ARRÊT N°
N° RG 22/00112 – N° Portalis DBV6-V-B7G-BIJTN
AFFAIRE :
Mme [I] [P]
C/
M. [N] [H]
Demande en dommages-intérêts formée par le bailleur en fin de bail en raison des dégradations ou des pertes imputables au locataire
Grosse délivrée à
Me CHABAUD, avocat
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 08 FEVRIER 2023
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Le huit Février deux mille vingt trois la Chambre civile de la cour d’appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
Madame [I] [P]
née le 01 Janvier 1975 à [Localité 4], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Jean VALIERE-VIALEIX de la SELARL ELIGE LIMOGES – CABINET VALIERE-VIALEIX, avocat au barreau de LIMOGES substituée par Me Océane TREHONDAT-LE HECH, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANTE d’une décision rendue le 26 janvier 2022 par le Tribunal judiciaire de LIMOGES
ET :
Monsieur [N] [H]
né le 14 Novembre 1956 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Philippe CHABAUD de la SELARL CHAGNAUD CHABAUD LAGRANGE, avocat au barreau de LIMOGES substitué par Me Stéphane CHAGNAUD, avocat au barreau de LIMOGES
INTIME
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Suivant avis de fixation de la Présidente de chambre chargée de la mise en état, l’affaire a été fixée à l’audience du 9 novembre 2022.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 septembre 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Mme Marie-Laure LOUPY, Greffier, a tenue seule l’audience au cours de laquelle elle a été entendue en son rapport. Les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Après quoi, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 janvier 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi. A cette date le délibéré a été prorogé au 1er février 2023 puis au 08 février 2023, les parties ayant été régulièrement avisées.
Au cours de ce délibéré, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a rendue compte à la Cour, composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, de Monsieur Gérard SOURY,et d’elle-même, Conseillers. A l’issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l’arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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LA COUR
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Exposé du litige:
Suivant acte sous seing privé du 15 février 2018, M. [N] [H] a donné à bail à Mme [I] [P], un logement situé [Adresse 3] (87), moyennant un loyer mensuel de 300 euros.
La locataire a donné congé le 9 janvier 2020 pour le 10 février suivant et a quitté les lieux à cette date.
Un état des lieux de sortie a été dressé contradictoirement.
Par acte d’huissier du 22 décembre 2020, M. [N] [H] a fait assigner son ancienne locataire devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Limoges aux fins de la voir condamner à lui payer, outre une indemnité de procédure et les dépens :
-la somme de 100 euros au titre du loyer de février 2020,
-la somme de 2005,67 euros, au titre des travaux de reprise des dégradations affectant le logement .
A titre reconventionnel, Mme [I] [P] a demandé la condamnation de M. [N] [H] à lui verser les sommes de :
-1200€ au titre du préjudice de jouissance,
-1200€ en réparation du préjudice moral et de l’atteinte à sa santé.
Par jugement contradictoire du 26 janvier 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Limoges a notamment :
-dit n’y avoir lieu à écarter la note en délibéré déposée par le conseil de Mme [P],
– débouté Mme [P] de l’ensemble de ses demandes et prétentions ;
– condamné Mme [P] à verser à M. [H] les sommes suivantes en principal, outre intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2020, date de la mise en demeure :
* 100 euros en paiement du reliquat de loyer dû pour le mois de février 2020,
* 1 703,97 euros au titre des réparations locatives,
– ordonné la compensation entre ces créances et la somme de 300 euros constitutive du dépôt de garantie versé par le preneur, et condamné en conséquence Mme [P] à payer à M. [H] la somme de 1 403,97 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2020, date de la mise en demeure :
-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– condamné Mme [P] à verser à M. [H] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
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Appel de la décision a été relevé le 10 février 2022 par Mme [I] [P], dans des conditions de forme et de délai non contestées du chef de toutes ses dispositions, hormis celle ayant dit n’y avoir lieu à écarter sa note en délibéré.
L’affaire a été orientée à la mise en état.
Par dernières conclusions signifiées et déposées le 8 août 2022, Mme [I] [P] demande à la Cour d’infirmer le jugement, et statuant à nouveau, de :
-recevoir son appel et le déclarer fondé,
-condamner M. [H] à lui verser à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis les sommes suivantes :
* 1 200 euros au titre de son préjudice de jouissance,
* 1 200 euros au titre de son préjudice moral et atteinte à la santé ;
-condamner M. [H] à lui restituer le dépôt de garantie, soit 300 euros, assorti des intérêts à compter de son départ des lieux ;
-rejeter toutes demandes contraires, comme étant irrecevables, non fondées et injustifiées ;
-opérer une compensation entre les sommes éventuellement dues par elle et les dommages-intérêts qui lui seront alloués, outre le montant du dépôt de garantie de 300€ ;
-condamner M. [H] à une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de la procédure d’appel.
Par dernières conclusions signifiées et déposées le 20 septembre 2022 contenant appel incident , M. [N] [H] demande à la Cour de réformer le jugement en ce qu’il a limité le montant de la condamnation de Mme [P] à son égard et, statuant à nouveau, de :
-condamner Mme [P] à lui verser la somme de 2 005,67 euros au titre des réparations locatives, outre intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2020, date de la mise en demeure ;
-constater, après compensation, que Mme [P] lui reste redevable de la somme de 2 005,67 euros, et la condamner à lui payer cette somme, outre intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2020, date de la mise en demeure ;
-confirmer le jugement pour le surplus ;
-condamner Mme [P] à lui verser une indemnité supplémentaire de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel, en accordant à Me Philippe CHABAUD le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile ;
-dire qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par l’arrêt à intervenir et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 08/03/2001 devront être supportées par le défendeur, en plus de l’indemnité mise à sa charge, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
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L’ordonnance de clôture a été prononcée le 28 septembre 2022.
La Cour pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise ainsi qu’aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
* Sur la dette locative:
Mme [I] [P] ne conteste pas devoir le loyer dû pour son occupation du logement du 1 er au 10 février 2020, soit la somme de 100 €,laquelle sera majorée des intérêts au taux légal à compter de la lettre recommandée de mise en demeure reçue le 10 mars 2020.
La décision de ce chef sera confirmée.
*Sur les demandes de dommages-intérêts formées par Mme [I] [P] pour cause d’insalubrité du logement :
Aux termes de l’article 6 de la loi n° 89 ‘ 462 du 6 juillet 1989, ‘le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé.
Par ailleurs, en vertu de l’article 1719 du Code civil, le bailleur est obligé par la nature du contrat de bail et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée, et s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent.
Mme [I] [P] soutient que le logement pris à bail présentait un état d’insalubrité qui l’a contrainte à partir le 10 février 2020.
Si le congé donné au bailleur par Madame [P] le 9 janvier 2020, mentionne notamment, comme motif à son départ, le froid et l’humidité de la maison, à l’origine de problèmes de santé, il sera relevé qu’antérieurement à ce courrier, elle ne justifie pas avoir alerté ou mis en demeure son bailleur de difficultés rencontrées dans la jouissance du logement.
Les attestations qu’elle produit, émanant de son entourage (familial ou amical) faisant état de l’humidité du logement sont insuffisantes à caractériser l’insalubrité du bien, alors que de son côté, son ex- bailleur verse aux débats l’attestation d’un précédent locataire lequel indique n’avoir connu pendant son occupation de la maison avec sa compagne et un jeune enfant, durant 5 ans, aucun problème d’insalubrité, que M. [N] [H] produit également un procès-verbal de constat dressé le 22 août 2022 par Maître [Y] [E] , huissier de justice laquelle a constaté que le logement comportait des bouches de ventilation dans les différentes pièces du logement, en particulier une bouche de ventilation dans la cuisine en état de marche, dans la salle de bains : une grille de ventilation et une VMC au-dessus la douche, la présence d’un survitrage sur la porte d’entrée et la présence de radiateurs dans chaque pièce avec un thermostat général et un thermostat par pièce.
L’huissier indique également dans son procès-verbal n’avoir constaté la présence d’humidité en partie basse que dans les WC et dans le couloir attenant. Il a mentionné quelques traces de moisissures à l’extrémité droite de la porte d’entrée en partie basse.
Son procès-verbal est assorti de photographies reprenant ses constatations.
Dans ces conditions, la preuve de l’insalubrité du logement pris à bail occupé par la locataire du 15 février 2018 au 10 février 2020 n’est pas rapportée, pas plus que le lien de causalité entre les affections respiratoires dont elle justifie souffrir par un certificat médical de son médecin traitant avec une prétendue insalubrité du logement dont elle ne démontre pas l’existence.
Ces demandes en dommages-intérêts pour préjudice de jouissance(1200 €) et pour préjudice moral et atteinte à la santé (1200 €) seront donc rejetées et la décision entreprise sera confirmée de ce chef.
*Sur la demande de M. [N] [H] en paiement de réparations locatives:
L’existence de dégradations dans le logement loué, constatée lors de l’état des lieux de sortie effectuée contradictoirement entre les parties le 10 février 2020 est discutée par Mme [I] [P], laquelle soutient qu’elles seraient dues à l’insalubrité du logement.
Or, la comparaison de l’état des lieux d’entrée et de sortie révèle des dégradations importantes sur les papiers peints du séjour et de la chambre dont certaines parties ont été arrachées, ces détériorations étant imputées aux chats de la locataire au vu des mentions de l’état des lieux de sortie.
Par ailleurs, le contrat de bail signé entre les parties mentionne expressément que des travaux de peinture et de papier peint avaient été réalisés en février 2018 notamment dans la chambre et l’état des lieux d’entrée ne mentionne pas ces détériorations.
Selon l’article 7 de la loi numéro 89- 462 du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu par cas de force majeure ,par la faute du bailleur ou par le fait d’un tiers qu’il n’a pas introduit dans le logement.
Ainsi que le relève, à juste titre, le premier juge, Mme [I] [P] ne peut invoquer aucun de ces 3 motifs pour s’exonérer de sa responsabilité, de sorte qu’elle doit être déclarée responsable des dégradations commises dans les lieux loués pendant son occupation, et condamnée à payer la somme de 1703, 97€ TTC à son ex bailleur, pour la remise en état des murs de la chambre et du salon selon devis établi le 12 février 2020 pour ce montant .
Le bailleur produit une facture du 19 juin 2020 émanant du même artisan pour un montant total de 2305,67€ TTC sur lequel figurent des travaux supplémentaires valorisés à la somme de 547 € hors-taxes outre TVA, pour des travaux de peinture sur les huisseries .
Le premier juge a relevé, de manière pertinente, que la comparaison des états des lieux d’entrée et de sortie ne faisait apparaître aucune dégradation sur les huisseries et que dans ces conditions leur remise en état ne devait pas être mise à la charge de Madame [W] . Il sera relevé, en outre, que l’artisan qui a procédé au devis initial a évalué nécessairement lors de l’établissement du devis, l’ensemble des travaux indispensables à la remise en état complète des lieux, et dans ces conditions, la somme supplémentaire mentionnée sur la facture sera écartée comme non justifiée.
Au vu de ces éléments, le premier juge a à bon droit, déclaré Madame [P] redevable de la somme de 1703,97€TTC à l’égard du bailleur, majorée des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2020, et après compensation avec le dépôt de garantie dont celui -ci est débiteur à l’égard de son ancienne locataire, a condamné Mme [I] [P] à payer à M. [N] [H], la somme de 1403,97€ majorée des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2020.
Sa décision sera confirmée.
*Sur les demandes accessoires:
Succombant en ses prétentions et en son recours, Mme [I] [P] supportera les dépens de première instance et d’appel, ce qui exclut par ailleurs qu’ elle puisse bénéficier des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Il serait en outre inéquitable de laisser M. [N] [H] supporter l’intégralité des frais qu’il a dû expose,r pour faire assurer la défense de ses intérêts.
Ainsi, outre la somme déjà allouée par le premier juge, une indemnité supplémentaire de 1200 euros lui sera accordée en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
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PAR CES MOTIFS
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LA COUR,
Statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne Mme [I] [P] à verser à M. [N] [H], une somme de 1200€ en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Dit que les dépens d’appel seront supportés par Mme [I] [P] et recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
Marie-Laure LOUPY. Corinne BALIAN.