Retenues sur salaire : 12 mai 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/05135

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Retenues sur salaire : 12 mai 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/05135

12/05/2023

ARRÊT N°2023/218

N° RG 21/05135 – N° Portalis DBVI-V-B7F-ORJH

SB/LT

Décision déférée du 10 Novembre 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( F19/01744)

A. SAUBENS

Section activités diverses

MORAD DJOUAHER

C/

S.A. CHEOPS TECHNOLOGY FRANCE

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le 12 mai 2023

à Me MERIEUX, Me MORET

Ccc à Pôle Emploi

le 12 mai 2023

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DOUZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

Monsieur [E] [G]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Solène MERIEUX, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIM »E

S.A. CHEOPS TECHNOLOGY FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Carole MORET de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant S. BLUM », présidente chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUM », présidente

M. DARIES, conseillère

N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par S. BLUM », présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre

FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [G] a été embauché le 4 janvier 2016 par la société Cheops technology en qualité de technicien système et réseaux suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale Syntec.

Après avoir été convoqué par courrier du 11 octobre 2018 à un entretien préalable au licenciement fixé au 23 octobre 2018, il a été licencié par courrier du 26 octobre 2018 pour faute grave.

Le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 25 octobre 2019 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.

Le conseil de prud’hommes de Toulouse, section activités diverses, par jugement du 10 novembre 2021, a :

-ordonné la jonction du dossier RG 19/01744 avec le dossier RG 20/01396, pour une meilleure administration de la justice,

-rejeté l’intégralité des demandes de M. [G],

-rejeté la demande reconventionnelle de la société Cheops technology,

-débouté les parties sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

-laisse les dépens à la charge de M. [G].

***

Par déclaration du 30 décembre 2021, M. [E] [G] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 30 novembre 2021, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

***

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 29 mars 2022, M. [G] demande à la cour de :

*infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 20 novembre 2021 en ce qu’il a débouté M. [G] de l’intégralité de ses demandes,

*dire et juger que le licenciement pour faute grave dont a fait l’objet M. [G] ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse, et est intervenu dans des conditions vexatoires,

en conséquence,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 1 277,50 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 3 360 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 336 euros bruts au titre de l’indemnité de congés payés sur préavis,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 6 125 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 10 080 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 2 569,79 euros bruts au titre des rappels d’heures supplémentaires,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 256,98 euros bruts au titre des congés sur rappel d’heures supplémentaires,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de10 080 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 583,50 euros au titre du remboursement des salaires indument prélevés,

*condamner la société Cheops technology au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

*condamner la société Cheops technology au paiement des entiers dépens.

***

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 28 juin 2022, la société Cheops technology demande à la cour de :

*confirmer le jugement,

*dire et juger le licenciement pour faute grave de M. [G] légitime,

*débouter M. [G] de ses demandes:

-d’indemnité compensatrice de préavis,

-d’indemnité de congés payés sur préavis,

-d’indemnité de licenciement,

-d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-de dommages et intérêts pour condition vexatoire de la rupture,

-de rappel de salaire à titre d’heures supplémentaires et d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel d’heures supplémentaires, prescrites pour la période antérieure au 25 octobre 2016,

-d’indemnité pour travail dissimulé,

-d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

*à titre infiniment subsidiaire, en cas de condamnation de la société à rembourser des retenues sur salaires indues, condamner M. [G] à rembourser à la société Cheops technology la somme de 583,50 euros,

*débouter M. [G] de l’ensemble de ses demandes,

*condamner M. [G] au paiement d’une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

*condamner M. [G] aux entiers dépens.

***

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 24 février 2023.

Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en rappel de salaire pour heures supplémentaires

L’employeur se prévaut d’un accord collectif d’entreprise du 8 décembre 2008 qui soumet les salariés relevant du statut ETAM à la modalité 2 de l’accord de branche du 22 juin 1999 et prévoit un horaire hebdomadaire de 37 à 38h30 moyennant une rémunération forfaitaire correspondant à 110% ou 115% du minimum conventionnel selon l’horaire effectué , ainsi que des jours de RTT. Il fait valoir que la rémunération annelle de 21 000 euros perçue par le salarié était supérieure à 110% du minimum conventionnel et que celui-ci a bénéficié de 19 jours de RTT, de sorte qu’il a été rempli de ses droits. Il soulève en tout état de cause la prescription de la demande en rappel de salaire formée sur la période antérieure au 25 octobre 2016 en considération de la saisine de la juridiction prud’homale le 25 octobre 2019. Il ajoute que le salarié ne peut prétendre au paiement d’un rappel de salaire entre 35 et 37h mais seulement à la majoration de salaire des heures supplémentaires.

Le salarié soutient quant à lui que son contrat de travail ne fait aucune référence à l’accord collectif du 8 décembre 2008, de sorte que la convention de forfait lui est inopposable. Il ajoute que l’octroi par l’employeur de 19 jours de RTT n’a pas compensé la totalité des heures supplémentaires accomplies entre 35 et 37 heures hebdomadaires sur 146 semaines. Il s’estime créancier de 185,60 heures supplémentaires.

Sur ce

La convention de forfait dite ‘modalité 2″ de la convention collective Syntec (accord de branche du 22 juin 1999) à laquelle l’employeur fait référence s’analyse en convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire. Faute d’avoir fait l’objet d’un consentement express individuel du salarié dans son contrat de travail ou par avenant, la convention de forfait est irrégulière et inopposable au salarié.

Le décompte et le paiement des heures supplémentaires doivent donc s’effectuer selon le droit commun, au regard de la durée légale de trente-cinq heures hebdomadaires et du temps de travail contractuellement fixé à 37h par semaine.

Le contrat de travail de M.[G] précise qu’il perçoit une rémunération de 1680 euros pour un horaire hebdomadaire de 37h sans précision permettant de déterminer si cette rémunération comprend les majorations des deux heures supplémentaires par semaine. De même les bulletins de salaire ne précisent ni le salaire horaire de base ni le nombre d’heures de travail correspondant à la rémunération allouée. En conséquence il est dû au salarié le paiement de deux heures supplémentaires par semaine au titre des 36ème et 37ème heures sur la période de trois ans non prescrite du 25 octobre 2016 au 25 octobre 2019, date de saisine du conseil de prud’hommes.

Sur la base des éléments de calculs fournis par le salarié en page 12 de ses écritures, et dont la cour a vérifié l’exactitude, il sera alloué au salarié sur 146 semaines, une fois déduits les 19 jours de RTT dont le salarié a bénéficié au cours de la période concernée, la somme de 2 569,79 euros outre l’indemnité de congés payés correspondante de 256,98 euros.

Sur le travail dissimulé

L’article L. 8221-5 du Code du travail dispose qu’« est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur (..) de mentionner sur le bulletin de paie (.. ) un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli ».

Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.

La cour estime que le caractère intentionnel de la dissimulation d’emploi ne peut se déduire du seul accomplissement d’heures supplémentaires par M.[G] et que le défaut de contrôle des heures de travail effectivement réalisées alors que l’intéressé était soumis à une convention de forfait en heures ne permet pas de caractériser l’intention frauduleuse nécessaire à l’établissement du travail dissimulé. M. [G] sera débouté de sa demande en ce sens.

Sur le licenciement

Tout licenciement doit être fondé sur une cause à la fois réelle et sérieuse.

Aux termes de l’article L. 1232-6 du code du travail, l’employeur est tenu d’énoncer dans la lettre de licenciement, le ou les motifs du licenciement. La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. La charge de la preuve de la faute grave incombe à l’employeur. En cas de doute, celui-ci profite au salarié.

Le courrier de licenciement en date du 26 octobre 2018 est ainsi rédigé :

‘Vous avez été régulièrement convoqué à un entretien préalable de licenciement par lettre recommandée avec avis de réception distribuée le 13 octobre 2018.

Au cours de cet entretien du 23 octobre 2018, Madame [R] [K] vous a exposé les motifs qui nous amenaient à envisager votre licenciement. Les explications recueillies auprès de vous au cours de cet entretien n’ayant pas permis de modifier notre appréciation des faits, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Comme Madame [R] vous l’a expliqué, vous faites preuve d’une insubordination répétée en décidant unilatéralement de ne pas vous présenter aux réunions de travail hebdomadaires organisées par votre responsable Monsieur [S].

Pour rappel, vous avez reçu un avertissement le 07 août 2018 compte tenu de votre décision unilatérale de ne pas vous présenter à la réunion de travail du 10 juillet 2018 et cela alors même que votre responsable vous avait alerté sur votre présence obligatoire suite à vos absences aux réunions précédentes du 20 juin 2018 et 26 juin 2018. Par le présent avertissement nous vous avons demandé de vous soumettre aux impératifs professionnels à défaut de quoi nous serions contraints d’envisager à votre encontre d’autres sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’au licenciement.

Or, vous avez de nouveau fait preuve d’insubordination en ne vous présentant pas à la réunion hebdomadaire du 18 septembre 2018 et du 25 septembre 2018. Par un avertissement distribué le 26 septembre 2018, nous vous sommons une nouvelle fois d’assister aux réunions organisées par votre responsable étant encore précisé qu’à défaut de vous soumettre aux impératifs fixés par votre responsable, vous vous exposez à d’autres sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’au licenciement.

Malgré ces différentes alertes, force est de constater que vous perdurez à faire preuve d’insubordination puisque vous ne vous êtes pas présenté aux réunions hebdomadaires suivantes:

réunion du 03 octobre 2018, du 09 octobre 2018, du 16 octobre 2018 et du 23 octobre 2018.

Alors même que vous recevez le 13 octobre 2018 la lettre de convocation à entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement pour motif disciplinaire, vous ne vous présentez pas aux réunions de travail qui suivent (réunion du 16/10 et du 23/10).

Lors de l’entretien préalable, la seule explication que vous fournissez est la suivante : « je suis à mon bureau et je travaille ». Or, comme cela vous a été indiqué tant par écrit dans vos avertissements préalables qu’à l’oral par Madame [R], il ne vous appartient pas de décider unilatéralement de ne pas venir aux réunions hebdomadaires de travail organisées par votre responsable.

Nous vous rappelons que le planning de ces réunions hebdomadaires a été instauré afin de permettre un partage d’informations et de directives nécessaires à la bonne exécution de la mission des techniciens auprès de notre client. L’objet de ces réunions visant à assurer, au-delà de la distribution des missions respectives, un partage d’informations et une analyse des problématiques rencontrées par chacun des techniciens pour les résoudre ensemble. C’est l’occasion de faire un point sur les actions à mener et le suivi des projets d’installation. L’objectif étant que chaque technicien de l’équipe dispose du même niveau d’information (informations techniques et clients) et que soient traités les sujets bloquants et organiser les priorités.

Outre le planning hebdomadaire fixé dès le mois de mai 2018 pour ces réunions et malgré les invitations Outlook, vous avez cumulé les absences et impacté ce faisant la qualité de votre travail et le service attendu par le client.

En outre, il s’avère également que vous faites preuve de négligences fautives dans l’exécution de vos missions auprès du client Caisse d’Epargne Midi Pyrénées (CEMP).

Ainsi, vos manquements professionnels fautifs ont occasionné un avertissement, remis en main propre le 27 juin 2017, par lequel nous vous demandions de faire preuve de professionnalisme et de réaliser correctement vos missions compte tenu des impératifs du client.

Dans l’avertissement reçu le 07 août 2018, nous vous alertons sur le fait que notre client CEMP déplore votre mauvaise volonté, celui-ci nous ayant fait part de votre attitude intolérable.

Dans l’avertissement distribué le 26 septembre 2018, nous vous faisons part du mécontentement et de l’insatisfaction du client et nous vous rappelons que vous devez exécuter votre prestation de travail dans l’intérêt du client.

Par mail du 10 octobre 2018, le client, las de votre manque de rigueur dans la gestion des demandes d’intervention et des dysfonctionnements en interne dus à vos négligences fautives nous demande votre retrait des interventions au siège et dans les filiales de la CEMP.

Nous considérons que ces faits, qui mettent en cause la bonne marche du service, constituent une faute grave rendant impossible votre maintien dans l’entreprise. Votre licenciement prend donc effet immédiatement. Votre solde de tout compte sera arrêté à la date d’envoi de cette lettre sans indemnité de préavis ni de licenciement.

Mardi 30 octobre 2018 à 14h vous restituerez tous les matériels professionnels en votre possession à Madame [R], à l’agence de [Localité 5] ([Adresse 6]) à savoir :

-téléphone portable et accessoires afférents (batterie, chargeur, carte Sim)

-documents sous toutes formes propriétés de l’entreprise, en votre possession.

Vous restituerez également votre véhicule de société Citroën C4 attribué neuf le 04/05/2018 lequel doit être parfaitement propre et nettoyé, (intérieur et extérieur).

A l’issue de ces restitutions, les éléments afférents à votre solde de tout compte vous seront remis, à savoir:

-votre dernier bulletin de paie et paiement de votre solde,

-votre certificat de travail.

-votre attestation Pôle Emploi,

-et votre reçu pour solde de tout compte, dont vous nous retournerez un exemplaire revêtu de votre signature et de la mention manuscrite «Bon pour solde de tout compte».

Vous trouverez ci-joint un courrier explicatif relatif à la possibilité de proroger vos droits en matière de prévoyance et frais de santé via les contrats d’assurance actuellement en place au sein de la Société sous réserve de votre prise en charge par Pôle Emploi.

Nous profitons de la présente pour vous préciser que nous vous délions de votre obligation de non concurrence prévue à l’article 16 de votre contrat de travail. Vous êtes donc libre de toute obligation de non concurrence envers nous, tout en demeurant tenu de ne pas effectuer d’acte de concurrence déloyale ainsi que de respecter une obligation de discrétion à l’égard des éléments confidentiels dont vous avez eu connaissance à l’occasion de votre travail.

En effet, nous vous rappelons le contenu de l’article 14 « Clause de secret professionnel et de discrétion » de votre contrat de travail, selon lequel vous vous êtes notamment engagé « tant pendant l’exécution qu’après l’expiration du présent contrat, à observer une discrétion professionnelle absolue pour tout ce qui concerne les faits ou informations dont il aura connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de ses fonctions. Il s’interdit notamment pendant la même durée, de quelque façon et sous quelque forme que ce soit, directement ou indirectement, d’utiliser ou de divulguer à des tiers des informations confidentielles dont il aurait eu connaissance dans le cadre de ses fonctions concernant l’activité de la société ou de toutes les personnes physiques ou morales qu’il a été amené à rencontrer dans le cadre de ses fonctions. Le collaborateur s’engage à ne divulguer à qui que ce soit aucune des méthodes de travail propres à la société, tant pendant l’exécution qu’après l’expiration du présent contrat ».

Enfin, vous pouvez faire une demande de précision du motif du licenciement énoncé dans la présente lettre, dans les 15 jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d’y donner suite dans un délai de 15 jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l’initiative d’apporter des précisions à ce motif dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement.’

En application de l’article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul, à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance. Toutefois ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs dans la mesure où le comportement du salarié s’est poursuivi dans ce délai et ne font pas obstacle non plus à la prise en compte de griefs antérieurs de plus de deux mois si de nouveaux griefs sont apparus dans les deux mois précédant la date de licenciement.

Deux griefs sont ainsi principalement articulés contre le salarié :

– une insubordination tenant à son absence répétée lors des réunions hebdomadaires

– des négligences fautives dans l’exécution de ses mssions auprès de la Caisse d’Epargne Midi Pyrénées.

1) Sur l’insubordination

Il est reproché au salarié ses absences aux réunions hebdomadaires fixées par son supérieur hiérarchique. Il est ainsi fait état de ses absences les 20 juin,26 juin, 10 juillet 2018 qui ont donné lieu à la notification d’un avertissement le 6 août 2018.

Par un nouvel avertissement daté du 24 septembre 2018 l’employeur a sanctionné une nouvelle absence du salarié à une réunion du 18 septembre 2018.

Nonobstant ces deux avertissements , il est constant que le salarié était de nouveau absent aux réunions hebdomadaires des 03 octobre 2018, 09 octobre 2018, 16 octobre 2018 et 23 octobre 2018.

Si le contexte tendu dans lequel interviennent ces avertissements à raison de l’intervention dans les locaux de l’entreprise de l’inspection du travail le 10 juillet 2018 sur sollicitation de M.[G], peut susciter une interrogation sur le bien fondé des griefs articulés contre le salarié, il ressort des débats que le salarié avait préalablement été sanctionné par un avertissement le 10 janvier 2017 pour plusieurs infractions routières ayant motivé trois amendes, et le 27 juin 2017 pour des négligences dans la tenue de son planning, soit plus d’un an avant l’intervention de l’inspection du travail.

La réalité des absences reprochées au salarié n’est pas contestée par celui-ci , les explications fournies par celui-ci tenant à sa charge de travail. Cet argument est toutefois inopérant en considération de la participation de deux autres salariés techniciens à la même activité auprès des filiales de la Caisse d’Epargne auxquelles est affecté M.[G], et pourtant présents lors des réunions hebdomadaires. De surcroît, la suppression des réunions dont il excipe à compter du 30 septembre 2018 procède d’une simple affirmation qui n’est objectivée par aucun élément probant.

Par ailleurs le choix de réunir les techniciens à un rythme hedomadaire relève du pouvoir de direction et d’organisation de l’employeur, et il n’appartient pas au salarié de se soustraire à cette organisation et aux consignes qui s’y rattachent.

C’est pourtant en termes dépourvus d’équivoque que le salarié s’est délibérément soustrait aux demandes répétées de l’employeur de participation aux réunions hebdomadaires dans un courriel du 26 juin 2018: ‘Désolé pour cette non-présence la réunion mais j’ai du boulot (…). Par essence cette réunion est plus destinée aux techniciens siège surtout qu’ils sont encore bleus. Pour ma part et tu le sais mieux que personne, je ne me suis jamais plaint d’un manque d’information. Pour ma part je n’emmerde personne, je fais le boulot pour lequel on me paye et plutôt bien d’ailleurs (…)’.

Le rappel dans la lettre de licenciement des avertissements déjà prononcés contre le salarié pour des manquements de même nature permet d’établir que le salarié était informé de l’importance accordée par l’employeur à sa participation aux réunions

La réitération des absences nonobstant les sanctions antérieurement prononcées permet de retenir le grief d’insubordination caractérisée, constitutif d’une faute faisant obstacle à la poursuite du contrat de travail, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la réalité et la gravité du second grief relatif aux négligences fautives dans l’exécution des missions.

En conséquence, le jugement du conseil de prud’hommes qui a dit que le licenciement de M. [G] repose sur une faute grave et a débouté le salarié de toutes ses demandes sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur la demande indemnitaire pour conditions vexatoire du licenciement

M. [G] ne caractérise pas les conditions brutales de son licenciement qui lui permettraient de se voir allouer des dommages et intérêts en sus de ceux alloués en réparation de l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.

Le jugement déféré qui a rejeté cette demande sera confirmé sur ce point.

Sur les retenues sur salaire

En application de l’article L. 1331-2 du code du travail, les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites.

L’employeur ne peut procéder à une retenue de salaire pour récupérer les sommes déboursées au titre de la réparation d’un véhicule appartenant à l’entreprise et endommagé par le salarié, ou pour obtenir le remboursement des amendes résultant des infractions commises par le salarié avec le véhicule de l’entreprise, sauf lorsque la responsabilité du salarié est engagée en cas de faute lourde.

Il résulte du compte rendu d’entretien du 9 juin 2017 (pièce 3 employeur) et des bulletins de salaire que l’employeur a procédé au prélèvement de plusieurs sommes sur le salaire de M.[G] entre octobre 2016 et avril 2017 pour une somme globale de 583,50 euros à titre de remboursement des amendes relatives aux infractions routières commises par le salarié .

L’imputabilité des infractions concernées au salarié n’a pas été remise en cause de façon sérieuse par ce dernier lors des échanges de courriers et entretiens avec l’employeur le 9 janvier 2017 relatifs aux amendes correspondantes, alors même que l’ensemble des procès-verbaux de contraventions produits aux débats comportent l’indication du numéro d’immatriculation du véhicule affecté au salarié, et des dates et heures des infractions, tous éléments qui ne donnent lieu à aucune observation particulière du salarié.

Il demeure que l’employeur ne pouvait procéder à une retenue sur salaire à titre de remboursement des amendes qu’il a acquittées auprès de l’administration fiscale en lieu et place du salarié. Le jugement mérite donc confirmation en ce qu’il a ordonné la restitution par la société Cheops Technologie France au salarié de la somme de 583,50 euros.

Aucun des éléments de la procédure ne corrobore un quelconque prélèvement sur salaire au titre de frais de remise en état du véhicule, en dépit des dommages subis par le véhicule et signalés par le salarié à l’employeur le 30 octobre 2018 (pièce 20 employeur) .

En vertu de l’article 11 de son contrat de travail, M.[G] est tenu de régler les amendes fiscales découlant des procès-verbaux et contravention qui lui sont imputables par l’utilisation du véhicule. Par suite l’employeur est fondé à solliciter la condamnation du salarié à lui payer la somme de 583,50 euros au titre des amendes dont il est redevable, par confirmation du jugement sur ce point.

La cour ordonne la compensation entre les sommes respectivement dues entre les parties.

Sur les frais et dépens

La SA Cheops Technology France, partie perdante, supportera les entiers dépens de première instance et d’appel.

M.[G] est en droit de réclamer l’indemnisation des frais non compris dans les dépens qu’il a dû exposer à l’occasion de cette procédure. La SACheops Technology France sera donc tenue de lui payer la somme globale de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 al.1er 1° du code de procédure civile.

Le jugement entrepris est infirmé en ses dispositions concernant les frais et dépens de première instance.

La SA Cheops Technology France est déboutée de sa demande formée au titre des frais et dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort

Confirme le jugement déféré sauf en ses dispositions relatives aux demandes en rappel de salaire , indemnité de congés payés, prélèvements sur salaire par l’employeur et condamnation au paiement des amendes

Statuant à nouveau des chefs infirmés

Condamne la SA Cheops Technology France à payer à M.[E] [G] :

– 2 569,79 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires

– 256,98 euros à titre d’indemnité de congés payés

– 583,50 euros à titre de retenues injustifiées sur salaire

Condamne M.[E] [G] à payer à la SA Cheops Technology France la somme de 583,50 euros au titre des amendes

Ordonne la compensation entre les sommes respectivement dues par les parties

Condamne la SA Cheops Technology France aux entiers dépens de première instance et d’appel

Condamne la SA Cheops Technology France à payer à M.[E] [G] 2000 euros au titre des frais irrépétibles

Le présent arrêt a été signé par S. BLUM », présidente et C. DELVER, greffière.

LA GREFFI’RE LA PR »SIDENTE

C. DELVER S. BLUM ».

 


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