SOC.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 octobre 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme K…, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 11269 F
Pourvoi n° M 17-14.959
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Hassen X…, domicilié […] ,
contre l’arrêt rendu le 20 janvier 2017 par la cour d’appel de Lyon (chambre sociale C), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société MJ Synergie, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est […] , représentée par M. Y… Fabrice, pris en qualité de mandataire liquidateur de la société Axe Consult,
2°/ à la société Farwell, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
3°/ à la société Expertys Rhône-Alpes, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
4°/ à la société AJ Partenaires, dont le siège est […], représentée par M. Etienne-Martin Z…, pris en qualité de mandataire judiciaire de la société Expertys Rhône-Alpes,
5°/ à la société MJ A… , dont le siège est […] , représentée par M. B… André-Charles, pris en qualité de mandataire judiciaire de la société Expertys Rhône-Alpes,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 25 septembre 2018, où étaient présents : Mme K…, conseiller doyen faisant fonction de président, M. C…, conseiller référendaire rapporteur, M. Pion, conseiller, Mme D…, avocat général, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de M. X…, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société MJ Synergie, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Farwell ;
Sur le rapport de M. C…, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour M. X….
M. X… fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir débouté de l’intégralité de ses demandes, dont notamment celles tendant à dire qu’il était salarié de la société Axe Consult, que son licenciement ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse, à ce que soit constatée l’existence d’une collusion frauduleuse entre les sociétés Axe Consult, Expertys Rhône Alpes et Farwell et à ce qu’il soit fixé au passif des deux premières diverses sommes au titre de ce licenciement et à ce que la dernière soit condamnée à lui régler diverses sommes au titre de ce licenciement;
AUX MOTIFS QU’il appartient (
) à la société MJ Synergie qui conteste la réalité du contrat de travail de rapporter la preuve du caractère fictif de celui-ci ; que M. X… produit un contrat de travail écrit à durée indéterminée prenant effet le 4 septembre 2007 en qualité de «responsable de mission d’expertise comptable et audit chef de groupe, responsable de la gestion du personnel, de l’établissement des bulletins de paie et déclarations sociales afférentes » ; que par ailleurs, M. X… produit des fiches de paie d’où il ressort que son salaire qui était de 3.000 € en septembre 2007 s’est élevé à 5.122 € bruts en 2010, soit plus de 70 % d’augmentation en 3 ans, sans qu’il soit produit le moindre document de M. E… concernant cette augmentation, alors que M. X… établissait lui-même ses bulletins de paye ; qu’il ressort de la lecture du jugement du tribunal correctionnel de Saint-Etienne en date du 20 mai 2009 que M. X… a été condamné pour exercice illégal de la profession d’expert-comptable, le tribunal ayant jugé que courant 2005, 2006 et 2007, il était « établi que M. X…, sous couvert de la société Axe Nadaud ou du cabinet Safa, a assuré la saisie et l’établissement de la comptabilité de nombreuses micro entreprises exerçant ainsi une activité d’expert-comptable pour laquelle il ne disposait d’aucun diplôme en permettant l’exercice légal ; que le recours à la signature de complaisance de M. F… (expert-comptable) avait pour seul objet de donner une apparence de légalité à son activité ; que M. X… était parfaitement informé du caractère illégal de cette activité dès lors que le 27 décembre 2006, le greffier en chef du tribunal de commerce avait refusé l’inscription de la société Axe Consultant au registre du commerce au motif que cette société n’avait pas été inscrite au tableau des experts-comptables » ; qu’ainsi la société Axe Consultant n’ayant pu être inscrite le 27 décembre 2006, la société Axe Consult a été constituée le 4 janvier 2007, entre M. E…, expert-comptable, associé majoritaire gérant et M. X… détenant 25 % du capital ; que cette société était située […] , dans des locaux donnés à bail par la société Ed Saada dont M. X… était le gérant ; que par ailleurs, M. X… ne dément pas que les salariés de la société Nadaud ont été repris par la société Axe Consult ; qu’ainsi les témoignages du lien de subordination existant entre M. E… et M. X… que ce dernier verse au débat venant de Mesdames G… et H… sont sujets à caution compte tenu des contentieux que ces dernières ont initié à l’encontre de la société Axe Consut et de leur relation d’anciennes salariées liées à M. X… ; que de même, les attestations de clients n’ayant pu personnellement constater le lien de subordination ne sont pas probantes et seront rejetées ; quant à l’attestation de l’avocat de la société Axe Consult qui indique que « systématiquement M. E… rappelait que c’était lui le responsable de la société Axe Consult, qu’il prenait les décisions et que M. X… était salarié », elle démontre a contrario, que M. X… n’avait pas un comportement de subordonné, ce qui est confirmé par le licenciement que M. X… a notifié à M. I… sans en référer à M. E… qui l’a annulé ; que par ailleurs, M. X… a reconnu avoir bénéficié d’une délégation de la signature bancaire sur les comptes de la société, ainsi qu’il l’a indiqué sur la fiche de renseignements AGS Unedic qu’il a rempli luimême le 18 avril 2011, et l’attestation de la BNP en date du 4 avril 2011 qui indique que M. X… n’a pas la signature au compte ouvert au nom de la société Axe Consult, alors qu’il est censé être en congé formation et qu’il est salarié de la société Art Sol, est inopérante ; qu’enfin, il ressort de cette demande de renseignements de délégation Unedic AGS remplie par M. X… qu’il certifie qu’il recevait les directives de M. E… dirigeant selon une périodicité quotidienne hebdomadaire matérialisée par des écrits et que son activité était contrôlée par celui-ci sous la forme d’entretiens quotidiens, réunions et divers écrits ; que néanmoins, les quelques courriers de M. E… qui sont versés au débat par M. X… à l’appui du contrôle de son activité révèlent encore une fois un conflit de pouvoir entre les deux associés, avec le besoin pour M. E… de réaffirmer son autorité face aux agissements de M. X… ; qu’ainsi la société MJ Synergie produit plusieurs courriers de M. E… se plaignant de la gestion de fait de son associé soit :
– une correspondance en date du 2 août 2010 par laquelle M. E… formulait de graves reproches contre son associé notamment d’avoir :
– scanné et utilisé à son insu sa signature et son titre,
– reçu et travaillé avec des clients dont M. E… ignorait l’existence,
– profité du titre et des moyens du cabinet pour réaliser des travaux juridiques interdits, travaux ayant parfois été encaissés sur une autre société,
– émis des règlements Axe Consult avec sa propre signature,
– émis deux bordereaux Urssaf à zéro
– une note du 25 octobre 2010 de M. E… qui informe l’ordre des experts-comptables des agissements de M. X… qui ont conduit la société Axe Consult à faire l’objet d’un redressement Urssaf et d’une action pour travail dissimulé, que M. E… déplorait de n’avoir pas su remettre « dans le droit chemin » M. X…, qu’il se plaignait des menaces régulières qu’il subissait de sa part et qu’il espérait que M. X… paie un jour pour tout le mal qu’il lui avait fait pour avoir usé et abuse de son nom et de son statut d’avoir falsifié et utilisé sa signature, et d’avoir pensé que le mettre en péril financièrement suffisait à le rendre corvéable à merci ; qu’ainsi, il résulte de tous ces éléments et plus particulièrement des écrits de M. E… qui sont versés aux débats par M. X… lui-même que M. E…, gérant de droit et associé majoritaire de la société Axe Consult, même s’il avait le pouvoir de donner des ordres et des directives, était, concernant M. X…, dans l’incapacité de contrôler l’exécution de ceux-ci, mais surtout, était dans l’impossibilité de sanctionner les manquements de celui-ci qui n’a pas fait l’objet du moindre avertissement ;
que la société MJ Synergie démontre ainsi l’absence du lien de subordination juridique entre les parties ; que cette condition nécessaire n’étant pas remplie en l’espèce, la cour constate le caractère fictif du contrat de travail conclu entre la société Axe Consult et M. X… le 30 août 2007 ; qu’en conséquence, il convient d’infirmer la décision du conseil de prud’hommes en ce qu’il a reconnu la qualité de salarié à M. X… au seul motif que le compromis de présentation de clientèle civile signé le 19 juillet 2010 entre la société Axe Consult et Consultis Comptabilité (qui n’a pas abouti) confirmait la qualité de salarié de celui-ci et de débouter M. X… de l’intégralité de ses demandes ;
1°) ALORS QU’en présence d’un contrat de travail écrit, il incombe à l’employeur qui invoque son caractère fictif, d’en rapporter la preuve ; que la cour d’appel qui, bien qu’elle ait constaté que M. X… produisait son contrat de travail écrit à durée indéterminée à effet au 4 septembre 2007 et que la société MJ Synergie en contestait la réalité, a néanmoins examiné en premier lieu, pour les écarter, les éléments de preuve de M. X… quant à l’existence de son lien de subordination, a inversé la charge de la preuve et violé ainsi l’article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l’article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE dans son attestation du 6 juin 2014, Me J…, avocat de la société Axe Consult indiquait, après avoir précisé que « M. E… rappelait que c’était lui le responsable de la société Axe Consult, qu’il prenait les décisions et que M. X… était salarié », qu’il n’y avait jamais eu pour lui « d’ambiguïté sur le lien de subordination qui a toujours existé entre M. E… et M. X…, ce dernier se conformant à chaque fois aux directives du premier » ; qu’en énonçant, pour dénier l’existence d’un contrat de travail entre la société Axe Consult et M. X…, que cette attestation démontrait que ce dernier n’avait pas un comportement de subordonné, la cour d’appel en a dénaturé les termes clairs et précis et violé l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
3°) ALORS QUE le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu’en se bornant, pour exclure l’existence d’un lien de subordination entre M. E… et M. X…, à énoncer que ce dernier avait notifié son licenciement à M. I… sans en référer à M. E… qui l’avait annulé, sans vérifier, ainsi qu’elle y était invitée, si M. X… qui s’était contenté de notifier à M. I… la fin de son contrat de travail à durée déterminée en lui envoyant son solde de tout compte le 30 avril 2009 et avait pris acte de la décision de son employeur de poursuivre le contrat de travail de M. I…, n’avait pas ainsi agi sous l’autorité de M. E…, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1221-1 du code du travail ;
4°) ALORS QUE la fiche de renseignements AGS Unedic remplie par M. X… le 18 avril 2011, après avoir indiqué, sous la question n° 2, « Avez-vous une procuration bancaire ?», que M. E… était titulaire de la signature bancaire, mentionnait, sous la question n° 3, « Détenez-vous une délégation de signature ? », que M. X… avait précisé que la délégation de signature portait sur « les documents administratifs, courriers » et que « tous les collaborateurs disposaient de cette même prérogative » ; qu’en énonçant, pour exclure l’existence d’un lien de subordination entre M. E… et M. X…, qu’ainsi qu’il l’avait indiqué sur la fiche de renseignements AGS Unedic remplie le 18 avril 2011, ce dernier avait reconnu avoir bénéficié d’une délégation de signature bancaire sur les comptes de la société, a dénaturé les termes clairs et précis de cette fiche de renseignements AGS Unedic et violé l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
5°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu’en se bornant à exclure l’existence d’un lien de subordination entre M. E… et M. X…, sans même analyser, fut-ce sommairement, ni le courrier adressé le 21 juin 2010 à l’ordre des experts comptables de Rhône Alpes par M. E… dans lequel ce dernier reconnaissait superviser le travail de M. X…, ni les courriers internes de M. E… en date des 21 septembre 2008, 9 février 2010 et 21 juin 2010 dans lequel il sommait M. X… d’obéir à ses instructions, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
6°) ALORS QUE le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que la cour d’appel qui, bien qu’elle ait constaté que M. E…, gérant de droit et associé majoritaire de la société Axe Consult, avait le pouvoir de donner des ordres et des directives à M. X…, a néanmoins exclu l’existence d’un lien de subordination constitutif d’une relation salariée, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations desquelles il résultait que M. X… se trouvait placé dans un lien de subordination caractérisant l’existence d’un contrat de travail, violant ainsi l’article L. 1221-1 du code du travail ;
7°) ALORS QU’en se fondant encore, pour exclure l’existence d’un lien de subordination constitutif d’une relation de salariée, sur la circonstance que M. E…, gérant de droit et associé majoritaire de la société Axe Consult, qui déplorait ne pas avoir su remettre dans le droit chemin M. X…, se plaignait des menaces qu’il subissait de ce dernier en espérant qu’il paie un jour pour tout le mal qui lui avait fait, était, concernant M. X…, dans l’incapacité de contrôler l’exécution de ses ordres et surtout dans l’impossibilité de sanctionner ses manquements, circonstance qui n’était pourtant pas de nature à exclure l’existence d’un lien de subordination constitutif d’une relation de travail salariée, la cour d’appel qui s’est déterminée par des motifs inopérants, a de nouveau violé l’article L. 1221-1 du code du travail.