Dénonciation calomnieuse : 23 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/09040

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Dénonciation calomnieuse : 23 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/09040
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23 juin 2022
Cour d’appel de Paris
RG n°
19/09040

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRET DU 23 JUIN 2022

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/09040 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAQOE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F18/08035

APPELANT

Monsieur [H] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Etienne BATAILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0320

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/042912 du 02/10/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉE

Société BSL SÉCURITÉ

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Fernando RANDAZZO, avocat au barreau de PARIS, toque : B1054

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Nathalie FRENOY, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Nathalie FRENOY, présidente,

Madame Corinne JACQUEMIN, conseillère

Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Nathalie FRENOY, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [H] [O] a été engagé par la société Alma Sécurité par contrat à durée indéterminée à temps partiel du 11 septembre 2006 en qualité de maître-chien.

Ce contrat a été transféré à la société Atlants le 1er novembre 2011, puis à la société BSL, entreprise privée de gardiennage et sécurité, le 1er octobre 2014.

Un avenant a été signé stipulant qu’il exrçait les fonctions d’agent d’exploitation, N3E3, coefficient 150 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité.

Le 15 décembre 2015, le contrat de travail de M. [O] a été suspendu pour cause de maladie jusqu’au 28 décembre suivant.

Le 5 janvier 2016, la société BSL a convoqué le salarié à un entretien préalable fixé au 18 janvier suivant et par courrier du 21 janvier 2016, lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Contestant la rupture de la relation de travail, M. [O] a saisi le 24 octobre 2018 le conseil de prud’hommes de Paris qui, par jugement du 28 mai 2019, notifié aux parties par lettre du 19 juillet 2019, a :

-condamné la société BSL Paris entreprise privée de gardiennage et de sécurité à payer à M. [O] :

-1 125 euros à titre de rappel de salaire de prime qualité

-112,50 euros à titre de congés payés afférents

-300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

-débouté M. [O] du surplus de ses demandes

-débouté la SAS BSL [Localité 3] entreprise privée de gardiennage et de sécurité de sa demande reconventionnelle

-condamné la SAS BSL Paris entreprise privée de gardiennage et de sécurité aux dépens.

Par déclaration du 14 août 2019, M. [O] a interjeté appel de ce jugement.

Par décision du 2 octobre 2019, M [O] s’est vu octroyer le bénéfice de l’aide juridictionnelle totale.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 février 2020, M. [O] demande à la Cour :

-de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société BSL [Localité 3] entreprise privée de gardiennage et de sécurité à lui verser les sommes de :

-1 125 euros à titre de rappel de prime qualité

-112,50 euros à titre de congés payés afférents

-300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

-de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société BSL [Localité 3] entreprise privée de gardiennage et de sécurité de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,

-d’infirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [O] des demandes suivantes :

*requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse

*30 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

*3 207,32 euros à titre d’indemnité de licenciement

*3 406 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

*340,60 euros au titre des congés payés y afférents

*917 euros à titre de rappel de salaire

*91,70 euros au titre des congés payés y afférents

*1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

*1 703 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité résultat

-intérêts au taux légal (article 1153-1 du Code civil) à compter de la convocation devant le bureau de conciliation,

-capitalisation des intérêts (article 1154 du Code civil),

en conséquence,

-de requalifier le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-de condamner la société BSL [Localité 3] entreprise privée de gardiennage et de sécurité à verser à Monsieur [O] les sommes de :

-30 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-3 207,32 euros à titre d’indemnité de licenciement

-3 406 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

-340,60 euros au titre des congés payés y afférents

-917 euros à titre de rappel de salaire

-91,70 euros au titre des congés payés y afférents

-1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

-1 703 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité-résultat

-1 500 euros sur le fondement de l’article 37 de la loi de 1991

-d’ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir et du bulletin de salaire du mois de décembre 2015,

-intérêts au taux légal (article 1153-1 du Code civil) à compter de la convocation devant le bureau de conciliation,

-capitalisation des intérêts (article 1154 du Code civil),

-de débouter la société BSL [Localité 3] entreprise privée de gardiennage et de sécurité de l’ensemble de ses demandes,

-de condamner la société BSL [Localité 3] entreprise privée de gardiennage et de sécurité aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 mars 2020, la société BSL Sécurité demande à la Cour :

-de la déclarer recevable en ses écritures et l’y déclarer bien fondée,

-de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Paris en ce que :

*il a dit le licenciement de Monsieur [O] fondé sur une faute grave,

*il a débouté M. [O] de sa demande d’indemnisation fondée sur la prétendue violation de l’obligation de sécurité,

*il l’a débouté de sa demande de rappel de salaire,

-d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions,

et, ce faisant,

-de débouter Monsieur [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-de condamner Monsieur [O] à payer à la société BSL Sécurité la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

-de condamner Monsieur [O] aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 15 mars 2022 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 17 mai 2022.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu’aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur l’obligation de sécurité :

M. [O] considère que son employeur a manqué à son obligation de sécurité dans la mesure où il a fait l’objet de deux agressions de la part de son supérieur hiérarchique, M. [E], a été placé en arrêt de travail consécutivement et a alerté à plusieurs reprises sa hiérarchie sans recevoir de réponse autre qu’un rappel à l’ordre dirigé contre lui. Il sollicite l’infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société BSL Sécurité à lui verser la somme de 1703 €, correspondant à un mois de salaire, à titre de dommages-intérêts.

La société BSL Sécurité fait valoir qu’à la suite de la dénonciation par M. [O] de ses conditions de travail et de sa mésentente avec le chef de site, elle a pris l’initiative de l’affecter sur un autre site, celui de la Gare [5], étant contrainte d’agir ainsi dans la mesure où tout entretien à ce sujet avec le salarié s’est avéré impossible. Elle estime avoir pris les mesures nécessaires pour éviter tout conflit et conclut au rejet de la demande.

Aux termes de l’article L4121-1 du code du travail, ‘l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes’.

L’obligation de sécurité pesant sur l’employeur est générale et suppose qu’il s’assure que le salarié n’est pas exposé à un risque, ou si tel est le cas, mette en ‘uvre les moyens nécessaires pour le prévenir. Il peut s’exonérer de sa responsabilité en démontrant avoir pris toutes les mesures nécessaires pour éviter le dommage subi par le salarié.

Si la société BSL Sécurité justifie de son courrier du 20 novembre 2014 par lequel elle informe M. [O], après avoir tenté d’organiser un entretien relativement aux mauvaises relations entretenues avec son chef de site, M. P, de son affectation sur un autre site à compter du 1er décembre 2014, elle n’apporte aucun élément relatif au risque dénoncé par M. [O] à la fin de l’année 2015.

La pièce n°36 du salarié permet au contraire de vérifier, consécutivement à son courriel du 16 novembre 2015 évoquant les ‘menaces d’avertissement’ de M. [E] à son encontre et la nécessité que les consignes lui soient données par écrit pour éviter tout litige, que la directrice d’agence par courriel du même jour a regretté que le salarié conteste à nouveau les ordres qui lui sont donnés, pense avoir toujours raison, rappelant que les rapports reçus le concernant seraient traités comme ils le sont pour les autres membres du personnel, sans porter attention au risque mis en évidence.

Par ailleurs, il n’est nullement justifié d’une quelconque enquête ou suite apportée par l’employeur dans le cadre de son obligation de sécurité au courrier du 11 décembre 2015 par lequel le salarié s’est plaint d’insultes de la part de son supérieur hiérarchique à l’occasion d’une altercation violente.

En l’état des suspensions de son contrat de travail pour cause de maladie ( du 15 décembre au 18 février 2016), l’appelant est en droit d’obtenir réparation du préjudice qu’il a ainsi subi, à hauteur de la somme réclamée.

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement adressée le 21 janvier 2016 à M. [O] énonce les motifs suivants, strictement reproduits :

« (…) Vous êtes régulièrement planifié en tant qu’agent de sécurité cynophile sur le site SEPADEF de 7h à 17 h pour en assurer la surveillance et la sécurité.

À plusieurs reprises, nous avons été informés que vous vous absentiez du site durant vos pauses rémunérées, notamment :

Les 07/12/15 et 08/12/2015, votre chef de poste nous a alertés de votre absence à votre poste de travail entre 12h et 14h, soit pendant 2 heures, et ce malgré le fait que votre pause réglementaire rémunérée ne saurait dépasser 20 minutes, et qu’il s’agit d’un temps de travail effectif pendant lequel vous devez rester à la disposition de l’employeur, vous conformer à ses directives et durant lequel vous ne pouvez ni vaquer à vos occupations personnelles ni quitter votre lieu de travail et ce pour des raisons de sécurité évidentes.

Le 14/12/2015, notre Directeur des Opérations s’est rendu sur le site et a constaté que vous aviez – une nouvelle fois – quitté le site de 12h35 à 13h sans autorisation aucune, nous empêchant ainsi de remplir notre obligation de moyen et de fait compromettant la sécurité du site.

Il nous a aussi été rapporté par plusieurs de vos collègues que – en cas d’intervention durant vos absences – vous vous faisiez alors appeler par l’un d’entre eux sur votre téléphone personnel, ce que notre Directeur des opérations a lui-même constaté le 14/12/15 lorsqu’il a dû demander à Monsieur [G] de vous téléphoner pour vous demander de revenir au PC assurer votre mission.

Qui plus est, nous avons également été informés qu’à plusieurs reprises, en visitant le site, vous avez aussi laissé votre chien au PC, ce qui est formellement interdit par la réglementation qui prévoit expressément la présence continue et immédiate du maître propriétaire du chien en tous lieux.

Par ailleurs, plusieurs de vos collègues de travail se sont plaints d’insultes, de propos racistes et de comportements agressifs et provocateurs, de votre part à leur encontre : notamment par votre refus de vous soumettre aux consignes données par votre chef de site, vos imitations de comportements et de cris de singe à l’égard de ce dernier, le plaçant dans une situation particulièrement humiliante et portant atteinte à la dignité de sa personne, étant précisé que la vigueur de vos propos l’a contraint à s’en plaindre à la Directrice de l’Agence de [Localité 3], notamment le 11 décembre 2015.

Votre attitude est totalement contraire au code de déontologie qui régit notre profession, et particulièrement les articles relatifs à la dignité, l’attitude professionnelle, le respect et la loyauté qui prévoient que :

«1. Les acteurs de la sécurité privée s’interdisent tout acte, man’uvre ou comportement de nature à déconsidérer la personne humaine.

2. En toute circonstance, ils s’interdisent d’agir contrairement à la probité, à l’honneur et à la dignité. Ils font preuve de discernement et d’humanité.

3. Ils font preuve entre eux de respect et de loyauté.»

Ainsi qu’à l’article 8 de notre règlement intérieur relatif à la discipline à l’exécution du contrat de travail qui précise que « le personnel est tenu de respecter les instructions de ses supérieurs hiérarchiques, ainsi que l’ensemble des directives, instructions et consignes, et qu’il est notamment interdit :

– de troubler le bon ordre et la discipline ;

– de se quereller;

– de quitter son poste ;

– d’adopter une attitude discourtoise ou injurieuse vis-à-vis du personnel ou de la clientèle ;

-de refuser d’exécuter une tâche entrant dans ses fonctions;

-de prononcer des propos injurieux ou diffamatoires ;

Etant explicitement prévu que ‘Tout acte contraire aux instructions et à la discipline est passible de sanction’.

Compte tenu de tout ce qui précède, force est de constater que vous avez d’une part, gravement manqué à vos obligations contractuelles en abandonnant le site à plusieurs reprises et sans autorisation, mettant en péril la sécurité du site, alors que vous êtes employé pour ce faire, vous faites preuve d’une insubordination caractérisée vis-à-vis de votre chef de site, ainsi que d’une conduite totalement inappropriée à son égard en portant atteinte à sa dignité.

Votre comportement est inacceptable, nous ne pouvons tolérer pareils agissements de votre part. Ceux-ci perturbent le bon fonctionnement du service de sécurité, et sont, qui plus est, totalement incompatibles avec la fonction que vous occupez.

En conséquence, et pour l’ensemble des motifs énoncés ci-dessus, nous vous notifions par la présente votre licenciement immédiat pour faute grave. »

M. [O] affirme que son licenciement a eu lieu dans un contexte de travail particulièrement dégradé, à la suite du licenciement du Chef de poste qui s’était associé aux plaintes des salariés sur les conditions d’hygiène sur le lieu de travail et de son remplacement par M.[E], chargé de ‘remettre de l’ordre’, lequel l’a agressé physiquement et verbalement à plusieurs reprises, le contraignant à déposer plainte les 11 et 14 décembre 2015. Il conteste formellement les faits qui lui sont reprochés et relève que son employeur échoue dans la démonstration de leur réalité puisque les deux attestations produites sont vagues et fallacieuses, émanant au surplus de deux salariés de l’entreprise. Il réclame une indemnité de licenciement à hauteur de 3 207,32 € compte tenu de son ancienneté de neuf ans et quatre mois, une indemnité compensatrice de préavis d’un montant de 3406 €, les congés payés y afférents, ainsi qu’une indemnité pour licenciement sans cause tenant compte de sa période de chômage et de l’absence de toute perspective pérenne d’emploi compte tenu de son âge, à savoir 30’000 €.

La société BSL Sécurité, rappelant que M. [O] ne rapporte nullement la preuve dont il a la charge conformément aux exigences de l’article L 1154-1 du code du travail, invoque l’abandon répété de poste dont le salarié se rendait coupable, obligeant ses collègues à l’appeler en cas de contrôle. Elle fait valoir que le Directeur des opérations, sur site, a constaté la longue absence du salarié entre 12 et 14 heures alors que sa pause réglementaire ne doit pas dépasser 20 minutes, d’autant que le site SEPADEF est un site sensible et qu’aucune autorisation de quitter son poste n’a été accordée à l’intéressé (qui avait déjà fait l’objet d’un avertissement pour des faits similaires ). La société intimée invoque également les insultes, dénigrements et invectives à l’encontre des autres salariés et du chef de service, M. [O] ayant instauré un climat de peur par son comportement particulièrement agressif, provoquant de nombreux troubles au sein de l’entreprise. Elle demande que le licenciement pour grave soit dit parfaitement justifié.

La faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; il appartient à l’employeur d’en rapporter la preuve.

La société BSL Sécurité ne saurait s’exonérer de la charge de cette preuve, en invoquant les doléances du salarié relativement à ses conditions de travail.

Pour démontrer la réalité, l’imputabilité au salarié et la gravité des faits ayant justifié, selon elle, le licenciement, la société BSL Sécurité verse aux débats notamment :

– l’avertissement notifié à M. [O] le 29 avril 2015 pour une absence injustifiée de trois jours les 25, 26 et 30 mars 2015,

– le planning du 1er octobre 2014 au 30 novembre 2015 concernant M. [O],

– le règlement intérieur de l’entreprise,

– le courriel du 7 décembre 2015 de M. [E], chef de site, indiquant ‘pour information M. [O] s’absente sur le site de 12 heures à 14h30, il nous dit pas où il est ni ce qu’il va faire et ce n’est pas la première fois, ça commence à être une habitude pour lui. Témoin M. [N] qui l’a attendu au PC pendant ce temps pour aller en ronde’,

-le courriel du 8 décembre 2015 de M. [E] faisant état à nouveau de l’absence de M. [O] de 12 à 14 heures,

– l’attestation d’un agent de sécurité, M. [N], affirmant subir une ‘pression psycologique’ de la part de l’appelant qui tient des propos à caractère raciste et des insultes ‘(imitation des singes, sale Rebeux…)’ depuis l’arrivée de M. [E] au poste de chef de site, ‘certaines consignes non respectées prétextant qu’il veut faire ce qu’il veut’, (…) ‘le 08/12/2015, à 12 h à 14 h ; le 07/12 ‘ 2015 à 12h à 14h il n’était pas au PC’, ‘à partir du 18 /11/2015 quand j’étais en équipe avec M.. j’ai constaté qui ne prenait pas sa pose au PC et qu’en cas d’intervention je devais l’appeler sur son téléphone personnel. Octobre novembre 2015 M. [O] a laissé à plusieurs reprises son chien au PC. Le chien m’a sauté dessus provoquant à sentiment de peur et de danger. Le 07/12/15 et le 08/12/15 ainsi que d’autres jours M. [O], alors nous étions en retours de ronde pour prendre notre pose s’est arrêté à son domicile me laissant ramener la voiture au PC. Celui-ci n’avait pas la radio’ ( sic),

– l’attestation d’un autre salarié de la socité BSL Sécurité, agent de sécurité, indiquant ‘Monsieur Agent Maître Chien [O] entre sont chien au PC accroché sur les deux palettes pour faire fin de service et quand on parler pour M. [I][M] ce dernier me dit c’est une balance’ et que M. [O] n’a pas voulu donner la clé d’une voiture de service.

Dans la mesure où le planning produit ne permet que de confirmer les jours de service du salarié et non les griefs qui lui sont reprochés dans la lettre de licenciement, ces derniers apparaissent ne pas être suffisamment démontrés par une attestation peu compréhensible relatant des faits très vagues et une seconde sujette à caution dans la mesure où elle émane d’un agent de sécurité ayant un lien de subordination avec l’employeur, décrivant, au surplus, de façon très imprécise différents manquements de son collègue (ceux qui sont non datés dans la lettre de licenciement) -dont il n’est pas justifié qu’il se soit plaint auparavant auprès de sa hiérarchie-, mais précise les dates (‘8 et 7 décembre 2015 ‘( sic)) des abandons de poste conformément aux reproches faits ( et datés) par l’employeur dans cette même lettre.

Il convient de relever en outre la relative contradiction entre les déclarations de ce salarié et celles du chef de site relativement à la durée de l’absence du 7 décembre 2015 et à l’articulation de cette absence avec la ronde et la pause prévues.

Il y a lieu de souligner enfin qu’aucun écrit n’est produit de la part du Directeur des opérations venu sur site le 14 décembre suivant et ayant constaté une pause de 25 minutes de la part de l’appelant, ainsi que cela résulte de la lettre de licenciement.

La preuve des faits reprochés ne saurait donc être rapportée par ces seuls éléments, en l’absence de tout autre donnée objective, d’autant qu’il a été vu que M. [O] s’était plaint peu avant notamment des conditions d’insalubrité du local de pause mis à la disposition du personnel ( envoi par ses soins d’un courrier collectif de doléances à la DIRECCTE d’Ile de France , reçu le 5 novembre 2015) , ainsi que de ses relations tendues avec le chef de site ayant dénoncé les faits litigieux – contre lequel il a déposé plainte à deux reprises-.

Il convient donc de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Tenant compte de l’âge du salarié (47 ans) au moment de la rupture, de son ancienneté (9 ans et 4 mois), de son salaire moyen mensuel brut (soit 1 703€), de l’absence de justification de sa situation consécutive à la rupture mais de la production de documents relatifs à une indemnisation par Pôle Emploi de juillet à août 2018 et de mars à avril 2019, il y a lieu de fixer à 15 000 € les dommages et intérêts lui revenant pour ce licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il convient d’accueillir également la demande d’indemnité compensatrice de préavis, de congés payés y afférents et d’indemnité de licenciement à hauteur des montants réclamés, correspondant aux droits du salarié et non strictement contestés par la société intimée.

Sur le rappel de salaire :

M. [O] soutient qu’il a accompli 1 991 heures de travail effectif entre octobre 2014 et novembre 2015 et n’a été payé qu’à hauteur de 1 903 heures de travail. Il sollicite donc la somme de 917 € à titre de rappel de salaire ainsi que les congés payés y afférents.

Il résulte des dispositions de l’ article L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des

exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des

pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, M. [O] produit ses bulletins de salaire ainsi qu’un tableau, renseigné mois par mois d’octobre 2014 à novembre 2015, portant en outre des mentions manuscrites chiffrées.

Alors que le salarié ne disconvient pas de la mise en place au sein de l’entreprise d’un avenant à l’accord relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail signé le 22 juin 2010, avenant en date du 16 septembre 2013 prévoyant les modalités d’aménagement du temps de travail du personnel d’exploitation, ainsi que le traitement des heures supplémentaires calculées ‘compte tenu de l’organisation du temps de travail dans un cadre annuel’ en fin de période et par référence au plafond de 1607 heures notamment, il ne justifie nullement de la pertinence de son décompte d’octobre 2014 à novembre 2015 alors que sa présence au sein de l’entreprise était complète sur l’exercice 2014 et sur l’exercice 2015.

Les éléments produits, très imprécis au surplus, sont par conséquent manifestement insuffisants quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies pour permettre à la société BSL Sécurité d’y répondre utilement.

La demande de rappel de salaire doit donc être rejetée, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur le rappel de prime qualité :

Invoquant un courrier du 19 septembre 2014 de son employeur s’engageant à lui verser une prime de qualité de 75 € par mois, en remplacement de son indemnité de transport conventionnel, M. [O] indique qu’il ne s’est jamais exécuté, son salaire de base ayant toujours correspondu au minimum conventionnel. Il sollicite donc la somme de 1125 € ainsi que les congés payés y afférents, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.

La société BSL Sécurité fait valoir que le paiement d’une prime s’impose quand il s’agit d’un complément de rémunération présentant un caractère de généralité, de constance et de fixité, mais ne s’impose pas quand il s’agit d’une gratification dont le versement dépend de facteurs subjectifs et discrétionnaires. Estimant n’avoir eu aucune obligation de verser cette prime de qualité, par définition discrétionnaire, et non contractualisée, elle conclut au rejet de la demande et à l’infirmation du jugement de ce chef.

M. [O] verse aux débats un courrier du 19 septembre 2014 de son employeur lui confirmant sa proposition de transfert de son contrat de travail au sein de l’entreprise ‘aux mêmes conditions de salaire brut que celles de votre rémunération actuelle avec le versement mensuel d’une prime de qualité de 75 euros brut qui viendra en remplacement de votre indemnité de transport non conventionnelle. Elle représente un net mensuel de 58 euros mais doit être remontée dans le brut afin de respecter les dispositions législatives’.

Le versement de cette prime tend donc à compléter le salaire de M. [O] pour le rendre égal, dans le cadre du transfert du contrat de travail, à celui précédemment perçu; par conséquent, nonobstant l’absence de tout écrit confirmant l’accord du salarié – dans la mesure où le transfert lui-même a été effectif et donc accepté -, cette prime faisait partie de la rémunération et devait être versée chaque mois.

Il convient d’accueillir la demande de rappel de salaire à hauteur du montant réclamé, ainsi que les congés payés y afférents, par confirmation du jugement entrepis de ce chef.

Sur la dénonciation calomnieuse :

M. [O] critique la demande formulée par son adversaire dans le corps de ses conclusions, tendant à la réparation d’une dénonciation calomnieuse.

Si la société BSL Sécurité dénonce effectivement de tels faits de la part du salarié, force est de constater qu’elle ne formule aucune demande à ce titre dans le dispositif de ses conclusions.

Il convient de relever par conséquent que la Cour n’est pas saisie de cette demande.

Sur les intérêts :

Conformément aux dispositions des articles 1153, 1153-1 (anciens), 1231-6 et 1231-7 (nouveaux) du Code civil et R1452-5 du code du travail, les intérêts au taux légal, avec capitalisation dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil, courent sur les créances fixées en fonction du contrat ou de la loi (indemnité de licenciement, indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis, rappel de prime et congés payés y afférents) à compter de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation, sur les créances indemnitaires confirmées à compter du jugement de première instance et sur les autres sommes à compter du présent arrêt.

Sur la remise de documents :

La remise d’une attestation Pôle Emploi, d’un certificat de travail et d’un bulletin de salaire rectificatif conformes à la teneur du présent arrêt s’impose.

Sur le remboursement des indemnités de chômage :

Les dispositions de l’article L 1235-4 du code du travail permettent, dans le cas d’espèce, le licenciement de M. [O] étant sans cause réelle et sérieuse, d’ordonner le remboursement par la société BSL Sécurité des indemnités chômage perçues par l’intéressé, dans la limite de six mois d’indemnités.

Le présent arrêt devra, pour assurer son effectivité, être porté à la connaissance de Pôle Emploi, conformément aux dispositions de l’article R 1235-2 alinéas 2 et 3 du code du travail.

Sur les dépens et les frais irrépétibles:

L’employeur, qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance, par confirmation du jugement entrepris, et d’appel.

L’équité commande de confirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles, comme le sollicite l’appelant, mais de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile en l’état de l’aide juridictionnelle obtenue par M. [O], qui ne saurait valablement demander en son nom une quelconque somme sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement déféré, sauf en ses dispositions relatives à la prime de qualité, aux congés payés y afférents, au rappel de salaire et aux congés payés y afférents, aux frais irrépétibles et aux dépens,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT le licenciement de M. [H] [O] dépourvu de cause réelle et sérieuse

CONDAMNE la société BSL Sécurité à payer à M. [O] les sommes de :

– 3 406 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 340,60 € au titre des congés payés y afférents,

– 3 207,32 € à titre d’indemnité de licenciement,

– 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1 703 € à titre de dommages-intérêts pour manquements à l’obligation de sécurité,

DIT que les intérêts au taux légal, avec capitalisation dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil, sont dus à compter de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation pour les créances de sommes d’argent déterminées à raison du contrat de travail ou de la loi, à compter du jugement de première instance pour les sommes indemnitaires confirmées et à compter du présent arrêt pour le surplus,

ORDONNE la remise par la société BSL Sécurité à M. [O] d’une attestation Pôle Emploi, d’un certificat de travail et d’un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la teneur du présent arrêt, au plus tard dans le mois suivant son prononcé,

ORDONNE le remboursement par la société BSL Sécurité aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage éventuellement payées à M. [O], dans la limite de six mois,

ORDONNE l’envoi par le greffe d’une copie certifiée conforme du présent arrêt, par lettre simple, à la Direction Générale de Pôle Emploi,

REJETTE les autres demandes des parties,

CONDAMNE la société BSL Sécurité aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

 


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