Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 10
ARRÊT DU 26 JANVIER 2023
(n° , 11 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/03089 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBPCM
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Février 2018 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 15/09886
APPELANT
Monsieur [K] [Y] [L] (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 751010022018014469 du 08/06/2018 accordée par le BAJ de PARIS)
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté et assisté à l’audience de Me Raphaël BARAZZA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0713
INTIMÉES
SARL ARGUSTAXIS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 5]
[Localité 3]
ET
SARL SDT PAGES II, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentées par Me Stéphane FERTIER de l’AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075
Assistées à l’audience de Me Philippe MAGNOL, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1573
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée le 15 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Valérie MORLET, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Florence PAPIN, Présidente
Madame Valérie MORLET, Conseillère
Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Dorothée RABITA
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Florence PAPIN, Présidente et par Florence GREGORI, greffier présent lors de la mise à disposition.
***
FAITS et PROCEDURE
Monsieur [K] [Y] [L] a conclu plusieurs contrats de location d’un véhicule de taxi équipé :
– avec la SARL ARGUS TAXIS, d’une part, du 20 juin au 30 juillet 2001, du 26 juin au 27 décembre 2002, du 15 juillet 2003 au 2 février 2006 et à partir du 24 mars 2006 (date de fin de contrat non précisée),
– avec la SARL SDT PAGES II, d’autre part, du 13 janvier au 19 juin 2003.
Les dates de ces contrats, alléguées par les deux entreprises de location de voiture de taxi, ne sont pas contestées, mais seules les conditions générales de contrats non identifiés sont versées aux débats.
Sont également communiquées les conditions générales d’un contrat conclu entre la société SDT PAGES II et Monsieur [Y] [L] le 28 avril 2015.
Revendiquant la qualité de salarié des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS, Monsieur [Y] [L] a le 2 mai 2012 saisi le conseil de prud’hommes de Paris afin d’obtenir la requalification des contrats de location en un unique contrat de travail à durée déterminée et le versement de diverses sommes découlant de l’exécution de ses prestations en qualité de salarié.
Le conseil de prud’hommes, par jugement du 3 novembre 2014, s’est déclaré incompétent pour connaître du litige, au profit du tribunal de grande instance de Paris auquel le dossier a été renvoyé.
Sur le contredit de Monsieur [Y] [L], la Cour d’appel de Paris a par arrêt du 2 juillet 2015 confirmé le jugement, estimant que l’existence d’un contrat de travail liant Monsieur [Y] [L] aux sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS n’était pas établie.
L’instance a repris devant le tribunal de grande instance de Paris.
*
Le tribunal de grande instance de Paris, par jugement du 20 février 2018, a :
– débouté Monsieur [Y] [L] de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la société SDT PAGES II de sa demande reconventionnelle en paiement de loyers impayés,
– débouté l’ensemble des parties de leurs demandes présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties,
– dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire.
Monsieur [Y] [L] a par acte du 10 février 2020 interjeté appel de ce jugement, intimant les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS devant la Cour.
*
Monsieur [Y] [L], dans ses dernières conclusions signifiées le 20 mai 2020, demande à la Cour de :
– constater les violations à la règlementation et manquement aux contrats souscrits,
– dire que les clauses litigieuses seront réputées non-écrites et rétablir les droits des parties conformément au contrat-type,
– condamner solidairement les parties intimées « à 50.000 euros à titre de dommages et intérêts » au taux d’intérêt légal en vigueur,
– condamner solidairement les parties intimées « à 71.780 euros » au taux d’intérêt légal en vigueur à titre de remboursement des sommes qu’il a indument versées,
– condamner les parties intimées à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS aux entiers dépens.
Les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS, dans leurs dernières conclusions signifiées le 13 août 2020, demandent à la Cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [Y] [L] de ses demandes à hauteur de 15.000 euros au titre des dommages et intérêts à leur égard,
– infirmer le jugement en ce que la société [sic] a été déboutée de sa demande en paiement à hauteur de 8.544,80 euros au titre des rappels de loyers,
Statuant à nouveau,
– débouter Monsieur [Y] [L] de l’ensemble de ses demandes devant la Cour d’appel à hauteur de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts au taux d’intérêt légal en vigueur et de 71.780 euros au taux légal en vigueur au titre de remboursement des sommes versées indument et à hauteur de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Monsieur [Y] [L] à payer à la société SDT PAGES II la somme de 11.149,93 euros au titre des rappels de loyers jusqu’au 2 janvier 2017, avec (phrase non terminée des conclusions),
– condamner Monsieur [Y] [L] à verser à chacune des sociétés ARGUS TAXIS (‘) la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Monsieur [Y] [L] à verser à la SDT PAGES II la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Monsieur [Y] [L] aux entiers dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit de la société JRF AVOCATS (Maître Stéphane FERTIER).
*
La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 12 octobre 2022, l’affaire plaidée le 15 novembre 2022 et mise en délibéré au 26 janvier 2022.
MOTIFS
Liminaire
Monsieur [Y] [L], appelant, ne présente dans le dispositif de ses dernières conclusions aucune demande d’infirmation ou de confirmation du jugement entrepris.
Or il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement.
Cette règle, issue de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire posée par le décret n°2017-891 du 6 mai 2017, n’a cependant été affirmée pour la première fois par la Cour de cassation dans un arrêt publié que le 17 septembre 2020, de sorte qu’il n’y a pas lieu de l’appliquer dans le cadre d’instances introduites devant une cour d’appel antérieurement à cette date, sauf à priver les appelants du droit à un procès équitable.
La règle est donc ici rappelée aux parties à titre d’information, mais ne sera pas appliquée, alors que Monsieur [Y] [L] a interjeté appel du jugement du tribunal de Paris du 20 février 2018 par acte du 10 février 2020 et a signifié ses dernières conclusions devant la Cour le 22 mai 2020, antérieurement à l’arrêt précité de la Cour de cassation.
Sur les demandes de Monsieur [Y] [L]
Les premiers juges ont, au regard des contrats liant les parties et de leurs conditions générales, estimé que Monsieur [Y] [L] échouait à démontrer les manquements à leurs obligations des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS et l’ont débouté de toute demande indemnitaire. Ils ont ensuite considéré qu’ils n’étaient pas en mesure d’apprécier la conformité des conditions générales des contrats avec la loi en vigueur et d’ordonner une mise en conformité avec un contrat type. Les magistrats ont enfin rappelé qu’il n’y avait pas lieu de donner acte à Monsieur [Y] [L] de sa demande d’application de l’article 13 du contrat-type, demande sans portée juridique.
Monsieur [Y] [L], aux termes de conclusions particulièrement confuses, reproche aux premiers juges d’avoir ainsi statué, estimant qu’il est établi « de manière intangible » que les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS sont « coupables » d’un manquement contractuel. Il estime que les magistrats ont fait une mauvaise interprétation des pièces produites, puis fait valoir un déséquilibre significatif des contrats et leur caractère léonin (évoquant un « article 13 » établi au bénéfice unique du loueur) et demande à la Cour de dire « ces clauses » non écrites. L’intéressé fait ensuite valoir différents manquements contractuels des loueurs (contrats non conformes à la réglementation, vices du véhicule, frais d’entretien supportés par lui, immobilisation du véhicule, non remboursement de la TICPE) et affirme avoir subi un préjudice de 72.660 euros (page 7 de ses conclusions), ou, à tout le moins, de 12.660 + 2.100 + 4.500 + 2.520 + 50.000 = 71.780 euros (page 8 et dispositif des conclusions), ainsi qu’un préjudice de 50.000 euros (distinct ‘).
Les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS rappellent que les contrats ont été dument remplis et signés, sans exceptions ni réserves des parties et constatent que Monsieur [Y] [L] ne produit pas aux débats le contrat-type (ou contrat-cadre) de la préfecture auquel il fait référence, de sorte qu’il est impossible d’apprécier la réalité de ses affirmations, et qu’en tout état de cause, le caractère obligatoire ou réglementaire de ce contrat cadre n’est pas établi. Elles estiment que les faits reprochés par Monsieur [Y] [L] ne concernent que la société ARGUS TAXIS et que la société SDT PAGES II, entité distincte, ne peut être mise en cause, que les manquements contractuels ne sont pas démontrés, que le préjudice allégué n’est pas établi et enfin qu’aucune clause ne prévoit la suspension des loyers pendant l’immobilisation du véhicule ni le système relatif à la taxe sur le carburant.
Sur ce,
Les relations contractuelles entre Monsieur [Y] [L] et les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS datant d’une période située entre 2001 et 2006, seul le code civil en sa version antérieure au 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations, est applicable en l’espèce.
Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, doivent être exécutées de bonne foi et se résolvent en dommages et intérêts à raison de l’inexécution ou de la mauvaise exécution par le débiteur de son obligation (articles 1134 et 1147 anciens du code civil).
Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention (article 9 du code de procédure civile). Ce principe fondamental en procédure civile est repris en matière contractuelle par l’article 1315 ancien (1353 nouveau) du code civil qui dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
1. sur la violation de la réglementation
Divers contrats-cadres ou contrats-types de location de véhicule de taxi sont disponibles sur Internet. Monsieur [Y] [L] verse aux débats un « CONTRAT-CADRE DE LOCATION DE VEHICULE EQUIPE EN TAXI », dont l’article 1.1 stipule que celui-ci est conclu conformément aux dispositions législatives et réglementaires régissant l’activité de location de taxi, et notamment l’article L311-3 du code de la sécurité sociale ainsi que les articles 1709 et suivants du code civil. La provenance de ce contrat-cadre n’est pas établie. Mis à jour au mois de juillet 2013, il ne peut en tout état de cause être applicable aux relations contractuelles de l’intéressé avec les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS, bien antérieures.
Monsieur [Y] [L] ne justifie en outre d’aucun texte réglementaire imposant, entre 2001 et 2006, la signature d’un contrat particulier aux chauffeurs souhaitant louer un véhicule de taxi équipé.
S’il fait ensuite valoir une violation de la réglementation, il ne précise ni de quelle réglementation il se prévaut, ni les termes de ses contrats ne respectant pas celle-ci, ni l’auteur de cette violation (alors même que deux entreprises sont mises en cause en l’espèce). Il semble que Monsieur [Y] [L] se prévale, en termes de réglementation, du contrat-type qu’il communique aux débats, sans que cela ne soit clair, et alors même que la provenance de ce contrat-type n’est pas identifiée, son applicabilité au cas d’espèce non démontrée et son caractère réglementaire non établi.
Les premiers juges n’ont pas été mis en mesure d’apprécier la réalité d’une non-conformité des contrats conclus entre les parties avec la réglementation en vigueur applicable en l’espèce. La Cour n’est pas plus renseignée et les demandes de Monsieur [Y] [L] sont par ailleurs confuses, alors qu’il sollicite que soit constatée une violation non précisée à une réglementation non définie.
Il n’est en conséquence aucunement démontré que les articles 1 (concernant l’utilisation professionnelle du véhicule), 3 (concernant la durée du contrat) et 5 (concernant l’état du véhicule fourni) des conditions générales produites aux débats (que les parties reconnaissent comme état applicables à leurs relations contractuelles) aient été édictées en méconnaissance d’une réglementation applicable en l’espèce.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [Y] [L] de sa demande de mise en conformité de ses contrats (ou, devant la Cour, de sa demande de « constat » d’une non-conformité).
2. sur le déséquilibre des contrats
L’article 1171 du code civil, tel qu’issu de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations, dispose que toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties et qui créée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations de celles-ci, dans le cadre des contrats d’adhésion, est réputée non écrite. Si ce texte n’est pas applicable aux contrats bien antérieurs conclus entre Monsieur [Y] [L] et les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS, il vient confirmer la sanction du déséquilibre du contrat. Celle-ci était d’ailleurs déjà prévue par l’article L442-6 du code de commerce, en sa version en vigueur à l’époque de la conclusion des contrats en cause, qui dispose qu’engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou artisan, notamment (1°) de pratiquer, à l’égard d’un partenaire économique, ou d’obtenir de lui des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d’achat discriminatoires et non justifiés par des contreparties réelles en créant, de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage ou un avantage dans la concurrence.
Monsieur [Y] [L] ne prouve pas que les contrats qu’il a signés avec les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS aient été des contrats d’adhésion et qu’il n’a pu négocier aucun de leurs termes.
Il se prévaut du caractère déséquilibré de « l’article 13 », sans précision sur le contrat réellement concerné.
Les conditions particulières des contrats signés par Monsieur [Y] [L] avec les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS ne sont pas versées aux débats.
Les « CONDITIONS GENERALES DE LOCATION D’UN VEHICULE EQUIPE TAXI » signées par Monsieur [Y] [L] le 20 juin 2001 (pièce n°1 de Monsieur [Y] [L] et n°7 des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS), ne permettent pas d’identifier le loueur comme étant la société SDT PAGES II. Aucun élément du dossier ne permet de rattacher ce document au contrat qui aurait été signé entre les parties le 13 janvier 2003, tel qu’allégué par ladite entreprise, bien postérieurement.
Les « CONDITIONS GENERALES DE LOCATION D’UN VEHICULE EQUIPE TAXI » signées par Monsieur [Y] [L] le 4 septembre 2008 et visées et signées par la société ARGUS TAXIS, ne peuvent quant à elle être rattachées à aucun des contrats allégués par l’entreprise, des 20 juin 2001, 26 juin 2002, 15 juillet 2003 et 24 mars 2006.
Ces conditions générales ne sont cependant contestées d’aucune part, et tant Monsieur [Y] [L] que les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS affirment qu’elles s’appliquent à leurs relations contractuelles. Il en est pris acte.
L’article 13 desdites conditions générales, rédigé dans les mêmes termes dans les deux documents précités, prévoit qu’ »une location en cours peut être interrompue ou un renouvellement refusé à l’initiative du Loueur, en cas de non-respect de l’une quelconque des conditions générales ci-dessus ». Elle n’apparaît pas induire de déséquilibre significatif entre les parties, le loueur de véhicule ne se réservant légitimement la possibilité d’interrompre ou de refuser le renouvellement du contrat qu’en cas de non-respect par le locataire des conditions de celui-ci.
Monsieur [Y] [L] fait état d’un « article 13 » semblant être établi au seul bénéfice du loueur conservant à sa discrétion la possibilité de réviser les prix de location qui ne correspond aucunement à l’article 13 des conditions générales versées aux débats. Aucun article des conditions générales communiquées ne correspond à la description donnée.
Il ne saurait donc, au seul vu des moyens formulés et des pièces communiquées, être fait droit à la demande de Monsieur [Y] [L], présentée pour la première fois en cause d’appel, tendant à dire « ces clauses » (sans précision) non écrites.
La Cour rappelle qu’en première instance, Monsieur [Y] [L] demandait qu’il lui soit donné acte de sa demande d’application de l’article 13 du contrat-type. Le contrat de cette nature communiqué aux débats n’est cependant pas applicable aux relations contractuelles entre les parties. Les premiers juges ont en outre et en tout état de cause rappelé qu’il ne leur appartenait pas de donner acte à une partie d’une demande, prétention sans aucune portée juridique, point qui sera confirmé en appel.
3. sur les manquements contractuels des loueurs
Monsieur [Y] [L] fait état de plusieurs manquements des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS.
La Cour constate que Monsieur [Y] [L] dirige ses prétentions contre les deux sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS sans jamais distinguer ce qui pourrait relever d’un contrat de l’une ou de l’autre.
Les contrats conclus avec ces deux entreprises sont distincts et il n’est justifié d’aucune solidarité entre elles, de sorte que Monsieur [Y] [L] ne peut pas, en application de l’article 1202 ancien (1310 nouveau) du code civil, réclamer une condamnation solidaire des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS.
Monsieur [Y] [L], qui réclamait la condamnation (solidaire) des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS au paiement de la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en première instance, porte sa demande devant la Cour à hauteur de 50.000 euros, à laquelle il ajoute une demande de remboursement d’une somme de 71.780 euros au titre de sommes versées indument. La Cour constate que cette dernière somme inclut déjà une demande de dommages et intérêts de 50.000 euros. Les moyens développés par l’intéressé ne permettent pas d’expliquer cette double demande (erreur matérielle ou demandes distinctes).
(1) sur les loyers indument versés
Monsieur [Y] [L] réclame la condamnation (solidaire) des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS au remboursement de la somme de 12.660 euros « au titre des loyers indûment versés » sans exposer aucun moyen au soutien de cette prétention.
Il ne justifie pas des conditions particulières de ses contrats, des termes de ceux-ci relatifs aux loyers dus, des loyers effectivement réglés, de loyers non dus, et n’apporte aucun élément tangible venant soutenir une telle prétention : les périodes visées ne sont pas précisées. En l’absence de tout élément de fait et de droit, Monsieur [Y] [L] sera débouté de sa demande de ce chef.
(2) sur le remboursement de la TICPE
Les articles 265 et suivants du code général des impôts prévoient le remboursement au moins partiel de taxes intérieures perçues par les services de la Douane dans certaines conditions (taxe intérieure sur les produits pétroliers – TIPP, aujourd’hui taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICPE).
Monsieur [Y] [L] ne peut cependant se contenter de réclamer à ce titre le remboursement par les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS de la somme de 2.100 euros, somme aucunement expliquée, sans indiquer au titre de quelles années il sollicite ce remboursement, sans justifier du régime applicable à chaque période de remboursement (et sur l’éligibilité de son véhicule au droit à remboursement) et sans même établir avoir réglé la taxe dont il demande le remboursement partiel. Il affirme en outre que les sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS ont perçu des remboursements, ce qui n’est pas non plus établi.
Ainsi que l’ont en outre relevé les premiers juges, il n’est justifié d’aucune obligation contractuelle des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS au titre de ce remboursement, lequel peut certes être réclamé par les entreprises propriétaires de véhicules loués, mais également par les locataires eux-mêmes de ces véhicules.
Les premiers juges ont donc à bon droit débouté Monsieur [Y] [L] de sa demande à ce titre.
(3) sur l’indemnité au titre de jours non travaillés et non remplacés
Monsieur [Y] [L] sollicite le paiement (ou remboursement) d’une somme de 4.500 euros au titre de l’indemnité afférente aux jours non travaillés et non remplacés du fait de l’absence de véhicule relai. Si certaines interventions de garagistes ont pu entraîner l’immobilisation de son véhicule, l’empêchant de l’utiliser, les éléments communiqués sont insuffisants pour établir les périodes exactes concernées et le paiement effectif de loyers aux sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS pendant ces immobilisations.
Monsieur [Y] [L] ne justifie en outre d’aucune obligation des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS de lui allouer un véhicule « de relai » en cas d’immobilisation de la voiture louée, ni de l’indemniser dans ce cas.
Une autre partie de cette prétention semble concerner l’indemnisation de Monsieur [Y] [L] pendant ses arrêts maladie, pendant lesquels il n’a pu travailler. Mais là encore, il ne justifie ni de la réalité et de la durée de ses arrêts maladie, ni des indemnités journalières qu’il aurait perçues à ces titres et encore moins de l’obligation à indemnisation des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS.
Il ne peut donc prétendre à aucun remboursement de loyers ni aucune indemnisation de ce chef.
(4) sur le remboursement des frais indument versés pour l’entretien du véhicule
L’article 6 des conditions générales versées aux débats (rédigé dans les mêmes termes dans les deux documents communiqués), que les parties affirment être applicables à leurs relations contractuelles, prévoit que « le loueur effectuant gratuitement l’entretien du véhicule, le locataire s’engage à user de la chose louée en bon père de famille (‘) » et l’article 8 stipule que « les réparations, échanges de pièces ou de pneumatiques résultant de l’usure normale, sont à la charge du loueur et seront obligatoirement effectuées dans ses ateliers ».
Monsieur [Y] [L] reconnaît lui-même que les réparations de son véhicule « ont été effectuées dans les ateliers d’un concessionnaire de la marque du véhicule loué et non ceux des loueurs » en méconnaissance des termes des contrats le liant aux sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS.
Les factures produites aux débats ne permettent pas de distinguer les réparations de simple entretien et celles résultant de l’usure normale du véhicule d’autres prestations liées à une utilisation anormale du véhicule (remplacement de pièces, remplacement du pare-brise, etc.). Certaines factures sont produites en double. Il n’est pas établi que Monsieur [Y] [L] ait soumis des devis, fiches d’intervention voire factures aux sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS, pour validation et prise en charge dans le cadre de leurs contrats : il n’est démontré par aucun moyen que les deux entreprises aient « constament [sic] refusé de prendre en considération la situation du véhicule, ainsi que celle du chauffeur » ainsi que cela est affirmé par l’intéressé. Il n’est pas non plus démontré que Monsieur [Y] [L] ait effectivement supporté le paiement des interventions sur son véhicule à hauteur de la somme totale de 2.520 euros. L’intéressé ne démontre enfin pas dans quelle mesure les unes ou les autres des factures peuvent être imputées, distinctement, aux contrats conclus avec l’une ou l’autre des entreprises.
Monsieur [Y] [L] ne justifiant de sa demande de remboursement de frais de réparation ni dans son principe ni dans son montant, devra en être débouté.
(5) sur le préjudice matériel et moral de Monsieur [Y] [L]
Monsieur [Y] [L] évalue globalement un préjudice « matériel et moral » qu’il aurait subi, sans le rattacher à aucun manquement particulier et précis de l’une ou l’autre des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS, sans apporter aux débats aucun élément permettant l’évaluation de ce poste de préjudice, sans circonscrire son préjudice matériel ni caractériser son préjudice moral.
Il réclame à ce titre des dommages et intérêts à hauteur de 50.000 euros, inclue dans la somme totale de 71.780 euros sollicitée au titre de remboursements, et demande par ailleurs en sus, au dispositif de ses écritures, une autre somme de 50.000 euros, non justifiée.
Il ne saurait être fait droit à aucune de ces deux demandes.
*
Sans élément justificatif (en droit et en fait), les premiers juges ont ainsi à juste titre débouté Monsieur [Y] [L] de ses demandes de dommages et intérêts. La Cour n’est pas mieux informée que le tribunal et confirmera en conséquence le jugement de ce chef.
Répondant en outre aux demandes augmentées de l’intéressé devant la Cour, celle-ci le déboutera de ses demandes de condamnation solidaire des sociétés SDT PAGES II et ARGUS TAXIS au « remboursement » d’une somme de 71.780 euros (incluant une demande de 50.000 euros au titre d’un préjudice matériel et moral) et au paiement de dommages et intérêts à hauteur de la somme supplémentaire de 50.000 euros, non explicitée.
Sur les demandes de la société SDT PAGES II
Les premiers juges ont débouté la société SDT PAGES II de sa demande en paiement de loyers non réglés par Monsieur [Y] [L], l’entreprise ne communiquant qu’un récapitulatif ne présentant pas la rigueur d’un document comptable et corroboré par aucune autre pièce.
La société SDT PAGES II affirme que, par « comble du comble », Monsieur [Y] [L] est un « mauvais payeur » et qu’il a accumulé de nombreux retards, produisant aux débats un récapitulatif de l’historique de ses paiements, et faisant valoir un retard de redevances de 11.149,93 euros. Selon elle, Monsieur [Y] [L] reconnaît lui-même sa dette par la « pièce 11 ».
Monsieur [Y] [L] ne conclut pas sur ce point.
Sur ce,
Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi (article 1134 ancien du code civil, applicable en l’espèce).
Les conditions particulières particulière du ou des contrat(s) conclus entre Monsieur [Y] [L] et la société SDT PAGES II, mentionnant les loyers dus, ne sont pas versées aux débats.
La société SDT PAGES II communique un listing informatique (formé de trois colonnes, l’une énumérant des dates sans précision, l’autre intitulée « Montant », la troisième concernant les règlements en espèces et la dernière les règlements par chèque), sans date ni auteur certains et sans aucune valeur probante. Les dates et montants qui y sont reportés ne sont corroborés par aucun élément (factures, numéros de chèque, récépissés de remises d’espèces, etc.). L’absence de caractère probant de ce document a très justement été relevée par les premiers juges. Aucun autre élément n’est produit devant la Cour, alors que seul un tableau « actualisé » est communiqué. Aucun document émanant d’un expert-comptable, assermenté, ne vient ainsi illustrer la situation de Monsieur [Y] [L] au titre des loyers dus, réglés ou non payés.
La société SDT PAGES II ne peut non plus prétendre que « la tache [sic] de la cour sera facilitée puisque Monsieur [Y] reconnaît lui-même ses non paiements pièce 11 » (caractères gras des conclusions). La pièce n°11 produite par l’entreprise correspond, dans son bordereau de pièces communiquées, à un « extrait du registre du commerce et des sociétés ». Au titre des pièces effectivement communiquées à la Cour, la pièce n°11 correspond à un courrier adressé le 27 janvier 2012 par Monsieur [Y] [L] à Monsieur [J] [M], de la société SBT [sic] PAGES II. Il n’est pas établi que cette pièce ait régulièrement été communiquée à la partie adverse, d’une part, et ce courrier ne contient aucune reconnaissance de dette de l’intéressé, d’autre part.
Les premiers juges ont en conséquence justement débouté la société SDT PAGES II de toute demande en paiement présentée contre Monsieur [Y] [L]. Le jugement sera confirmé de ce chef et, statuant à nouveau, la Cour déboutera l’entreprise de sa demande actualisée.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Le sens du présent arrêt conduit à la confirmation du jugement en ses dispositions relatives aux dépens de première instance, partagés par moitié entre les parties, et aux frais irrépétibles, au titre desquels les demandes des parties ont été rejetées.
Ajoutant au jugement, la Cour laissera à la charge de chacune des parties, qui toutes succombent en cause d’appel, les dépens d’appel par elles supportées, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Tenues au paiement de leurs propres dépens, aucune des parties ne sera indemnisée au titre des frais exposés devant la Cour et non compris dans les dépens, en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Vu le jugement du 20 février 2018 du tribunal de grande instance de Paris (RG n°15/9886),
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
DEBOUTE Monsieur [K] [Y] [L] de l’ensemble des prétentions formulées en cause d’appel à l’encontre de la SARL SDT PAGES II et de la SARL ARGUS TAXIS,
DEBOUTE la SARL SDT PAGES II de sa demande en paiement actualisée de loyers en cause d’appel,
DIT que chacune des parties gardera la charge des dépens d’appel par elle exposés,
DEBOUTE Monsieur [K] [Y] [L], la SARL SDT PAGES II et la SARL ARGUS TAXIS de leurs demandes d’indemnisation de leurs frais irrépétibles d’appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE