Présomption d’innocence : 11 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/02229

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Présomption d’innocence : 11 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/02229
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MINUTE N° 23/198

Copie exécutoire à :

– Me Noémie BRUNNER

– Me Laurence FRICK

– Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 11 Avril 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/02229 – N° Portalis DBVW-V-B7G-H3KH

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 mai 2022 par le juge de l’exécution de Schiltigheim

APPELANTE :

S.C.I. VALENTIN prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Noémie BRUNNER, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Caroline MAINBERGER, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

INTIMÉES :

Association CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 4] GUTENBERG devenue CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 4] CATHEDRALE prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Laurence FRICK, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Serge PAULUS, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

S.C.P. THIERRY RIEGER & [P] [J] ASSOCIES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Arnaud HOUSSAIN, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 janvier 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Suivant acte de prêt reçu par la société civile professionnelle Thierry Rieger et [P] [J] le 25 octobre 2019, l’association Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg (ci- avant dénommée la banque) a consenti à la Sci Valentin, dont Monsieur [W] [O] est gérant, un prêt d’un montant de 418 000 € en vue de l’achat d’une maison située [Adresse 6] à [Localité 7], d’une surface habitable de 180 m², à titre de résidence principale d’un locataire et travaux (grosses réparations), et ce moyennant le remboursement de 240 échéances successives de 2 075,23 € chacune hors assurance.

En garantie du remboursement du crédit, l’immeuble objet du financement a été affecté d’une hypothèque de premier rang au profit du prêteur.

L’emprunteur s’est soumis à l’exécution forcée immédiate dans tous ses biens meubles et immeubles, présents et à venir conformément, selon la situation des biens, soit à l’article 2284 du code civil, soit à l’article L 111-5 du code des procédures civiles d’exécution.

Par décision en date du 15 décembre 2020, le conseil d’administration de la Fédération du Crédit mutuel centre Est Europe a placé la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg sous administration provisoire pendant six mois avec effet immédiat et a mis fin au mandat de ses président, administrateurs ou conseillers.

Parallèlement, un certain nombre de ses anciens dirigeants, le notaire M° [P] [J] et Monsieur [W] [O] étaient mis en examen des chefs d’escroqueries en bande organisée,

faux, blanchiment… dans le cadre de l’octroi d’un nombre considérable de crédits consentis par la banque au bénéfice de sociétés liées à Monsieur [O].

Par courrier en date du 11 février 2021, la banque a mis en demeure la Sci Valentin de lui transmettre sous huit jours les justificatifs des travaux entrepris au bénéfice de la maison de [Localité 7].

Par courrier recommandé du 3 avril 2021, la Sci Valentin a transmis à la banque une facture BS Renov d’un montant de 17 000 € ainsi qu’une facture d’honoraires d’architectes d’un montant de 2 500 € concernant le dépôt d’un permis de construire.

La banque a organisé une expertise contradictoire privée à l’effet de vérifier les travaux entrepris sur place, au terme de laquelle il a été conclu que les travaux mentionnés dans la facture BS Renov n’avaient pas été intégralement réalisés au 15 mai 2021.

Par lettre recommandée du 29 mai 2021, la banque, estimant que la facture BS Renov est mensongère, s’est prévalue des clauses du contrat qui prévoyait un cas d’exigibilité immédiate du crédit si l’emprunteur manque à son engagement d’affecter directement les sommes prêtées à l’emploi auquel elles sont contractuellement destinées, a reproché à la Sci Valentin d’avoir affecté la partie du montant du prêt destiné au paiement des travaux soit 50 000 €, non pas à la réalisation de ces travaux, mais au remboursement des échéance du crédit et a prononcé, pour ce motif, la déchéance du terme du contrat du 25 octobre 2019, a mis en demeure la société de lui régler, sous huit jours, la somme de 407 796,11 € en principal et a procédé également à la clôture du compte courant de la Sci Valentin.

Un commandement aux fins de saisie vente a été signifié à la Sci Valentin à la demande de la banque, pour un montant en principal de 407 747,56 €, et ce, en vertu de la copie exécutoire de l’acte de prêt reçu le 25 octobre 2019 contenant soumission à l’exécution forcée immédiate et muni de la formule exécutoire.

Par assignation délivrée le 31 août 2021, la Sci Valentin a saisi le juge de l’exécution auprès du tribunal de proximité de Schiltigheim d’une demande dirigée contre la banque en vue de voir prononcer la nullité du commandant de payer et condamner la banque à lui verser une somme de 3 000 € en réparation de son préjudice moral et financier au titre de l’abus de saisie, outre 2 500 € au titre des frais irrépétibles.

A l’appui de sa demande, la Sci Valentin faisait valoir que la banque ne pouvait se prévaloir d’un titre exécutoire en raison du lien de parenté existant entre le notaire ayant instrumenté et l’une des parties au contrat, en prohibition des prescriptions légales.

Subsidiairement, elle a soutenu que la nullité du commandement est encourue en l’absence d’exigibilité de la créance, la déchéance du terme du prêt prononcé par la créancière étant abusive et infondée en fait et en droit.

La banque a appelé en intervention forcée dans la cause la société civile professionnelle Thierry Rieger et [P] [J], notaires associés et les deux instances ont été jointes.

La banque a conclu au rejet des prétentions de la demanderesse à laquelle elle a réclamé paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, faisant valoir que le père du notaire instrumentaire n’est pas intervenu dans l’acte authentique dont la validité est contestée et que la déchéance du terme est justifiée dès lors que les fonds prêtés ont été affectés en tout ou partie à d’autre emploi que celui contractuellement prévu.

La société civile professionnelle titulaire de l’office notarial Riegel-[J] a conclu au rejet de la demande de la société Valentin à laquelle elle a réclamé une indemnité de procédure.

Par jugement en date du 24 mai 2022, le juge de l’exécution délégué au tribunal de proximité de Schiltigheim a rejeté la demande de la Sci Valentin aux fins de réouverture des débats, l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes tendant à voir déclarer nul ou abusif le commandement de payer aux fins de saisie vente du 23 juillet 2021 et de ses prétentions indemnitaires à ce titre, a condamné la Sci Valentin à payer à la banque la somme de 600 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a débouté la SCP Riegel-[J], notaires associés, de sa demande au titre des frais irrépétibles, a constaté l’exécution provisoire de la décision et condamné la Sci Valentin aux entiers dépens.

La Sci Valentin a interjeté appel à l’encontre de cette décision suivant déclaration en date du 24 mai 2022.

L’affaire a été fixée à bref délai en application de l’article 905 du code de procédure civile.

Par dernières écritures notifiées le 9 septembre 2022, la Sci Valentin demande à la cour de :

Sur l’appel principal

-le déclarer recevable et bien fondé,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et en ce qu’il l’a condamnée aux dépens et à payer la somme de 600 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau sur ces points,

-déclarer la demande de la Sci Valentin recevable et bien fondée,

À titre principal,

-dire et juger que le commandement aux fins de saisie vente diligenté par la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg, délivré par la SCP Demmerle et Stalter, a été signifié le 23 juillet 2021 en l’absence de titre exécutoire,

-dire et juger que ce commandement n’est pas fondé sur un titre exécutoire constatant une créance liquide, exigible et certaine,

En conséquence,

-déclarer ce commandement aux fins de saisie vente nul,

À titre subsidiaire,

-déclarer inutile, frustratoire et abusive ce commandement aux fins de saisie vente,

En conséquence,

-déclarer le commandement aux fins de saisie vente litigieux nul,

En toute hypothèse,

-condamner la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg à payer à la Sci Valentin la somme de 3 000 € au titre du préjudice causé par cette mesure sur le fondement des dispositions des articles L 121-2 du code des procédures civiles d’exécution,

-débouter la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg de l’intégralité de ses demandes,

-condamner la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg à lui payer une somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance,

-condamner la même aux dépens de première instance,

Sur l’appel incident de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg

-déclarer l’appel incident sans objet,

-le rejeter,

Sur l’appel incident de la SCP Rieger et [J],

-déclarer l’appel incident mal fondé,

-le rejeter,

En tout état de cause,

-débouter la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg et la SCP Rieger-[J] de l’intégralité de leurs demandes,

-condamner la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg à payer à la Sci Valentin une somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,

-condamner la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg aux dépens d’appel.

Au soutien de son appel, la Scp Valentin énonce, en préambule, qu’elle fait, comme une vingtaine de sociétés dont Monsieur [O] est dirigeant ou associé, l’objet d’un acharne- ment incompréhensible de la part de la Caisse de Crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg suite à des modifications récemment intervenues dans la composition des membres du conseil d’administration et que la juridiction interrégionale spécialisée de Nancy a été saisie d’une enquête pénale visant l’ensemble des protagonistes du litige et impliquant notamment Maître [P] [J], notaire ainsi que Monsieur [L] [J], son père, président délégué de la Caisse de crédit mutuel, Monsieur [F] [A], ancien directeur de la Caisse de crédit mutuel ainsi que Monsieur [S] [Y], courtier en prêts immobiliers, l’ensemble des protagonistes étant mis en examen dans le cadre de cette procédure pénale.

Elle fait ensuite essentiellement valoir :

-sur le défaut de titre exécutoire valable : qu’en vertu de l’article 2 du décret du 26 novembre 1971, les notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels leurs parents en ligne directe sont parties ou qui contiennent quelques dispositions en leur faveur ; que Monsieur [L] [J], membre du conseil d’adminis- tration de la Caisse de Crédit mutuel et président délégué au sein de ce conseil est en réalité le président de fait du conseil d’administration de la Caisse de Crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg ; qu’ainsi son fils, M° [P] [J], notaire, avait interdiction de recevoir l’acte de prêt du 29 mars 2019 ; que cet acte de prêt ne peut ainsi constituer un titre exécutoire et ne vaut que comme écrit sous signature privée, en application de l’article 1370 du code civil ;

-sur l’absence de bien-fondé de la déchéance du terme et de l’exigibilité du prêt : que le contrat de prêt ne précise pas quel est le montant du crédit affecté aux travaux ; que le montant du crédit a été débloqué par la banque en deux temps : premièrement une somme de 368 000 € a été débloquée aux fins d’acquisition de l’immeuble le 25 octobre 2019 et en deuxième lieu, le solde d’un montant de 50 264,11 € a été débloqué sans aucun justificatif le

29 octobre 2019 soit quatre jours plus tard ; que pour affirmer que les fonds débloqués le 29 octobre n’auraient pas servi à financer des travaux, la banque s’est fondée sur un rapport d’expertise tendancieux établi par un expert rémunéré par elle auquel elle n’a pu adresser de dire ; que la facture intermédiaire BS Renovation n’est pas mensongère et que Monsieur [O], gérant de la Sci Valentin, a dû l’acquitter lui-même sur ses fonds propres ; qu’une facture finale de cette société BS rénovation lui a d’ailleurs été adressée le 31 mai 2021 ; qu’elle a bien utilisé les fonds conformément à l’objet du prêt.

Elle ajoute que la banque, qui ne disposait pas d’un pouvoir discrétionnaire à cet effet, a, de mauvaise foi, mis en ‘uvre la clause de déchéance du terme, alors que la Sci Valentin, qui a régulièrement remboursé les mensualités de crédit, n’a jamais connu d’incident de paiement, le solde de son compte-courant professionnel présentant un solde créditeur et alors qu’il appartenait à la banque de solliciter la transmission des justificatifs des travaux entrepris avant le déblocage des fonds et qu’elle ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

Elle ajoute que si les anciens dirigeants de la banque ont commis des fautes dans l’octroi des crédits, ainsi qu’il résulte d’un jugement du tribunal de Strasbourg du 6 décembre 2021, elle n’a pas à en subir les conséquences.

Par dernières écritures notifiées le 19 décembre 2022, la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] cathédrale anciennement dénommée Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg demande à la cour de :

Sur l’appel principal de la Sci Valentin,

-déclarer l’appel irrecevable et en tout cas mal fondé,

-rejeter l’appel,

-confirmer le jugement déféré,

-débouter la Sci Valentin de l’ensemble de ses demandes,

Sur l’appel incident de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Cathédrale si par extraordinaire « le juge de l’exécution » venait à invalider l’acte

-déclarer l’appel incident recevable,

-le déclarer bien fondé,

-infirmer le jugement déféré en ce qu’il a implicitement rejeté la demande de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] cathédrale tendant à voir déclarer le jugement opposable à la SCP Rieger-[J],

Statuant à nouveau,

-déclarer le jugement opposable à la SCP Rieger-[J],

-réserver les droits de la Caisse de crédit mutuel à saisir le juge compétent pour rechercher la responsabilité de la SCP Rieger-[J],

En tout état de cause,

-déclarer l’arrêt à intervenir opposable à la SCP Rieger-[J],

-débouter la Sci Valentin de l’ensemble de ses demandes,

-condamner la Sci Valentin à payer à la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] cathédrale une somme de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamner la Sci Valentin aux entiers dépens de l’instance.

En préambule, la partie intimée énonce qu’elle est victime, y compris en son sein, d’une vaste fraude commise à son préjudice, qui s’est révélée à la fin de l’année 2020, et se réfère de ce chef à un communiqué de la juridiction interrégionale spécialisée de Nancy, dans un communiqué publié dans un journal local le 8 janvier 2021, faisant état d’une enquête ouverte « pour escroqueries en bande organisée sur les circonstances dans lesquelles de nombreux crédits ont été accordés par la Caisse locale de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg à plusieurs dizaines de sociétés civiles crées par des membres de quelques familles d’origine étrangère, en vue de l’acquisition de biens immobiliers ».

Elle fait essentiellement valoir :

-sur la validité du titre exécutoire : que Monsieur [L] [J], père de Maître [P] [J], notaire, n’est pas intervenu à l’acte de prêt puisque le pouvoir conféré à la préposée de l’étude notariale pour signer l’acte pour le compte de la banque a été régularisé par son ex-directeur Monsieur [F] [A] et son président Monsieur [E] [G], qu’au surplus, l’acte ne contient aucune disposition en faveur de Monsieur [L] [J],

-sur la mise en ‘uvre de le déchéance du terme : que les dispositions des articles 11.4, 14 et 17 du contrat de crédit lui permettaient de prononcer la déchéance du terme et d’exiger immédiatement le remboursement du prêt ; que tel était le cas dès lors que les fonds prêtés qui devaient être employés à la réalisation des travaux n’y ont jamais été affectés et ont servi au remboursement des échéances du crédit ; qu’au surplus la Sci Valentin a produit une fausse facture dans le but de la tromper,

lui faisant croire que les travaux avaient été réalisés alors qu’il n’en est rien ; qu’il importe peu que les fonds affectés aux travaux aient été débloqués avant la production de justificatifs ; que l’expertise s’est déroulée en présence de Monsieur [W] [O] qui a eu la faculté de s’exprimer et que l’impartialité des conclusions du rapport ne saurait dès lors être remise en cause.

Elle affirme en outre avoir été fondée à prononcer l’exigibilité immédiate du crédit sur le fondement de l’article L313-12 al 2 du code monétaire et financier qui dispose que l’établissement de crédit ou la société de financement n’est pas tenu de respecter un délai de préavis, que l’ouverture de crédit soit à durée indéterminée ou déterminée, en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou au cas où la situation de ce dernier s’avérerait irrémédiablement compromise. Selon elle, la fourniture d’une fausse facture aux fins de dissimuler l’absence de respect de l’affectation des fonds prêtés constitue un comportement gravement répréhensible justifiant la rupture immédiate du concours.

Elle estime que le délai accordé au débiteur pour régler la créance, sous huit jours, n’a rien de fantaisiste comme le fait écrire la Sci Valentin alors qu’elle a attendu deux mois avant de pratiquer la mesure contestée.

Elle se réfère à un arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Nancy en date du 10 mars 2022 pour postuler que le « groupe » [O] a largement et en toute connaissance de cause profité des pratiques douteuses mises en ‘uvre par les anciens dirigeants de la banque dans l’octroi des crédits.

Par dernières écritures notifiées le 27 décembre 2022, Maître [P] [J] et la SCP Thierry Rieger et [P] [J] associés, demandent de :

Sur l’appel principal,

-rejeter l’appel principal de la Sci Valentin et confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la contestation, en tant qu’elle est fondée sur l’allégation que l’acte de prêt du 25 octobre 2019, reçu par Maître [C] [B], agissant en qualité de notaire de la SCP Thierry Rieger et [P] [J], ne vaudrait pas titre exécutoire,

Statuant sur l’appel incident formé par la banque

-dire l’appel incident formé par la banque sans objet,

En conséquence,

-le rejeter,

Statuant sur l’appel incident formé par Maître [P] [J] et la SCP Rieger et [J],

-déclarer recevable et bien-fondé l’appel incident,

En conséquence,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté l’office notarial de sa demande au titre des frais irrépétibles de conseil,

Et statuant à nouveau de ce chef,

-condamner la Sci Valentin au paiement d’une somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

En tout état de cause,

-condamner la partie succombante en appel au paiement d’une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’instance d’appel.

Au soutien, ils font essentiellement valoir que le père de Maître [P] [J], qui n’était que membre du conseil d’administration et bénéficiait d’un titre purement honorifique de président délégué de ce conseil, n’est nullement intervenu à l’acte pour représenter directement ou indirectement la Caisse de crédit mutuel ; que le contrat de crédit ne prévoyait aucune stipulation en sa faveur ; que l’allégation suivant laquelle Monsieur [L] [J] est en réalité le président de fait du conseil d’administration de la Caisse de Crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg n’est nullement établie ; qu’en tout état de cause, un dirigeant de fait ne saurait être assimilé à un représentant légal au regard de l’article 2 du décret 71-941 du 26 novembre 1971 ; que la production aux débats d’un extrait de l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Nancy du 10 mars 2022 se heurte au principe du secret de l’instruction et enfreint le principe de la présomption d’innocence, alors même qu’une telle décision n’a pas autorité de chose jugée ; qu’il en résulte que la banque dispose bien d’un titre exécutoire.

La sci Valentin a transmis, en cours de délibéré du 23 mars 2023, une note accompagnée d’une pièce nouvelle.

Tant la Caisse de crédit mutuel que la SCP Thierry Rieger et [P] [J] ont demandé à la cour d’écarter cette note en délibéré.

MOTIFS

Vu les dernières écritures des parties ci-dessus spécifiées et auxquelles il est référé pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, en application de l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu les pièces régulièrement communiquées ;

Sur la recevabilité de la note en délibéré

L’article 445 du code de procédure civile dispose qu’après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations, si ce n’est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444.

Dès lors, la note en délibéré accompagnée d’une pièce nouvelle, déposée par la société appelante en cours de délibéré, doit être déclarée irrecevable.

Sur la validité du titre exécutoire

En vertu de l’article L111-2 du code des procédures civiles d’exécution, le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution.

Pour contester en l’espèce l’existence d’un titre exécutoire et solliciter en conséquence la mainlevée de la mesure d’exécution forcée pratiquée, la Sci Valentin invoque d’abord la violation des dispositions de l’article 2 du décret 71-941du 26 novembre 1971 qui prévoient que les notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels leurs parents ou alliés, en ligne directe, à tous les degrés, et en ligne collatérale jusqu’au degré d’oncle ou de neveu inclusivement, sont parties, ou qui contiennent quelque disposition en leur faveur.

Elle fait valoir que les relations de famille existant entre le notaire instrumentaire et le président délégué de la Caisse de crédit mutuel et membre influent du conseil d’administration, interdisaient au premier nommé de recevoir le contrat de crédit litigieux.

En l’espèce, il convient de rappeler que M° [C] [B], notaire au sein de la Société Civile Professionnelle « Thierry Rieger et [P] [J], notaires associés » a , le 25 octobre 2019 , reçu un acte de prêt Modulimmo conclu entre l’association Caisse de Crédit Mutuel [Localité 4] Gutenberg, d’une part, et la Sci Valentin d’autre part, prêt d’un montant de 418 000 € destiné à financer l’acquisition d’une maison de 180 m² à [Localité 7] à titre de résidence principale d’un locataire et des travaux de grosses réparations, remboursable en 240 mensualités de 2 075,23 € l’une  hors assurance et que la banque a, le 29 mai 2021, notifié à l’emprunteur la déchéance du terme en application des conditions générales du contrat liant les parties.

Il ressort en l’espèce des productions que Monsieur [L] [J], père de [P] [J], a assumé la présidence du conseil d’administration de la Caisse de crédit mutuel durant plus

de trente ans ; que par arrêt en date du 31 octobre 2012, la Cour de cassation, première chambre civile, a confirmé un arrêt de la cour d’appel de Colmar qui avait considéré que ne valait pas titre exécutoire un acte de prêt reçu par Maître [P] [J] alors que [L] [J], son père, était intervenu à l’acte en tant que président du conseil d’administration de la CCM dont il était le représentant légal ; que le mandat de président du conseil d’administration de Monsieur [L] [J] a ensuite pris fin, celui-ci demeurant membre du conseil d’administration et ayant reçu le titre de président délégué, le plaçant dans l’organigramme de la banque au deuxième rang, devant le vice président du conseil d’administration.

Pour autant, il est constant que le contrat de prêt notarié litigieux du 25 octobre 2019, reçu par l’étude notariale Rieger-[J], notaires associés, a été conclu entre, d’une part  la Sci Valentin et, d’autre part, la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg, représentée à l’acte par Mademoiselle [M] [D], en vertu d’une délégation de pouvoir délivrée par Monsieur [F] [A], directeur et par Monsieur [E] [G], président du conseil d’administration.

Monsieur [L] [J], père du notaire instrumentaire, n’est pas intervenu à l’acte litigieux et n’aurait pu y intervenir comme n’ayant pas, en sa qualité de président délégué voire d’administrateur, pouvoir de représentation et d’engagement de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg, association coopérative à responsabilité limitée, la circonstance que, selon jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 6 décembre 2021, « ces opérations (de crédit) étaient validées par la commission d’urgence de la caisse locale composée du président du conseil de surveillance, du président du conseil d’administration, du président délégué et du directeur de la caisse locale » étant indifférente à cet égard.

Pour étayer son allégation suivant laquelle Monsieur [L] [J] était en réalité le président de fait de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg, Monsieur [G], président, n’étant en réalité qu’un « homme de paille », la société Valentin se réfère essentiellement à un certain nombre de courriers adressés aux sociétés du « groupe [O] », tous cosignés par Monsieur [L] [J] et surtout à un arrêt rendu par la chambre de l’instruction de Nancy en date du 10 mars 2022, statuant sur un appel interjeté à l’encontre d’une décision du juge des libertés et de la détention ayant placé Monsieur [P] [J] sous contrôle judiciaire, dont elle produit un extrait.

Cet arrêt intervient dans le cadre d’une vaste enquête pénale pour abus de confiance et blanchiment dans laquelle sont notamment mis en examen Monsieur [W] [O], citoyen de nationalité roumaine et Messieurs [J] père et fils.

L’extrait produit dudit arrêt énonce que malgré avertissement délivré par la Cour de cassation le 31 octobre 2012, Monsieur [L] [J] et Monsieur [P] [J] auraient continué d”uvrer de concert pour favoriser l’obtention de prêts pour le compte de la communauté d’intérêts existant autour de Monsieur [W] [O], Monsieur [L] [J] étant en réalité le président de fait du conseil d’administration aux dires de Monsieur [F] [A] et de Monsieur [S] [Y].

Or, la Sci Valentin pas plus que la banque au demeurant, qui ne peut en outre se prévaloir d’une communication régulière à sa personne de l’arrêt de la chambre de l’instruction de Nancy alors qu’aux termes de l’article 114 du code de procédure pénale, seules

les copies des rapports d’expertise peuvent être communiquées par les parties ou leurs avocats à des tiers pour les besoins de la défense, ne pouvait pas produire, au surplus de manière tronquée, ledit arrêt, rendu dans le cadre d’une information judiciaire en cours, dans la présente instance civile.

Il ne peut donc être tenu compte, dans la présente instance, des énonciations de l’arrêt de la chambre de l’instruction de Nancy, qui ne sont au demeurant en rien revêtues de l’autorité de chose jugée quant à la matérialité des faits pour lesquels Messieurs [J] père et fils, comme Monsieur [W] [O], sont mis en examen.

Au final, force est de constater que la cour ne dispose pas des éléments d’appréciation nécessaires et suffisants pour retenir que Monsieur [L] [J] était dirigeant de fait de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg et que Maître [P] [J] aurait, de ce fait, instrumenté en méconnaissance de l’interdiction prévue par le texte précité.

Enfin, il n’est pas justifié que l’acte litigieux aurait contenu des dispositions en faveur de Monsieur [L] [J], l’allégation suivant laquelle celui-ci, en sa qualité de président délégué et membre du conseil d’administration, aurait profité du prêt litigieux au travers du bénéfice qu’en aurait retiré la banque, n’apparaissant pas à cet égard pertinente.

Il résulte de l’ensemble de ses énonciations que la Sci Valentin échoue dans sa contestation de la validité du titre exécutoire pour méconnaissance des dispositions de l’article 2 du décret 71-941 du 26 novembre 1971.

L’appelante conteste ensuite le bien-fondé de la déchéance du terme.

En l’espèce, la Sci Valentin a documenté le 17 septembre 2019 une demande de crédit auprès de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg prévoyant au chapitre « synthèse du plan de financement » une dépense de 330 000 € au titre de l’acquisition de la maison [Adresse 6] à [Localité 7], une dépense de

50 000 € au titre des travaux à entreprendre (grosses réparations), une dépense de 10 000 € pour frais d’agence ainsi qu’une dépense pour frais de notaire de 24 750 € outre divers frais soit un total de dépenses de 418 207 €.

Il était encore précisé quant à l’objet du financement que le début des travaux était prévu pour le 20 septembre 2019 et la fin des travaux pour le 31 décembre 2019.

Le contrat de prêt notarié du 25 octobre 2019, dispose que l’objet du prêt est l’achat d’une maison d’une surface habitable de 180 m² comprenant huit pièces à titre de résidence principale d’un locataire et travaux (grosses réparations). Il précise que le montant du prêt

est de 418 000 € sans indication du montant affecté à l’acquisition de la maison et celui affecté aux travaux. Il prévoit en outre que :

-article 11.4 : les conditions financières du présent contrat ont été déterminées en considération de l’objet prévu dans la demande de crédit. Elles ne pourront être maintenues que si l’emprunteur respecte cette affectation.

-article 14 : dans le cas où l’objet du prêt est de financer l’acquisition d’un immeuble ou la réalisation de travaux, l’emprunteur s’engage à exécuter les travaux de construction, ou à effectuer l’acquisition, conformément à la demande de prêt soumis au prêteur… L’emprunteur s’engage à donner toute facilité pour l’exercice du contrôle qui sera effectué à la requête du prêteur en ce qui concerne l’utilisation des fonds, notamment par la visite de l’habitation financée au moyen du crédit et par la production des documents et attestations justifiant de la réalisation du projet. S’agissant de la visite de l’habitation financée, le prêteur informera préalablement l’emprunteur de sa demande et fixera une date de visite après concertation… Dans tous les cas, l’emprunteur sera tenu d’affecter les sommes prêtées à l’emploi auquel elles sont contractuellement destinées, tel qu’indiqué à l’objet du présent crédit,

-article 17 : sans préjudice de l’application possible de l’article 1226 du code civil, le contrat est résilié et les sommes dues au titre du crédit deviennent immédiatement exigibles dans l’un quelconque des cas suivants après mise en demeure de l’emprunteur restée infructueuse dans le délai fixé par ce courrier pour remédier à l’inexécution contractuelle :

-si l’emprunteur manque à son engagement d’affecter directement les sommes prêtées à l’emploi auquel elles sont contractuellement destinées.

Aux termes de ces dispositions, la Sci Valentin avait l’obligation d’affecter les fonds prêtés conformément à la demande de crédit du 17 septembre 2019, soit 350 000 € à l’acquisition de la maison [Adresse 6] à [Localité 7] et 50 000 € aux travaux de grosses réparations au bénéfice de cet immeuble, les travaux

devant avoir été exécutés à la fin de l’année 2019 en vue de la location dudit immeuble.

Il est constant que les fonds prêtés ont été débloqués au bénéfice de l’emprunteur le 24 octobre 2019 en ce qui concerne la partie acquisition et le 29 octobre 2019 en ce qui concerne la partie travaux.

Il apparaît à l’examen du compte bancaire professionnel ouvert par la Sci Valentin dans les livres de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg, qu’elle produit elle-même, que le virement de la somme de 50 264,11 €, effectué le 29 octobre 2019 par

l’étude notariale, a exclusivement servi jusqu’au 16 mars 2021 à rembourser les échéances du crédit, sous réserve d’un paiement par chèque d’un montant de 1 243 € le 6 novembre 2020 et d’un paiement par chèque de 2 500 € le 26 novembre 2020.

Par courrier du 11 février 2021, la banque a mis en demeure l’emprunteur de justifier des travaux entrepris.

En réponse, la Sci Valentin a fait parvenir à la banque par courrier du 3 avril 2021 deux factures provenant l’une de la société BS Rénov en date du 23 mars 2021 pour un montant de 17 000 € ttc, à régler à réception de la facture, en paiement de travaux de gros ‘uvre réalisés dans l’immeuble financé par le prêt, et une facture de 2 500 € ttc de la société d’architecture Plan Libre en date du 30 novembre 2020 pour dépôt de permis de construire pour la restructuration d’une maison et la création de deux logements.

La banque a alors manifesté l’intention d’exercer son contrôle sur les travaux effectués, conformément aux clauses contractuelles, par la mise en ‘uvre de la visite de l’immeuble litigieux, au contradictoire de la Sci Valentin, dont le gérant était présent aux opérations d’expertise.

La visite a eu lieu le 12 mai 2021 en présence de Monsieur [O], gérant de la Sci Valentin, et d’un expert en bâtiment, mandaté par la banque et il ressort du procès-verbal de constat d’huissier établi le même jour que :

-selon les déclarations de Monsieur [O], les travaux en cours qui consistent en la construction d’une annexe destinée à abriter un salon et une cuisine sur un seul étage, n’avait démarré que depuis quinze jours, soit fin avril, début mai,

-au vu des constatations et photographies de l’huissier instrumentaire, seuls étaient présents sur le chantier une dalle en béton, des piliers béton et des piliers en brique rouge,

-selon les constatations de l’expert sachant, tout ou partie des travaux facturés au 23 mars 2021 n’étaient pas conformes à la facture ni réalisés le 12 mai 2021 : aucun plancher préfabriqué ni

de dalle acrotère réalisés au jour de la visite bien que facturés, outre anomalies de Tva sur la facture et métrés relevés différents sur site et sur facture.

La Sci Valentin conteste vainement l’impartialité de l’expert commis par la banque pour constater l’adéquation des factures présentées à la réalité sur le terrain pour justificatifs des travaux exécutés alors que les constatations de l’expert sont corroborées par les photographies prises par l’huissier de justice.

Il ne peut qu’être relevé qu’alors que les travaux devaient être achevés au 31 décembre 2019 pour mise en location, rien de ces travaux n’avait été entrepris antérieurement à la mise en demeure de la banque, adressée le 11 février 2021 à la Sci Valentin, d’avoir à justifier de l’affectation de la somme de 50 000 € aux travaux de grosses réparations de la maison [Adresse 6] à [Localité 7].

Les factures de la société BS Rénov, dont a justifié l’appelante auprès de la banque au mois d’avril 2021, sont manifestement des faux dès lors qu’aucun des travaux facturés, de l’aveu même du gérant de la Sci Valentin, n’avait été entrepris au 9 et 23 mars 2021, date desdites factures et qu’au 21 mai 2021, soit deux mois plus tard, tout ou partie desdits travaux n’avaient pas été réalisés (plancher préfabriqué facturé 6 370 € hors-taxes et acrotère en béton facturé 1 390 € hors-taxes).

La Sci Valentin ne peut sérieusement soutenir que la facture de la société BS Rénov en date du 23 mars 2021, pour un montant de 17 000 € n’était qu’une facture « intermédiaire », aucune mention portée sur cette facture ne mentionnant qu’elle concerne le paiement d’un acompte, et la facture définitive dont elle fait état en date du 31 mai 2021 d’un montant de 2 665,54 € n’est qu’une facture d’avenant suite à des mètres carrés en plus.

Au demeurant, il aurait été aisé pour la société Valentin, de se pourvoir d’une attestation en bonne et due forme de la société BS Rénov qui aurait pu indiquer dans quelles conditions et selon quelles modalités les travaux auraient été entrepris, ce qu’elle n’a pas fait.

Encore, les travaux mis en oeuvre ne sont pas conformes à l’objet du prêt puisqu’il ne s’agit pas de grosses réparations mais de création d’une annexe avec dépôt d’un permis de construire.

C’est dans ces conditions que le premier juge, par des motifs pertinents que la cour adopte, a considéré que la banque démontre suffisamment que les fonds prêtés ont été affectés en tout ou partie par la Sci Valentin à un autre emploi que celui contractuellement prévu, à savoir le remboursement des échéances du crédit et que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient bien remplies au vu du manquement contractuel constaté, de sorte que

le prononcé de la déchéance du terme ne revêtait pas un caractère abusif, a fortiori dans un contexte de suspicion de blanchiment et escroqueries.

Dès lors , la banque disposait bien d’un titre exécutoire pour un montant arrêté au 28 mai 2021 à la somme de 407 796,11 euros, conformément au décompte de créance du 28 mai 2021, adressé à la Sci Valentin le 29 mai 2021 détaillant le capital restant dû au 28 mai 2021, l’indemnité conventionnelle de 5 %, et les intérêts courus, et qui n’est pas contesté en tant que tel.

Il est ajouté que la circonstance que la banque ait transféré les fonds relatifs à la mise en ‘uvre des travaux avant de réclamer des justificatifs de l’exécution desdits travaux est sans emport dès lors qu’aucune clause du bail ne lui imposait de procéder de la sorte ; que la banque a agi de bonne foi dès lors que la facture justificative des travaux qui lui a été présentée ne correspondait pas à la réalité et que les fonds objet du crédit n’ont pas été affectés à la destination prévue contractuellement, peu important que le crédit était régulièrement remboursé ; que le créancier a le choix des mesures d’exécution qu’il entend mettre en ‘uvre pour obtenir le règlement de sa créance et que la banque pouvait pertinemment préférer mettre en ‘uvre une mesure de saisie vente plutôt qu’une procédure de vente forcée immobilière, plus longue et plus lourde.

À défaut de caractérisation d’une faute commise par la banque dans la mise en ‘uvre des mesures d’exécution, la demande de dommages intérêts formée par la Sci Valentin ne peut qu’être rejetée et la décision déférée sera également confirmée de ce chef.

Sur la demande de la banque de, en tout état de cause, déclarer l’arrêt à intervenir opposable à la SCP Rieger et [J]

Cette demande est sans objet dès lors que la société civile professionnelle Rieger et [J], co- intimée, est partie à la procédure d’appel.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Les dispositions du jugement déféré seront confirmées quant à l’article 700 du code de procédure et aux dépens étant observé qu’il ne saurait être fait droit à la demande de Maître [P] [J] et de l’étude Rieger-[J], dirigée à l’encontre de la société civile immobilière Valentin au titre des dispositions de l’article 700 pour les frais irrépétibles de première instance dans la mesure où ceux-ci ont été attraits en la procédure de première instance par la banque et non par la Sci Valentin .

Partie perdante à hauteur d’appel, la Sci Valentin sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche, elle sera condamnée à payer sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la banque la somme de 1 000 euros et à la Scp Rieger-[J] et M° [P] [J] la somme de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

DÉCLARE irrecevable la note en délibéré accompagnée d’une pièce nouvelle déposée par l’appelante le 23 mars 2023, en cours de délibéré,

CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

DECLARE sans objet la demande de la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg, devenue Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Cathedrale, tendant à voir déclarer opposable le présent arrêt à la Scp Thierry Rieger et [P] [J] Associés,

REJETTE la demande de la Sci Valentin au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sci Valentin à payer à la Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Gutenberg, devenue Caisse de crédit mutuel [Localité 4] Cathedrale, la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la Sci Valentin à payer à la Scp Thierry Rieger et [P] [J] Associés la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sci Valentin aux dépens.

La Greffière La Présidente

 


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