C O U R D ‘ A P P E L D ‘ O R L É A N S
CHAMBRE SOCIALE – A –
Section 1
PRUD’HOMMES
Exp +GROSSES le 28 FEVRIER 2023 à
Me Alexis DEVAUCHELLE
la SELARL CONVERGENS
FCG
ARRÊT du : 28 FEVRIER 2023
MINUTE N° : – 23
N° RG 20/02597 – N° Portalis DBVN-V-B7E-GIGC
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE TOURS en date du 1er Décembre 2020 – Section : AGRICULTURE
APPELANTE :
S.C.E.A. SPORTS ET LOISIRS EQUESTRES agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d’ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Pascale BOUDRY STELANDRE, avocat au barreau de PARIS
ET
INTIMÉE :
Mademoiselle [V] [Y]
née le 15 Avril 1994 à [Localité 3]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Emilie GUERET de la SELARL CONVERGENS, avocat au barreau de TOURS
Ordonnance de clôture : 29 novembre 2022
Audience publique du 06 Décembre 2022 tenue par Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller, et ce, en l’absence d’opposition des parties, assistée lors des débats de Mme Karine DUPONT, Greffier.
Après délibéré au cours duquel Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller a rendu compte des débats à la Cour composée de :
Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre, président de la collégialité,
Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre,
Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, conseiller
Puis le 28 Février 2023, Monsieur Alexandre DAVID, président de Chambre, assisté de Mme Karine DUPONT, Greffier a rendu l’arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [V] [Y] a été engagée à compter du 1er août 2017 en qualité d’enseignante animatrice par la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée, moyennant une rémunération brute mensuelle de 1689,60 €.
La relation de travail était régie par la convention collective nationale concernant le personnel des centres équestres du 11 juillet 1975.
En juin 2018, le centre équestre a connu des difficultés financières. Mme [Y] a perçu son salaire de manière fractionnée sous forme d’acomptes.
Le 21 octobre 2019, la salariée a réclamé, par courrier recommandé avec accusé de réception, le paiement d’un arriéré de salaires impayés, soit la somme de 8140,94 €.
Le 25 octobre 2019, par courrier, l’employeur s’est engagé à régulariser la situation dans les plus brefs délais, ajoutant : « depuis votre prise de fonction en 2017, vous avez bénéficié de nombreux avantages en nature (pension gratuite de vos 2 juments Qvalencia et Joanne) et de formation professionnelle (cours et sorties en compétition etc.’). Je ne souhaite en aucun cas, ni remettre tous ces avantages en cause ni m’en servir en contrepartie, mais vous demande de les prendre en considération avant d’engager une procédure trop hâtive qui serait fatale à l’entreprise ».
Le 8 novembre 2019, Mme [Y] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur en raison de son manquement à son obligation de verser un salaire.
Le 26 novembre 2019, Mme [Y] a mis en demeure l’employeur de lui verser les salaires restant dus ainsi que de lui remettre les documents de fin de contrat.
Le 1er décembre 2019, la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres a adressé à Mme [V] [Y] ses documents de fin de contrat : attestation Pôle emploi, certificat de travail et bulletins de paie, mais n’a procédé à aucun règlement.
Selon ordonnance du 19 février 2020, rendue en référé, le conseil de prud’homme de Tours a :
– Rejeté la demande d’échéancier de la SCEA Sports et Loisirs Equestres
– Condamné à titre provisionnel la SCEA Sports et Loisirs Equestres à verser à Mme [Y] les sommes suivantes :
– 7476,41 € nets au titre des salaires impayés des mois de juin 2018 à octobre 2019, – 488,81 € bruts au titre du salaire du mois de novembre 2019 ;
– 3355,87 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés acquis à la date de la rupture ;
– 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par requête du 12 juin 2018, Mme [V] [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Tours d’une demande tendant à requalifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à obtenir le paiement de diverses sommes en conséquence.
Par jugement du 1er décembre 2020, auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé du litige, le conseil de prud’hommes de Tours a :
– Dit et jugé que la prise d’acte est justifiée,
– Requalifié la prise d’acte de Mme [V] [Y] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– Condamné la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à verser à Mme [V] [Y] les sommes suivantes :
3379,20 € au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
950,40 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
3379,20 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 337,92 € au titre des congés payés afférents,
3355,87 € au titre d’indemnité de congés payés en deniers ou quittance,
15 321,06 € au titre des heures supplémentaires,
1531,11 € au titre des congés payés afférents,
1200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;
– Ordonné à la SCEA Sports Loisirs Equestres de remettre à Mme [V] [Y] les documents suivants, conformes à la décision ;
un bulletin de salaire,
une attestation Pôle Emploi,
un certificat de travail, et ce sous astreinte de 20 euros par jour de retard et par document à compter de la notification de la présente décision , se réservant le droit de liquider l’astreinte ;
Débouté Mme [V] [Y] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé ;
Débouté la SCEA Sports et Loisirs Equestres de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles ;
Condamné la SCEA Sports et Loisirs Equestres aux entiers dépens.
Le 14 décembre 2020, la SCEA Sports et Loisirs Equestres a relevé appel de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 28 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres demande à la cour de :
Déclarer la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres bien fondée en son appel du jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Tours le 1er décembre 2020 ;
Y faisant droit ;
Infirmer le jugement rendu le 1er décembre 2020 ;
Et, statuant à nouveau :
Requalifier la prise d’acte de Mme [V] [Y] en démission ;
En conséquence,
Débouter Mme [V] [Y] de l’ensemble de ses prétentions ;
Condamner Mme [V] [Y] au paiement de la somme de 3379,20 € au titre du préavis non exécuté ;
Condamner Mme [V] [Y] à payer à la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Confirmer le jugement en ce qu’il a :
Débouté Mme [V] [Y] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé ;
En tout état de cause :
Condamner Mme [V] [Y] aux dépens de première instance et d’appel dont le montant sera directement recouvré par Maître Alexis Devauchelle, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 14 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, et aux termes desquelles Mme [V] [Y], formant appel incident , demande à la cour de :
Confirmer le Jugement du conseil de prud’hommes de Tours en date du 1er décembre 2020 en ce qu’il a jugé que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de Mme [V] [Y] s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et condamné la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à verser à Mme [V] [Y] une somme de 950,40€ à titre d’indemnité légale de licenciement, 3379,20 € au titre d’indemnité compensatrice de préavis, 337,92 € au titre des congés payés afférents, 3355,87 € au titre d’indemnité de congés payés en denier ou quittance, 1200 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
Infirmer le Jugement du conseil de prud’hommes quant au quantum des dommages et intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et au titre des heures supplémentaires, et a débouté Mme [V] [Y] de sa demande au titre du travail dissimulé,
Statuant à nouveau de ces chefs,
Condamner la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à verser à Mme [V] [Y] les sommes suivantes :
– 5913,60 € (soit 3,5 mois de salaire) à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 27 001,11 € bruts à titre de rappel d’heures supplémentaires,
– 2270,11 € bruts à titre de congés payés afférents,
– 10 137,60 € à titre d’indemnité pour travail dissimulé,
Condamner la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à remettre à Mme [V] [Y] un bulletin de paie, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail conformes à la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document à compter de la notification du jugement,
En tout état de cause,
Confirmer le Jugement du Conseil de Prud’hommes de Tours en ce qu’il a débouté la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
Condamner la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à verser à Mme [V] [Y] une somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 15 novembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le non-paiement des salaires des mois de juin 2018 à octobre 2019
La S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres n’a payé à Mme [V] [Y] l’intégralité des salaires dus au titre de la période de juin 2018 à octobre 2019 que le 6 octobre 2020 après recours à un huissier de justice. La somme due se chiffrait au 31 octobre 2019 à 7476,41 € net.
Comme l’a justement retenu le conseil de prud’hommes, l’employeur ne pouvait se dispenser de verser les salaires à sa salariée, peu importe qu’il y ait eu un projet d’association. Que la salariée, qui habitait chez ses parents, n’ait pas réclamé ses salaires ne peut faire échec à une demande ultérieure de paiement de ceux-ci, lesquels doivent être versés en contrepartie du travail effectué.
Pendant le cours de la relation contractuelle, l’employeur n’a adressé à la salariée aucun reproche sur le travail effectué. Dès lors, les attestations produites selon lesquelles Mme [V] [Y] aurait exercé son travail en dilettante ne sont pas suffisantes pour retenir une inexécution de sa part justifiant le non-paiement du salaire.
Le manquement de l’employeur à ses obligations est caractérisé.
Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires
Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant (Soc., 18 mars 2020, pourvoi n° 18-10.919, FP, P + B + R + I et Soc., 27 janvier 2021, pourvoi n°17-31.046, P+R+I).
Mme [V] [Y] soutient que très régulièrement elle assurait les cours d’équitation jusqu’à 19 heures et devait ensuite nourrir les chevaux. Elle ajoute qu’elle devait travailler de nombreux week-ends y compris les dimanches pour coacher les élèves du club d’équitation participant à des concours.
Elle verse aux débats :
– quatre attestations d’élève selon lesquels elle leur donnait des cours après 18 heures et les accompagnait à des concours le dimanche ;
– un tableau récapitulant le nombre d’heures impayées.
Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre en produisant ses propres éléments.
La S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres est un centre équestre comptant outre sa gérante qui est présente constamment pour recevoir le public, donner des cours, s’occuper des chevaux, deux salariés : Mme [V] [Y], monitrice, et un palefrenier présent le matin, lequel intervient pour nourrir les chevaux et entretenir les boxes. Ce centre accueille également des stagiaires de l’école du cheval, présents au centre et qui aident les cavaliers, nourrissent les chevaux’.
L’employeur produit un courriel du service juridique du groupement hippique national qui est l’organisation professionnelle de la branche des centres équestres. Selon cet écrit, pour un centre comme celui de la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres, recevant en moyenne 38 chevaux et 11 cavaliers, la main-d »uvre est en moyenne de deux personnes, dont pour 1,3 l’exploitant équestre et 0,8 le salarié.
Les attestations versées aux débats, émanant d’enseignants d’équitation, permettent de confirmer la pertinence de cette estimation s’agissant du centre exploité par la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres.
La S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres a, semaine après semaine, analysé les tableaux versés aux débats par la salariée, en reprenant l’emploi du temps de celle-ci. Elle a procédé à une analyse minutieuse avec plusieurs annotations. Cette analyse est confortée par les multiples attestations produites, qui emportent la conviction de la cour.
À titre d’exemple peuvent être citées les attestations :
– de M. [Z] [E], artisan ayant effectué des travaux au sein du centre en juillet, août et septembre 2019, qui relate que Mme [V] [Y] n’était pas présente aux écuries entre 12 heures et 14 heures ;
– de Mme [L], stagiaire, selon laquelle Mme [Y] arrivait à 10 heures, partait à 11h30 pour déjeuner, revenait à 14h30 pour finir à 17 heures et que durant ce temps elle traitait ses chevaux, donnait des cours, assise au milieu de la carrière ;
– de Mme [K], cliente qui atteste que [V] [Y] montait son cheval ainsi que les chevaux du centre équestre pendant ses heures de travail…
Mme [V] [Y] avait ses deux juments hébergées au centre. Elle devait donc les monter, les nourrir et les soigner. Il ressort des attestations produites et des fiches des engagements concours qu’elle faisait ses entraînements au centre pour les différents concours auxquels elle participait, ce qui lui prenait du temps qu’elle ne consacrait pas à son employeur.
Au vu des éléments produits par l’une et l’autre partie, il y a lieu de considérer que Mme [V] [Y] a effectué des heures supplémentaires n’ayant pas donné lieu à rémunération mais en nombre moindre que celui qu’elle revendique et que celui retenu par le conseil de prud’hommes.
Il y a lieu de lui allouer au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées la somme de 850 euros outre 85 euros au titre des congés payés afférents.
Sur la demande d’indemnité pour travail dissimulé
En application de l’article L. 8221-5 du code du travail, est réputé dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de salaire un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.
Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.
Le caractère intentionnel de la dissimulation d’emploi ne peut se déduire du seul accomplissement d’heures supplémentaires non rémunérées.
Certes, l’employeur n’a pas opéré de contrôle suffisant sur les heures de travail effectivement réalisées par la salariée et n’a pas donné une suite favorable à ses demandes de paiement d’heures supplémentaires.
Pour autant, il n’apparaît pas qu’il ait entendu sciemment se soustraire à ses obligations déclaratives ou se soit, en toute connaissance de cause, abstenu de rémunérer des heures de travail dont il savait qu’elles avaient été accomplies. L’élément intentionnel du travail dissimulé n’est pas caractérisé.
Il y a lieu de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a débouté Mme [V] [Y] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé.
Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail
Il résulte de la combinaison des articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail que le salarié qui reproche à l’employeur des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail peut prendre acte de la rupture de son contrat. Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat, en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission.
Aux termes du courrier de rupture qu’elle a adressé à son employeur, Mme [V] [Y] a reproché à celui-ci de ne pas lui avoir réglé ses salaires. Elle lui reproche également dans ses écritures, de ne pas lui avoir réglé les heures supplémentaires effectuées et les congés payés afférents et de s’être rendu coupable de travail dissimulé.
Il résulte des précédents développements que le grief relatif au défaut de paiement intégral du salaire de juin 2018 à octobre 2019 est fondé, de même que celui relatif au non-paiement des heures supplémentaires.
A lui seul le défaut de paiement en temps et en heure du salaire convenu est suffisamment grave pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail. La circonstance qu’il n’y ait eu aucune retenue délibérée de la part de l’employeur, ni aucune intention de nuire à la salariée n’enlève pas le caractère de gravité du non-paiement du salaire.
Il s’en déduit que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par Mme [V] [Y] est justifiée et entraîne les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.
Il y a donc lieu de débouter l’employeur de sa demande reconventionnelle au titre du préavis non exécuté.
Sur les demandes pécuniaires au titre de la rupture
Il y a lieu de fixer l’indemnité de licenciement à 950,40 € net.
En application de l’article 43-1 de la convention collective nationale concernant le personnel des centres équestres du 11 juillet 1975, la durée du préavis est de deux mois. Il y a lieu de fixer le montant de l’indemnité compensatrice de préavis en considération des sommes que la salariée aurait perçues si elle avait travaillé durant cette période, soit à 3379,20 € brut outre 337,92 € brut au titre des congés payés afférents.
Les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du travail, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l’ancienneté du salarié et qui prévoient que, dans les cas de licenciements nuls, le barème ainsi institué n’est pas applicable,
permettent raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi.
Le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l’employeur est également assuré par l’application, d’office par le juge, des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail.
Mme [V] [Y] a acquis une ancienneté de 2 années complètes au moment de la rupture dans la société employant habituellement moins de onze salariés. Le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est compris entre 0,5 et 3,5 mois de salaire.
Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont ainsi de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT (Soc., 11 mai 2022, pourvoi n° 21-14.490, FP-B+R).
Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences de la rupture à son égard, telles qu’elles résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de condamner l’employeur à payer à Mme [V] [Y] la somme de 3379,20 euros brut à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement du conseil de prud’hommes est confirmé de ces chefs. Il y a lieu de préciser que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée par le jugement du conseil de prud’hommes est exprimée en brut.
Sur l’indemnité de congés payés d’un montant de 3355,87 €
Dans le dispositif de ses conclusions, l’employeur se borne à solliciter l’infirmation du jugement et le débouté des prétentions adverses.
Il n’articule aucun moyen de fait et de droit à l’encontre du chef de dispositif du jugement l’ayant condamné à payer à Mme [V] [Y] la somme de 3355,87 € en deniers ou quittance au titre d’indemnité de congés payés.
Il y a donc lieu de confirmer ce chef de jugement.
Sur la demande de remise des documents de fin de contrat
Il convient d’ordonner à la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres de remettre à Mme [V] [Y] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un bulletin de paie conformes aux dispositions du présent arrêt et ce dans un délai d’un mois à compter de sa signification.
Aucune circonstance ne justifie d’assortir ce chef de décision d’une mesure d’astreinte pour en garantir l’exécution.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Les dépens de première instance et d’appel sont à la charge de l’employeur, partie succombante.
Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a alloué à la salariée la somme de 1200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il paraît inéquitable de laisser à la charge de la salariée l’intégralité des sommes avancées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure d’appel. L’employeur est débouté de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :
Infirme le jugement déféré mais seulement en ce qu’il a condamné la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à payer à Mme [V] [Y] les sommes de 15 321,06 euros au titre des heures supplémentaires et de 1531,11 euros au titre des congés payés afférents ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
Condamne la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à payer à Mme [V] [Y] les sommes suivantes :
– 850 euros brut à titre de rappel d’heures supplémentaires ;
– 85 euros brut au titre des congés payés afférents ;
Dit que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée par le jugement du conseil de prud’hommes est exprimée en brut ;
Ordonne à la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres de remettre à Mme [V] [Y] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un bulletin de paie conformes aux dispositions du présent arrêt et ce dans un délai d’un mois à compter de sa signification ;
Dit n’y avoir lieu à assortir la remise des documents d’une astreinte ;
Condamne la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres à payer à Mme [V] [Y] la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile d’appel et déboute l’employeur de sa demande à ce titre ;
Condamne la S.C.E.A. Sports et Loisirs Equestres aux dépens d’appel.
Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre et par le greffier
Karine DUPONT Alexandre DAVID