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ARRET
N°
S.A.S. FLINT GROUP FRANCE
C/
COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE DE LA SOCIETE FLINT GROUP FRANCE
MS/VB
COUR D’APPEL D’AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 22/05191 – N° Portalis DBV4-V-B7G-ITTJ
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS DU DIX NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
PARTIES EN CAUSE :
S.A.S. FLINT GROUP FRANCE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée et plaidant par Me Bruno DRYE de la SCP DRYE DE BAILLIENCOURT ET ASSOCIES, avocat au barreau de SENLIS
APPELANTE
ET
COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE DE LA SOCIETE FLINT GROUP FRANCE agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté Me Alexandra LECAREUX, avocat au barreau de COMPIEGNE
Plaidant par Me JOURNET substituant Me Mounir BOURHABA, avocats au barreau de PARIS
INTIME
DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :
L’affaire est venue à l’audience publique du 14 mars 2023 devant la cour composée de M. Pascal BRILLET, Président de chambre, M. Vincent ADRIAN et Mme Myriam SEGOND, Conseillers, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.
A l’audience, la cour était assistée de Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.
Sur le rapport de Mme [G] [O] et à l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et le président a avisé les parties de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 16 mai 2023, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
PRONONCÉ :
Le 16 mai 2023, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Pascal BRILLET, Président de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.
*
* *
DECISION :
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Le 28 mai 2019, à l’issue du second tour des élections, un comité social et économique (le CSE) a été mis en place au sein de la société Flint group France (l’employeur). Lors de sa réunion du 16 septembre 2019, le CSE a adopté son règlement intérieur à la majorité de ses membres. L’employeur en sa qualité de président s’est opposé à certaines de ses clauses, puis a saisi le tribunal judiciaire de Beauvais afin de les lui voir déclarer inopposables.
Par jugement du 19 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Beauvais a partiellement fait droit à la demande de la société Flint group France.
Par déclaration du 18 novembre 2022, la société Flint group France a fait appel puis après y avoir été autorisée, a délivré au CSE le 16 décembre 2022 une assignation à jour fixe en vue de l’audience du 14 mars 2023.
Vu les conclusions du 3 mars 2023 pour la société Flint group France et du 20 février 2023 pour le CSE ;
MOTIVATION
Vu l’article L. 2315-24 du code du travail ;
Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le comité social et économique détermine, dans un règlement intérieur, les modalités de son fonctionnement et celles de ses rapports avec les salariés de l’entreprise, pour l’exercice des missions qui lui sont conférées par le chapitre II du présent titre.
La validité des clauses du règlement est soumise à plusieurs conditions :
– elles ne doivent pas être contraires aux règles d’ordre public,
– elles ne doivent pas concerner des mesures qui relèvent des prérogatives de l’employeur,
– elles ne doivent pas imposer à l’employeur des contraintes supplémentaires à celles prévues dans la loi, sauf accord de ce dernier,
– dans les domaines réservés par le législateur à la négociation collective, le règlement intérieur doit respecter les termes de l’accord d’entreprise qui a été conclu.
Enfin, le juge peut seulement annuler une disposition du règlement qu’il estime illicite, et non la modifier.
– Sur les clauses relatives à la mise en place du CSE
La composition du CSE
– Titre I, article 1.1, alinéa 2, du règlement relatif à la désignation du président
Le premier juge a écarté l’article 1.1, alinéa 2, du règlement qui stipule :
« Le président et/ou son délégataire sera désigné lors de la première réunion. »
La société Flint group France soutient que cette clause est contraire aux prérogatives de l’employeur qui préside le CSE de plein droit.
Le CSE réplique que cette clause est licite puisqu’en cas de délégation par l’employeur d’un représentant pour présider le comité, le comité doit pouvoir vérifier que ce représentant a la qualité et le pouvoir nécessaires à l’information et à la consultation de l’institution représentative du personnel.
Sur ce, selon l’article L. 2315-23 du code du travail, applicable aux entreprises d’au moins 50 salariés, l’employeur ou son représentant préside le CSE de plein droit.
Si le délégataire de l’employeur doit avoir la qualité et le pouvoir nécessaires à l’information et à la consultation de l’institution représentative du personnel, de nature à permettre l’exercice effectif des prérogatives de celle-ci, il appartient, en cas de contestation, au CSE de saisir le juge des référés pour faire constater le trouble manifestement illicite en résultant (Soc, 25 novembre 2020, n° 19-18681). Mais il n’appartient pas au CSE de désigner lui-même le délégataire de l’employeur, cette prérogative appartenant à ce dernier à titre exclusif.
C’est dès lors à bon droit que le premier juge a écarté l’article 1.1, alinéa 2, du règlement intérieur. Le jugement est confirmé.
– Titre I, article 1.3, du règlement relatif aux représentants syndicaux au CSE
Le premier juge a écarté l’article 1.3 du règlement qui stipule :
« Chaque représentant syndical au CSE désigné par son organisation syndicale représentative dans l’entreprise assiste aux réunions du CSE avec une voix consultative. »
L’illégalité de cette clause n’est pas contestée par le CSE. En effet, selon l’article L. 2143-22 du code du travail, dans les entreprises de moins de 300 salariés et dans les établissements appartenant à ces entreprises, le délégué syndical est, de droit, représentant syndical au comité social et économique. Le représentant de la section syndicale ne peut occuper cette fonction (Soc, 14 décembre 2011, n° 11-14642). Le jugement est confirmé.
Les mandats
– Titre 1, article 3.2.4, alinéa 1, du règlement relatif au secret professionnel et à l’obligation de discrétion
Le premier juge a écarté une partie de l’article 3.2.4, alinéa 1, du règlement qui stipule :
« [Toute personne siégeant ou pouvant siéger au CSE, dont la participation à une réunion plénière ordinaire ou extraordinaire lui permet d’obtenir des informations et des données confidentielles et/ou sensibles pour l’entreprise est tenue, dans les conditions prévues par le code du travail, d’une obligation de secret professionnel et/ou de confidentialité, à la condition que ces informations n’aient pas fait l’objet d’une communication antérieure aux salariés de l’entreprise, ni d’aucune publication dans un média quelconque et] à condition que le président apporte une justification quant au pouvoir de nuisance de l’information confidentielle à l’encontre de l’entreprise si elle venait à être divulguée. »
L’illégalité de cette condition apportée à l’obligation de confidentialité n’est pas contestée par le CSE. En effet, l’obligation tenant au secret professionnel et à la confidentialité est prévue par l’article L. 2315-3 du code du travail qui n’impose pas à l’employeur d’apporter une justification particulière. Il appartient au CSE, en cas de contestation, de saisir le juge des référés pour faire constater le trouble manifestement illicite qui résulterait de la présentation illégitime par l’employeur d’informations comme confidentielles (Soc, 5 novembre 2014, n° 13-17270). Le jugement est confirmé.
– Sur les clauses relatives aux moyens du CSE
Le bureau
– Titre I, article 1.2.2, du règlement relatif à la désignation d’un secrétaire et d’un trésorier adjoints
Le premier juge a écarté l’article 1.2.2 du règlement qui stipule :
« Un secrétaire adjoint et un trésorier adjoint seront également désignés lors de la première réunion du CSE parmi ses membres titulaires et suppléants. »
La société Flint group France soutient que cette clause est contraire à l’accord d’entreprise du 12 avril 2019 qui n’a prévu la désignation d’adjoints au secrétaire et au trésorier parmi les membres suppléants qu’en cas d’impossibilité de les désigner parmi les titulaires.
Le CSE réplique que l’accord d’entreprise a prévu que les adjoints peuvent être désignés parmi les membres titulaires ou suppléants.
Sur ce, l’accord d’entreprise du 12 avril 2019, en son article 1.1, alinéa 3, prévoit qu’un secrétaire adjoint et un trésorier adjoint sont désignés parmi les titulaires ou suppléants.
La conjonction de coordination ‘ou’ marque un choix qui peut être hiérarchisé ou non. La disposition conventionnelle est ambigüe et doit être interprétée.
L’article L. 2314-1, alinéa 2, du code du travail dispose que le suppléant assiste aux réunions en l’absence du titulaire. Cette règle est rappelée par l’article 1.4, alinéa 6, de l’accord d’entreprise, qui instaure ainsi une hiérarchie entre titulaires et suppléants.
L’accord d’entreprise doit donc être interprété en ce sens que les adjoints ne peuvent être désignés parmi les suppléants qu’en cas d’impossibilité de les désigner parmi les titulaires.
C’est par conséquent à bon droit que le premier juge a écarté l’article 1.2.2 du règlement. Le jugement est confirmé.
Les réunions
– Titre I, article 1.1, alinéa 4, du règlement relatif à la périodicité des réunions ‘santé-sécurité’
Le premier juge a écarté l’article 1.1, alinéa 4, du règlement qui stipule :
« Lorsque les réunions annuelles (au minimum 6 réunions) abordent les sujets de santé sécurité et conditions de travail dans l’entreprise, les personnes suivantes sont également invitées :
– l’agent de contrôle de l’inspection du travail,
[…]
– l’agent des services de prévention des organismes de sécurité sociale. […] »
La société Flint group France soutient que cette clause lui impose une charge supplémentaire à celle prévue par l’article L. 2315-27 du code du travail et l’accord d’entreprise du 12 avril 2019, qui limitent à quatre le nombre de réunions annuelles en matière de santé, sécurité et conditions de travail.
Le CSE réplique que la loi et l’accord d’entreprise se bornent à fixer un plancher de quatre réunions et que le règlement peut en prévoir un nombre plus important, cela d’autant plus que la société Flint group France est classée Seveso compte tenu de son activité qui la conduit à manipuler des produits chimiques dangereux.
Sur ce, aux termes de l’article L. 2315-27, alinéa 1, du code du travail, au moins quatre réunions par an doivent porter en tout ou partie sur les attributions du comité en matière de santé, sécurité et conditions de travail, plus fréquemment en cas de besoin, notamment dans les branches d’activité présentant des risques particuliers. Le minimum de quatre réunions par an est d’ordre public.
Les partenaires sociaux n’ont pas entendu augmenter la périodicité des réunions annuelles en matière de santé, sécurité et conditions de travail, qui sont fixées au nombre de quatre par l’article 1.4, alinéa 5, de l’accord d’entreprise du 12 avril 2019.
Ainsi, la fixation à un niveau plus élevé de six du nombre de ces réunions annuelles constitue une charge supplémentaire pour l’employeur qui suppose son accord.
Il convient de préciser que la loi a prévu la possibilité pour le CSE d’organiser des réunions supplémentaires sur les questions de santé, sécurité et des conditions de travail dans certaines circonstances graves ou à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel (article L. 2315-27, alinéa 2, du code du travail).
Enfin, l’invitation aux réunions de l’agent de contrôle de l’inspection du travail ainsi que des agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale n’est prévue par l’article L. 2314-3, paragraphe 2, 2° et 3°, qu’à l’initiative de l’employeur ou à la demande de la majorité de la délégation du personnel du CSE ou en cas de réunion consécutive à un accident de travail ayant entrainé un arrêt de travail d’au moins huit jours ou à une maladie professionnelle ou à caractère professionnel. La loi ne prévoit donc pas de manière systématique l’invitation des agents précités aux réunions ‘santé-sécurité’.
En l’absence d’accord de l’employeur, c’est dès lors à bon droit que le premier juge a écarté l’article 1.1, alinéa 4, du règlement intérieur. Le jugement est confirmé.
– Titre I, article 3.1, alinéa 1, seconde phrase, du règlement relatif au jour des réunions ordinaires
Le premier juge a écarté l’article 3.1, alinéa 1, seconde phrase, du règlement qui stipule :
« Les réunions ordinaires bimensuelles du comité ont lieu le troisième lundi de chaque mois impair à partir de 9 heures. »
L’illégalité de cette clause n’est pas contestée par le CSE. En effet, il résulte de l’article L. 2315-28 du code du travail que l’employeur a le pouvoir de convocation, lequel inclut nécessairement le pouvoir de fixer la date de la réunion du comité, sauf accord entre la majorité des élus et l’employeur. Si le CSE détermine, dans son règlement intérieur, les modalités de son fonctionnement, l’article L. 2315-24 ne lui permet pas d’inclure dans ce règlement des dispositions concernant une mesure qui relève des prérogatives de l’employeur, sauf pour celui-ci à répondre d’un éventuel abus dans leur exercice (Soc, 15 janvier 2013, n° 11-28324). Le jugement est confirmé.
– Titre I, article 2.1, alinéa 4, article 2.3.1, alinéa 1, et article 3.1, alinéas 3, 4 et 5, du règlement relatifs à l’établissement de l’ordre du jour
Le premier juge a validé l’article 2.1, alinéa 4, l’article 2.3.1, alinéa 1, à l’exception de la partie de phrase relative à l’ordre du jour de la première réunion, et l’article 3.1, alinéas 3, 4 et 5 du règlement, qui stipulent :
« Tous les autres ordres du jour [excepté celui de la première réunion] sont établis conjointement par le président ou son représentant dûment mandaté, avec le secrétaire de l’instance, qu’il s’agisse des réunions ordinaires ou extraordinaires ; hormis pour les réunions extraordinaires organisées à la demande des élus. » (article 2.1, alinéa 4)
« [Le président (ou son représentant dûment mandaté) arrête l’ordre du jour des réunions plénières du CSE conjointement avec le secrétaire] excepté l’ordre du jour de la première réunion ainsi que des réunions à la demande des élus du CSE. » (article 2.3.1, alinéa 1)
« Au moins quatre réunions annuelles du CSE portent en tout ou partie sur les sujets relatifs à la santé, à la sécurité et les conditions de travail dans l’entreprise, soit une réunion tous les trois mois.
En dehors de ces quatre réunions, les sujets liés à la santé, à la sécurité et les conditions de travail, ces points seront nécessairement rajoutés aux réunions ordinaires et/ou extraordinaires du CSE.
Le CSE se réunit selon deux modalités :
– les réunions plénières ordinaires
– les réunions plénières extraordinaires. » (article 3.1, alinéas 3, 4 et 5)
La société Flint group France soutient que ces clauses sont contraires à l’article L. 2315-29 du code du travail et à l’accord d’entreprise du 12 avril 2019 qui prévoient l’établissement conjoint de l’ordre du jour sans distinction entre les réunions du CSE.
Le CSE réplique que l’article L. 2315-31 du code du travail prévoit une dérogation à l’établissement conjoint de l’ordre du jour en cas de réunion du CSE à la demande de la majorité de ses membres.
Sur ce, aux termes de l’article L. 2315-29, alinéa 1, du code du travail, l’ordre du jour de chaque réunion du comité social et économique est établi par le président et le secrétaire. Cette disposition est reprise à l’article 1.4, alinéa 2, de l’accord d’entreprise du 12 avril 2019.
Si l’article L. 2315-31 du même code prévoit que lorsque le comité social et économique se réunit à la demande de la majorité de ses membres, les questions jointes à la demande de convocation sont inscrites à l’ordre du jour de la réunion, l’élaboration conjointe de l’ordre du jour demeure la règle (voir par analogie, en matière de consultation obligatoire : Soc, 12 juillet 2010, n° 08-40740).
S’agissant de l’article 3.1, alinéas 3, 4 et 5, du règlement, il a été indiqué, au sujet de l’article 1.1, alinéa 4, que les réunions ‘santé-sécurité’ sont limitées à quatre par an sauf exceptions prévues par l’article L. 2315-27, alinéa 2. L’ajout obligatoire à l’ordre du jour de questions relatives à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail, en dehors des quatre réunions annuelles, constitue une charge supplémentaire pour l’employeur qui suppose son accord.
Les clauses précitées sont par conséquent illicites. Le jugement est infirmé.
– Titre I, article 2.1, alinéas 5 et 6, du règlement relatif aux modalités de communication de l’ordre du jour et de convocation aux réunions
Le premier juge a validé l’article 2.1, alinéas 5 et 6, du règlement qui stipule :
« La convocation et l’ordre du jour sont adressés aux membres du CSE et représentants syndicaux par email sur la boîte professionnelle, au minimum 8 jours ouvrés avant la date de réception (le mercredi), sauf en cas d’urgence ou de circonstances exceptionnelles.
Les documents relatifs aux informations du CSE seront mis à disposition des membres du CSE dans la base de données économique et sociale 5 jours ouvrés avant la réunion (soit le lundi de la semaine précédente). »
La société Flint group France soutient que cette clause est contraire à l’article L. 2315-30 du code du travail qui prévoit un délai de communication de l’ordre du jour et de convocation de trois jours, et auquel l’accord d’entreprise du 12 avril 2019 renvoie.
Le CSE réplique que les délais de convocation stipulés par le règlement intérieur sont raisonnables.
Sur ce, selon l’article L. 2315-30 du code du travail, l’ordre du jour des réunions du comité social et économique est communiqué par le président aux membres du comité, à l’inspecteur du travail ainsi qu’à l’agent des services de prévention des organismes de sécurité sociale, trois jours au moins avant la réunion.
Ainsi, la fixation d’un délai de huit jours pour communiquer l’ordre du jour constitue une charge supplémentaire pour l’employeur qui suppose son accord.
De même, un délai de prévenance de trois jours ayant été fixé par le législateur pour la communication de l’ordre du jour des réunions, il s’en déduit que le même délai doit être considéré comme raisonnable s’agissant de la convocation aux réunions.
Les délais prévus par les clause précitées, supérieurs au délai légal de trois jours, doivent recueillir l’accord de l’employeur.
A défaut, les clauses doivent être écartées. Le jugement est infirmé.
– Titre I, article 1.1.2 et article 2.2, du règlement relatifs aux participants aux réunions
Le premier juge a écarté l’article 1.1.2 et l’article 2.2 du règlement qui stipulent :
« Les parties conviennent que les membres et/ou le président du CSE pourront inviter toute personne de l’entreprise ou extérieure à l’entreprise sur un ou plusieurs points de l’ordre du jour. » (article 1.1.2)
« Les élus de la délégation du personnel participent pleinement et activement au fonctionnement du CSE.
Ces derniers doivent notamment être convoqués et participer, en tant que possible, à l’ensemble des réunions plénières tant ordinaires qu’extraordinaires. » (article 2.2)
La société Flint group France soutient que le CSE ne peut inviter aux réunions des personnes étrangères à ce comité sans l’accord de l’employeur.
Le CSE réplique que cette faculté est offerte à l’employeur par l’article L. 2315-23, alinéa 2, du code du travail, de sorte qu’en vertu du principe de réciprocité, le CSE doit avoir la même faculté.
Sur ce, aucune personne extérieure au comité ne peut assister aux réunions sauf exception expressément prévue par la loi (Soc, 22 novembre 1988, n° 86-13368). Ainsi, par exemple, l’article L. 2314-3 du code du travail a prévu la présence de personnes qualifiées aux réunions de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT). De même, l’article L. 2315-23, alinéa 2, du même code permet à l’employeur de se faire assister par trois collaborateurs qui ont voix consultative.
La clause du règlement permettant aux membres et/ou au président d’inviter toutes personnes de leur choix est trop générale et donc illégale.
L’illégalité de l’article 2.2 du règlement n’est pas contestée. En effet, selon l’article L. 2314-1, alinéa 2, du code du travail, le suppléant n’assiste aux réunions qu’en l’absence du titulaire. Il en résulte que les élus ne participent pas tous aux réunions du comité, comme le laisse penser l’article critiqué.
C’est donc à bon droit que le premier juge a écarté l’article 1.1.2 et l’article 2.2 du règlement intérieur. Le jugement est confirmé.
– Titre I, article 2.1, alinéa 7, article 3.1.1, alinéa 2, article 3.2.3, alinéa 1, et article 3.2.6, alinéa 3, du règlement relatifs au déroulement des réunions
Le premier juge a écarté l’article 2.1, alinéa 7, et l’article 3.2.6, alinéa 3, du règlement qui stipulent :
« La présidence des réunions consiste en l’animation et la direction des débats pendant les réunions du CSE. Même si le président se voit confier un rôle clé, il ne saurait se prévaloir d’une légitimité au sens politique du terme de ‘président’, en ce sens où il préside mais ne dirige pas. Ainsi assure-t-il la police de la réunion : […] » (article 2.1, alinéa 7)
« Au cours de ces réunions plénières, tant ordinaires qu’extraordinaires, le CSE est amené à organiser et procéder à des votes. » (article 3.2.6, alinéa 3)
En revanche, il a validé les articles 3.1.1, alinéa 2, et 3.2.3, alinéa 1, du règlement qui stipulent :
« Les parties s’engagent à traiter l’ensemble des points actés à l’ordre du jour le jour de la réunion fixée, sous réserve d’un report des points actés à la majorité des membres présents. » (article 3.1.1, alinéa 2)
« Une suspension de séance peut être demandée par tout membre du CSE, y compris le président ou son représentant dûment mandaté. Elle est validée par un vote majoritaire des membres présents, le président pouvant prendre part au vote, sans que sa voix ne soit prépondérante. Il appartient à celui demandant une suspension de séance, d’en fixer la règle avant qu’il ne soit procédé au vote. Lors de la suspension de séance, les membres de la direction quittent temporairement la salle de réunion. » (article 3.2.3, alinéa 1)
La société Flint group France soutient que ces clauses ajoutent à la loi et contrarient les prérogatives du président qui dirige les débats et peut seul décider de les suspendre ou de mettre aux voix les résolutions.
Le CSE réplique que ces clauses ne font que rappeler les pouvoirs du président, qu’à défaut de disposition légale régissant la suspension de séance, le règlement intérieur peut en fixer les règles et qu’enfin, il est exact de rappeler que le CSE procède aux votes.
Sur ce, conformément au rôle traditionnel d’un président d’assemblée, l’employeur ouvre la séance, dirige les débats en suivant l’ordre du jour et en distribuant la parole, il met aux voix les résolutions, assure la police de la séance et à l’issue, clôt les débats.
L’article 2.1, alinéa 7, du règlement, qui définit le rôle du président tout en lui déniant une légitimité ‘au sens politique’, est superflu, sinon obscur. Si l’employeur n’a effectivement pas de légitimité élective, il tire ses prérogatives de président du code du travail.
Conformément à une jurisprudence précitée, si le CSE détermine, dans son règlement intérieur, les modalités de son fonctionnement, l’article L. 2315-24 ne lui permet pas d’inclure dans ce règlement des dispositions concernant une mesure qui relève des prérogatives de l’employeur, sauf pour celui-ci à répondre d’un éventuel abus dans leur exercice (Soc, 15 janvier 2013, n° 11-28324).
Le report de certaines questions, la suspension de séance ou la mise aux voix des résolutions sont des prérogatives de l’employeur qui ne peuvent être regies par le règlement intérieur.
C’est, par conséquent, à bon droit que le premier juge a écarté les articles 2.1, alinéa 7, et 3.2.6, alinéa 3 du règlement, mais à tort qu’il a validé les articles 3.1.1, alinéa 2, et 3.2.3, alinéa 1, dudit règlement. Le jugement est infirmé de ces deux derniers chefs.
Les commissions
– Titre I, article 4.1 du règlement relatif à la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT)
Le premier juge a validé les paragraphes 1, 3, 6 et 8 de l’article 4.1 du règlement relatif à la CSSCT, à l’exception de la mutualisation des heures de délégation de ses membres, qui stipulent :
« 1. Le nombre de membres de la commission est fixé à cinq personnes.
[…]
3. Le temps passé [dans le cadre des enquêtes et inspections] est assimilé à du temps de travail rémunéré comme tel.
[…]
6. Afin de permettre d’exercer leurs missions, les membres de cette commission se verront attribuer huit heures de délégation par mois et par membre qui peuvent être mutualisables entre eux.
[…]
8. Cette commission fera également cinq inspections par an. »
La société Flint group France soutient que cette clause est contraire à l’article L. 2315-39 du code du travail, qui constitue une disposition supplétive s’appliquant à défaut d’accord collectif. Selon cet article, la commission est composée de trois membres. Elle estime que l’accord d’entreprise du 12 avril 2019 renvoyant à la règlementation relative aux heures de délégation, le règlement ne peut imposer des heures supplémentaires ni les qualifier de temps de travail effectif, sans l’accord de l’employeur. Enfin, les articles L. 2315-27 et R. 2312-4 du code du travail limitent à quatre le nombre d’inspections annuelles.
Le CSE réplique que la loi se borne à fixer un minimum de membres de la CSSCT et d’inspections à réaliser et que le règlement peut en prévoir un nombre plus important, cela d’autant plus que la société Flint group France est classée Seveso compte tenu de son activité qui la conduit à manipuler des produits chimiques dangereux. Il ajoute que l’article L. 2315-11 du code du travail prévoit que le temps passé en enquête ou en inspection ne s’impute pas sur les heures de délégation prévues pour les membres titulaires de la délégation du personnel du CSE.
Sur ce, la société Flint group France ne conteste pas son obligation de créer une CSSCT en application de l’article L. 2315-36, paragraphe 3, du code du travail. La loi fixe des règles d’ordre public de mise en place de la commission et renvoie pour les modalités à l’accord d’entreprise ou à un accord conclu entre l’employeur et le CSE. A défaut, il revient au règlement intérieur d’en fixer les modalités, dans la limite des planchers d’ordre public.
L’article L. 2315-39, alinéa 2, du code du travail, d’ordre public, fixe à trois le nombre minimum de membres de la CSSCT. L’article R. 2312-4 du code du travail précise que la fréquence des inspections en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail est au moins égale à celle des réunions prévues au premier alinéa de l’article L. 2315-27, d’ordre public, soit quatre. Aucun accord n’a été conclu pour fixer le nombre de membres de la commission et d’inspection à réaliser ou leur allouer des moyens supplémentaires.
Dans ces conditions, le règlement intérieur ne peut imposer à l’employeur un nombre plus élevé de membres et d’inspections que les planchers légaux, ni des heures de délégation supplémentaires à leur profit, sous réserve pour ces dernières de la possibilité de mutualisation des heures entre les membres de la délégation du personnel du CSE dans les conditions prévues à l’article R. 2315-6 du code du travail et des exceptions prévues par l’article L. 2315-11, L. 2315-16 et R. 2314-1 du code du travail (circonstances graves ou exceptionnelles, réunions, formations…).
La fixation à cinq du nombre des membres de la CSSCT et du nombre des inspections ainsi que l’octroi d’heures de délégation spécifiques à leur profit constituent une charge supplémentaire pour l’employeur qui suppose son accord.
L’article 4.1, paragraphes 1, 3, 6 et 8, du règlement doit donc être écarté dans son intégralité. Le jugement est infirmé.
– Titre I, article 4.1 du règlement relatif à la commission mutuelle
Le premier juge a validé les stipulations de l’article 4.1 du règlement, relatives à la commission mutuelle, à l’exception de la désignation de ses membres parmi les membres suppléants :
« Les membres de la commission seront au nombre de trois. Ils seront désignés par le CSE lors d’une réunion, nécessairement parmi les membres titulaires ou suppléants.
La désignation se fait à la majorité des membres présents à la réunion.
Chaque membre de cette commission bénéficiera de deux heures mensuelles non cumulables.
Deux réunions annuelles seront prévues.
Les membres seront convoqués par l’employeur une semaine avant la réunion par e-mail et avec remise des documents. »
La société Flint group France soutient que cette clause ajoute à l’accord d’entreprise du 12 avril 2019, ce que le CSE conteste.
Sur ce, l’accord d’entreprise du 12 avril 2019 a prévu la création d’une commission mutuelle. Il stipule, à l’article 2.1 :
« Les membres de la commission seront au nombre de 3. Ils seront désignés par le CSE nécessairement parmi les membres du CSE. La désignation se fait à la majorité des membres du comité présents, pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité. »
L’article 4.1 du règlement ajoute à l’accord d’entreprise en ce qu’il prévoit la désignation des membres de la commission parmi les membres suppléants alors que ceux-ci ne siègent qu’en l’absence du titulaire, l’octroi d’heures de délégation à leur profit et l’organisation de deux réunions annuelles.
A défaut d’accord de l’employeur, cette clause lui est inopposable dans sa totalité. Le jugement est infirmé.
Les moyens matériels
– Titre II, article 3 du règlement relatif à la contribution patronale au financement des activités sociales
Le premier juge a écarté l’article 3 du règlement qui stipule :
« Cette contribution [de 1% de la masse salariale brute versée chaque année pour financer les activités sociales et culturelles] est versée en cinq fois (puis détail des versement).
[…]
En début d’année, c’est le trésorier qui établit l’échéancier des versements, avec la direction. »
L’illégalité de cette clause n’est pas contestée par le CSE. En effet, la périodicité annuelle du versement de la contribution est prévue par l’article L. 2312-81 du code du travail. Si l’employeur peut échelonner ses versements selon le budget du comité, son programme de dépenses et ses besoins de trésorerie, cet échelonnement ne peut pas lui être imposé. Le jugement est confirmé.
– Titre II, article 4 du règlement relatif au local
Le premier juge a partiellement écarté l’article 4 du règlement qui stipule :
« L’employeur met à la disposition du CSE un local aménagé et équipé du matériel nécessaire à l’exercice de ses fonctions.
Ce local fermant à clef est notamment équipé d’un ordinateur, d’un bureau, de tables et de chaises en nombre suffisant pour y organiser les réunions préparatoires, d’une armoire, d’un caisson, d’un téléphone fixe, d’un coffre-fort, d’une connexion internet. »
L’illégalité de cette clause n’est pas contestée par le CSE. En effet, l’accord d’entreprise du 12 avril 2019 prévoit, en son article 5, la mise à disposition par l’employeur d’un local aménagé (chaises, tables, armoires, ordinateurs, ligne téléphonique, internet) situé sur le site de [Localité 1]. Les équipements listés par la clause du règlement excèdent les termes de l’accord d’entreprise. Le jugement est confirmé.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a dit que les autres dispositions du règlement intérieur du CSE sont valables,
Statuant à nouveau des chefs infirmés :
Déclare illégales et inopposables à la société Flint group France les dispositions suivantes du règlement intérieur :
Titre I, article 2.1, alinéas 4, 5 et 6: « Tous les autres ordres du jour sont établis conjointement par le président ou son représentant dûment mandaté, avec le secrétaire de l’instance, qu’il s’agisse des réunions ordinaires ou extraordinaires ; hormis pour les réunions extraordinaires organisées à la demande des élus.
La convocation et l’ordre du jour sont adressés aux membres du CSE et représentants syndicaux par email sur la boîte professionnelle, au minimum 8 jours ouvrés avant la date de réception (le mercredi), sauf en cas d’urgence ou de circonstances exceptionnelles.
Les documents relatifs aux informations du CSE seront mis à disposition des membres du CSE dans la base de données économique et sociale 5 jours ouvrés avant la réunion (soit le lundi de la semaine précédente). »
Titre I, article 2.3.1, alinéa 1 : « excepté l’ordre du jour de la première réunion ainsi que des réunions à la demande des élus du CSE. »
Titre I, article 3.1, alinéas 3, 4 et 5 : « Au moins quatre réunions annuelles du CSE portent en tout ou partie sur les sujets relatifs à la santé, à la sécurité et les conditions de travail dans l’entreprise, soit une réunion tous les trois mois.
En dehors de ces quatre réunions, les sujets liés à la santé, à la sécurité et les conditions de travail, ces points seront nécessairement rajoutés aux réunions ordinaires et/ou extraordinaires du CSE.
Le CSE se réunit selon deux modalités :
– les réunions plénières ordinaires
– les réunions plénières extraordinaires. »
Titre I, article 3.1.1, alinéa 2 : « Les parties s’engagent à traiter l’ensemble des points actés à l’ordre du jour le jour de la réunion fixée, sous réserve d’un report des points actés à la majorité des membres présents. »
Titre I, article 3.2.3, alinéa 1 : « Une suspension de séance peut être demandée par tout membre du CSE, y compris le président ou son représentant dûment mandaté. Elle est validée par un vote majoritaire des membres présents, le président pouvant prendre part au vote, sans que sa voix ne soit prépondérante. Il appartient à celui demandant une suspension de séance, d’en fixer la règle avant qu’il ne soit procédé au vote. Lors de la suspension de séance, les membres de la direction quittent temporairement la salle de réunion. »
Titre I, article 4.1 :« 1. Le nombre de membres de la commission est fixé à cinq personnes.
[…]
3. Le temps passé [dans le cadre des enquêtes et inspections] est assimilé à du temps de travail rémunéré comme tel.
[…]
6. Afin de permettre d’exercer leurs missions, les membres de cette commission se verront attribuer huit heures de délégation par mois et par membre qui peuvent être mutualisables entre eux.
[…]
8. Cette commission fera également cinq inspections par an. »
Titre I, article 4.1 du règlement : « Les membres de la commission seront au nombre de trois. Ils seront désignés par le CSE lors d’une réunion, nécessairement parmi les membres titulaires ou suppléants.
La désignation se fait à la majorité des membres présents à la réunion.
Chaque membre de cette commission bénéficiera de deux heures mensuelles non cumulables.
Deux réunions annuelles seront prévues.
Les membres seront convoqués par l’employeur une semaine avant la réunion par e-mail et avec remise des documents. »
Y ajoutant :
Condamne le comité social et économique de la société Flint group France aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT