ARRÊT N° 28
RG N° : N° RG 22/00478 – N° Portalis DBV6-V-B7G-BILBU
AFFAIRE :
S.A. MAAF ASSURANCES Immatriculée au RCS de NIORT sous le numéro 542 073 580, prise en la personne de son représentant légal
C/
[U] [S], [X] [L], [O] [F], Compagnie d’assurance MMA IARD, Compagnie d’assurance MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, S.A.S.U. NPG DECO Inscrite au RCS de BRIVE sous le numéro 822 731 352, prise en la personne de son représentant légal
MCS/MLL
demande en dommages-interêts contre le prestataire de services pour mauvaise exécution
Grosse délivrée
Me LABROUSSE, Me CAETANO, Me RENAUDIE, avocats
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 25 JANVIER 2023
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Le vingt cinq janvier deux mille vingt trois la Chambre civile de la cour d’appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
S.A. MAAF ASSURANCES Immatriculée au RCS de NIORT sous le numéro 542 073 580, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est sis au [Adresse 3]
représentée par Me Michel LABROUSSE de la SCP SCP D’AVOCATS MICHEL LABROUSSE – CELINE REGY – FRANCOIS ARMAND & ASSOCIES, avocat au barreau de TULLE, Me Eric BRECY-TEYSSANDIER, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANTE d’une ordonnance rendue le 12 MAI 2022 par le JUGE DE LA MISE EN ETAT près le Tribunal judiciaire de BRIVE LA GAILLARDE
ET :
[U] [S]
de nationalité française
née le 27 Novembre 1986 à LIMOGES (87000)
Profession : Chef d’atelier, demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Philippe CAETANO de la SELARL MARCHE CAETANO, avocat au barreau de BRIVE
[X] [L]
de nationalité française
né le 08 Août 1987 à PARIS 20 (75020)
Profession : Technicien(ne) de maintenance, demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Philippe CAETANO de la SELARL MARCHE CAETANO, avocat au barreau de BRIVE
[O] [F]
de nationalité française, demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Virgile RENAUDIE de la SELARL CABINET D’AVOCATS RENAUDIE LESCURE BADEFORT, avocat au barreau de BRIVE
Compagnie d’assurance MMA IARD
dont le siège social est sis au [Adresse 1]
représentée par Me Virgile RENAUDIE de la SELARL CABINET D’AVOCATS RENAUDIE LESCURE BADEFORT, avocat au barreau de BRIVE
Compagnie d’assurance MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
dont le siège social est sis au [Adresse 1]
représentée par Me Virgile RENAUDIE de la SELARL CABINET D’AVOCATS RENAUDIE LESCURE BADEFORT, avocat au barreau de BRIVE
S.A.S.U. NPG DECO Inscrite au RCS de BRIVE sous le numéro 822 731 352, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est sis au [Adresse 2]
non représentée bien que régulièrement assignée.
INTIMES
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Selon avis de fixation à bref délai des articles 905 et suivants du Code de procédure civile, l’affaire a été fixée à l’audience du 26 Octobre 2022 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 14 Décembre 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Mme Marie-Laure LOUPY, Greffier, a tenu seule l’audience au cours de laquelle elle a été entendue en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients, et Me CAETANO a été entendu en sa plaidoirie.
Après quoi, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 14 Décembre 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
A cette date, le délibéré a été prorogé au 11 janvier 2023, puis au 25 janvier 2023, les parties ayant été régulièrement avisées.
Au cours de ce délibéré, Madame Marie-Christine SEGUIN, a rendu compte à la Cour, composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, de Monsieur Gérard SOURY et d’elle-même, Conseillers. A l’issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l’arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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LA COUR
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EXPOSÉ DU LITIGE:
Mme [U] [S] et M. [X] [L] sont propriétaires d’un immeuble situé [Adresse 4] (19).
Selon devis accepté du 16 décembre 2016, ils ont confié à la SASU NPG DECO 77, la réalisation d’une terrasse en béton drainant, pour un montant de 8 100 euros.
Suivant devis accepté du 13 mars 2017, ils ont confié à M. [O] [F] , artisan maçon, la réalisation de travaux de décaissement, d’évacuation de dalles, de dépose de margelles, d’ouverture des fouilles, de terrassement, de béton de fouilles et de maçonnerie d’agglos pour un muret et un appentis, pour un montant de 2 760 euros.
Les travaux ont été exécutés au début de l’année 2017 et Mme [S] et M. [L] ont :
– intégralement réglé à M. [F] sa facture du 15 mai 2017,
– payé à la société NPG DECO 77 la somme de 8 205,60 euros au titre de sa facture du 19 juin 2017.
La facture de la société NPG DECO 77 du 9 juin 2017 (1428€), relative à la pose de margelles, n’a pas été réglée.
Exposant que des fissures étaient apparues sur la terrasse à compter d’août 2017, sans que l’intervention de la SAS NPG DECO 77 en mai 2018 ne corrigent définitivement le problème avec nouvelles fissures apparues en juin 2018, Mme [S] et M. [L] ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Brive la Gaillarde, lequel a fait droit à leur demande d’expertise par ordonnance du 18 juillet 2019. Etaient parties à cette instance, la SASU NPG DECO 77 et M. [O] [F].
L’expert désigné, M.[G] [H], a déposé son rapport définitif le 21 septembre 2020. Il a conclu à l’impropriété des ouvrages à leur destination.
Par actes d’huissier des 20 et 23 novembre 2020, Mme [S] et M. [L] ont fait assigner la SASU NPG DECO 77 et M. [F] devant le Tribunal judiciaire de Brive aux fins de voir juger que leur responsabilité est engagée et de les voir condamner in solidum à leur payer la somme de 62 881,20 euros au titre des travaux de reprise, outre la réparation de leurs préjudices moraux (2000€) et de jouissance(5500€), outre une indemnité de procédure et les dépens.
Par acte d’huissier du 12 mai 2021, la société NPG DECO 77 a appelé en cause son assureur, la SA MAAF Assurances, l’instance étant jointe à l’instance principale.
Les assureurs de M. [F], MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles, sont intervenus volontairement à l’instance .
Par conclusions d’incident du 5 octobre 2021, Mme [S] et M. [L] ont saisi le juge de la mise en état aux fins d’obtenir la condamnation in solidum des entrepreneurs et de leurs assureurs respectifs à leur payer à titre de provision, la somme de 62 881,20 euros.
Par ordonnance contradictoire du 12 mai 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Brive la Gaillarde a :
– condamné in solidum la société NPG DECO 77 et son assureur, MAAF Assurances, d’une part, et M. [F] et ses assureurs, MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles, d’autre part, à payer à Mme [S] et M. [L] la somme de 62 881,20 euros à titre de provision ;
– jugé que dans leurs rapports entre eux, le montant de la provision sera partagé par moitié entre la société NPG DECO 77 et son assureur, MAAF Assurances, d’une part, et M. [F] et ses assureurs, MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles, d’autre part ;
– réservé les dépens et la demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile avec l’instance au fond.
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Appel de la décision a été relevé le 23 juin 2022 par la SA MAAF ASSURANCES dans des conditions de forme et de délai non contestées du chef de toutes ses dispositions sauf en ce qu’elle a réservé les frais de justice .
L’affaire a été fixée à bref délai en application des dispositions des articles 905 et suivant du code civil.
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Par conclusions signifiées et déposées le 22 août 2022, la SA MAAF ASSURANCES demande à la Cour de réformer la décision entreprise et de :
– Débouter les consorts [S] ‘ [L] de leur demande de paiement de provision ;
– Les condamner en tant que de besoin de restituer ladite somme ;
– Subsidiairement et si par impossible la cour confirmait ladite décision, dire et juger qu’elle sera assumée par moitié par M. [F] et son assureur MMA et l’autre moitié par la société NPG DECO 77 et par elle, et ce sous toutes réserves et protestions d’usage ;
– Joindre au fond les demandes relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile et confirmer en cela la décision ;
– Condamner toute partie succombante aux dépens d’appel.
Par conclusions signifiées et déposées le 18 août 2022, Mme [U] [S] et M. [X] [L] demandent à la Cour de confirmer l’ordonnance critiquée et de condamner la société MAAF à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 22 août 2022, M. [O] [F] et ses assureurs, MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, demandent à la Cour de confirmer l’ordonnance et de condamner la MAAF à leur régler 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, dont distraction au profit de la SELARL RENAUDIE LESCURE BADEFORT sur ses offres de droits.
La SASU NPG DECO 77, n’ayant pas constitué avocat dans le mois de la notification par le greffe, de la déclaration d’appel, celle-ci lui a été signifiée à la requête de la SA MAAF ASSURANCES par acte d’huissier de justice du 27 juin 2022, remis à étude.
La SASU NPG DECO 77 n’a pas constitué intimée.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
Selon l’article 789 ‘ 3 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent à l’exclusion de tout autre formation du tribunal pour accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.
*Sur la demande de provision de consorts [S]-[L] à l’égard de la SA MAAF assurances:
Pour solliciter le rejet de cette demande de provision, la SA MAAF ASSURANCES, assureur décennal de la SASU NPG DECO 77, fait valoir tout d’abord , pour la première fois, dans le corps de ses conclusions d’appel, que le rapport d’expertise judiciaire du 21 septembre 2020 lui est inopposable dès lors qu’elle n’a pas été appelée aux opérations d’expertise, n’ayant été attraite à la procédure que tardivement le 12 mai 2021.
Selon l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions… si ce n’est pour faire écarter les prétentions adverses.
Par ailleurs, selon l’article 563 du code de procédure civile, les parties peuvent pour justifier en appel, les prétentions soumises au premier juge, invoquer des moyens nouveaux.
En l’espèce, l’inopposabilité du rapport d’expertise que la SA MAAF invoque au soutien du rejet de la demande de provision formulée à son égard, constitue un moyen de défense nouveau que l’assureur est recevable à invoquer pour la première fois en cause d’appel.
Il est exact que la SA MAAF n’a pas été appelée aux opérations d’expertise judiciaire.
Toutefois, si le juge peut fonder sa décision sur un rapport d’expertise judiciaire non contradictoire à l’égard d’une partie, c’est à la condition que ce rapport ait été soumis à la discussion contradictoire des parties et qu’il se trouve corroboré quant à ses constatations et conclusions par des éléments extérieurs. ( en ce sens, C.Cass., Civ. 3ème, 19 décembre 2019, pourvoi n°14-29882).
En l’espèce, la demande de provision à l’égard de la SA MAAF assurances est fondée exclusivement sur le rapport d’expertise judiciaire de sorte qu’elle se heurte à une contestation sérieuse, qui justifie son rejet.
La décision entreprise sera donc infirmée de ce chef.
*Sur la demande de provision des consorts [S]-[L] à l’égard des autres parties:
La décision sera, en revanche, confirmée, par adoption de motifs, en ce que la SASU NGO DECO 77, M. [F] et ses assureurs, MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles ont été condamnés in solidum à payer aux consorts [S]-[L] la somme provisionnelle de 62 881,20 euros .
Le premier juge, après un examen précis et complet des éléments de la cause et après avoir répondu aux moyens des parties, a considéré à bon droit, :
-que les travaux litigieux avaient fait l’objet d’une réception tacite au 1er juillet 2017,
-que les désordres affectant la terrasse avaient un caractère décennal et rendaient celle-ci a impropre à son usage,
– que la responsabilité de la SASU NPG DECO 77 et celle de M. [O] [F] ne faisaient l’objet d’aucune contestation sérieuse au vu des conclusions expertales,
-que l’évaluation du coût des travaux de réparation à la somme de 62’880,20 €
ne faisait l’objet d’aucune critique.
Il a, par suite, condamné la SASU NPG DECO 77 et . M. [F] ainsi que ses assureurs, MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles in solidum à payer aux consorts [S]-[L], la somme provisionnelle de 62 881,20 euros et rappelant qu’il revenait au seul juge du fond de statuer sur le partage de responsabilité entre les 2 constructeurs, il à ce stade de la procédure et dans leurs rapports entre eux, dit que le montant de la provision devait être partagé par moitié entre la SASU NPG DECO 77,d’une part et Monsieur [O] [F] et ses assureurs, d’autre part.
Si la SASU NPG DECO 77 est défaillante en cause d’appel et n’avait pas conclu en première instance sur cet incident, ce qui laisse présumer qu’elle n’a aucun moyen sérieux à opposer à la demande présentée, Monsieur [O] [F] et ses assureurs ne contestent en appel ni le principe de la responsabilité décennale de Monsieur [F] ni l’évaluation du coût des travaux de réparation effectuée par l’expert judiciaire, ni la répartition par moitié de la provision, ni s’agissant des assureurs de M. [F] , leur obligation à garantie.
La décision entreprise sera donc confirmée hormis en ce qu’elle a condamné la
la SA MAAF Assurances à payer aux consorts [S] -[L], la provision de 62’881,20 euros in solidum avec la SASU NPG DECO 77 et M. [F] et ses assureurs, MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles.
*Sur les demandes accessoires :
La décision de première instance sera également confirmée en ce qu’elle a dit que les dépens de l’incident et la demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile seront réservés avec l’instance au fond.
Les dépens d’appel suivront le sort des dépens au fond.
Les éléments de la cause ne justifient pas de faire droit aux demandes des parties fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
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PAR CES MOTIFS
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LA COUR,
Statuant publiquement par arrêt rendu par défaut susceptible d’opposition, mis à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
infirme les dispositions critiquées de l’ordonnance de mise en état du 12 mai 2022,
Statuant de nouveau des chefs infirmés,
Déboute les consorts [S] -[L] de leur demande de provision à l’encontre de la SA MAAF assurances,
Condamne in solidum la société NPG DECO 77, M.[O] [F] et ses assureurs, la SA MMA IARD et la SA MMA IARD Assurances Mutuelles, à payer à Mme [U] [S] et M.[X] [L], la somme de 62 881,20 euros à titre de provision ;
Dit que dans leurs rapports entre eux, le montant de la provision sera partagé par moitié entre la SASU NPG DECO 77 d’une part, et M. [O] [F] et ses assureurs, la SA MMA IARD et la SA MMA IARD Assurances Mutuelles, d’autre part,
Y ajoutant,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Dit que les dépens d’appel suivront le sort des dépens au fond.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
Marie-Laure LOUPY. Corinne BALIAN.