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27 mai 2022
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/00498
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 27 MAI 2022
N° 2022/142
Rôle N° RG 19/00498 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BDTI7
[C] [Z]
C/
SAS ADREXO
Copie exécutoire délivrée
le : 27 mai 2022
à :
Me Philippe BRUZZO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 41)
Me Jonathan LAUNE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 8)
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’AIX-EN-PROVENCE en date du 26 Novembre 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00639.
APPELANT
Monsieur [C] [Z], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO / DUBUCQ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Hugues SENLECQ, avocat au barreau de DUNKERQUE
INTIMEE
SAS ADREXO, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Jonathan LAUNE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre suppléante
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2022
Signé par Maame Véronique SOULIER, pour la Présidente de chambre empêchée et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
La SAS Adrexo exerce l’activité de distribution de journaux gratuits et de prospectus publicitaires dans les boîtes aux lettres.
Monsieur [C] [Z] a été embauché le 26 juin 1996 suivant contrat de travail à durée indéterminée par la SA Le Messager en qualité de distributeur d’imprimés publicitaires et de journaux gratuits avant de devenir salarié de la société Adrexo dans le cadre d’une fusion absorption en date du 1er septembre 2000.
Le salarié a exercé divers mandats syndicaux ayant été successivement représentant syndical auprès du Comité d’Entreprise, Délégué syndical, Délégué syndical central, Représentant syndical auprès du CHSCT puis Délégué du personnel et membre du comité d’entreprise.
Le 28 août 2003 Monsieur [Z] a adressé à la société Adrexo une lettre recommandée avec accusé de réception contenant sa démission rédigée ainsi qu’il suit:
‘Monsieur le Directeur,
Je vous informe que j’ai pris la décision de démissionner.
Je vous remercie de bien vouloir accepter de me dispenser d’effectuer mon préavis.’
Par courrier adressé par Monsieur [Z] à la société Adrexo le 16 octobre 2006, celui-ci a sollicité sa réintégration en indiquant que ‘sa démission , provoquée par le comportement inadmissible d’Adrexo notamment pour harcèlement, discrimination, entrave à ses fonctions représentatives, absence de fourniture de travail pendant 18 mois, non-paiement de l’intégralité du salaire’ était imputable à cette dernière.
En réponse, la SAS Adrexo a indiqué n’avoir exercé aucune pression et a rejeté cette demande.
En février 2007, Monsieur [Z] a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes de Dunkerque, procédure qui sera radiée pour défaut de diligences du demandeur le 30 juin 2008.
Souhaitant obtenir la requalification de sa démission en une prise d’acte imputable à l’employeur, sa réintégration dans l’entreprise et la condamnation de l’employeur à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire pour travail à temps complet et de dommages-intérêts pour discrimination, harcèlement moral, entrave, Monsieur [Z] a saisi le conseil de Prud’hommes d’Aix-en-Provence le 29 mars 2007.
Fixée à l’audience du bureau de jugement du 14 mai 2007, l’affaire a été radiée le 25 juin 2009.
Entretemps, le 20 février 2008, il a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes d’Aix-en-Provence sur le fondement de l’existence d’un trouble manifestement illicite afin d’obtenir une provision sur rappel de salaire.
Par ordonnance de départage en date du 20 octobre 2008, la formation des référées s’est déclarée incompétente.
L’affaire au fond rétablie le 24 août 2015 a été radiée le 11 février 2016 pour défaut de diligences du demandeur.
Rétablie une nouvelle fois le 15 septembre 2017, les parties ont été convoquées devant le bureau de jugement du 18 mai 2018.
Par jugement du 26 novembre 2018 rendu en l’absence de Monsieur [Z] dont la demande de renvoi a été rejetée par la juridiction de même que l’intégralité de ses conclusions et pièces, le conseil de prud’hommes d’Aix-en-Provence a:
– débouté Monsieur [Z] de l’intégralité de ses demandes,
– débouté les parties de toute autre demande,
– condamné Monsieur [Z] aux entiers dépens.
Monsieur [C] [Z] a relevé appel de ce jugement suivant deux déclarations adressées successivement au greffe par voie électronique en date du 10 janvier 2019, la seconde rectifiant une erreur matérielle figurant dans la première relative à la date du jugement du conseil de prud’hommes d’Aix-en-Provence, les procédures n°190052 et n°1900498 ayant été jointes sous ce dernier numéro suivant ordonnance du 4 septembre 2020.
L’ordonnance de clôture du 10 janvier 2022 a été révoquée à l’audience du 26 janvier 2022 à la demande de la SAS Adrexo qui indiquait ne pas avoir disposé d’un temps suffisant pour examiner et, le cas échéant, répondre aux nouvelles conclusions et pièces notifiées par Monsieur [Z] le 5 janvier 2022, la procédure étant renvoyée à l’audience du 4 avril 2022 avec nouvelle clôture de l’instruction fixée au 21 mars 2022.
Aux termes de ses conclusions n°2 d’appelant transmises par voie électronique le 5 janvier 2022 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, Monsieur [C] [Z] a demandé à la cour :
D’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et, statuant à nouveau, de :
– dire que la transaction ne porte que sur le désistement du pourvoi en cassation que [C] [Z] a formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Douai du 21 novembre 2002,
– constater que les articles 5 et 6 de la transaction ne comportent aucune concession de la part de la SAS Adrexo et qu’en conséquence, la cour est compétente pour trancher tous les éléments du litige sauf ceux repris aux articles 1 à 3 du protocole,
– dire les dispositions sur le salaire minimum et la durée du travail applicables à la SAS Adrexo,
– dire que le mode de calcul de la rémunération et la formation du contrat d etravail de [C] [Z] ne reposent sur aucune base légale,
– dire que les dispositions du contrat de travail (articles 3, 4 et 6) caractérisent la mise à disposition permanente qui doit être assimilée à du temps de travail effectif au sens de l’article L.3121-1 du code du travail et le contrat de travail de [C] [Z] doit être considéré comme étant un contrat à temps plein,
Subsidiairement:
Requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein pour absence des mentions obligatoires de l’article L.3123-14 du code du travail relatives à la durée du travail et sa répartition et en l’absence de preuve à la charge de l’employeur d’une part de la durée exacte du travail convenue et d’autre part que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler,
– condamner la SAS Adrexo à verser à [C] [Z] la somme de 59.678 € à titre de rappel de salaire pour la période de juillet 1996 à août 2003,
– condamner l’employeur à lui verser la somme de 5.967 € à titre de congés payés sur rappel de salaire,
– condamner la SAS Adrexo à payer à [C] [Z] la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et matériel subi lié au non-paiement de l’intégralité du salaire,
– dire que la SAS Adrexo a négocié le départ de [C] [Z] en violation de son statut protecteur,
– constater que la SAS Adrexo refuse de réintégrer son salarié en dépit de ses demandes répétées,
– ordonner la réintégration de [C] [Z] à son poste de travail dans les 8 jours suivant la notification de l’arrêt à intervenir sous peine d’une astreinte de 500 € par jour de retard passé ce délai,
– se réserver la liquidation de l’astreinte sur simple demande du salarié,
– condamner la SAS Adrexo à verser à [C] [Z] une indemnité limitée à 20 000 € correspondant au montant des salaires qu’il aurait du percevoir de septembre 2003 à décembre 2021,
– dire que la convention collective nationale de la publicité et assimilées était applicable à la SAS Adrexo jusqu’au 30 juin 2005,
– condamner la société Adrexo à verser à [C] [Z] la somme de 2.567 € au titre de la prime d’ancienneté prévue à l’article 18 de la CCN de la Publicité et assimilées,
– condamner la société Adrexo à lui verser la somme de 256 € au titre de l’indemnité de congés payés sur la prime d’ancienneté,
– condamner la SAS Adrexo à verser à [C] [Z] la somme de 40 000 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination,
– condamner la SAS Adrexo à verser à [C] [Z] la somme de 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,
– condamner la SAS Adrexo à lui verser la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour entrave à l’exercice de ses fonctions représentatives,
– dire que les condamnations seront assorties de l’intérêt au taux légal à compter du jour de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation,
– ordonner à la SAS Adrexo de délivrer à [C] [Z] des bulletins de salaire rectifiés (période juillet 1996 à août 2003) dans les 15 jours suivant la notification de l’arrêt à intervenir sous peine d’une astreinte de 50 € par jour de retard passé ce délai,
– se réserver la liquidation de l’astreinte sur simple demande du salarié,
– condamner la SAS Adrexo à verser à [C] [Z] la somme de 4.000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel,
– condamner la SAS Adrexo aux entiers dépens et notamment aux frais éventuels de l’exécution forcée de la décision à intervenir.
Suivant conclusions d’intimée transmises par voie électronique le 9 juillet 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, la SAS Adrexo a demandé à la cour de :
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en toutes ses dispositions,
En tout état de cause,
– débouter Monsieur [Z] de toutes ses demandes,
– le condamner au paiement d’une somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– le condamner aux entiers dépens.
SUR CE :
Sur l’exécution de la relation de travail :
Sur la transaction :
Au sens de l’article 2044 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties décident, moyennant des concessions réciproques, de mettre un terme à une contestation née ou de prévenir une contestation à naître. Conformément aux articles 2048 et 2049 du code civil, l’interprétation d’une transaction doit se faire de manière stricte, par une recherche de la commune intention des parties quant au différend qui y a donné lieu, exclusivement.
Monsieur [Z] demande à la cour de juger que la transaction signée avec son employeur ne porte que sur le désistement du pourvoi en cassation qu’il a formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Douai du 21 novembre 2002 et de constater que les articles 5 et 6 de celle-ci ne comportant aucune concession de la part de la SAS Sodrexo, la cour demeure compétente pour trancher tous les éléments du litige sauf ceux repris aux articles 1 à 3 du protocole.
La SAS Adrexo fait valoir que le salarié qui bénéficiait des conseils d’un avocat préalablement à la signature de la transaction litigieuse a signé celle-ci qui prévoyait le désistement de Monsieur [Z] de toutes les instances en cours relatives à la société Adrexo en contrepartie du versement d’une somme de 200.000 €, qu’il est ainsi faux de dire qu’elle ne comportait pas de concessions réciproques et ajoute que tout en demandant à la cour d’annuler deux clauses de la transaction, Monsieur [Z] ne formule aucune demande chiffrée à ce titre de sorte qu’il doit être débouté de ses demandes.
Le protocole litigieux (pièce n°29) est rédigé ainsi qu’il suit:
‘Article 1er :
[Z] est personnellement constitué partie civile dans une instance correctionnelle ayant abouti à une décision de la cour d’appel de Douai du 21/11/2002 qui a relaxé le PDG de la SA Le Messager (société absorbée par la SARL Adrexo) en infirmant le jugement correctionnel du TGI de Dunkerque qui l’avait précédemment condamné à une peine d’emprisonnement et à une amende pour délit d’entrave.
Quoique le Ministère public ne se soit pas pourvu en cassation, l’action de [Z] demeure poursuivie par la voie d’un pourvoi du 25/11/02 actuellement pendant devant la chambre criminelle de la cour de cassation.
Article 2 :
[Z] se désiste de toute instance et action relativement à cette instance et à l’action correspondante.
Article 3 :
En contrepartie de ce désistement d’instance et d’action, ADREXO verse à [Z] 200.000 € de dommages-intérêts.
Article 4 :
[Z] s’engage également à se désengager intégralement de toutes les procédures dirigées contre ADREXO (Le Messager…) où il intervient (directement ou indirectement) à quelque titre que ce soit.
Article 5:
[Z] est également partie aux procédures suivantes:
– appel devant la cour d’appel de Douai d’un jugement du CPH de Dunkerque RG n°98/00763 radié le 20/03/2003,
– saisine du CPH de Dunkerque du 06/03/2001 sous le n° 01/00151 radié le 27/01/2003,
– saisine du CPH de Dunkerque du 18/05/2001 sous le n° 01/00327 radiée le 27/01/2003,
dont il se désiste purement et simplement de même qu’il renonce aux actions correspondantes.
Article 6 :
Ces désistements ci-dessus désignés à l’article 5 interviennent sans contrepartie.
Article 7 :
Le versement de la somme désignée à l’article 3 ci-dessus interviendra dans les 9 mois du présent accord sous réserve de la justification de tous les désengagements convenus.
Article 8 :
En cas de contestation entre les parties relativement au présent contrat, seules les juridictions civiles de Paris seront territorialement compétentes.
Article 9 :
ADREXO prend directement en charge les honoraires du conseil de [Z] soit 6.000 € HT.
Article 10 :
Le présent accord vaut transaction conformément aux articles 2044 et suivants du code civil.’
L’interprétation d’une transaction suppose que la volonté exprimée par les parties sur le différent objet de celle-ci ne soit pas parfaitement claire et précise ce qui n’est pas le cas en l’espèce, aucune interprétation n’étant nécessaire alors qu’il résulte des termes parfaitement clairs du protocole transactionnel que la renonciation faite par Monsieur [Z] ne porte que sur le désistement du pourvoi en cassation qu’il a formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Douai du 21 novembre 2002 et que les désistements opérés dans le cadre des procédures listées à l’article 5 interviennent sans contrepartie de sorte que la cour serait effectivement compétente pour trancher les éléments du litige mentionnés exclusivement aux article 5 et 6 si elle était saisie d’une quelconque demande de ce chef ce qui n’est pas le cas, Monsieur [Z] ne formalisant pas même une demande d’annulation de ces deux clauses litigieuses.
Il convient en conséquence uniquement de dire que la transaction ne porte que sur le désistement du pourvoi en cassation formé par Monsieur [Z] à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Douai du 21 novembre 2002.
Sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet:
Il résulte de l’article L212-4-3 du code du travail dans sa version applicable au litige (devenu L. 3123-14) que le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit qui, entre autres mentions, précise la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations d’aide à domicile, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
A défaut des mentions précitées, le contrat de travail est présumé conclu pour un horaire normal et il incombe à celui qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.
Monsieur [Z] fait valoir que la SAS Adrexo a opté pour un mode de rémunération à la tâche qui ne tient pas compte des heures réellement effectuées qui est calculé non en fonction de la durée effective de travail mais à partir d’une durée de travail unilatéralement mentionnée sur les bulletins de salaire et chiffrée en divisant le salaire brut découlant du travail à la tâche par le taux horaire du SMIC, qui ne respecte pas la réglementation d’ordre public sur le temps de travail en matière de temps partiel qui exige que la durée du travail convenue ainsi que sa répartition sur la semaine ou le mois figurent dans le contrat de travail, les distributeurs de publicité n’étant pourtant pas écartés des dispositions sur la durée du travail par le livre VII de l’ancien code du travail.
Il ajoute que les dispositions contractuelles (articles 3,4 et 6) caractérisent sa mise à disposition permanente de l’employeur assimilée à du temps de travail effectif et ainsi à un temps plein et soutient à titre subsidiaire, dans l’hypothèse d’un contrat de travail à temps partiel, que ne respectant pas les dispositions légales elles font présumer que l’emploi est à temps complet, l’employeur devant rapporter la preuve contraire, ce qu’il ne fait pas précisant que ses demandes antérieures à mars 2002 ne sont pas prescrite ayant saisi la juridiction prud’homale le 26 mars 2007, soit antérieurement à la loi du 17 juin 2008 ayant substitué un délai quinquennal au délai trentenaire de droit commun, ses demandes étant ainsi soumises à ce dernier délai.
La société Adrexo explique que les contraintes propres à l’activité de distribution des imprimés sans adresse en boîtes à lettres ne lui permettent pas de garantir au distributeur un travail à temps complet, qu’il s’agit d’un travail à la tâche, qu’il n’est pas en mesure de fixer une durée du travail contractuelle intangible a priori, ni de contrôler le temps de travail nécessaire à l’exécution d’une prestation de distribution déterminée ni de considérer comme un temps de travail effectif un temps qui n’est pas sous le contrôle de l’employeur ni de fixer en conséquence des horaires de travail et encore moins leur répartition.
Elle indique s’agissant de la faculté pour l’employeur de rapporter la preuve d’un travail à temps partiel y compris dans le cas d’une présomption de travail à temps complet que la jurisprudence a évolué à la suite des arrêts rendus par la cour de cassation les 25 mai et 28 juin 2005, l’exigence que l’employeur rapporte la preuve de la durée exacte du travail et celle de sa répartition sur la semaine ou sur le mois ayant été abandonnée, ce dernier devant rapporter la preuve qu’il s’agit d’un travail à temps partiel et que le salarié n’est pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et qu’il n’est pas tenu de se tenir constamment à sa disposition ce qu’elle fait en l’espèce, indiquant qu’il ressort des bulletins de salaires de Monsieur [Z] pour la période non prescrite (mars 2002 jusqu’à sa démission en août 2003) qu’il a travaillé à temps partiel en moyenne 79,18 heures soit en moyenne 18 heures par semaine et qu’il n’est pas demeuré à sa disposition sans pouvoir vaquer à ses occupations.
Elle ajoute enfin que Monsieur [Z] ne rapporte pas la preuve du nombre d’heures dont il réclame le paiement produisant deux tableaux appelés ‘récapitulatifs des salaires’ sur la base de 151,67 heures puis sur la base de 124 heures pour la période de septembre 2003 à mars 2008 alors que sa demande de rappel de salaire concerne la période de 1996 à 2008.
L’article 3 du contrat de travail stipule ‘vous déclarez être disponible pour effectuer des distributions les lundi, mardi, mercredi, jeudi , vendredi.
Dans le cadre de vos disponibilités, la société Le Messager s’engage à vous fournir une quantité minimale de boîtes aux lettres à servir de 1280 ex par période hebdomadaire.
(…) Vous serez techniquement formé et contrôlé …votre activité sera suivie par les responsables du centre dont vous dépendez, et ce sous leur subordination hiérarchique…’
L’article 5 relatif à la rémunération précise : ‘les distributions effectuées en vertu du présent contrat seront rémunérées au rendement en fonction du nombre de documents distribués dans les boites aux lettres qui vous sont confiées dans le présent contrat ou que vous accepterez de servir.
Vous reconnaissez avoir pris connaissance des tarifs en vigueur dans l’entreprise à ce jour et les accepter expréssement. Les tarifs comprennent le salaire brut.
Votre salaire vous sera réglé dans les 10 jours du mois suivant. Il ne poura être inférieur au montant du SMIC Horaire rapporté à la durée du travail figurant sur votre fiche de paie.’
L’article 6 indique que le salarié s’engage ‘à ne pas exercer d’activité même à son compte qui soit concurrente en tout ou partie de l’activité de la société Le Messager pendant toute la durée d’exécution du contrat.’
Le contrat de travail à durée indéterminée produit ne mentionne pas s’il est conclu à temps plein ou partiel et prévoit une rémunération au rendement en fonction du nombre de documents distribués ce qui fait présumer en raison de l’absence des mentions légales que l’emploi est à temps complet .
Or, la société Adrexo qui conteste cette présomption ne rapporte pas la preuve, d’une part, qu’il s’agissait d’un emploi à temps partiel et d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’était pas tenu de se tenir constamment à la disposition de son employeur, s’agissant de conditions cumulatives.
En effet, d’une part, elle se borne à commenter les bulletins de salaire versés aux débats par le salarié en pièce 57 qui sont cependant insuffisants à caractériser un travail à temps partiel étant peu exploitables leur présentation ayant été modifiée en 1999 avec la disparition de la mention du nombre d’heures réalisées rendant impossible toute vérification du temps de travail, d’autre part, elle affirme sans produire strictement aucun élément que le salarié ne se tenait pas contamment à sa disposition alors même que celui-ci avait expressément indiqué dans son contrat de travail qu’il était disponible du lundi au vendredi.
Dès lors, il convient par infirmation des dispositions du jugement entrepris de requalifier le contrat de travail en un contrat de travail à temps complet et de faire partiellement droit à la demande de rappel de salaire de Monsieur [Z].
Si antérieurement à la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, les actions en requalification des contrats pouvaient être exercées pendant 30 ans, en revanche la prescription des actions en paiement des créances salariales était quinquennale de sorte que Monsieur [Z] ayant saisi la juridiction prud’homale le 29 mars 2007, ne peut prétendre à un rappel de salaire antérieur au 29 mars 2002.
A partir du décompte précis établi par le salarié pour la période de juillet 1996 à août 2003, la cour, par infirmation des dispositions du jugement entrepris, condamne la SA Adrexo à payer à Monsieur [Z] une somme de 11.170,74 € outre 1.117,07 € de congés payés afférents.
Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral et matériel distinct:
Monsieur [Z] sollicite la condamnation de la SAS Adrexo au paiement d’une somme de 20.000 € à titre de dommages-intérêts pour s’être exonérée délibérément et de mauvaise foi de ses obligations contractuelles en ne lui versant qu’une partie de ses salaires .
Cependant, outre le fait que le salarié ne justifie pas de la réalité des préjudices moral et matériel distincts allégués alors qu’il a obtenu le paiement du rappel de salaire sollicité , la sanction du défaut de paiement de salaire se traduit par le versement d’intérêts moratoires et non de dommages-intérêts et Monsieur [Z] ne peut, sous le couvert d’une demande de dommages-intérêts, faire échec à la prescription d’une partie des créances de rappel de salaire.
Il convient dès lors, par confirmation des dispositions du jugement entrepris, de débouter Monsieur [Z] de ce chef de demande.
Sur l’application de la convention collective nationale de la publicité jusqu’au 30 juin 2005 et le rappel de salaire sur prime d’ancienneté :
Monsieur [Z] sollicite par application de l’article 18 de la convention collective nationale de la publicité et assimilées applicable selon lui jusqu’au 30 juin 2015 la condamnation de la SAS Adrexo à lui payer une somme de 2.567 € à titre de rappel de salaire sur prime d’ancienneté pour la période de juillet 1999 à août 2003 outre la somme de 256 € de congés payés y afférents en faisant valoir que l’activité principale de l’employeur qui est la distribution d’imprimés publicitaires et de journaux gratuits celui-ci intervenant dans le cadre de campagnes publicitaires relève de la convention collective des entreprises de la publicité du 22 avril 1955 étendue par arrêté du 29 juillet 1955 ce que met en évidence le code APE 744 A figurant sur ses bulletins de salaire lequel correspond aux anciens codes NAF 77-10 et 77-11, ‘créateurs et intermédiaires de publicité’.
La société Adrexo s’y oppose en affirmant qu’aucune convention collective de branche y compris celle de la publicité, ne s’appliquait à l’activité de la distribution directe antérieurement à l’ouverture de la négociation d’une convention collective propre à la branche de la Distribution Directe en 1993 laquelle a abouti à la signature d’un accord national de la Distribution Directe le 10 mai 1994 applicable aux entreprises exerçant une activité de distribution non adressée de journaux imprimés publicitaires ou non, documents, objets, échantillons tous à caractère gratuit alors que son activité n’entrait pas dans le champ d’application de la convention collective de la publicité visant uniquement les entreprises de la publicité et assimilées telles que définies par les codes NAP 77-10 et 77-11, devenus les codes NAF 92.1 B et 74-4 A des nomenclatures d’activité se référant exclusivement aux entreprises vouées à la conception et à la réalisation de messages publicitaires sur des supports divers, le code NAP lui étant attribué jusqu’au changement de nomenclature étant le code 77-14 visant les services divers rendus aux entreprises lequel ne relevait pas de la convention collective de la publicité.
Elle ajoute que son activité principale est l’acheminement et la distribution manuelle en boites à lettres d’imprimés sans adresse à caractère gratuit, les documents publicitaires de la grande distribution constituant seulement 30 à 35% de la masse des documents distribués, que l’absence de rattachement à la convention collective de la publicité a été actée par la jurisprudence alors qu’elle-même n’a jamais appliqué à titre volontaire cette dernière convention comme telle a pu être le cas de la société Delta Diffusion, citée en exemple par le salarié mais dont la situation n’est donc pas comparable, qu’aucune convention collective de branche ne lui était applicable jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention collective de la Distribution Directe du 1er juillet 2005.
En tout état de cause, elle affirme que par application des dispositions de l’article L.3245-1 du code du travail dans leur version applicable à l’époque, les demandes de rappel de salaire de Monsieur [Z] au titre de cette prime sont prescrites antérieurement au 29 mars 2002.
Contrairement aux affirmations de la SAS Adrexo, il résulte de la nature même de son activité notamment de distribution de documents publicitaires de la grande distribution et des mentions figurant sur les bulletins de salaire de juin 1996 à décembre 1996 (pièces n°47-1 à 47-6) faisant état de la ‘CC : Publicité et assimilées’ que celle-ci avait bien pour activité principale la distribution de documents publicitaires et de journaux gratuits, ce dont il se déduit qu’elle était appelée à intervenir dans le cadre de campagnes publicitaires et qu’elle faisait dès lors partie du groupe APE 77.10 «’créateurs et intermédiaires en publicité’» visé par le texte précité, que de ce fait son activité principale entrait bien avant le 1er juillet 2005 dans le champ d’application de la convention collective des entreprises de la publicité’française du 22 avril 1955 étendue par arrêté du 29 juillet 1955’et que ce faisant Monsieur [Z] est fondé à solliciter un rappel de salaire sur la prime d’ancienneté prévue par l’article 18 de cette même convention dans les limites de la prescription quinquennale, soit uniquement pour la période comprise entre le 29 mars 2002 et le 28 août 2003.
A partir du décompte précis présenté par le salarié non utilement contesté par l’employeur en pièce n°56, il convient par infirmation partielle du jugement entrepris de condamner la SAS Adrexo à verser à Monsieur [Z] une somme de 1.161,91 € à titre de rappel de salaire sur prime d’ancienneté outre 116,19 € de congés payés y afférents.
Sur les demandes de dommages-intérêts pour discrimination syndicale et harcèlement moral:
En application des dispositions des articles L 1132-1 et L 1134-1 du code du travail, dans leur version applicable au litige, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou d’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou renouvellement de contrat en raison, entre autres de son origine ou de son appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
En cas de litige, il appartient à celui qui se prévaut d’une discrimination directe ou indirecte de présenter au juge les éléments de fait laissant supposer la situation qu’il dénonce .
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Monsieur [C] [Z] soutient avoir subi une situation de discrimination syndicale en raison d’une activité syndicale intense mise en évidence par une suite ininterrompue de sanctions disciplinaires à compter du mois de juin 1997, dont un avertissement annulé par la juridiction prud’homale et six convocations à un entretien préalable à un éventuel licenciement entre le 22 juillet 1997 et le 10 janvier 2000, procédures systématiquement assorties d’une mise à pied à titre conservatoire n’ayant pas abouti à un licenciement en raison des refus d’autorisation de licenciement opposés à l’employeur tant par l’inspection du travail que par le Ministre de l’Emploi et de la solidarité, l’ensemble de ces décisions ayant relevé la discrimination dont il faisait l’objet.
Il ajoute qu’en février 1998, l’employeur a déposé à son encontre deux plaintes avec constitution de partie civile n’ayant pas donné lieu à son renvoi devant le Tribunal correctionnel, lui même ayant riposté sur le fondement de l’article 91 du code de procédure pénale et ayant obtenu la condamnation de l’employeur, qu’à compter du mois d’avril 2002, la SA Adrexo ne lui a plus fourni de travail, et qu’en mars 2003 deux tracts ont circulé le mettant gravement en cause en rapport évident avec l’employeur , qu’il a ainsi contamment subi des pressions pour démissionner du fait de son activité syndicale.
La SAS Adrexo le conteste et s’étonne que malgré ses fonctions syndicales ayant consisté à assister devant les juridictions prud’homales de très nombreux salariés d’Adrexo, Monsieur [Z] n’ait jamais agi à son encontre à ce titre ayant invoqué ce manquement pour la première fois en 2008, soit cinq ans après son départ de l’entreprise. Elle relève le peu d’éléments versés aux débats par le salarié auquel incombe la charge de soumettre au juge des éléments de fait caractérisant la discrimination, considère que rien ne permet d’affirmer que la procédure de licenciement ait été intentée du fait de l’appartenance syndicale du salarié et affirme qu’en toute hypothèse la prescription quinquennale est acquise relativement aux faits discriminatoires dont celui-ci se plaint entre 1998 et 2000.
Cependant, Monsieur [Z] ayant saisi la juridiction prud’homale le 29 mars 2007, soit antérieurement à la loi du 17 juin 2008 ayant prévu dans un nouvel article L. 1134-5 que ‘l’action en réparation du préjudice résultant d’une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination’, l’ancien délai trentennaire de prescription est applicable et sa demande est recevable.
Monsieur [Z] verse aux débats de nombreux éléments laissant supposer la situation de discrimination syndicale qu’il dénonce.
En effet, à la suite d’un premier avertissement qui lui a été notifié le 5 juin 1997 pour avoir refusé de signer un reçu pour transmission de ses fiches de paie d’avril et de mai 1997 et qui a été annulé par le conseil de prud’hommes de Dunkerque dans un jugement du 22 décembre 1997, il a été convoqué à six reprises dont cinq fois entre le 22 juillet 1997 et le 26 janvier 1998 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, ce dernier n’ayant pas été autorisé par l’inspection du travail laquelle a relevé :
– le 10 septembre 1997 (pièce n°7) que ‘les faits reprochés à l’intéressé présentent un lien certain avec sa qualité de demandeur à l’organisation d’élection et de candidat’ ,
– les 26 mai 1998 et le 28 décembre 1998 que ‘la concordance entre les premiers avertissements adressés au salarié et la première candidature de Monsieur [Z], la multiplicité des procédures engagées à son encontre, l’activité du salarié afin d’obtenir le respect de la législation sociale relative au salaire minimum, l’inertie de l’entreprise dans l’organisation des éléments sur le site de Teteghem..’ et ‘notamment le refus de la société d’accepter la candidature de Monsieur [Z] présentée valablement le 3 juin 1998, date limite de dépôt des candidatures’,
– le 15 mai 2000, ‘l’acharnement dont a fait preuve l’entreprise en 1997 et 1998 contre M. [Z] lié à son statut de salarié demandeur d’élections…’ ‘le fait que la demande d’autorisation de licenciement est liée aux mandats détenus par Monsieur [Z]’.
Il justifie également du dépôt de deux plaintes de la société Le Messager à son encontre avec constitution de partie civile en date des19 février 1998 et 5 août 1998 des chefs de diffamation et de dénonciation calomnieuse pour des propos qu’il aurait tenus au cours d’audiences judiciaires et en raison de sa dénonciation de son employeur pour défaut d’élections de délégués du personnel et produits deux tracts diffamatoires datant de mars 2003dont il impute l’origine à l’employeur.
Si à la suite des plaintes avec constitution de partie civile de l’employeur de février et d’août 1998, Monsieur [Z] n’a pas été renvoyé devant le Tribunal Correctionnel et a, au contraire, été indemnisé de son préjudice et qu’il n’établit nullement un lien de causalité entre les tracts diffamatoires et la Direction ou même des salariés d’Adrexo, force est de constater que l’employeur, qui ne verse aux débats aucun élément démontrant que ses nombreuses tentatives de licencier le salarié sont étrangères au mandat syndical de Monsieur [Z], ne prouve pas que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination syndicale celle-ci ayant été constaté à de nombreuses reprises par l’inspection du travail de sorte que par infirmation des dispositions du jugement entrepris, il y a lieu de condamner la SAS Adrexo à verser à Monsieur [Z] une somme de 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale.
En revanche, il convient de confirmer les dispositions du jugement entrepris ayant rejeté la demande de dommages-intérêts formée par Monsieur [Z] au titre du harcèlement moral.
En effet, si l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail d’agissements de harcèlement moral prévus par l’article L.1152-1 du code du travail matérialisés par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d’altérer sa santé physique et mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la cour constate que Monsieur [Z] qui, au soutien de cette demande, verse aux débats strictement les mêmes éléments que ceux fondant sa demande au titre de la discrimination syndicale ne produit aucune pièce médicale permettant de laisser supposer que les agissements de la SAS Adrexo aient eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible d’altérer sa santé physique et mentale, de sorte que l’examen de l’ensemble des éléments invoqués pris dans leur ensemble ne permet pas de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail.
Sur la rupture de la relation de travail :
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul si les faits invoqués le justifiaient ou dans le cas contraire d’une démission.
Monsieur [Z] soutient que la transaction avait comme finalité en plus des clauses qui y sont mentionnées la négociation de son départ en contournant illégalement les dispositions d’ordre public relatives à son statut protecteur ce qui résulte selon lui de manière irréfutable des télécopies des 11 et 25 août 2003 évoquant sa démission que lui a adressés son avocate, Maître [J] lesquelles établissent également que la transaction a été signée le 27 août 2003 et non le 15 septembre 2003 tel que faussement indiqué par le Directeur Général Monsieur [B] et précise qu’aucun délai n’étant imparti au salarié protégé pour demander sa réintégration lorsque la rupture de son contrat de travail a été prononcée en violation de son statut protecteur, la tardiveté de sa saisine trois années plus tard ne peut lui être opposée.
La SA Adrexo conteste cette analyse fondée par Monsieur [Z] sur un procès-verbal de transaction établi entre les parties le 15 septembre 2013 lequel portait cependant uniquement sur les procédures en cours et nullement sur la rupture du contrat de travail ce que la simple lecture de ce document permet de constater alors que le courrier du 11 août 2003 rédigé par le conseil du salarié évoquait des hypothèses de négociations qui n’ont pas été matérialisées par le protocole signé postérieurement à la démission du salarié suivant courrier en date du 28 août 2003 ce dernier ne faisant état d’aucune difficulté et que Monsieur [Z] n’a évoqué le caractère contraint de sa démission que trois années plus tard.
La cour relève d’une part que Monsieur [Z] lui demande à la fois de dire que le protocole transactionnel porte exclusivement sur le désistement du pourvoi en cassation qu’il a formé à l’encontre de la cour d’appel de Douai du 21 novembre 2002 et que la finalité de celui-ci était en définitivepour l’employeur d’obtenir sa démission alors que selon sa propre analyse et celle de son précédent conseil (pièce n°31) les stipulations d’ordre financier y figurant ne concernent nullement les conséquences de la rupture du contrat de travail mais uniquement le différend l’opposant à la SAS Adrexo à propos de ce pourvoi et qu’il admet qu’aucun des articles du protocole litigieux n’évoque la rupture de la relation de travail ni ne subordonne l’exécution de la transaction à sa démission.
Si la démission de Monsieur [Z] est effectivement évoquée dans la télécopie du conseil de ce dernier du 11 août 2013 concernant le protocole transactionnel, pour autant celle-ci ne figure pas dans ce même document et si le salarié a effectivement démissionné le 28 août 2003, il s’agit d’une démission sans réserve et non équivoque, alors que la contrainte évoquée, qui ne résulte d’aucune des pièces concomitantes à celle-ci, n’a pas été alléguée dans un délai raisonnable l’ayant été plus de trois années plus tard, soit le 16 octobre 2006, que les relations conflictuelles entretenues avec la SA Adrexo depuis plusieurs années avaient été réglées, que la période de discrimination syndicale (juillet 1997 à janvier 2000) était révolue, les derniers faits remontant à plus de trois années et demi, qu’aucun des éléments produits par le salarié ne démontre que les tracts anonymes des 5 et 6 mars 2003 émanaient de la direction ou d’employés de la SAS Adrexo pas plus que ce dernier n’a établi la réalité à cette période de l’appel téléphonique à son domicile du Directeur Général évoquant ‘que la meilleure solution pour lui serait de quitter l’entreprise’, que le désistement de la SAS Adrexo d’une instance engagée à son encontre le 9 juillet 2013 est intervenu antérieurement à la signature du protocole litigieux quelle que soit la date retenue, et qu’enfin, le seul témoignage de M. [L] (pièce n°46) salarié protégé d’Adrexo évoquant durant le 1er semestre 2003 des relations conflictuelles entre le salarié et M. [K], dont la qualité n’est pas même précisée, ne suffit pas à caractériser les pressions exercées par la direction afin qu’il démissionne.
En conséquence, il y a lieu d’approuver la juridiction prud’homale qui a débouté Monsieur [Z] de ses demandes de requalification de sa démission en une prise d’acte produisant les effets d’un licenciement nul pour violation du statut protecteur, de réintégration sous astreinte de celui-ci à son poste de travail, de paiement d’une indemnité limitée de 20 000 € correspondant aux salaires qu’il aurait dû percevoir entre septembre 2003 et décembre 2021.
Sur la demande de dommages-intérêts pour entrave :
Monsieur [Z] réclame une somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour l’entrave délibérée à l’exercice de ses fonctions représentatives aux motifs que la SAS Adrexo l’a harcelé afin de le pousser à la démission, qu’elle a négocié son départ et qu’elle a refusé de le réintégrer alors que ce refus de réintégration d’un salarié protégé est constitutif à lui seul du délit d’entrave.
Cependant, la cour n’ayant retenu ni les agissements de harcèlement moral ni le caractère équivoque de la démission de Monsieur [Z] et ayant de ce fait rejeté sa demande de requalification de la rupture de la relation de travail en une prise d’acte produisant les effets d’un licenciement nul et en conséquence, sa demande de réintégration au sein de la SAS Adrexo, il y a lieu, par confirmation des dispositions du jugement entrepris de débouter Monsieur [Z] de sa demande de dommages-intérêts pour entrave à l’exercice de ses fonctions représentatives.
Sur les intérêts:
Les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires à partir du présent arrêt.
Sur la délivrance des bulletins de paie sous astreinte :
Par infirmation des dispositions du jugement entrepris, il convient d’ordonner à la SAS Adrexo de remettre à Monsieur [Z] des bulletins de salaire rectifiés (période 30 mars 2002 à août 2003) sans qu’il soit toutefois nécessaire d’assortir cette injonction d’une mesure d’astreinte, le salarié étant débouté de cette demande.
Sur les dépens et les frais irrépétibles:
Les dispositions du jugement prud’homal ayant condamné Monsieur [Z] aux dépens de l’instance et l’ayant débouté de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure pénale sont infirmées.
La SAS Adrexo est condamnée aux entiers dépens et à payer à Monsieur [Z] une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour
Statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort :
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [Z] de ses demandes de :
– dommages-intérêts pour préjudice moral et matériel distinct lié au non-paiement de l’intégralité du salaire,
– requalification de sa démission en une prise d’acte produisant les effets d’un licenciement nul,
– réintégration sous astreinte de celui-ci à son poste de travail,
– condamnation de la SAS Adrexo à lui payer une indemnité de 20.000 € au titre des salaires qu’il aurait dû percevoir de septembre 2003 à décembre 2001,
– dommages-intérêts pour harcèlement moral et pour entrave dans l’exercice de ses fonctions représentatives,
L’infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau :
Dit que la transaction ne porte que sur le désistement du pourvoi en cassation formé par Monsieur [Z] à l’encontre de la cour d’appel de Douai du 21 novembre 2002.
Déboute Monsieur [Z] de sa demande de ‘constatation que les article 5 et 6 de la transaction ne comportent aucune concession de la part de la SAS Adrexo et qu’en conséquence la cour est compétente pour trancher tous les éléments du litige sauf ceux repris aux articles 1 à 3 du protocole’.
Requalifie le contrat de travail à temps partiel de Monsieur [Z] en contrat de travail à temps complet.
Condamne la SAS Adrexo à verser à Monsieur [C] [Z] la somme de 11.170,74 € à titre de rappel de salaire pour la période du 30 mars 2002 au 28 août 2003 ainsi que la somme de 1.117,07 € de congés payés afférents.
Dit que la convention collective nationale de la publicité et assimilées était applicable à la société Adrexo jusqu’au 30 juin 2005.
Condamne la SAS Adrexo à verser à Monsieur [C] [Z] une somme de 1.161,91 € à titre de rappel de salaire sur prime d’ancienneté outre 116,19 € de congés payés y afférents.
Condamne la SAS Adrexo à payer à Monsieur [C] [Z] une somme de 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale.
Ordonne à la SAS Adrexo de remettre à Monsieur [Z] des bulletins de salaire rectifiés (période 30 mars 2002 à août 2003).
Dit n’y avoir lieu d’assortir cette injonction d’une mesure d’astreinte.
Rappelle que les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires à partir du présent arrêt.
Condamne la société Adrexo aux entiers dépens et à payer à Monsieur [Z] une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président