d’un retour de votre part, laissant supposer que vous vous heurtiez à des difficultés, votre supérieur a dû vous rappeler, le 16 mars 2017, qu’il convenait simplement que vous appliquiez une méthodologie rationnelle (« il faut seulement mettre en ‘uvre le point 2a ‘ ensuite on passera au point 3 ‘ ») ;

Suite à un retour de votre part, votre supérieur hiérarchique se devait de constater, le 24 mars 2017 :

Non seulement, que vous n’aviez nullement été efficace s’agissant d’une tâche qui vous avait été confiée (« je crois qu’il faut pouvoir reconnaitre ensemble que tu n’as pas été très efficace sur la question de l’ergonomie du Widget « Unique Values », si l’on prend pour point de mesure le temps déjà consacré à ce Widget et que nous n’avons pas fini, loin de là ») ce qui le conduisait à s’interroger sur le problème que cela induisait en termes de réalisation du projet (« il me faut donc m’assurer que nous n’allons pas engloutir un grand nombre de jours sur les sujets qui devraient normalement être traités rapidement »), concluant ce point en vous demandant de vous interroger sur la nécessité « de trouver une vraie efficacité sur les sujets dits « Qt » »’

Mais surtout, que vous ne respectiez ni le fonctionnement opérationnel qu’il avait institué, ce qui, par évidence, induisait des conséquences contreproductives (« ta tendance naturelle à proposer en tout premier des solutions sophistiquées, sans forcément en débattre avec moi, alors que des approches simples sont possibles (et parfois bien meilleures). Le point problématique ici est que tu engages du temps « sur du compliqué » sans me demander mon avis »), ni ne respectiez ses consignes techniques nécessaires à la bonne réalisation des projets, notamment en termes de communication et de partage commun (absence de commentaires et d’explication de la logique des codes), rendant complexe et quasi impossible un contrôle technique efficient et rapide ‘

Par mail du 31 mars 2017, votre supérieur se devait à nouveau de constater que, malgré son investissement à votre égard, et que vous avez dûment reconnu, vous continuiez à rencontrer des difficultés sur le sujet Qt et continuiez à privilégier des options complexes sans nécessité (« comme tu as pu le constater, je me suis beaucoup investi à tes côtés pour arriver à avancer sur ces sujets tout en gardant une approche qui nous pousse vers une simplification du code, et pas une augmentation de la complexité des rustines. Les difficultés que tu rencontres avec le code Qt et la logique spécifique de Qt font pour moi un sujet qu’il est important de traiter ‘ dans le cas contraire, cela serait très pénalisant pour l’équipe ‘) et notait, le même jour, qu’à nouveau, vous n’aviez pas procédé aux diligences nécessaires pour qu’il puisse avoir accès à vos réalisations en cours’ (« je ne vois pas le code et les modifications dans le merge en cours. C’est normal ‘ »).

De même, le 5 avril 2017, après que votre supérieur vous ait relancé sur une tâche qu’il vous avait confiée, celui-ci, au vu de votre réponse, a dû, à nouveau, vous rappeler, les consignes que vous n’aviez manifestement pas appliquées (« comme j’ai pu te le dire à de multiples reprises, il faut me dire ce que tu comptes faire avant de le faire et non lorsque ton travail est en cours ou que tu bloques avant la prochaine étape ‘ Si tu ne dis pas les choses avant, on perd du temps. Il faut donc me suivre et, pour cela, revenir vers moi après chaque fin d’étape. Ici, la première étape était de te familiariser avec le principe de pagination introduit dans le développement avec [K] »).

De même et courant avril, votre manager se devait à nouveau de constater :

Que votre retour sur une tâche qui vous avait été confiée, non seulement démontrait que vous ne l’aviez pas bien appréhendée, nécessitant de la part de votre supérieur une « nouvelle explication » (« je vais réexpliquer ce que je t’avais expliqué au tableau ») ;

Mais, qu’en outre, vous aviez, à nouveau, omis de respecter les consignes s’agissant de la communication de votre travail, notamment en omettant de transmettre les codes permettant à votre manager d’y avoir accès et donc de pouvoir procéder à un contrôle (et/ou analyse) efficient(e).

Ainsi, non seulement votre manager se devait de constater que vos commentaires n’étaient nullement au niveau attendu eu égard à vos fonctions et à la technicité de celles-ci (commentaires vagues et imprécis eu égard à l’objet de la tâche : « ce n’est pas le niveau de communication et de visibilité que je peux être en droit d’attendre ‘ »), mais qu’en outre, il ne pouvait procéder à une quelconque analyse du fait que vous n’aviez pas, à nouveau, transmis votre code pour permettre à celui-ci d’avoir accès à vos réalisations (« en l’absence d’accès à ton code ‘il m’est impossible de réagir à ton mail qui reste assez vague pour moi »).

En conséquence, Monsieur [V] a dû, à nouveau, par mail du 14 avril 2017, vous rappeler à l’ordre s’agissant de cette obligation en termes de communication et de partage, par ailleurs, expressément visée à vos obligations contractuelles et vous rappeler les conséquences préjudiciables d’une telle carence sur l’avancement des projets.

Par mail du 19 avril 2017, vous avez reconnu que vos carences tant s’agissant du non-respect de ses consignes quant à l’absence de la transmission du code que s’agissant du niveau insuffisant de vos commentaires ‘

Par ailleurs, et toujours au cours du mois d’avril 2017 et sur divers sujets, votre manager a dû, à nouveau, s’étonner de difficultés que vous sembliez rencontrer et a dû, à nouveau, constater qu’en substance, il se trouvait à effectuer des tâches qui étaient exactement celles qu’il sollicitait que vous réalisiez (notamment, proposition d’un vocabulaire technique).

A ces constats (absence de respect des consignes / exécution non conforme de vos tâches), votre supérieur a également dû constater une carence manifeste dans le cadre de vos présentations ainsi qu’il vous l’a clairement rappelé par mail du 16 mars 2017 (« c’était confus et sans rapport ‘ et les questions de [D], de [M] et de moi ont souligné le fait que plusieurs points importants n’avaient pas été compris ‘ »).

Ainsi et au vu de l’ensemble de ces constats réitérés malgré des alertes claires, votre manager s’est trouvé contraint, à vous adresser, le 2 mai 2017, un mail particulièrement étayé pointant l’ensemble des difficultés rencontrées à savoir :

Une qualité de travail insuffisante (votre manager récapitulant, en outre, en ce mail et de manière précise et détaillée, l’ensemble de vos carences s’agissant d’une tâche alors en cours : « encore une fois, je vais reprendre avec toi l’ensemble des éléments qui ont été dessinés dans mon bureau et remettre les choses dans l’axe ‘ » et concluant l’ensemble de ces constats techniques de la façon suivante : « si j’ai un peu de temps cette semaine, je produirai d’autres illustrations pour stabiliser ce projet et accélérer la production du code. Mais, tu le sais, ce n’est pas normal et c’est toi qui devrait produire ces illustrations et rendre claire ce qui a été exposé au tableau et dont nous avions convenu » ;

Une totale incapacité à respecter les consignes et directives qui vous étaient données démontrant votre choix délibéré d’opter pour un mode de fonctionnement « strictement personnel » et ce, malgré les difficultés que celui-ci induisant dans la réalisation de vos tâches et qui auraient pu précisément être évitées par le simple respect des directives de votre supérieur au titre de la conduite des projets (non-respect des directives en termes, notamment, de partage, d’échanges préalables, etc.).

Ainsi, et par ce mail, votre manager se devait de faire constat que, malgré ses multiples alertes vous rappelant ce qu’il attendait de votre part et malgré son clair investissement que vous avez dûment reconnu, vous n’avez nullement tenu compte de celles-ci, ni pour améliorer la qualité technique de vos réalisations ni dans la prise en considération des directives et consignes que celui-ci vous a clairement données, et ce pour, précisément, vous permettre d »uvrer de manière opérante et, ainsi, éviter les multiples retards et autres pertes de temps induits par votre mode de fonctionnement, sans compter le temps supplémentaire que votre manager a dû vous consacrer pour remédier à vos erreurs et/ou errements (nécessité de multiplier les explications, de remettre vos interventions dans le cadre de la bonne conduite d’un projet du fait d’options prises par vos soins sans concertation préalable, quand il n’est pas tout simplement s’agit pour lui de les réaliser en vos lieux et place).

Force est donc de constater que malgré les nombreuses alertes de votre hiérarchie, vous n’avez pas apporté les changements attendus, la qualité insuffisante de votre travail et votre refus d’appliquer les directives malgré vos manifestes difficultés à réaliser les tâches confiées ne pouvant, eu égard aux conséquences induites, être acceptables eu égard à votre niveau de fonctions et à votre séniorité. Nous sommes donc contraints, eu égard à ces constats, de procéder à votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. (‘) ».

Le salarié a été dispensé d’effectuer son préavis de 3 mois qui lui a été payé, et son licenciement a pris effet le 18 octobre 2017.

Par requête en date du 6 août 2018, M. [E] a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon en lui demandant de dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la société ESI Group à lui verser des dommages et intérêts à titre.

Par jugement en date du 30 janvier 2020, le conseil de prud’hommes a :

– prononcé la requalification du licenciement de M. [N] [E] en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– fixé le salaire mensuel brut moyen de M. [N] [E] à 3 502,09 euros,

– condamné la SA ESI Group à payer à M. [E] la somme suivante :

21 012,54 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1 700 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– dit et jugé qu’il n’y a lieu à exécution provisoire autre que celle de droit,

– condamné la SA ESI Group aux entiers dépens de l’instance.

La société ESI Group a interjeté appel de ce jugement le 14 février 2020.

Par conclusions notifiées le 12 mai 2020, elle demande à la cour :

– de réformer en son intégralité le jugement et de débouter M. [N] [E] de l’intégralité de ses demandes ;

– de condamner M. [N] [E] à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées le 27 juillet 2020, M. [E] demande à la cour :

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné la société ESI Group à lui payer la somme de 21 012,54 euros à titre de dommages et intérêts, l’a condamnée aux entiers dépens de l’instance et a dit que les sommes prononcées seront productives d’intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

– de faire droit à son appel incident et d’infirmer le jugement quant au montant de la somme allouée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, et de condamner la société ESI Group à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 février 2023.

SUR CE,

Sur le licenciement pour insuffisance professionnelle :

La société ESI Group fait valoir que M. [E] a été licencié en raison d’une incapacité à réaliser les travaux qui lui étaient confiés et à respecter les directives hiérarchiques, malgré les multiples remarques et alertes de son supérieur hiérarchique sur plusieurs mois.

Elle soutient que ces insuffisances et carences sont attestées par l’ensemble des mails produits aux débats et visés dans la lettre de licenciement ; que M. [E] ne procédait pas à la communication quotidienne de ses travaux en cours sur la base commune accessible à tous et à leur manager ; qu’il se refusait à échanger, déterminait seul des options techniques et ne revenait sur celles-ci que lorsqu’elles aboutissaient à des impasses.

Elle souligne que les faits reprochés ne sont pas prescrits, le dernier mail de reproches datant du 2 mai 2017, pour une procédure engagée moins de deux mois après ce dernier « constat », soit le 26 juin 2017.

Elle estime que M. [V] avait une attitude professionnelle, courtoise et « aidante » à l’égard de M. [E], et que ce dernier ne rapporte pas la preuve d’un radical changement à compter de février 2017 ou des propos qu’il impute à son supérieur hiérarchique,

M. [E] répond qu’il a été licencié alors qu’il n’avait bénéficié d’aucun entretien annuel d’évaluation au cours de la relation contractuelle, ni fait l’objet de sanction disciplinaire.

Il fait valoir que la lettre de son licenciement s’appuie sur un fait datant du 5 avril 2017, lequel était donc prescrit lors de sa convocation à un entretien préalable datée du 26 juin 2017, Il ajoute qu’il ne peut lui être reproché de n’avoir pas respecté les consignes de sa hiérarchie alors qu’aucune organisation de travail et d’équipe n’avait été fixée depuis le rachat par la société ESI Group ; que ses fonctions et responsabilités n’ont pas été définies de façon précise par la société ESI Group.

Il affirme avoir toujours transmis son travail sur la base accessible à l’ensemble de ses collaborateurs, que sa prétendue insuffisance est un motif fallacieux, M. [V] l’ayant incité à quitter la société à compter de février 2017.

Il ajoute que la concentration de 16 mails de reproches en une période de 2 mois n’était pas de nature à justifier le bien-fondé de sa prétendue insuffisance professionnelle.

***

Pour constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, l’insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Si la preuve est partagée en matière de licenciement pour cause réelle et sérieuse, il incombe à l’employeur d’apporter au juge des éléments objectifs à l’appui des faits qu’il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l’insuffisance professionnelle dont il se prévaut.

L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité objective, non fautive et durable, d’un salarié à accomplir correctement la prestation de travail pour laquelle il est employé, c’est-à-dire conformément à ce qu’on est fondé à attendre d’un salarié moyen ou ordinaire, employé pour le même type d’emploi et dans la même situation.

Les motifs de la lettre de licenciement reprennent des mails expédiés à compter du 16 mars 2017.

L’employeur verse aux débats, la fiche de poste de M. [E], annexée au contrat de travail du 31 mars 2015 ainsi que 14 échanges de mails, intervenus entre le 28 février 2017 et le 2 mai 2017, soit une période de deux mois, débutant au retour d’un arrêt de travail du salarié.

Aucun entretien d’évaluation n’a eu lieu depuis le 31 mars 2015, en sorte que les éventuels points à améliorer attendus par l’employeur ne sont pas connus du salarié.

Les longs mails que M. [V] adresse au cours des mois de mars et avril 2017 contiennent de nombreux reproches alors même que M. [E] informe et rend compte de ses travaux, sans que jamais son supérieur ne soit satisfait des réponses apportées.

Le court délai sur lequel se concentrent ces échanges et reproches incessants de l’employeur ne permettent pas de caractériser une insuffisance professionnelle.

Les premiers juges ont considéré à juste titre que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé, sauf à porter le montant de la somme allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 2 000 euros.

La société ESI GROUP, qui succombe en appel sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition, contradictoirement

Confirme le jugement sauf le montant de la somme allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau

Condamne la société ESI GROUP à payer à M. [E] à la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant,

Condamne la société ESI GROUP aux dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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