Charte informatique : 15 décembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/02276

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Charte informatique : 15 décembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/02276

ARRET

[C]

C/

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE LILLE

S.A. SEDEV

PERIN

S.E.L.A.S. BMA ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES

copie exécutoire

le 15 décembre 2022

à

Me Daimé

Me Camier

Me Vaneecloo

CB/MR/SF

COUR D’APPEL D’AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD’HOMALE

ARRET DU 15 DECEMBRE 2023

*************************************************************

N° RG 21/02276 – N° Portalis DBV4-V-B7F-ICUG

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE COMPIEGNE DU 22 AVRIL 2021 (référence dossier N° RG 20/00048)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [V] [C]

[Adresse 3]

[Localité 10]

représenté et concluant par Me Aurelien DAIME, avocat au barreau de COMPIEGNE

ET :

INTIMES

UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE LILLE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 13]

[Localité 7]

représentée et concluant par Me Hélène CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d’AMIENS substituée par Me Alexis DAVID, avocat au barreau D’AMIENS

S.A. SEDEV agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège :

[Adresse 2]

[Localité 8]

comparante en la personne de M. [L] [M], responsable des ressources humaine (muni d’un pouvoir)

assistée et concluant par Me Louis VANEECLOO de la SELARL SOLUCIAL AVOCATS, avocat au barreau de LILLE

Maître Yvon PERIN de la SELARL PERIN-BORKOWIAK ès qualités de co-commissaire à l’exécution du plan de la SEDEV

[Adresse 4]

[Adresse 17]

[Localité 9]

représenté et concluant par Me Louis VANEECLOO de la SELARL SOLUCIAL AVOCATS, avocat au barreau de LILLE

Représenté par Me Louis VANEECLOO de la SELARL SOLUCIAL AVOCATS, avocat au barreau de LILLE

S.E.L.A.S. BMA ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES prise en la personne de Maître MIQUEL, ès qualités de co-commissaire à l’exécution du plan de la SEDEV

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée et concluant par Me Louis VANEECLOO de la SELARL SOLUCIAL AVOCATS, avocat au barreau de LILLE

DEBATS :

A l’audience publique du 27 octobre 2022, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l’affaire a été appelée.

Madame [H] [W] indique que l’arrêt sera prononcé le 05 janvier 2023 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame [H] [W] en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Les conseils des parties ont été avisés que la date du délibéré initialement fixée au 5 janvier 2023 a été avancée au 15 décembre 2022.

Le 15 décembre 2022, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

M. [C] a été embauché par contrat à durée indéterminée le 21 août 2017, par la société Sedev, en qualité de directeur de magasin.

Son contrat est régi par la convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail de l’habillement.

L’effectif de la société compte plus de vingt salariés.

A la suite d’un incendie survenu le 4 juin 2019 ayant totalement détruit le magasin Devianne de [Localité 11], le salarié a été muté temporairement sur le magasin de [Localité 14], puis à [Localité 15] et enfin à [Localité 12].

M. [C] a alors saisi le conseil de prud’hommes de Compiègne le 28 février 2020, aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur et sa condamnation à lui verser différentes indemnités.

Le 13 mai 2020, le salarié a été convoqué par la société Sedev à un entretien préalable fixé au 27 mai 2020.

Par courrier du 5 juin 2020, il a été licencié pour faute grave dans les termes suivants :

Monsieur,

Par lettre recommandée datée au 15 mai 2020, nous vous avons convoqué à un entretien préalable pour le 27 mai 2020 à 11h00 en présence de Madame [I] [S], Directrice Retail & RH, et Monsieur [L] [M], Juriste social, mais vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien.

Dès lors, nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave, sans indemnité de rupture ni de préavis. Nous vous rappelons les motifs qui nous conduisent à appliquer cette mesure.

Exerçant les fonctions de directeur de magasin au sein du magasin DEVIANNE de [Localité 12], vous n’avez pas participé aux réunions d’information relatives à la reprise d’activité depuis le 29 avril 2020 et ne

vous êtes pas présenté sur votre lieu de travail depuis le 4 mai 2020 inclus, malgré les sollicitations

de vos responsables, qu’il s’agisse de Madame [J] [X], Directrice Régionale, ou Madame [I] [S], Directrice Retail & RH. Depuis, nous sommes sans nouvelle de vous.

N’ayant reçu aucun justificatif de votre part, nous vous avons mis en demeure de justifier de vos absences le 13 mai 2020. Malgré cette mise en demeure, vous ne nous avez fait parvenir aucun document permettant de justifier ce comportement d’une gravité incontestable.

Cette conduite irrespectueuse et inacceptable a conduit à la désorganisation du magasin dans lequel vous êtes employé, malgré les enjeux sanitaires et économiques que vous n’ignoriez pas à la suite du confinement et de la fermeture des établissements décidée par les pouvoirs publics. Nous déplorons donc votre méprise à l’égard de ces enjeux et des collaborateurs du magasin.

Aussi, compte tenu de la gravité des faits reprochés, nous sommes amenés à procéder à votre licenciement pour faute grave.

Cette mesure, effective à présentation de ce courrier, est privative de préavis et d’indemnité de licenciement. Nous vous ferons parvenir dans les jours suivants votre sortie les éléments afférents à votre solde de tout compte.

Vous pouvez faire une demande de précisions des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les quinze jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d’y donner suite dans un délai de quinze jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.

En application de l’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale, vous bénéficierez, à compter de la date de cessation de votre contrat de travail, du maintien à titre gratuit des garanties frais de santé, à savoir des remboursements de soins liés à la maladie, l’accident ou la maternité, prévues par le contrat de prévoyance souscrit par l’entreprise, ainsi que des garanties de la couverture prévoyance et ce, pendant une période égale au maximum à la durée d’indemnisation du chômage, et dans la limite de la durée du dernier contrat de travail (ou des derniers contrats de travail consécutifs au sein de notre entreprise), sans pouvoir excéder 12 mois. Les garanties maintenues seront identiques à celles en vigueur dans l’entreprise et seront applicables dans les mêmes conditions aux ayants droit du salarié qui en bénéficiaient effectivement à la date de la cessation du contrat de travail.

Par jugement en date du 2 juin 2020, le tribunal de commerce de Lille a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la SA Sedev, la date de cessation des paiements étant fixée au 26 mai 2020.

Un plan de redressement d’une durée de dix ans a été arrêté selon jugement du tribunal de commerce de Lille du 16 décembre 2020.

Le conseil de prud’hommes de Compiègne par jugement du 22 avril 2021, a :

– dit qu’il n’y avait pas lieu à prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [C] ;

– dit que le licenciement de M. [C] reposait sur une faute grave ;

– débouté M. [C] de l’ensemble de ses autres demandes ;

– dit que la convention de forfait jours était opposable à M. [C],

– condamné M. [C] à payer à la société Sedev la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– dit qu’il n’y avait pas lieu à exécution provisoire ;

– condamné M. [C] aux entiers dépens ;

– débouté les parties de plus amples demandes ;

– pris acte de l’intervention de l’AGS-CGEA de Lille et dit que le jugement était commun.

Ce jugement a été notifié le 23 avril 2021 à M. [C] qui en a relevé appel le 23 avril 2021.

La société Sedev, la société BMA administrateurs judiciaires et la société Perin Borkowiak ont constitué avocat le 25 mai 2021.

L’Unédic délégation AGS CGEA de Lille a constitué avocat le 17 juin 2021.

Par ordonnance du 10 février 2022 de la cinquième chambre prud’homale de la cour d’appel d’Amiens, le conseiller de la mise en état a :

– dit que les conclusions de l’Unedic AGS CGEA d’Amiens étaient irrecevables ;

– condamné l’Unedic AGS CGEA d’Amiens aux dépens de l’incident de mise en état.

Par ordonnance du 7 juillet 2022 de la cinquième chambre prud’homale de la cour d’appel d’Amiens, le conseiller de la mise en état a :

– débouté M. [C] de sa demande tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de l’Unédic délégation AGS CGEA de Lille communiquées le 22 mars 2022 ;

– condamné M. [C] aux dépens de l’incident de mise en état.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 8 juillet 2022, M. [C] prie la cour de :

– le dire et le juger recevable et bien fondé en toutes ses demandes,

En conséquence,

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 22 avril 2021, en ce qu’il a dit qu’il n’y avait pas lieu à résiliation judiciaire, en ce qu’il a dit que le licenciement reposait sur une faute grave, en ce qu’il a dit que la convention de forfait lui était opposable, en ce qu’il l’a condamné aux dépens et à payer à la société Sedev la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il l’a débouté de toutes ses demandes de :

«- dire et juger que l’employeur a mis en ‘uvre la clause de mobilité de façon abusive et qu’il est bien fondé à la refuser ;

– dire et juger que la demande résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur était justifiée ;

– dire et juger que la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-fixer sa créance au passif de la société Sedev aux sommes suivantes :

– 21 100 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 8 400 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 840 euros brut au titre des congés payés sur l’indemnité compensatrice de préavis ;

– 15 484,27 euros brut au titre des rappels d’heures supplémentaires à 25 % ;

– 1 548,43 euros brut au titre des congés payés sur rappels d’heures supplémentaires à 25 % ;

– 4 652,21 euros brut au titre des rappels d’heures supplémentaires à 50 % ;

– 465 euros brut au titre des congés payés sur rappels d’heures supplémentaires à 50 % ;

– 2 067,65 euros brut au titre des rappels d’heures non majorées ;

– 206,76 euros brut au titre des congés payés sur rappels d’heures non majorées ;

– 9 814,49 euros brut à titre de contreparties obligatoire en repos ;

– 981,45 euros brut à titre de congés payés sur les contreparties obligatoires en repos ;

– 5 875,93 euros brut à titre rappels de salaire sur les jours de dépassement du forfait ;

– 587,59 euros brut à titre de congés payés sur les rappels de salaire sur les jours de dépassement du forfait ;

– 16 380 euros brut au titre des rappels de salaires en raison de la violation du principe d’égalité de traitement ;

– 1 638 euros brut au titre des congés payés sur rappels de salaires en raison de la violation du principe d’égalité de traitement ;

– 5 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour non-paiement du salaire intégral ;

– 10 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour défaut de justification de la prime de directeur de magasin ;

– 5 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait ;

– 2 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour modification unilatérale du contrat de travail (retrait du véhicule de fonction) ;

– 20 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour mise en ‘uvre abusive de la clause de mobilité ;

– 2 097,39 euros net de dommages et intérêts pour défaut d’organisation de la visite médicale de reprise ;

– 6 000 euros net au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonner la remise des documents de fin de contrat de travail conformes (attestation Pôle Emploi, reçu pour solde de tout compte, certificat de travail, bulletin de paie) conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document ;

– ordonner l’exécution provisoire ;

– condamner la société Sedev aux intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

– condamner la société Sedev à la capitalisation des intérêts ;

– condamner la société Sedev aux entiers dépens ;

A titre principal,

– 21 099,92 euros net à titre d’indemnité de travail dissimulé ;

– 2 637,49 euros net à titre d’indemnité de licenciement ;

– fixer la moyenne des salaires à 3 516,65 euros brut ;

A titre subsidiaire,

– 17 350 euros net à titre d’indemnité de travail dissimulé ;

– 2 168,75 euros net à titre d’indemnité de licenciement ;

– fixer la moyenne des salaires à 2 891,67 euros brut ;

Dans tous les cas,

– dire le jugement commun à l’AGS-CGEA d’Amiens. » ;

Statuant à nouveau,

– dire et juger que l’employeur a mis en ‘uvre la clause de mobilité de façon abusive et qu’il est bien fondé à la refuser ;

– dire et juger que la demande résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur était justifiée ;

– dire et juger que la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– fixer sa créance au passif de la société Sedev aux sommes suivantes :

– 21 100 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 8 400 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 840 euros brut au titre des congés payés sur l’indemnité compensatrice de préavis ;

– 15 484,27 euros brut au titre des rappels d’heures supplémentaires à 25 % ;

– 1 548,43 euros brut au titre des congés payés sur rappels d’heures supplémentaires à 25 % ;

– 4 652,21 euros brut au titre des rappels d’heures supplémentaires à 50 % ;

– 465,00 euros brut au titre des congés payés sur rappels d’heures supplémentaires à 50 % ;

– 2 067,65 euros brut au titre des rappels d’heures non majorées ;

– 206,76 euros brut au titre des congés payés sur rappels d’heures non majorées ;

– 9 814,49 euros brut à titre de contreparties obligatoire en repos ;

– 981,45 euros brut à titre de congés payés sur les contreparties obligatoires en repos ;

– 5 875,93 euros brut à titre rappels de salaire sur les jours de dépassement du forfait ;

– 587,59 euros brut à titre de congés payés sur les rappels de salaire sur les jours de dépassement du forfait ;

– 16 380 euros brut au titre des rappels de salaires en raison de la violation du principe d’égalité de traitement ;

– 1 638 euros brut au titre des congés payés sur rappels de salaires en raison de la violation du principe d’égalité de traitement ;

– 5 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour non-paiement du salaire intégral ;

– 10 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour défaut de justification de la prime de directeur de magasin ;

– 5 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait ;

– 2 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour modification unilatérale du contrat de travail (retrait du véhicule de fonction) ;

– 20 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour mise en ‘uvre abusive de la clause de mobilité ;

– 2 097,39 euros net de dommages et intérêts pour défaut d’organisation de la visite médicale de reprise ;

– 6 000 euros net au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonner l’exécution provisoire ;

– condamner la société Sedev aux intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

– condamner la société Sedev à la capitalisation des intérêts ;

– condamner la société Sedev aux entiers dépens ;

A titre principal,

– 21 099,92 euros net à titre d’indemnité de travail dissimulé ;

– 2 637,49 euros net à titre d’indemnité de licenciement ;

– fixer la moyenne des salaires à 3 516,65 euros brut ;

A titre subsidiaire,

– 17 350 euros net à titre d’indemnité de travail dissimulé ;

– 2 168,75 euros net à titre d’indemnité de licenciement ;

– fixer la moyenne des salaires à 2 891,67 euros brut ;

Dans tous les cas,

– dire le jugement commun à l’AGS-CGEA de Lille.

Par conclusions remises le 13 septembre 2022, la SA Sedev, la SELAS BMA administrateurs judiciaires prise en la personne de Me [G] ès qualités de co-comissaire à l’exécution du plan de la société Sedev, et la SELARL Perin Borkowiak prise en la personne de Me Perin ès qualités de co-commisssaire à l’exécution du plan de la société Sedev, prient la cour de :

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Compiègne ;

– débouter M. [C] de l’ensemble de ses demandes ;

Reconventionnellement,

– condamner M. [C] à payer à la société Sedev 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 22 mars 2022, l’Unedic délégation AGS CGEA de Lille prie la cour de :

– la dire et la juger recevable et bien fondée dans son intervention volontaire devant la cour ;

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Compiègne le 22 avril 2021 ;

En tout état de cause,

– dire et juger qu’elle ne devrait être amenée à garantir les éventuelles créances salariales de M. [C] que dans la mesure où la SA Sedev justifierait de l’impossibilité dans laquelle elle se trouve de procéder, elle-même, au règlement desdites créances ;

– dire qu’elle ne peut en aucun cas être condamnée et que sa garantie n’est due que dans le cadre de l’exécution du contrat de travail ;

– dire en conséquence qu’elle ne peut en aucun cas garantir la somme sollicitée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– dire que sa garantie n’est également due, toutes créances avancées confondues pour le compte du salarié, que dans la limite des 3 plafonds définis notamment aux articles L.3253-17, D.3253-2 et D.3253-5 du code du travail et dans la limite des textes légaux définissant l’étendue et la mise en ‘uvre de sa garantie (articles L.3253-8 à L.3253-13, L.3253-15 et L.3253-19 à 24 du code du travail) ;

– dire que, par application des dispositions de l’article L.622-28 du code de commerce, le cours des intérêts a été interrompu à la date de l’ouverture de la procédure collective.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 octobre 2022 et l’affaire fixée à l’audience de plaidoirie du 27 octobre 2022.

MOTIFS

La cour observe que la société Sedev n’est pas en situation de liquidation judiciaire mais a bénéficié d’un plan suivant jugement en date du 16 décembre 2020 rendu par le tribunal de commerce de Lille. Etant in bonis elle peut donc être condamnée.

Sur l’exécution du contrat de travail

Sur la convention de forfait jours

M. [C] soutient que la convention de forfait jours à laquelle il était soumis à raison de 214 jours de travail est nulle car cette modalité n’est pas prévue par un accord collectif, à type d’accord de branche ou d’entreprise, que si la convention collective applicable le prévoit pour les cadres avec établissement par ceux ci du décompte des jours de travail alors qu’ils veillent seuls au respect de la durée maximale de travail et du droit au repos, ce qui est contraire aux dispositions de l’article L 3121- 64 du code du travail car il n’y est fait aucune mention sur les modalités selon lesquelles l’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ni des modalités de communication avec le salarié, ni de l’articulation vie privée ‘ vie professionnelle et sur la rémunération et l’organisation de travail dans l’entreprise.

Il précise que la jurisprudence a censuré des conventions de forfait se contenant d’un entretien annuel, d’un décompte des journées ou demi-journées travaillées et du rappel au salarié des limites journalière et hebdomadaire de travail, que tel est le cas de la convention de forfait jours de la convention collective applicable ; qu’en outre l’accord d’entreprise du 17 avril 2014 est beaucoup trop flou, ne prévoyant même pas d’entretien annuel sur la charge de travail et l’adéquation vie professionnelle- vie personnelle.

Il ajoute que la convention collective ne prévoit pas de droit à la déconnexion, que la charte informatique de l’entreprise ne le prévoit pas non plus, se contentant d’interdire un usage privé de l’informatique professionnel, que même si la cour jugeait la convention de forfait jours valide, elle serait privée d’effet car l’employeur n’a, sauf pour la première année, assuré l’entretien annuel pour s’assurer de la charge de travail.

Le salarié rapporte qu’il ne disposait pas d’autonomie dans l’organisation de son emploi du temps telle qu’exigée par l’annexe EE de la convention collective et l’article L 3121-58 du code du travail, puisque c’est l’employeur qui fixait ses jours de repos hebdomadaires, qu’au gré des mutations il a même fixé les jours de travail.

La SA Sedev, la Selas BMA administrateurs judiciaires et la Selarl Borkowiak répliquent d’une part que l’article 5 de la convention collective applicable prévoit la convention de forfait jours et d’autre part que la société a conclu un accord d’entreprise sur ce sujet afin de fixer les règles en vue de préserver l’équilibre vie privée-vie professionnelle, qu’en tout état de cause l’article L 3121-65 du code du travail prévoit que l’employeur peut conclure une telle convention s’il établit un document de contrôle mentionnant notamment les dates et nombre de journées travaillées, document qui peut être renseigné par le salarié sous la responsabilité de l’employeur, que le salarié disposait d’une autonomie dans l’organisation de son travail puisqu’il organisait ses journées comme il le souhaitait car elle se contentait de lui préciser les jours de présence et d’absence au sein du magasin.

Les intimées soulignent que la question de la charge et de l’organisation de travail étaient étudiées lors de l’entretien annuel, qu’en 2020 cet entretien n’a pu avoir lieu en raison de la pandémie qu’ensuite le salarié n’a plus donné signe de vie ; enfin elles affirment que la charte informatique de l’entreprise le prévoit, que cette question a aussi été examiné dans le cadre des négociations annuelles obligatoires et reprise dans le procès-verbal dressé à cette occasion, qu’au surplus les salariés de la société ne disposent pas de téléphones ou d’ordinateurs professionnels.

Par ailleurs les intimées soutiennent que la convention de forfait jours n’est pas privée d’effet car la société Sedev assurait à la fois l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail avec communication périodique sur ce point, vérifiait l’articulation vie privée-vie professionnelle, la rémunération et l’organisation du travail dans l’entreprise, le salarié bénéficiant d’une large autonomie organisant son temps de travail comme il l’entendait.

L’Unedic s’oppose à cette demande soutenant que l’accord de branche respecte les dispositions légales sur la convention de forfait jours et que M. [C] ne disposant ni de téléphone portable professionnel ni d’ordinateur portable professionnel l’argumentation relative au droit à la déconnexion n’a pas vocation à s’appliquer.

Sur ce

L’article L3121-64 du code du travail (en vigueur depuis le 22 décembre 2017) édicte que : 

I.- L’accord prévoyant la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l’année détermine :

1° Les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, dans le respect des articles L. 3121-56 et L. 3121-58 ;

2° La période de référence du forfait, qui peut être l’année civile ou toute autre période de douze mois consécutifs ;

3° Le nombre d’heures ou de jours compris dans le forfait, dans la limite de deux cent dix-huit jours s’agissant du forfait en jours ;

4° Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;

5° Les caractéristiques principales des conventions individuelles, qui doivent notamment fixer le nombre d’heures ou de jours compris dans le forfait.

II.-L’accord autorisant la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours détermine :

1° Les modalités selon lesquelles l’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

2° Les modalités selon lesquelles l’employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération ainsi que sur l’organisation du travail dans l’entreprise ;

3° Les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion prévu au 7° de l’article L. 2242-17.

L’accord peut fixer le nombre maximal de jours travaillés dans l’année lorsque le salarié renonce à une partie de ses jours de repos en application de l’article L. 3121-59. Ce nombre de jours doit être compatible avec les dispositions du titre III du présent livre relatives au repos quotidien, au repos hebdomadaire et aux jours fériés chômés dans l’entreprise et avec celles du titre IV relatives aux congés payés.

En outre l’article L. 3121-63 du code du travail édicte qu’il ne peut être recouru au forfait annuel en jours que si un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou de groupe ou, à défaut, une convention ou un accord de branche l’autorise expressément.

Le salarié qui conclut une convention de forfait en jours doit entrer dans les prévisions de la loi (cadre autonome ou salarié dont la durée de travail ne peut être prédéterminée et qui dispose d’une réelle autonomie dans l’organisation de son emploi du temps article L.3121-58 et relever des catégories définies par l’accord collectif.

L’accord collectif prévoyant la conclusion de convention de forfait en jours doit préciser les catégories de salariés concernés.

Le juge doit vérifier en cas de litige sur l’application d’une convention de forfait en jours, en prenant en compte notamment les fonctions réellement exercées par le salarié si celui-ci entre dans le champ défini par l’accord et en tout état de cause dans le champ défini par la loi.

S’agissant des conventions de forfait en jours conclues sur la base d’accords collectifs conclus depuis le 10 août 2016 insuffisamment précis sur les modalités de suivi de la charge de travail des salariés en forfait jours, les conventions de forfait conclues sur la base de cet accord collectif ne seront pas pour autant frappées de nullité ou sans effet si l’employeur respecte les modalités supplétives prévues par le code du travail en son article L.3121-65 qui énonce qu’« A défaut de stipulations conventionnelles prévues au 1° et 2° du II de l’article L.3121-64, une convention individuelle de forfait en jours peut être valablement conclue sous réserve du respect des dispositions suivantes :

‘l’employeur établit un document de contrôle du nombre de jours travaillés faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l’employeur, ce document peut être rempli par le salarié ;

‘l’employeur s’assure que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ;

‘l’employeur organise des échanges avec le salarié pour évoquer sa charge de travail qui doit être raisonnable, l’organisation de son travail, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, ainsi que sa rémunération ».

En conséquence de ces développements, la convention de forfait jours ne sera invalidée et donc nulle que si l’accord collectif ou les dispositions conventionnelles qui la prévoient sont lacunaires et si l’employeur n’a pas pallié ces insuffisances en respectant l’ensemble des modalités supplétives de suivi et contrôle de la charge de travail.

Pour échapper à la nullité, il faut que les modalités d’évaluation, de suivi de la charge de travail et de communication périodique prévues par l’accord collectif ou à défaut les modalités supplétives mises en ‘uvre par l’employeur soient suffisantes pour assurer le respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que les temps de repos.

En l’espèce, l’avenant n° 42 2001-07-05 de la convention collective 32/35 étendu par arrêté du 15 mars 2002 prévoit que les cadres dont l’organisation du travail n’est pas liée à l’horaire collectif peuvent bénéficier d’une convention de forfait jours s’ils disposent d’une totale autonomie, définie par la liberté d’organiser leur travail et la liberté d’organiser leur emploi du temps dans la limite de 214 jours de travail par année civile avec une rémunération supérieure de 15% plus élevée que la rémunération conventionnelle. Il est précisé que «  le décompte des journées travaillées ou des jours de repos pris est établi hebdomadairement par l’intéressé. Il transmet cette information à son responsable hiérarchique au titre de toutes les semaines écoulées lors du mois considéré, au plus tard au débit du mois suivant. A cette occasion, peut s’opérer le suivi de l’organisation du travail, le contrôle de l’application du présent accord et de l’impact de la charge de travail sur leur activité de la journée. Le cadre veillera lui-même concrètement au respect des dispositions légales et réglementaires en vigueur relatives à la durée du repos hebdomadaire, du nombre maximum de jours de travail dans la semaine de la durée minimale en repos quotidien.

La cour observe que la convention collective prévoit dans l’hypothèse de la conclusion de conventions individuelles de forfait la catégorie de salariés susceptibles d’en bénéficier (cadres), la période de référence du forfait, (l’année civile), le nombre d’heures ou de jours compris dans le forfait (214 jours), la rémunération des salariés mais aussi les modalités selon lesquelles l’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié.

En revanche la convention collective ne prévoit pas les modalités selon lesquelles l’employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle afin de permettre à l’employeur de prendre au besoin des mesures afin de garantir la santé du salarié.

Dés lors il convient d’écarter l’application de la convention collective.

La SA Sedev et la CFDT avaient conclu un avenant le 17 avril 2014 au terme duquel les directeurs de magasin étaient soumis à une convention de forfait jours de 214 jours annuel, il était stipulé que le salarié concerné devait respecter un repos obligatoire minimum de 11 heures consécutives entre deux journées de travail, que compte tenu de l’autonomie et de la nature de la mission, le salarié devait veiller concrètement chaque journée au fur et à mesure, au respect des dispositions légales et réglementaires en vigueur relatives à la durée du repos hebdomadaire, au nombre quotidien de jours de travail dans la semaine et à la durée minimale de repos quotidien. Il gérait lui même son organisation du travail, l’amplitude de ses journées d’activité, la charge de travail qui en résultait. Il devait pouvoir identifier, au fur et à mesure, les éventuels écarts et/ou déséquilibres qui pouvaient s’en suivre entre la vie professionnelle et sa vie personnelle ; un entretien individuel une fois l’an aurait lieu avec le supérieur hiérarchique.

Il était en outre prévu que les salariés devaient remettre chaque mois au service du personnel un relevé du nombre et la date de journées travaillées et le positionnement des jours de repos et que si exceptionnellement en fin de période de référence le nombre de jours travaillés dépasse le plafond de 214 jours, ils étaient considérés comme perdus pour le salarié, mais s’il intervenait du fait de l’employeur il avait la possibilité de récupérer ces jours le premier trimestre de la période de référence suivante.

Le salarié produit le contrat de travail qui stipule que le jour de repos est le mardi, des courriers des 29 novembre 2019 et 13 décembre 2019 au terme desquels l’employeur fixe les semaines pendant lesquelles le salarié est autorisé à ne pas travailler et enfin un dernier courrier du 13 février 2020 par lequel la société lui impose 4 jours de présence par semaine dont la répartition lui sera communiquée par sa responsable.

Dés lors il est constant que le salarié ne disposait pas d’une autonomie réelle dans l’organisation de son temps de travail en contradiction avec les stipulations de la convention de forfait dont il bénéficie puisqu’il ne choisit ni les jours de repos, ni les toutes les semaines travaillées.

La cour, par infirmation du jugement, jugera que la convention de forfait jours est privée d’effet.

Sur les heures supplémentaires

M. [C] revendique le paiement d’heures supplémentaires faisant valoir que l’employeur n’a pas respecté les dispositions de l’article D 3171-12 du code du travail, il soutient avoir dépassé la durée maximale du travail puisqu’il a travaillé 10 heures par jour et parfois 48 heures par semaine, que la société ne produit aucun élément contestant ses affirmations alors qu’il verse un tableau récapitulatif des heures supplémentaires qu’il a effectués.

Il sollicite en outre la condamnation de l’employeur à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice né de l’absence de paiement de ces salaires pendant plusieurs années.

Les intimés s’opposent à cette demande rétorquant que le salarié a produit un tableau mentionnant des heures mais sans apporter d’élément pour corroborer ce décompte.

Sur ce

La convention de forfait jours ayant été jugé précédemment privée d’effet, les règles ordinaires relatives au paiement d’heures supplémentaires doivent s’appliquer. Aux termes de l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Or, aux termes de l’article L.3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L.3171-3 du même code, l’employeur tient à la disposition des membres compétents de l’inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

La durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine.

Selon l’article L. 3121-28 du code du travail, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.

L’article L. 3121-36 du même code dispose qu’à défaut d’accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

Pour étayer sa demande, M. [C] produit un tableau des années 2017 à 2019 qui indique pour chaque semaine le nombre d’heures supplémentaires qu’il aurait effectué.

Il y a lieu de considérer que le salarié fournit des éléments suffisamment précis permettant d’étayer sa demande et permettant à l’employeur d’y répondre utilement.

Pour s’opposer aux demandes de M. [C], l’employeur produit à la procédure un tableau dit de modulation pour la période comprise entre mai 2018 et mai 2019 recouvrant ainsi une période commune avec le tableau du salarié. Il apparaît que certaines semaines il effectuait 42 ,50 heures avec une semaine à 46 heures soit au-delà du nombre d’heures contractuelles.

Au vu des éléments produits de part et d’autre, et sans qu’il soit besoin d’une mesure d’instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que M. [C] a effectué des heures supplémentaires non rémunérées mais seulement dans la limite de 426 heures pour la période concernée à raison de 90 heures en 2017, 226 heures en 2018 et 110 heures en 2019 car les tableaux du salarié ne comprennent pas le détail des pauses méridiennes et qu’il n’est pas déduit l’intégralité des congés soit au total une somme de 9 827,82 euros outre la somme de 982,27 euros de congés payés afférents.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Le retard de paiement est réparé par l’octroi d’intérêts moratoires, le salarié qui n’établit pas avoir subi un préjudice spécifique de ce fait, est débouté par confirmation du jugement de sa demande de réparation du préjudice consécutif à l’absence de paiement d’heures supplémentaires.

Sur de dépassement du contingent d’heures supplémentaires

Le salarié sollicite la condamnation de l’employeur à lui verser une indemnité en contre partie du dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires.

Les intimées s’y opposent.

Sur ce

La cour rappelle, que la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine, qu’en application de l’article L. 3121- 30 du code du travail, les heures effectuées au delà du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos, que les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d’heures supplémentaires sont celles accomplies au delà de la durée légale et que les heures supplémentaires ouvrant droit au repos compensateur équivalent mentionné à l’article L. 3121- 28 et celles accomplies dans les cas de travaux urgents énumérés à l’article L. 3132-4 ne s’imputent pas sur le contingent annuel d’heures supplémentaires.

Sont donc prises en compte, pour le calcul de la contrepartie obligatoire en repos, les heures supplémentaires effectivement réalisées et les temps assimilés à du travail effectif, comptabilisés après dépassement du contingent annuel. Les temps de pause ne sont pas des temps de travail effectif même s’ils sont rémunérés sauf disposition conventionnelle contraire.

L’article D. 3121-23 prévoit que le salarié dont le contrat de travail prend fin avant qu’il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu’il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos reçoit une indemnité en espèces dont le montant correspond à ses droits acquis.

Les heures supplémentaires sont décomptées dans le cadre d’un contingent annuel. Ce dernier vise à instituer une limite au nombre des heures supplémentaires, le décompte s’effectuant dès la première heure supplémentaire. Au-delà de cette limite, une contrepartie obligatoire en repos s’impose.

Le volume du contingent annuel d’heures est fixé par accord collectif, ou à défaut, par décret.

En application de l’article L. 3121-30 du code du travail, les heures imputées sur le contingent annuel d’heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale.

Toute heure supplémentaire effectuée au-delà du contingent conventionnel, ou du contingent réglementaire ouvre droit à une contrepartie obligatoire en repos. Il s’agit d’une règle d’ordre public. La durée, les caractéristiques et les conditions de prise de cette contrepartie obligatoire en repos sont fixées par accord collectif, ou à défaut par le code du travail

Il s’agit des heures de travail effectif ou assimilées comme telles par la loi au regard de la législation sur les heures supplémentaires.

La convention collective applicable prévoit en son avenant n°42 2001-07-05 étendu par arrêté du 15 mars 2002 en son IV que le contingent d’heures supplémentaires. À l’exclusion du personnel au forfait jours le volume est fixé à 130 heures. Les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel légal de 130 heures fixé par le décret du 27 janvier 1982 ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire, dont la durée est égale à 100 % de ces heures supplémentaires. Le repos de 50 % prévu pour les entreprises de plus de 10 salariés n’est pas applicable aux heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel légal de 130 heures ouvrant droit au repos de 100 %.

En l’espèce, le salarié sollicite au dispositif de ses écritures une indemnité correspondant aux droits acquis qu’il n’aurait pas pris en violation du droit au repos compensateur.

La cour constate que l’employeur a été condamné à verser au salarié au titre des heures supplémentaires une somme de 9827,82 euros outre les congés payés afférents.

En cumulant les heures supplémentaires à celles reprises dans les fiches de paie le volume du contingent annuel d’heures supplémentaires de 130 heures est effectivement dépassé mais seulement pour l’année 2019 puisqu’il a effectué 226 heures supplémentaires.

L’article D 3121-14 du code du travail prévoit que « Le salarié dont le contrat de travail prend fin avant qu’il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu’il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos reçoit une indemnité en espèces dont le montant correspond à ses droits acquis.
Cette indemnité est également due aux ayants droit du salarié dont le décès survient avant qu’il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il avait droit ou avant qu’il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos. Elle est alors versée à ceux des ayants droit qui auraient qualité pour obtenir le paiement des salaires arriérés.

Cette indemnité a le caractère de salaire.« 

La cour a jugé que le salarié avait effectué 426 heures supplémentaires, soit 226 heures supplémentaires et 96 heures au delà du volume du contingent annuel d’heures pour l’année 2019.

Les heures accomplies au delà du contingent donnent droit à une contre-partie en repos qui est fixée à 100% de ces même heures si l’entreprise emploie plus de 20 salariés ce qui est le cas de la société Sedev. Au regard du salaire mensuel de 2 800 euros, le salarié est bien fondé à obtenir le paiement de la somme de 3 544,32 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos.

La cour infirmera en conséquence le débouté de la demande de M. [C] à voir condamner son employeur à lui verser à ce titre une somme de 3 544,32 euros.

Sur l’exécution déloyale de la convention de forfait jours

M. [C] sollicite l’indemnisation du préjudice né de l’exécution déloyale de la convention de forfait jours car l’employeur n’a pas organisé d’entretien annuel sur la charge de travail et l’adéquation entre privée-vie professionnelle.

Les intimés s’y opposent soutenant qu’un entretien a bien eu lieu et qu’il n’est pas établi de préjudice particulier.

Sur ce

L’article L 1222-1 du code du travail édicte que «  le contrat de travail est exécuté de bonne foi. »

La cour constate que l’employeur a justifié par le compte rendu avoir effectué un entretien avec le salarié le 17 mai 2018 au cours duquel a été abordé l’organisation du travail, la rémunération et l’articulation vie privée vie professionnelle.

S’il n’est pas établi qu’un autre entretien ait eu lieu en 2019 ni en 2020, la cour constate que le salarié n’a pas travaillé en 2020, il n’y a donc eu qu’une seule absence d’entretien annuel, celui de 2019 .

La cour rappelle concernant les conventions de forfait que l’obligation de l’entretien annuel a disparu depuis le 22 décembre 2017 dans la nouvelle rédaction de l’article L3121-64 du code du travail.

Dés lors, par confirmation du jugement, la cour déboutera M. [C], de sa demande de condamnation de l’employeur pour exécution déloyale de la convention de forfait jours.

Sur le travail dissimulé

[C] sollicite la condamnation de l’employeur à lui verser l’indemnité pour travail dissimulé arguant que l’employeur ne pouvait ignorer la nullité de la convention de forfait jours et n’a pas mentionné les jours effectués en sus de la convention de forfait jours n’a pas mentionné l’intégralité des heures effectuées par lui sur les fiches de paie, que de surcroît l’employeur lui avait remis un véhicule de fonction ce qui constitue un avantage en nature sur lequel il n’a pas payé de cotisations sociales.

Les intimés répliquent que le travail dissimulé requiert la preuve de l’élément intentionnel d’échapper au paiement de cotisations sociales afférentes, que les fiches de paie mentionnaient le forfait jours car il le croyait valide, que le véhicule n’était pas de fonction mais de société mis à disposition pendant quelques semaines pour pouvoir se rendre à [Localité 14].

L’Unedic s’oppose à cette demande invoquant l’absence d’élément intentionnel, que la seule application d’une convention de forfait illicite ne peut caractériser le caractère intentionnel du travail dissimulé.

Sur ce

Il résulte de l’article L.8223-1 du code du travail que le salarié dont le travail a été dissimulé par l’employeur a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Selon l’article L.8221-5 du même code, le travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié est notamment caractérisé par le fait pour l’employeur de mentionner intentionnellement sur les bulletins de paie, un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, ou encore par le fait pour l’employeur de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.

Aux termes de l’article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l’employeur a recours dans les conditions de l’article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. Cette indemnité forfaitaire est cumulable avec des dommages et intérêts du fait du préjudice résultant de la dissimulation de l’emploi.

Enfin, l’attribution par une juridiction au salarié d’heures supplémentaires non payées ne constitue pas à elle seule la preuve d’une dissimulation intentionnelle.

En l’espèce, la cour a jugé que la convention de forfait jours était privée d’effet et que M. [C] avait accompli des heures supplémentaires non rémunérées par l’employeur au cours de la relation contractuelle mais pour un quantum bien moindre que celui revendiqué.

La cour relève que les fiches de paie mentionnent que le salarié était rémunéré dans le cadre d’une convention de forfait jours de 214 jours annuels et aucun élément en l’espèce ne permet d’affirmer que l’employeur ait su que cette convention n’était pas valide et n’avait agi que dans le but de ne pas payer de cotisations sociales.

En outre le fait que la cour ait invalidé la convention de forfait jours n’induit pas nécessairement le caractère intentionnel de la dissimulation d’emploi.

Pendant le remplacement qu’il avait effectué au magasin de [Localité 14] la société avait mis à sa disposition un véhicule pour s’y rendre. Cependant, cette circonstance ne suffit pas à établir la dissimulation d’emploi salarié intentionnelle de la part de la société Sedev.

Il convient donc de rejeter la demande de M. [C] formée au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et de confirmer le jugement entrepris.

Sur la prime de directeur de magasin

M. [C] argue que l’avenant du 26 février 2018 prévoyant la prime de directeur de magasin ne précise ni son montant ni les modalités de calcul, qu’il n’a pas été destinataire d’un document à cet effet si bien qu’il ne peut vérifier s’il avait rempli les critères requis pour vérifier la validité des calculs de cette prime ; il sollicite l’octroi d’une somme correspondant au montant de son préjudice.

Les intimées s’opposent à cette demande rétorquant que l’appelant connaissait parfaitement les modalités de calcul de cette prime qui lui avaient été communiquées, qu’il a perçu cette prime en août 2018 mais plus ensuite faute d’avoir atteint les objectifs fixés.

L’Unedic s’oppose à cette demande prétendant que les seules affirmations du salarié sur l’absence de communication des modalités de calcul de cette prime sont insuffisantes à emporter la conviction de la cour.

Sur ce

L’employeur a produit aux débats l’avenant au contrat de travail signé le 21 août 2017 stipulant le versement d’une prime dite de directeur de magasin, ce document ne mentionnant pas les conditions exigées pour en bénéficier et notamment les modalités de calcul.

La société Sedev verse un document émanant du service des ressources humaines spécifiant ces modalités de calcul et des tableaux de décompte du chiffre d’affaires par semaine travaillée à compter de février 2018, date de mise en ‘uvre de cette prime.

Toutefois il n’est pas établi que le salarié ait eu connaissance de ces modalités de calcul et pu vérifier sur ses bulletins de salaires, qui ne valent pas arrêtés de compte, que le non paiement pour certains mois étaient justifiés.

L’employeur a produit le détail des modalités de calcul de la prime et des tableaux de calcul pour la période de travail ; le salarié ne contestant pas ne pas avoir rempli les conditions d’obtention de la prime litigieuse il ne rapporte pas la preuve d’un quelconque préjudice et la cour, par confirmation du jugement sur ce point, le déboutera de sa demande.

Sur le retrait du véhicule de fonction

M. [C] rapporte que l’employeur a mis à sa disposition un véhicule de fonction en juin 2019 mais en a exigé la restitution en décembre 2019, alors même qu’il l’envoyait travailler près de [Localité 16], site très éloigné de son domicile et sans qu’il lui ait donné son accord sur cette restitution ; que cette restitution contre sa volonté constitue une modification du contrat de travail.

Les intimées répliquent que le véhicule n’est pas un véhicule de fonction mais un véhicule qui a été mis temporairement à la disposition du salarié pour faciliter sa mobilité.

L’Unedic s’oppose à cette demande soulignant que l’employeur pouvait exiger la restitution de véhicule sans qu’il y ait eu de modification du contrat de travail.

Sur ce

L’utilisation privée d’un véhicule mis à disposition du salarié de façon permanente constitue un avantage en nature, qu’il s’agisse d’un véhicule dont l’employeur est propriétaire ou locataire ou d’un véhicule dont l’employeur acquiert la propriété dans le cadre de location avec option d’achat.

Le contrat de travail peut spécifier des avantages en nature qui ne peuvent être modifiés que par avenant et avec l’accord du salarié puisqu’ils constituent un élément de la rémunération.

En l’espèce le contrat de travail signé par M. [C] ne stipule pas d’avantage en nature constitué par la mise à disposition d’un véhicule de fonction.

La société a remis au salarié, pour l’arranger, un véhicule alors qu’il avait été été affecté au magasin de [Localité 15] dans le strict cadre de ses trajets professionnels mais sans qu’un avenant n’ait été signé à cet effet.

Dans ces conditions l’employeur pouvait sans accord du salarié exiger la remise du véhicule, sans pour autant contrevenir aux stipulations contractuelles.

C’est à bon droit que les premiers juges ont débouté M. [C] de la demande en réparation qu’il a formé à ce titre ; le jugement est donc confirmé sur ce point.

Sur les mutations irrégulières

M. [C] rapporte que les conditions d’application de la clause de mobilité n’ont pas été respectées car il était stipulé un délai de prévenance d’un mois, qu’il a été été muté oralement à [Localité 14] à compter du 12 juin 2019 soit 8 jours après l’incendie, ne lui laissant qu’une semaine pour se préparer, qu’il a ensuite été envoyé à [Localité 15] n’étant informé que le 30 novembre pour une prise de poste le 18 décembre 2019, et enfin face à son refus à Vandoeuvre les [Localité 16], information donnée le 13 février pour une prise de poste le 17 février 2020 et enfin à [Localité 12] n’étant averti que le 23 février pour le 25 février 2020.

Il argue que si ces mutations étaient possibles, elles nécessitaient de respecter le délai de prévenance d’un mois, que l’employeur ne justifie pas d’un intérêt légitime à le muter alors que ces mutations étaient temporaires sans terme précis avec des effets perturbants pour sa vie familiale qui a été atteinte de façon disproportionnée, que cette situation a entraîné des arrêts de travail alors qu’il s’en est plaint auprès de l’employeur et que le médecin du travail a préconisé son affectation sur un lieu proche de son domicile.

Il fonde sa demande sur la convention collective qui prévoit qu’un employeur ne peut imposer une mutation temporaire à ses salariés mais seulement une mutation définitive ce qui justifie son indemnisation.

Les intimées répliquent que la convention collective applicable prévoit la possibilité d’affectations temporaires mais seulement avec du personnel volontaire, ce qui était le cas de M. [C], qu’il avait donné son accord dés le lendemain de l’incendie pour être muté à titre temporaire, qu’il s’est rendu à [Localité 14] puis a été informé fin octobre de la possibilité de se rendre à [Localité 15] à compter du 18 décembre 2019 ce qu’il a de nouveau accepté le 6 novembre 2019, qu’étant placé en arrêt maladie entre le 7 décembre jusqu’au 15 février 2020, l’informant le 3 février 2020 qu’il souhaitait reprendre le travail.

Elles ajoutent l’avoir averti le 13 février 2020 de sa future affectation à [Localité 12] à compter du 16 mars 2020 mais que dans l’attente et pour les besoins de l’entreprise il lui était demandé de se rendre à Vandoeuvre les [Localité 16] ce à quoi le salarié s’est refusé, que sur recommandations médicales la société a décidé de l’affecter à [Localité 12] temporairement jusqu’à la prise de poste définitive mais que le salarié ne s’y est pas rendu.

Sur ce

L’article 29 de la convention collective applicable édicte que « Les affectations temporaires sont destinées à pourvoir au remplacement des absences autres que celles de courte durée résultant de la vie courante de l’entreprise (repos hebdomadaire, RTT, congés payés, maladies de courte durée).

Pour ces affectations temporaires, il est fait appel uniquement au personnel volontaire. En cas de refus, le salarié n’est pas pénalisé en termes d’exécution du contrat de travail, de formation ou d’avancement.

L’affectation temporaire d’une personne sur un emploi de catégorie supérieure au poste qu’elle occupe ordinairement n’est prononcée qu’en cas de nécessité de service. Elle ne peut servir à pallier de façon pérenne des insuffisances d’effectifs.

Les affectations temporaires concernent essentiellement :

la longue maladie ;

le congé de maternité ou d’adoption ;

le congé parental ;

le congé parental d’éducation ;

le congé de soutien familial ;

la formation de longue durée ;

la vacance (ou carence) de poste dans l’attente d’un recrutement ;

le congé pour création d’entreprise ;

le congé sabbatique.

Ces affectations temporaires entraînent, à compter du premier jour de ladite affectation et pour sa stricte durée, un complément de rémunération.

Ce complément de salaire doit être au moins égal à la différence entre le salaire fixe du salarié et la rémunération minimum en vigueur dans l’entreprise ou, à défaut, conventionnelle du poste considéré.

Les règles de rémunération variable liées à ce poste sont appliquées et les primes variables correspondantes versées.

Les compétences acquises à l’occasion d’affectations temporaires doivent permettre au salarié concerné d’accéder au niveau de classification supérieur. L’affectation devient pérenne en cas de vacance définitive du poste. »

L’incendie a eu lieu le 4 juin 2019. Il n’est pas produit de document relatif à son affectation sur le magasin de [Localité 14] le 12 juin 2019 mais elle n’est pas contestée. En tout état de cause le salarié avait donné son accord de principe à une affectation sur un autre magasin.

Le 14 novembre M. [C] donne son accord pour se rendre à [Localité 15] mais demande des modifications par rapport au programme prévu ce à quoi l’employeur consent par courrier du 13 décembre 2019 en différant la prise de début de poste au 26 décembre 2019. Toutefois dés le 21 novembre il informe l’employeur par mail de son refus d’être affecté à [Localité 15].

Puis le 13 février 2020 l’employeur notifie une affectation définitive sur le site de [Localité 12] à partir du 16 mars 2020 mais passation de poste les 9 et 10 mars 2020.

Par ce même courrier l’employeur lui demande de se rendre sur le site de Vandoeuvre les [Localité 16] de façon temporaire du 17 février au 7 mars inclus. Le salarié en réponse l’informe de son refus de se rendre à Vandoeuvre les [Localité 16] expliquant être trop usé par le remplacement à [Localité 14] qui a eu un impact sur sa vie personnelle.

Il est donc établi que le salarié n’avait donné son accord en affectation temporaire que pour le site de [Localité 14] et ensuite s’était opposé aux autres. L’affectation définitive sur le site de [Localité 12] n’étant intervenue que le 13 février 2020 pour une prise de poste le 16 mars 2020 , les autres affectations étant temporaires requéraient son accord, la clause de mobilité ne trouvant à s’appliquer que pour les mutations définitives.

Le fait que la société ait été placée en redressement judiciaire n’a pas d’influence sur les règles de la convention collective.

Le salarié a été éprouvé par l’affectation temporaire pour le site de [Localité 14], il s’en est plaint auprès de l’employeur et son état a nécessité un arrêt de travail concomittant à une nouvelle affectation temporaire pour le site de [Localité 15] à laquelle il avait émis son opposition.

L’affectation temporaire sur les sites de [Localité 15] et Vandoeuvre les [Localité 16] a été abusive de la part de l’employeur. Toutefois le salarié ne s’y est pas rendu refusant ces propositions faites par l’employeur qu’il a été en mesure de refuser sans aucune sanction. Il ne saurait donc soutenir avoir subi un préjudice du fait de ces propositions d’affectations temporaires.

Sur la demande relative à l’atteinte au principe d’égalité de traitement

M. [C] argue que lorsque le magasin de [Localité 11] a été incendié, le personnel a été sommé de rester à son domicile en attendant la fin des travaux et la réouverture, qu’il a été le seul membre du personnel à qui il a été demandé de travailler, qu’il a du se rendre à [Localité 14] puis dans d’autres magasins, ce qui constitue une différence de traitement que ne peut justifier son statut de directeur de magasin, qu’il aurait du rester à son domicile comme les autres salariés et percevoir un salaire puisque l’employeur était indemnisé par son assurance pour les rémunérations dues aux salariés.

Il revendique le paiement d’un salaire pendant la période comprise entre le 12 juin et le 7 décembre 2019.

L’employeur s’y oppose répliquant que M. [C] est le seul cadre du magasin de [Localité 11] et pouvait à ce titre être muté dans d’autres établissements, que l’assurance n’ a pas pris en charge les rémunérations dues aux salariés et devant rester à leurs domiciles dans l’attente de la réouverture, qu’en tout état de cause il n’y avait pas eu d’atteinte au principe d’égalité de traitement.

Sur ce

L’égalité de traitement entre les salariés qui se traduit principalement par le principe « à travail égal salaire égal » vise à garantir aux salariés une protection contre les décisions de l’employeur puisqu’il permet aux salariés de bénéficier des mêmes avantages et rémunérations que leurs collègues placés dans une situation identique. Cela se traduit par la condamnation de l’employeur au paiement de rappel de salaires (ou à l’octroi d’un avantage) lorsque des salariés sont victimes d’une différence de traitement avec des salariés placés dans une situation identique, sauf si cette différence de traitement est justifiée par des éléments objectifs.

Le champ d’application du principe d’égalité de traitement ne se limite pas à la rémunération des salariés. Il s’applique également à tout avantage lié à l’entreprise, tel que l’octroi de jours de congés payés.

Plus généralement, elle considère que si l’employeur peut accorder des « avantages particuliers » à certains salariés, c’est à la condition que tous les salariés de l’entreprise placés dans une situation identique puissent bénéficier de l’avantage ainsi accordé, et que les règles déterminant l’octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables.

En matière de preuve il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et et il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence.

Or en l’espèce, l’atteinte ne porte pas sur le salaire ou les avantages salariaux mais sur le fait que le salarié ait travaillé pendant les travaux mais pas les autres collaborateurs.

La cour observe que M. [C] n’était pas le seul salarié concerné puisque M. [R], autre salarié du magasin de [Localité 11] avait aussi été appelé en renfort au magasin de [Localité 12] 4 jours au mois d’août et septembre 2019 puisqu’il est produit ses état de frais de déplacement.

La cour observe encore que le salarié avait accepté de se rendre d’abord au magasin de [Localité 14] à compter de la semaine 40 de l’année 2019 puis à [Localité 15] avant de refuser en novembre 2019 et il ne prouve pas que les autres salariés du magasin n’avaient pas été sollicités pour travailler ailleurs ou avaient refusé de s’y rendre.

En outre M. [C] avait perçu une compensation financière en contre partie de son affectation temporaire au magasin de [Localité 14].

Dés lors, la cour, par confirmation du jugement, jugera que l’employeur n’a pas porté atteinte au principe d’égalité de traitement du salarié et le déboutera de sa demande d’indemnisation à ce titre.

Sur la visite médicale

M.[C] expose avoir été en arrêt maladie pendant 32 jours, que l’employeur aurait du lui faire effectuer une visite médicale de reprise afin de déterminer son aptitude, que son préjudice correspond au montant du salaire dont il a été privé le temps que la visite médicale soit réalisée puisqu’il ne pouvait reprendre le travail.

Les intimées s’oppose à toute indemnisation faute de préjudice établi.

L’Unedic affirme que le salarié n’apporte la preuve d’un quelconque préjudice.

Sur ce

L’article D 4624-31 du code du travail dispose que « Le travailleur bénéficie d’un examen de reprise du travail par le médecin du travail :

1° Après un congé de maternité ;

2° Après une absence pour cause de maladie professionnelle ;

3° Après une absence d’au moins trente jours pour cause d’accident du travail ;

4° Après une absence d’au moins soixante jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnel.

Dès que l’employeur a connaissance de la date de la fin de l’arrêt de travail, il saisit le service de prévention et de santé au travail qui organise l’examen de reprise le jour de la reprise effective du travail par le travailleur, et au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent cette reprise. »

L’employeur ne peut laisser un salarié reprendre son travail après une période d’absence d’au moins 30 jours pour cause de maladie sans le faire bénéficier, lors de la reprise du travail, ou au plus tard dans les 8 jours de celle-ci, d’un examen par le médecin du travail destiné à apprécier son aptitude à reprendre son ancien emploi, la nécessité d’une adaptation des conditions de travail ou d’une réadaptation ou éventuellement de l’une et de l’autre de ces mesures. Le non-respect par l’employeur de ses obligations relatives à la visite médicale de reprise ouvre droit en principe à des dommages-intérêts.

Le salarié a été en arrêt maladie du 27 février au 29 mars 2020 soit plus de 30 jours consécutifs, une visite médicale de reprise aurait du être organisée par l’employeur.

La jurisprudence ayant abandonné la notion de préjudice nécessaire dans de multiples domaines, en ce compris en cas de défaut de l’organisation de la visite médicale de reprise, il appartient donc au salarié de rapporter la preuve d’un préjudice.

Faute de rapporter cette preuve, la demande du salarié, par confirmation du jugement, doit être rejetée.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur la résiliation judiciaire

M.[C] expose qu’il avait saisi le conseil de prud’hommes en résiliation judiciaire du contrat de travail mais qu’entre temps il a été licencié le 5 juin 2020 pour faute grave, qu’il demande donc à la cour de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail, qui doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il invoque des manquements de l’employeur, à savoir l’absence de visite médicale de reprise après un arrêt de travail de plus de 30 jours, qu’il ne peut lui être reproché une absence injustifiée car le contrat de travail est suspendu tant que la visite médicale de reprise n’a pas été régularisée, que la faute grave n’est pas établie, que la jurisprudence invoquée par l’employeur est isolée.

Il fait valoir que l’employeur ne lui a pas demandé de reprendre le travail à compter du 29 avril 2020, qu’il ne le pouvait pas de toute façon car le pays était en confinement et les salariés étaient en chômage partiel jusqu’au 11 mai, que son absence à [Localité 12] relève d’un abus de la clause de mobilité.

Il ajoute que les absences de février 2020 invoquées par conclusions ne sont pas reprises dans la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige, qu’en tout état de cause ce grief est prescrit, datant de plus de deux mois, que les arrêts maladie sont bien arrivés chez l’employeur.

Les intimées s’opposent à cette demande rétorquant que le licenciement pour faute grave est fondé, que le salarié a été en absence injustifiée du 17 février au 26 février 2020, puis en arrêt maladie à compter du 29 mars 2020, qu’il n’a pas renouvelé son arrêt à partir du 1er avril et était alors placé en activité partielle du fait de la pandémie, que le 17 avril 2020, il donnait son accord à une mutation sur le site de [Localité 12] mais ne participait pas à la réunion en visio-conférence préalable à la réouverture des magasins, qu’à compter du 29 avril le salarié n’était plus en chômage partiel.

L’employeur argue que M. [C] a effectué sa visite de reprise du travail après arrêt maladie de plus de 30 jours le 19 février, qu’il a ensuite été en arrêt injustifié et n’a plus donné signe à son employeur, tant en distanciel qu’en ne se présentant pas à son nouveau magasin de [Localité 12], que le salarié a profité de la crise sanitaire en ne lui adressant l’arrêt maladie du 27 février au 29 mars, que le 10 avril.

L’Unedic soutient que le licenciement pour faute grave est fondé car le salarié a abandonné son poste et n’a même pas daigné répondre à la mise en demeure de justifier de ses absences qui lui a été adressée le 13 mai 2020, pas plus qu’à l’entretien préalable.

Sur ce

La voie de la résiliation judiciaire n’est ouverte qu’au salarié et à lui seul; qu’elle produit, lorsqu’elle est accueillie, tous les effets attachés à un licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse.

Lorsque les manquements de l’employeur à ses obligations légales, conventionnelles ou contractuelles sont établis, ont revêtus une gravité suffisante et empêchent la poursuite du contrat de travail, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail doit être accueillie, avec effet à la date de la décision la prononçant, lorsqu’à cette date le contrat de travail est toujours en cours .

En cas d’action en résiliation judiciaire suivie en cours d’instance d’un licenciement, l’examen de la résiliation judiciaire revêt un caractère préalable, dans la mesure où si la résiliation du contrat est prononcée, le licenciement ultérieurement notifié par l’employeur se trouve privé d’effet ; que l’examen de la légitimité du licenciement n’a donc lieu d’être opéré qu’en cas de rejet de la demande de résiliation judiciaire.

Le salarié fonde sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail sur plusieurs manquements :

le caractère illicite de la convention de forfait jours et par voie de conséquence l’absence de paiement des heures supplémentaires et de contreparties obligatoires en repos

le retrait du véhicule de fonction

l’atteinte au principe d’égalité de traitement

le travail dissimulé

la mise en oeuvre abusive de la clause de mobilité

l’absence de visite médicale de reprise après un arrêt de travail de plus de 30 jours

La cour a jugé précédemment que le retrait du véhicule de fonction, l’atteinte au principe d’égalité de traitement, le travail dissimulé ne sont pas caractérisés et que l’absence de visite médicale de reprise ne cause pas de préjudice au salarié.

En revanche elle a reconnu le caractère abusif de l’affectation temporaire sur les sites de [Localité 15] et Vandoeuvre les [Localité 16], jugé que la convention de forfait jours était privée d’effet avec pour conséquence la condamnation de l’employeur à payer des heures supplémentaires et que le salarié avait droit à une contrepartie de son droit au repos .

La cour retient que les manquements de l’employeur à ses obligations légales, conventionnelles ou contractuelles sont établis, ont revêtus une gravité suffisante et empêchent la poursuite du contrat de travail, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail doit en conséquence être accueillie.

Lorsqu’en cours d’instance de résiliation judiciaire le contrat de travail a été rompu, notamment par l’effet d’un licenciement, la date d’effet de la résiliation doit être fixée à la date de rupture effective du contrat, c’est à dire dans l’hypothèse considérée à la date du licenciement soit en l’espèce au 5 juin 2020.

Sur les conséquences de la résiliation judiciaire

[C] sollicite la condamnation de la société Sedev à lui verser un préavis correspondant à 3 mois de salaire en application de la convention collective applicable, une indemnité de licenciement sur la base d’une ancienneté de 3 ans et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 6 mois de salaire soit au delà de barème d’indemnisation qui contredit aux dispositions des article 10 de la convention n° 158 sur le licenciement de l’OIT et de l’article 4 de la charte européenne du 2 mai 1996.

Les intimées s’opposent à ces demandes soutenant que le licenciement est bien fondé. Sur les dommages et intérêts réclamés au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, elles invoquent l’application du barème d’indemnisation alors que le salarié n’avait que deux années d’ancienneté.

Sur ce

Produisant tous les effets d’un licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse, la résiliation judiciaire ouvre doit pour le salarié aux indemnités de rupture (indemnité compensatrice de préavis, indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de congés payés) ainsi qu’à des dommages et intérêts appréciés, selon les cas, sur le fondement de l’article L.1235-3 ou de l’article L 1235-5 du code du travail.

Non spécifiquement contestée la cour fera droit à la demande de M. [C] relativement au préavis.

Sur l’indemnité conventionnelle de licenciement.

L’ancienneté du salarié s’apprécie au jour de l’envoi de la lettre de licenciement soit en l’espèce au 5 juin 2020, il avait donc 2 ans et 10 mois d’ancienneté.

En application de l’article L 1234-9 du code du travail le salarié ayant mois de 10 ans d’ancienneté perçoit une indemnité de licenciement correspondant à une somme calculée par année de service sur la base d’1/4 de salaire. En cas d’année incomplète il est pris en compte le nombre de mois de présence.

Il faut prendre en compte les différents éléments de rémunération donc les heures supplémentaires.

La cour retient le salaire de base brut et les heures supplémentaires retenues précédemment soit 2 800 euros de salaire et 365 euros d’heures supplémentaires.

L’employeur est condamné à payer à M. [C] une somme de 2 241,25 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement.

Il est constant que l’application de l’article L. 1235-3 du code du travail qui fixe le barème d’indemnisation applicable, conduira à limiter les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse entre un montant minimum de 3 mois de salaire et un montant maximum à 3,5 mois de salaire.

Sur l’exception de conventionnalité

M. [C] invoque les textes suivants :

– l’article 4 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’Organisation internationale du travail (l’OIT ci-après) selon lequel « un travailleur ne devra pas être licencié sans qu’il existe un motif valable de licenciement lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service ».

– l’article 10 de la convention internationale du travail n° 158 de l’OIT dont il ressort que si les tribunaux « arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ou d ‘ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée »

– l’article 24 de la charte sociale européenne du 3 mai 1996, qui énonce « En vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s’engagent à reconnaitre (…) :

b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée. »

L’indemnité adéquate doit être considérée comme d’un montant suffisamment élevé pour dissuader l’employeur et pour compenser le préjudice subi par la victime.

La cour constate que le point litigieux est donc relatif au fait que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévus à l’article L. 1235-3 du code du travail ne constituent pas une indemnité adéquate au sens des articles 10 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’OlT et 24 de la Charte sociale européenne.

Sur ce,

L’article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose que les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie.

Lorsque des dispositions internes sont en cause, comme en l’espèce, le juge du fond doit vérifier leur compatibilité avec les normes supranationales que la France s’est engagée à respecter, au besoin en écartant la norme nationale en cas d’incompatibilité irréductible.

Sur l’invocation de l’article 4 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’OlT et du droit au procès équitable

La cour constate que si M. [C] invoque l’article 4 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’OlT et le droit au procès équitable, les normes en question ne concernent pas le point litigieux qui est relatif au fait que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévus à l’article L. 1235-3 du code du travail ne constituent pas une indemnité adéquate au sens des articles 10 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’OlT et 24 de la Charte sociale européenne.

L’invocation de l’article 4 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’OlT et du droit au procès équitable est donc inopérante.

Surabondamment, la cour retient en ce qui concerne le droit au procès équitable que l’article L.1235-3 du code du travail n’empêche pas un salarié d’agir en justice pour faire reconnaître le caractère injustifié du licenciement et condamner l’employeur, que loin d’interdire ou de compromettre le recours au juge, l’article L.1235-3 du code du travail en fait un préalable nécessaire, que le salarié conserve ainsi la faculté de saisir effectivement un juge impartial pour défendre ses droits selon des modalités qui, tout en réduisant l’office de ce dernier, laisse intact la nature de son pouvoir, que ce pouvoir reste souverain et s’exerce entre les plancher et plafond variables et afférents à l’ancienneté du salarié, ce qui ôte au procès tout caractère inéquitable, peu important l’impact de l’article L.1235-3 du code du travail sur le montant de l’indemnisation en sorte que l’invocation du droit au procès équitable n’est pas fondée.

Surabondamment encore, la cour retient qu’aucun grief ne peut être sérieusement invoqué sur le fondement de l’article 4 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’OlT au motif qu’elle a jugé que le licenciement de M. [C] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur le moyen tiré de l’article 10 de la Convention internationale du travail n° 158 de l’OlT et 24 de la Charte sociale européenne

Les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée le 3 mai 1996 ne sont pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers ; dès lors, la cour retient que, tant ce texte que les décisions du comité européen des droits sociaux, ne peuvent être utilement invoqués par M. [C] pour voir écarter les dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail.

La cour rappelle que l’article 10 de la Convention n° 158 précitée est d’application directe en droit interne et que le barème d’indemnisation a été validé par la jurisprudence.

La cour retient que M. [C] ayant au jour du licenciement une ancienneté de plus de 2 ans et 10 mois, il est en droit d’obtenir en vertu de l’article L.1235-3 du code du travail, entre 3 et 3,5 mois de salaires bruts dès lors que la société Sedev emploie plus de 11 salariés.

A l’examen des moyens débattus, la cour retient que les dispositions de l’article L 1235-3, prévoyant pour M. [C] des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse entre un montant minimal de trois mois de salaire brut et un montant maximal de trois mois et demi, sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la convention n° 158 de l’OIT au motif que :

– une indemnité dite adéquate ou une réparation appropriée n’implique pas, en soi, une réparation intégrale du préjudice de perte d’emploi injustifiée et peut s’accorder avec l’instauration d’un plafond

– le terme adéquat doit donc être compris comme réservant aux États parties une marge d’appréciation, dont l’État français n’a fait qu’user en instituant des planchers et des plafonds d’indemnisation

– lorsque le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, comme c’est le cas en l’espèce, le juge peut proposer la réintégration et ce n’est que lorsque celle-ci est refusée par l’une ou l’autre des parties que le juge octroie au salarié une indemnité dans la limite du barème

– le barème est écarté en cas de nullité du licenciement en application de l’article L 1235-3-1 du code du travail

– ces dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de l’article L 1235-3 sont versés en sus des indemnités de rupture, savoir pour M. [C], l’indemnité de licenciement, l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération de M. [C], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour retient que l’indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de M. [C] doit être évaluée à la somme de 8611,47 euros soit 3 mois de salaire fixé à 3011 euros brut ( 2800 + 110 d’heures supplémentaires annuelles ramenée à 211,47 euros mensuelles).

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a débouté M. [C] de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne la société Sedev à payer à M. [C] la somme de 8 611,47 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur l’AGS

Il convient de dire le présent arrêt opposable à l’UNEDIC délégation AGS CGEA de Lille et de rappeler que la garantie de l’AGS n’est due, toutes créances avancées pour le compte du salarié que dans la limite des plafonds définis notamment aux articles L.3253-17, D.3253-2 et D. 3253-5 du code du travail et dans la limite des textes légaux définissant l’étendue de sa garantie à savoir les articles L.3253-8 à L.3253-13, L.3253-15 et L.3253-19 à L.3253-24 du code du travail.

Il convient également de dire que l’AGS ne garantit pas les sommes allouées en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur les documents de fin de contrat

La société Sedev devra remettre au salarié les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt sans qu’il soit nécessaire à ce stade d’ordonner une astreinte.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société Sedev succombant pour l’essentiel à la procédure d’appel est condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [C] les frais qu’il a dû exposer pour la présente procédure. La société Sedev est condamnée à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour l’ensemble de la procédure d’appel.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société Sedev les frais qu’elle a dû exposer pour la présente procédure. Elle est déboutée de sa demande sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement et en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu du 22 avril 2021 par le Conseil des Prud’hommes de [Localité 11] sauf en ce qu’il a débouté M. [C] de ses demandes :

en exécution déloyale de la convention de forfait jours

au titre du travail dissimulé

relative à la prime de directeur de magasin

en réparation du préjudice né des affectations temporaires abusives

en dommages et intérêts relative au retrait du véhicule mis à disposition

en dommages et intérêts relative à l’atteinte au principe d’égalité de traitement

en dommages et intérêts relative à l’absence de visite médicale de reprise

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant

Dit que la convention de forfait jours est inopposable au salarié

Prononce la résiliation du contrat de travail entre la société Sedev et M. [V] [C] aux torts exclusifs de l’employeur au 5 juin 2020

Condamne la société Sedev à payer à M. [V] [C] les sommes de :

– 9 827,82 euros à titre d’heures supplémentaires outre 982,78 euros de congés payés

– 3 544,32 euros de contrepartie obligatoire en repos outre 354,43 euros de congés payés

– 8 400 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

– 840 euros au titre des congés payés sur préavis

– 2 241,25 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement

– 8 611,47 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Dit le jugement opposable à l’Unedic GAS CGEA délégation de Lille

Dit que l’employeur devra remettre à M. [C] les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt

Dit n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte pour garantir cette remise

Condamne la société Sedev à payer à M. [V] [C] la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour l’ensemble de la procédure

Déboute la société Sedev de sa demande présentée sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires

Condamne la société Sedev aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.

 


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