Droits des Artisans : 26 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/15494

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Droits des Artisans : 26 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/15494

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRET DU 26 OCTOBRE 2022

(n° ,10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/15494 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCR6Q

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Juin 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MEAUX – RG n° 18/04717

APPELANTE

S.A. CREDIT LYONNAIS S.A.

inscrit au registre du commerce et des sociétés de LYON sous le n° B 954 509 741,

agissant poursuites et diligences de son directeur général,

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Magali TARDIEU-CONFAVREUX de l’AARPI TARDIEU GALTIER LAURENT DARMON associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R010

INTIME

Monsieur [X] [G]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Sarah BOUNOUGHAZ, avocat au barreau de PARIS, toque : E2085

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M.Vincent BRAUD et Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M.Marc BAILLY, Président de chambre

M.Vincent BRAUD, Président

Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par devant M.Vincent BRAUD,Président et par Anaïs DECEBAL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*

* *

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par offre de prêt immobilier formalisée le 10 octobre 2017 et acceptée le 24 octobre 2017 par l’emprunteur, la société LE CREDIT LYONNAIS – ci-après LCL – a consenti à monsieur [X] [G] un prêt immobilier d’un montant de 100 000 euros au taux de 2,04 % l’an remboursable en 300 mensualités de 448,30 euros assurance incluse, en vue de financer l’acquisition dans l’ancien, à usage de résidence principale, d’un appartement sis [Adresse 2], à [Localité 6] (Seine et Marne).

Par lettre recommandée avec accusé de réception, datée du 14 mars 2018, LCL a informé monsieur [G] de l’inexactitude de renseignements et/ou justificatifs communiqués par celui-ci à l’appui de sa demande de prêt, et l’a invité à lui fournir des explications dans un délai de 30 jours, sous peine de déchéance du terme.

Le 22 mars 2018, monsieur [G] s’est entretenu avec le responsable d’agence.

Par lettre du 20 juin 2018, LCL a dénoncé l’intégralité des comptes et contrat souscrits par monsieur [G], puis par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 septembre 2018, a prononcé la déchéance du terme du contrat de prêt immobilier et mis en demeure monsieur [G] de lui régler les sommes restant dues à ce titre.

Par acte d’huissier de justice en date du 28 novembre 2018, LCL a fait assigner monsieur [G] en paiement, devant le tribunal de grande instance de Meaux.

Le tribunal judiciaire de Meaux, par jugement du 23 juin 2020 :

‘ a dit irrégulière la déchéance du terme du prêt telle que prononcée par la banque,

‘ a dit en conséquence que la dette devra être payée selon les échéances prévues au contrat de prêt,

‘ a rejeté l’ensemble des demandes de LCL,

‘ a condamné LCL aux dépens de l’instance ainsi qu’à payer à monsieur [G] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

*****

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 29 octobre 2020, la société LE CREDIT LYONNAIS a interjeté appel de ce jugement. À l’issue de la procédure d’appel clôturée le 14 juin 2022 les moyens et prétentions des parties s’exposent de la manière suivante.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 12 mai 2022 l’appelant, la société LE CREDIT LYONNAIS

demande à la cour de bien vouloir :

‘Vu les articles 1104 et 1231-1 du code civil,

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Meaux du 23 janvier 2020 (RG 18/04717) en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

Condamner monsieur [X] [G] à payer au CREDIT LYONNAIS la somme de 88 655,56 euros augmentée des intérêts au taux conventionnel de 2,04 % sur la somme de 81 817,81 euros à compter du 15 janvier 2021 et des intérêts au taux légal sur la somme de 6 837,75 euros à compter de cette même date ;

Condamner monsieur [X] [G] à payer au CREDIT LYONNAIS la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens’.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 14 juin 2022, l’intimé, monsieur [G]

demande à la cour,

‘Vu les articles 1103, 1104, 1342-2, 1343-5, 1353 du code civil,

Vu l’article L. 313-16 du code de la consommation,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Vu le contrat de prêt du 24 octobre 2017,’

de bien vouloir :

‘Déclarer monsieur [G] recevable et bien-fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Débouter la société LE CREDIT LYONNAIS de toutes ses demandes, fins et conclusions;

À titre principal,

Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Meaux en date du 23 juin 2020 en toutes ses dispositions et :

Dire que la déchéance du terme de l’offre de prêt du 10 octobre 2017 acceptée le 24 octobre 2017 a été prononcée irrégulièrement par la société LE CREDIT LYONNAIS ;

En conséquence,

Dire que la dette doit être payée par monsieur [G] selon les échéances prévues au contrat de prêt ;

À titre subsidiaire,

Accorder à monsieur [X] [G] le bénéfice de délais de paiement pour le paiement de la somme de 81 710 euros augmentée des intérêts au taux conventionnel de 2,04 % sur la somme ;

En tout état de cause,

Rejeter la demande de capitalisation des intérêts échus ;

Condamner la société le CREDIT LYONNAIS à payer à monsieur [X] [G] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers

dépens.’

Par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

La société LE CREDIT LYONNAIS poursuit, tout comme en première instance, au motif de la mauvaise foi de l’emprunteur dans l’exécution du contrat et en se basant sur la déchéance du terme qui a été prononcée subséquemment, le paiement des sommes restant dues au titre du contrat de prêt conclu le 24 octobre 2017 avec monsieur [G], .

De son côté, et lui aussi comme devant le premier juge, monsieur [G] soutient l’irrégularité de la déchéance du terme et revendique en conséquence la continuation de l’exécution du contrat de prêt dont il précise avoir toujours réglé en totalité et en temps et en heure les mensualités, ce qui démontre qu’il n’a pas trompé LE CREDIT LYONNAIS sur ses facultés contributives.

L’article 1103 du code civil dispose :’Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits’ et l’article 1104 précise : ‘Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi’.

En l’espèce, le contrat de prêt inclut un article 5-1 des Conditions générales, ainsi rédigé:

‘LCL aura la faculté de rendre exigibles par anticipation, toutes les sommes dues au titre du prêt, tant en principal qu’en intérêts et accessoires, dans l’un quelconque des cas suivants :

(…)

‘Inexactitude des renseignements et/ou des justificatifs fournis lors de la demande de prêt, résultant de manoeuvres frauduleuses imputables à l’un et/ou l’autre des emprunteurs, portant sur la situation personnelle, professionnelle, patrimoniale ayant servi de base à l’octroi du prêt’.

(…)

Dans l’un ou l’autre des cas ci-dessus LCL notifiera, par lettre recommandée avec accusé de réception, à l’emprunteur au aux emprunteurs, (…) qu’il se prévaut de la présente clause et que l’exigibilité anticipée lui sera acquise si ladite lettre reste sans effet à l’expiration d’un délai de 15 jours en cas d’impayé(s), 30 jours dans les autres cas’.

Une telle clause n’est que l’application du principe directeur selon lequel les contrats doivent s’exécuter de bonne foi.

Le tribunal a tout d’abord, à bon droit, par une motivation précise et appropriée, retenu que la déchéance du terme était valide en ce qu’elle a été prononcée en suite d’un préavis adressé par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 mars 2018, monsieur [G] étant mis en demeure d’avoir à fournir les renseignements et/ou justificatifs présentés à l’appui de sa demande de prêt dans un délai de 30 jours, préavis qui a été suivi d’un délai suffisant avant que soit prononcée la déchéance du terme, par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 13 septembre 2018.

Si ce point-là n’est d’ailleurs plus discuté devant la cour, en revanche monsieur [G] persiste à contester la fausseté des documents présentés à l’appui de sa demande de prêt, et comme l’a relevé le premier juge, il s’agira donc de vérifier si la déchéance du terme a été prononcée valablement, c’est à dire en ce qu’elle est fondée sur la fourniture de renseignements et/ou de justificatifs inexacts, comme prévu à l’article 5-1 des conditions générales du contrat de prêt, précité, donnant en un tel cas à la banque la faculté de rendre exigibles par anticipation, toutes les sommes restant dues au titre du prêt, en principal, intérêts et accessoires.

Monsieur [G], à hauteur d’appel, écrit qu’au titre de son obligation de vérification des informations du prêteur, LCL disposait de tous les moyens nécessaires pour procéder à ces vérifications avant de lui accorder le prêt, ce dont il s’est manifestement abstenu.

Raisonnant ainsi, monsieur [G] opère confusion entre la vérification que la banque se doit d’effectuer sur les capacités financières du candidat au prêt, et une vérification de la sincérité des documents produits par celui-ci, à laquelle elle n’est pas tenue, du moins en l’absence d’anomalie ou d’incohérence en ressortant.

En l’espèce, il s’avère que le prêteur de fonds a bien procédé aux vérifications nécessaires, en recueillant bulletins de paie, relevés de compte bancaire et avis d’imposition, dont les données chiffrées étaient pleinement concordantes et emportaient la conviction que l’emprunteur pourrait sans difficultés faire face à des mensualités de 448 euros pendant 25 ans.

D’autre part, il ne saurait être fait grief à la banque de ne pas avoir procédé immédiatement à des vérifications complémentaires alors que lui ont été remises des pièces en nombre suffisant, cohérentes entre elles, dont il ressortait un niveau de revenus confortable, monsieur [G] ayant un emploi salarié et une certaine stabilité professionnelle, et ce d’autant que les anomalies ultérieurement révélées étaient loin d’être décelables au premier coup d’oeil.

Monsieur [G] soutient également, là aussi nouvellement, que l’exécution du contrat était conditionnée à une domiciliation, or bien que cette dernière n’ait pas eu lieu, LCL n’a pas cru devoir différer tout déblocage de fonds et reconsidérer sa position.

Cette présentation est d’une singulière mauvaise foi dans la mesure où si le compte domicilaire du prêt n’a jamais reçu les fonds annoncés par l’emprunteur, cela résulte du manquement contractuel de ce dernier qui s’était engagé à les y domicilier afin de bénéficier d’un taux d’intérêts préférentiel, et c’est justement cet élément qui a attiré la suspicion de la banque sur la sincérité des documents qui avaient été présentés par monsieur [G] et l’a conduite à demander des explications à l’intéressé, par courrier recommandé avec accusé de réception daté du 13 mars 2018, bien après le déblocage des fonds, qui en pratique suit de peu l’octroi du prêt que la banque a accordé sur la base d’éléments auxquels elle pouvait alors raisonnablement se fier.

Comme précédemment indiqué, l’article 5-1 des Conditions générales du prêt prévoit que la déchéance du terme est encourue notamment en cas d »Inexactitude des renseignements et/ou des justificatifs fournis lors de la demande de prêt, résultant de manoeuvres frauduleurs imputables à l’un et/ou l’autre des emprunteurs, portant sur la situation personnelle, professionnelle, patrimoniale ayant servi de base à l’octroi du prêt’.

Il ne saurait être contesté que la remise par l’emprunteur de faux documents tels avis d’imposition, bulletin de salaire, relevé de compte bancaire, sert de base à l’octroi du prêt.

La banque en son appel, pour demander l’infirmation du jugement déféré, considère rapporter la preuve suffisante de la fausseté des documents fournis par monsieur [G] à l’appui de sa demande de prêt. Aussi résulte t’il de la lecture comparative du jugement et des conclusions des parties à hauteur de cour, que la société LCL a fait évoluer son dossier, dans la mesure où il lui était reproché par le tribunal, des insuffisances dans l’administration de la preuve.

Sur l’avis d’imposition

Il ressort des énonciations du jugement, que la société LCL a initialement conclu à la fausseté de l’avis d’imposition 2016 des revenus 2015 alors que c’est celui de l’année suivante qui avait été versé au dossier de demande de prêt, et que c’est pour cette raison que le tribunal a jugé que la preuve de la fausseté du document produit n’était pas rapportée.

La banque appelante explique cette confusion par le fait que l’avis d’imposition 2016 a probablement lui aussi été versé au dossier de demande de prêt, et dit également rapporter la preuve de la fausseté de l’avis d’imposition 2017.

Elle expose avoir découvert que le document était un faux, en vérifiant l’avis d’imposition remis par monsieur [G] auprès de l’administration fiscale, via le site internet dédié, au moyen des numéros fiscaux et de référence de l’avis ; ceux-ci n’ont pas permis d’accèder aux déclaration fiscale et avis d’imposition de monsieur [G], ce qui signifie que ces numéros ne correspondent à aucun avis authentique existant et en possession de l’administration fiscale. La fausseté de l’avis d’impôt 2017 sur les revenus 2016 est donc démontrée.

Monsieur [G] estime cette preuve insuffisante, la capture d’écran produite rendant impossible l’identification, faute de saisie du numéro fiscal et de la référence de l’avis.

Or, l’examen de la pièce 1 de la banque appelante dans son entièreté permet de comprendre que cette dernière effectuant cette vérification a bel et bien dans un premier temps saisi, sans erreur, les deux numéros de référence figurant sur l’avis d’imposition présentement querellé, et que par suite, lui a été donnée la réponse suivante ‘La référence saisie ne correspond pas à un avis présent dans la base, son authenticité ne peut être vérifiée en ligne’.

Aucune réponse n’aurait été obtenue si les champs n’avaient été remplis.

De cette réponse découle le caractère faux du document proposé par monsieur [G] dans le cadre de sa demande de prêt.

Sur le relevé de compte de LA BANQUE POSTALE,

La société appelante indique que LA BANQUE POSTALE, à laquelle a été soumis le relevé de compte bancaire remis à LCL pour l’établissement du dossier de demande de prêt, a répondu : ‘Après vérification, le RDCB (relevé de compte bancaire) est non conforme’.

Monsieur [G] rétorque que le document produit n’apporte aucun éclairage concret sur le caractère non conforme du relevé de compte.

La réponse de LA BANQUE POSTALE est certes laconique mais a le mérite d’être parfaitement claire, et il en découle de manière univoque, la fausseté du document.

Sur le bulletin de salaire

– La banque expose qu’au soutien de sa demande de prêt monsieur [G] a produit également un bulletin de paie du mois d’août 2017 faisant état d’un salaire d’un montant de 4 186,85 euros, émanant d’une société – non dénommée sur ce bulletin – au sein de laquelle il serait salarié depuis le 9 janvier 2012, et dont le numéro SIREN 809 181 902 indiqué correspond à une société ‘INSTITUT DU RECRUTEMENT’ (cf. pièce 10), immatriculée le 16 février 2015, soit trois ans postérieurement à la prétendue date d’embauche de monsieur [G].

En outre, plusieurs anomalies ont été constatées : l’employeur n’est pas dénommé, en violation de l’article R. 3243-1 du code du travail ; pour les cotisations assurances maladie, vieillesse, solidarité, le taux à la charge de l’employeur est de 12,84 % alors qu’il devrait être de 12,89 % ; le taux de cotisation au titre de l’assurance vieillesse déplafonné est de 1,90 % au lieu de 1,85 % à la charge de l’employeur et de 0,40 % au lieu de 0,35 % pour le salarié.

Enfin, il s’avère que monsieur [G] est artisan couvreur, immatriculé à ce titre depuis le 11 décembre 2012.

– Monsieur [G] se contente de répondre qu’il n’est pas démontré que les prétendues anomalies résulteraient d’une man’uvre frauduleuse qui lui serait imputable, la fiche de paie ayant été délivrée par un tiers.

Sur ce :

Il sera fait observer que monsieur [G], prompt à imputer à un tiers la responsabilité de ces anomalies formelles, ne s’exprime que sur ce point, et se garde de toute réponse aux autres observations de la banque appelante, dont il pourrait d’ailleurs bien difficilement dénier la pertinence.

Aussi, monsieur [G] dans le cadre de la présente instance n’a jamais soutenu que ces revenus correspondraient à la réalité, qu’il s’agisse de leur nature salariale, ou de leur montant.

En outre, il doit être souligné que le montant du salaire indiqué sur la fiche de paie et celui figurant sur le relevé bancaire versé par une société COSEARCHING, également argué de faux, correspondent au centime près. Ces montants sont par ailleurs compatibles avec les revenus déclarés sur l’avis d’imposition, dont il est démontré qu’il s’agit d’un faux.

Sur la demande de prêt

Enfin et surtout il importe de noter que monsieur [G] a signé le 9 octobre 2017 une demande de prêt (pièce 15 de la banque) mentionnant

– comme profession : ‘cadre d’entreprise’ ce qui correspond aux mentions du bulletin de salaire dont il est établi qu’il s’agit d’un faux,

– un revenu annuel de 48 300 euros, ce qui coincide exactement avec le montant des salaires de l’avis d’imposition dont la fausseté est également démontrée.

Monsieur [G] en aucun endroit de ses écritures ne conteste avoir signé la demande de prêt, pas plus qu’il ne prétend pas qu’il ne l’aurait pas comprise, alors que dans ce document l’emprunteur ‘Certifie sur l’honneur l’exactitude des renseignement donnés, notamment en ce qui concerne les revenus et l’endettement’ y étant précisé aussi ‘En cas d’erreur, omission ou fausse déclaration, le dossier pourrait être refusé ou le crédit annulé’.

Il résulte de ces éléments que monsieur [G] a bel et bien effectué de fausses déclarations et remis de fausses pièces dans le cadre de son dossier de financement en vue de la souscription du crédit, tout en certifiant la réalité de sa prétendue situation financière en signant la demande de prêt, le 9 octobre 2017.

La mauvaise foi dont a fait preuve monsieur [G] s’exprime donc, en premier lieu et de toute évidence, par la fourniture de renseignements et justificatifs qu’il savait mensongers, et cette mauvaise foi perdure d’ailleurs encore lorsqu’il fait valoir la fraude commise par un tiers sans en faire la moindre démonstration.

À cet égard il sera rappelé que selon les écritures de la banque appelante, non contestée sur ce point monsieur [G] s’abstenant dans ses écritures de toutes précisions sur la question, en suite de la lettre de réclamation d’explications que lui a adressée LCL monsieur [G] s’est présenté à son agence, et à cette occasion a déclaré avoir recouru, pour présenter le dossier de demande de prêt, aux services d’un intermédiaire, non identifié, rémunéré 200 euros payés en espèces, et auquel il aurait remis les documents à produire.

Etant rapportée la preuve de la fausseté des pièces finalement produites à l’appui de la demande de prêt, peu importe d’ailleurs, la détermination de l’auteur exact des falsifications des pièces, dès lorsque l’emprunteur lui-même – ou le cas échéant, son mandataire, dont il doit répondre – les a produites à la banque, à son profit.

Dès lors monsieur [G] ne saurait valablement soutenir que la banque ne démontre pas que le relevé bancaire ou le bulletin de salaire fournis seraient inexacts en raison de man’uvres frauduleuses qui lui seraient imputables, comme exigé aux stipulations contractuelles.

La présentation de justificatifs faux dans le but d’obtenir l’octroi d’un crédit constitue sans nul doute des manoeuvres frauduleuses, et seraient-elles en premier lieu le fait d’un tiers, ce qui n’est d’ailleurs aucunement démontré, elles sont aussi imputables à monsieur [G], au sens de l’article 5-1 précité du contrat de prêt, dans la mesure où il en a directement et personnellement bénéficié.

Ainsi, c’est légitimement que la banque s’est prévalue de la clause de déchéance du terme du contrat de crédit dans l’hypothèse de la fourniture de renseignements confidentiels inexacts figurant à l’offre de prêt pour considérer le contrat résilié et les sommes restant dues au titre du prêt, immédiatement exigibles, en application de l’article 5-1, précité, et qu’elle a pu prononcer la déchéance du terme du prêt pour ce motif, dûment visé.

L’argument selon lequel monsieur [G], qui insiste sur sa totale bonne foi, a toujours, sans défaillance, réglé les échéances échues du prêt, est inopérant dès lors que l’emprunteur par son comportement a lui-même trompé la banque quant à l’exécution normale de l’opération de prêt, faussant ainsi l’appréciation de son risque par le prêteur. La clause précitée visant à protéger la loyauté dans les relations contractuelles au moment de la formation du contrat et de son exécution, il n’y a pas lieu de considérer que la banque ne subirait aucun préjudice du seul fait que le prêt accordé – sur des déclarations fausses ou inexactes de l’emprunteur – est régulièrement remboursé.

Au vu de ces divers éléments factuels et par application des dispositions contractuelles précitées, la résiliation du prêt a été régulièrement prononcée et le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions.

Sur la créance de la banque

La banque sollicite la condamnation de monsieur [X] [G] à lui payer la somme de 88 655,56 euros augmentée des intérêts au taux conventionnel de 2,04 % sur la somme de 81 817,81 euros à compter du 15 janvier 2021[nb : date du précédent décompte – pièce 12] et des intérêts au taux légal sur la somme de 6 837,75 euros à compter de cette même date.

Elle produit à l’appui, en pièce 14, un décompte de sa créance pour la période du 11 septembre 2018 au 9 mai 2022, qui tient compte des versements effectués par monsieur [G] postérieurement à la déchéance du terme (du 11septembre 2018) soit un premier versement de 3 151,65 euros, puis d’autres, d’un montant de 460 euros, pour un total de 22 471,65 euros.

Ces paiements viennent en déduction d’une somme due que la banque chiffre à 97 682,09 euros correspondant à la somme qui avait été réclamée à monsieur [G] dans la mise en demeure du 11 septembre 2018, et ont été correctement imputés par la banque.

De ce décompte, qui n’est en rien critiqué par monsieur [G], il ressort que ce dernier reste redevable à l’égard de la société LE CREDIT LYONNAIS, des sommes suivantes :

– principal : 81 676,30 euros [comme restant dû après le dernier versement, du 8 avril 2022]

– intérêts [calculés au taux contractuel de 2,04 %] du 8 avril 2022 [date du dernier encaissement] au 9 mai 2022 : 141,51 euros

– indemnité forfaitaire contractuelle de résiliation de 7 % [calculée sur le capital restant dû, de 97 682,09 euros au jour de la déchéance du terme] : 6 837,75 euros ‘ comme indiqué dans la mise en demeure du 11 septembre 2018.

Il y a donc lieu de condamner monsieur [G] à payer à la société LE CREDIT LYONNAIS les sommes de 81 676,30 euros portant intérêts au taux contractuel de 2,04% à compter du 8 avril 2022 et de 6 837,75 euros portant intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2021 tel qu’il est demandé par la banque.

Sur les délais de paiement

Monsieur [G] rappelle qu’il ne conteste aucunement les sommes dues à la banque au titre du contrat de prêt, ayant toujours honoré le paiement de ses échéances, cependant il écrit ne pas être en mesure de régler en une seule fois la somme qui lui est réclamée. Aussi, pour le cas où la déchéance du terme serait confirmée, il sollicite ‘le bénéfice de délais de paiement’.

La société LE CREDIT LYONNAIS s’y oppose compte tenu de la mauvaise foi de monsieur [G] et du fait qu’il ne justifie ni de ses ressources ni de ses difficultés financières.

En vertu de l’article 1345-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge, peut dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.

Tel aménagement de la dette n’est envisageable que si son montant le permet eu égard aux facultés contributives du débiteur et si les propositions faites pour son apurement permettent à celui-ci de s’en acquitter dans le respect des droits du créancier.

L’octroi d’un délai de paiement n’est pas de plein droit.

Or monsieur [G] ne produit aucune pièce relative à sa situation financière et ne fait aucune proposition concrète sur les versements à venir.

Dans ces conditions, en l’état, sa demande de délai de paiement ne peut qu’être rejetée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Monsieur [G], partie qui succombe, supportera la charge des entiers dépens de l’instance, et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l’équité il y a lieu de faire droit à la demande de la société LE CREDIT LYONNAIS formulée sur ce même fondement, mais uniquement dans la limite de la somme de 2 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de l’appel,

Infirme le jugement déféré, et statuant à nouveau :

CONDAMNE monsieur [X] [G] à payer à la société LE CREDIT LYONNAIS :

– les sommes de 81 676,30 euros portant intérêts au taux contractuel de 2,04 % à compter du 8 avril 2022 et de 6 837,75 euros portant intérêts au taux légal à compter du 15janvier 2021,

– la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu’en cause d’appel ;

DÉBOUTE monsieur [X] [G] de sa propre demande formulée sur ce même fondement ;

CONDAMNE monsieur [X] [G] aux entiers dépens de l’instance.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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