RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 21/01037 – N° Portalis DBVS-V-B7F-FPOB
Minute n° 23/00044
S.A.R.L. OMNIUM AGENCEMENT
C/
S.A.S. SOPREMA ENTREPRISES
Jugement Au fond, origine TJ à compétence commerciale de METZ, décision attaquée en date du 26 Janvier 2021, enregistrée sous le n° 16/00946
COUR D’APPEL DE METZ
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 09 MARS 2023
APPELANTE :
S.A.R.L. OMNIUM AGENCEMENT Représentée par son gérant
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ
INTIMÉE :
S.A.S. SOPREMA ENTREPRISES représentée par son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Yves ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ
DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 01 Septembre 2022 tenue en double rapporteurs par Mme Anne-Yvonne FLORES et Mme Catherine DEVIGNOT, Magistrats rapporteurs, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en ont rendu compte à la cour dans leur délibéré, pour l’arrêt être rendu le 09 Mars 2023.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Jocelyne WILD
COMPOSITION DE LA COUR :
PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre
ASSESSEURS : Mme DEVIGNOT,Conseillère
Mme DUSSAUD, Conseillère
ARRÊT : Contradictoire
Rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme FLORES, Présidente de Chambre et par Mme Jocelyne WILD, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Selon un devis quantitatif estimatif accepté le 13 février 2012, la SARL Omnium agencement a confié à la SAS Soprema entreprises la réalisation de travaux d’étanchéité et de bardage sur un bâtiment situé à [Localité 4] pour une somme de 60 000 euros HT soit 71 760 euros TTC.
La SAS Soprema entreprises a sous-traité les travaux de bardage et d’étanchéité à M. [J] [K], artisan exerçant sous l’enseigne Niles bardage couverture, ainsi qu’à la SARL Shala.
Les travaux ont fait l’objet d’un procès-verbal dit de « pré-réception » du 29 octobre 2012 contenant différentes réserves devant être levées le même jour.
Par acte d’huissier du 11 janvier 2013 remis à personne habilitée, la SAS Soprema entreprises a assigné la SARL Omnium agencement devant le tribunal de grande instance de Metz afin d’obtenir sa condamnation au paiement du solde de ses travaux ainsi qu’à des dommages et intérêts.
La SARL Omnium agencement s’est opposée à cette demande en soutenant que les travaux n’avaient pas été réceptionnés et en se prévalant de désordres nécessitant des travaux de reprise d’un montant de 73 449 euros.
Par ordonnance du 15 octobre 2013 rectifiée par une ordonnance du 19 novembre 2013, le juge de la mise en état a désigné un expert aux fins d’examen des travaux liés à l’étanchéité de la toiture terrasse et au bardage.
Par actes d’huissier du 23 juin 2014 remis à personne à la SARL Shala, du 25 juin 2014 remis à personne habilitée à la SA Generali et à la société de droit anglais Elite Insurance Company Limited, prise en la personne de la SAS Securities & Financial Solutions France, et du 2 juillet 2014 remis à personne présente à M. [K], la SAS Soprema entreprises, agissant par son représentant légal, a fait assigner les défenderesses en intervention forcée.
Par ordonnance du 25 novembre 2014, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux procédures.
Par ordonnance du 27 janvier 2015, le juge de la mise en état a déclaré les opérations d’expertise ordonnées par ordonnances des 15 octobre et 19 novembre 2013 opposables aux défenderesses en intervention forcée.
L’expert judiciaire a déposé son rapport le 13 juin 2016.
Par jugement avant-dire-droit du 9 octobre 2018, le tribunal de grande instance de Metz :
– a rejeté la demande de contre-expertise formulée par la SARL Omnium agencement,
– lui a enjoint de conclure au fond en formulant expressément ses prétentions et en indiquant les moyens de droit sur lesquels elle fonde celles-ci,
– l’a invitée à faire toute observation utile sur la prise en charge des travaux de reprise et à donner toute précision utile sur le lien entre, d’une part, les désordres qu’elle invoque et d’autre part les travaux prévus par le devis quantitatif estimatif accepté le 13 février 2012 et les réserves mentionnées dans le procès-verbal dit de « pré-réception » du 29 octobre 2012.
L’affaire a été renvoyée à la mise en état.
Par conclusions du 28 mai 2019, la SAS Soprema entreprises, agissant par son représentant légal, a demandé au tribunal de :
A titre principal,
– dire et juger que les travaux sont réceptionnés le 29 octobre 2012 avec levée des réserves à cette date,
– condamner la SARL Omnium agencement à lui payer la somme en principal de 63 287,71 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 1,5 % à compter de la signification de la demande et subsidiairement au taux légal,
– condamner la SARL Omnium agencement à lui payer une somme équivalente à 15 % de la somme de 63 287,71 euros à titre de dommages et intérêts soit la somme de 9 493,15 euros et en tout état de cause avec un minimum de 200 euros,
– condamner la SARL Omnium agencement à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– condamner la SARL Omnium agencement aux entiers frais et dépens, qui incluront ceux de la procédure en expertise,
– débouter la SARL Omnium agencement de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
A titre subsidiaire,
– condamner la SARL Omnium agencement à la garantir de toutes condamnations de quelque nature susceptibles d’être mises à sa charge au titre de l’intervention procédurale des sous-traitants et de leurs assurances,
Plus subsidiairement encore,
– dire et juger que les sous-traitants, M. [K], la SARL Shala et leurs assurances, la SA Groupe Generali et la société de droit anglais Elite Insurance Company Limited, prise en la personne de la SAS Securities & Financial Solutions France, devront solidairement la garantir de toutes condamnations susceptibles d’être mises à sa charge en principal, frais, intérêts et accessoires au profit de la SARL Omnium agencement.
Par conclusions du 13 mai 2019, la SARL Omnium agencement a demandé au tribunal, au visa de l’article 1103 du code civil, de :
Vu les rapports d’expertise de MM. [G] et [C],
Au principal,
– condamner la SAS Soprema entreprises à réaliser les travaux ci-après :
– mise en ‘uvre pour l’ensemble du bâtiment d’une isolation thermique sur la tôle haute et basse du bardage, ainsi qu’au pourtour des ouvertures compris pose et repose des habillages et compris toutes sujétions en ce inclus la dépose partielle du bardage,
– fourniture et mise en ‘uvre d’un vidage supplémentaire venant se raccorder sur l’existant en 100 mm,
– fourniture et mise en ‘uvre d’un vidage en remplacement du vidage de 60 mm par un diamètre de 100 mm dans le chéneau arrière,
– dire que ces travaux devront être réalisés et réceptionnés, sous réserve d’éventuelles intempéries au sens des articles L. 5424 8 et suivants du code du travail, dans les deux mois du jugement à intervenir, sous l’astreinte qu’il plaira au tribunal de chiffrer,
– lui donner acte de ce qu’elle payera à la SAS Soprema entreprises la somme de 58 742,91 euros TTC dans le mois de la réception desdits travaux, déduction faite des dommages et intérêts sollicités infra,
Subsidiairement,
Vu l’article 1792-6 et 1347 du code civil,
– condamner la SAS Soprema entreprises à lui payer la somme de 3 564,69 euros TTC par compensation de leurs créances connexes,
En tout état de cause,
– condamner la SAS Soprema entreprises à lui payer une indemnité globale de 5 000 euros pour le défaut esthétique de l’ouvrage (bardage bombé et détérioration du macadam),
– condamner la SAS Soprema entreprises aux dépens ainsi qu’à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Vu l’article 1231-5 alinéa 2 du code civil,
– débouter la SAS Soprema entreprises de toutes ses demandes plus amples ou contraires.
Par conclusions du 30 décembre 2014, la SARL Shala a notamment demandé au tribunal de débouter la SAS Soprema entreprises de sa demande d’extension des opérations d’expertise ainsi que de ses fins et prétentions, et de condamner cette dernière au paiement d’une somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Par conclusions du 17 novembre 2017, la société de droit anglais Elite Insurance Company Limited, prise en la personne de la SAS Securities & Financial Solutions France, a notamment demandé au tribunal de débouter la SAS Soprema entreprises de sa demande en garantie et de toute autre demande dirigée à son encontre, de débouter la SARL Omnium agencement de sa demande de contre-expertise, et de condamner de la SAS Soprema entreprises au paiement d’une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions du 25 novembre 2016, la SA Groupe Generali, prise en la personne de son représentant légal, a notamment demandé au tribunal de dire et juger que sa garantie ne peut pas être recherchée, de débouter en conséquence la SAS Soprema entreprises de sa demande et de condamner cette dernière aux entiers dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 26 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Metz a :
– constaté que les travaux ont été réceptionnés à la date du 29 octobre 2012 avec levée des réserves à cette date,
– condamné la SARL Omnium agencement à payer à la SAS Soprema entreprises la somme en principal de 63 287,71 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 1,5 % fois le taux d’intérêt légal, à compter de l’assignation,
– condamné la SARL Omnium agencement à payer à la SAS Soprema entreprises 9 493,15 euros à titre de dommages et intérêts prévus aux conditions générales de vente de la demanderesse,
– condamné la SAS Soprema entreprises à payer à la SARL Omnium agencement la somme de 7 482,47 euros HT au titre des désordres,
– débouté la SAS Soprema entreprises de son appel en garantie formé à l’encontre de la SARL Omnium agencement,
– débouté la SAS Soprema entreprises de son appel en garantie formé à l’encontre de M. [K] [J] et de son assureur, la SA Groupe Generali,
– débouté la SAS Soprema entreprises de son appel en garantie formé à l’encontre de la SARL Shala, et de son assureur la société de droit anglais Elite Insurance Company Limited,
– mis hors de cause la SA Groupe Generali, assureur de responsabilité civile de M. [K],
– mis hors de cause la société de droit anglais Elite Insurance Company Limited, assureur de responsabilité décennale et de responsabilité civile de la SARL Shala,
– ordonné l’exécution provisoire,
– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties.
Pour se déterminer ainsi, le tribunal a considéré qu’il ressortait du procès-verbal dit de « pré-réception » que les travaux avaient été réceptionnés le 29 octobre 2012 par la SARL Omnium agencement et que trois des cinq réserves émises avaient été levées. Dès lors, il a considéré que le refus de cette dernière de payer les sommes dues au titre des travaux, au-delà éventuellement de la retenue de garantie pour les deux réserves restantes, n’était pas justifié, de sorte qu’elle devait régler la somme de 63 287,71 euros à la SAS Soprema entreprises. Cette condamnation a été assortie par le tribunal des intérêts au taux contractuel de 1,5 fois le taux légal à compter de l’assignation, conformément aux conditions générales de vente opposables aux parties.
Sur les désordres, le tribunal a considéré que la SARL Omnium agencement ne justifiait pas des préjudices allégués relatifs aux taches de gazole sur l’enrobé et à la façade arrière bombée. Il a néanmoins estimé que la responsabilité contractuelle de la SAS Soprema entreprises était engagée concernant les désordres retenus par l’expert, la renonciation de la SARL Omnium agencement à la prestation d’isolation du bâtiment dans le marché de base n’étant pas démontrée. Il a statué de même quant aux désordres relatifs au complexe isolation-étanchéité, la SAS Soprema n’ayant pas contesté sa responsabilité contractuelle sur ce point.
En conséquence, le tribunal a fixé le coût des travaux de reprise dû par la SAS Soprema entreprises à la somme de 7 482,47 euros. Il a en effet considéré que la SARL Omnium agencement ne démontrait ni le caractère dérisoire de ce montant évalué par l’expert judiciaire, ni la nécessité d’une reprise complète des travaux de bardage et d’étanchéité. Il a également écarté des débats le rapport d’expertise privée qu’elle a produit, celui-ci ne respectant pas le principe du contradictoire.
Il a en outre considéré que la clause pénale n’apparaissait pas manifestement excessive, la SARL Omnium agencement devant ainsi être condamnée à payer à la SAS Soprema entreprises une somme de 8 146,31 euros à ce titre.
Par ailleurs, le tribunal a rejeté l’appel en garantie formé par la SAS Soprema entreprises à l’encontre de la SARL Omnium agencement, la demanderesse ayant été condamnée au titre des désordres. Il a également rejeté l’appel en garantie de la SAS Soprema entreprises à l’encontre des sous-traitants et de leurs assureurs, aucune faute de la part des premiers n’étant démontrée.
Enfin, le tribunal a mis hors de cause les assureurs au motif que les désordres relevés ne relevaient ni de la garantie décennale, ni de leurs assurances de responsabilité civile professionnelle.
Par déclaration au greffe de la cour d’appel de Metz du 28 avril 2021, la SARL Omnium agencement, agissant par son représentant légal, a interjeté appel aux fins d’annulation, subsidiairement infirmation du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Metz le 26 janvier 2021 en ce qu’il :
– a constaté que les travaux ont été réceptionnés à la date du 29 octobre 2012 avec levée des réserves à cette date,
– l’a condamnée à payer à la SAS Soprema entreprises la somme en principal de 63 287,71 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 1,5 % fois le taux d’intérêt légal à compter de l’assignation,
– l’a condamnée à payer à la SAS Soprema entreprises 9 493,15 euros à titre de dommages et intérêts prévus aux conditions générales de vente de la demanderesse,
– a condamné la SAS Soprema entreprises à lui payer la somme de 7 482,47 euros HT au titre des désordres,
– a ordonné l’exécution provisoire,
– a dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à son profit,
– fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties,
– l’a déboutée de l’ensemble de ses moyens, fins, conclusions et demandes.
Par conclusions déposées le 20 juillet 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la SARL Omnium agencement, agissant par son représentant légal, demande à la cour de :
– faire droit à son appel,
– rejeter l’appel incident de la SAS Soprema entreprises et confirmer le jugement dans ses dispositions non contraires à l’appel principal,
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Metz le 26 janvier 2021 en ce qu’il :
– a constaté que les travaux ont été réceptionnés à la date du 29 octobre 2012 avec levée des réserves à cette date,
– l’a condamnée à payer à la SAS Soprema entreprises la somme en principal de 63 287,71 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 1,5 % fois le taux d’intérêt légal à compter de l’assignation,
– l’a condamnée à payer à la SAS Soprema entreprises 9 493,15 euros à titre de dommages et intérêts prévus aux conditions générales de vente de la demanderesse,
– a condamné la SAS Soprema entreprises à lui payer la somme de 7 482,47 euros HT au titre des désordres,
– a ordonné l’exécution provisoire,
– a dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à son profit,
– a fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties,
– l’a déboutée de l’ensemble de ses moyens, fins, conclusions et demandes,
– rejeter l’appel incident formé par la SAS Soprema entreprises,
Vu les articles 1103 du code civil, subsidiairement 1792-6, 1347, 1184 ancien et 1219 du même code,
Vu les articles 246, 565 et 566 du code de procédure civile,
– dire et juger que la SAS Soprema entreprises est seule entièrement responsable des désordres liés à
l’exécution des travaux de bardage et d’étanchéité qu’elle a dénoncés et retenus en leur principe par le rapport d’expertise judiciaire,
– dire et juger qu’elle était fondée à ne pas régler le solde de la facture de la SAS Soprema entreprises en application de l’exception d’exécution tirée de l’article 1184 ancien aujourd’hui 1219 du code civil,
Vu l’article 1231-5 du code civil,
– dire et juger que la clause pénale non paraphée par la SAS Soprema entreprises n’est pas entrée dans le champ contractuel,
– dire et juger subsidiairement que les conditions de la clause pénale ne sont pas réunies,
– dire et juger plus subsidiairement que la clause pénale de 15 % est manifestement excessive et la ramener à 1 % du montant que fixera la cour après compensation judiciaire des créances respectives des parties,
– dire et juger que la SAS Soprema entreprises ne peut prétendre au paiement du solde de sa facture en raison des désordres qui lui sont imputables qu’après compensation judiciaire de la créance du solde de la facture et de la créance de réparation,
– condamner la SAS Soprema entreprises à lui payer la somme de 70 000 euros HT au titre des travaux de mise en conformité selon évaluation de M. [I] selon rapport d’expertise privée du 8 juillet 2021 produit en pièce N°8 avec actualisation par BT 49 à compter d’avril 2016, ladite somme étant majorée de la TVA applicable au jour de l’exécution des travaux,
– condamner la SAS Soprema entreprises à lui payer la somme de 7 500 euros en réparation du préjudice lié au défaut d’esthétique de l’ouvrage (bardage bombé, détérioration du matériel et du macadam),
– débouter la SAS Soprema entreprises de l’ensemble de ses moyens, fin, conclusions, demandes et appel incident,
Très subsidiairement, avant dire droit et en tant que de besoin,
Vu le rapport d’expertise judiciaire de M. [G] et les rapports d’expertise privée de MM. [C] et [I],
– ordonner une contre-expertise judiciaire et désigner tel expert qu’il plaira à la cour de désigner, à l’exception de M. [G], avec pour mission de décrire et de chiffrer les travaux permettant que l’ouvrage qu’elle a commandé à la SAS Soprema entreprises soit réparé et chiffrer sa créance au titre du défaut d’exécution du contrat et le cas échéant de la garantie de parfait achèvement,
– dire que l’expert aura pour mission de faire le compte entre les parties,
– lui donner acte qu’elle accepte d’avancer les frais d’expertise judiciaire,
– condamner la SAS Soprema entreprises aux dépens de première instance qui comprendront le rapport d’expertise judiciaire de M. [G] et aux dépens d’appel ainsi qu’à lui payer la somme de 10 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, la SARL Omnium agencement soutient que la créance de la SAS Soprema entreprises d’un montant de 63 287,71 euros au titre des travaux n’est pas exigible. Elle expose en effet qu’elle n’a jamais réceptionné les travaux et que les réserves qu’elle a émises à l’occasion du procès-verbal de « pré-réception » du 29 octobre 2012 n’ont pas été levées, de sorte qu’elle considère être fondée à opposer à sa créancière l’exception d’inexécution sur le fondement de l’article 1219 du code civil.
La SARL Omnium agencement ajoute qu’elle conteste l’allégation de la SAS Soprema entreprises selon laquelle elle aurait reconnu devoir le solde du marché d’un montant de 63 287,61 euros et soutient que ce moyen est inopérant sur le fondement du principe d’estoppel.
Subsidiairement, si la cour considérait que les travaux ont été réceptionnés le 29 octobre 2012, la SARL Omnium agencement précise avoir respecté les délais prescrits par l’article 1792-6 du code civil, de sorte que la SAS Soprema entreprises demeurerait tenue à son égard par la garantie de parfait achèvement.
La SARL Omnium agencement conteste également la clause pénale dans son principe, les conditions générales du contrat la stipulant n’ayant ni été portées à sa connaissance, ni acceptées de sa part. Elle expose subsidiairement que cette clause est inapplicable en l’espèce, l’exception d’exécution ayant été opposée à la SAS Soprema entreprises au titre des malfaçons causées durant les travaux. Plus subsidiairement, elle demande la réduction de la clause pénale à 1 % du solde dû après compensation des créances réciproques, une indemnité de 15 % apparaissant dans le domaine des travaux manifestement excessive au sens de l’article 1231-5 du code civil.
La SARL Omnium agencement demande à titre reconventionnel la condamnation de la SAS Soprema entreprises sur le fondement de l’article 1103 du code civil au motif qu’elle n’a pas correctement exécuté son obligation contractuelle relative aux travaux d’isolation thermique du bâtiment.
En outre, elle reproche à l’expert judiciaire d’avoir sous-évalué le montant des travaux de reprise à la somme de 7 482,47 euros sans en avoir justifié le calcul, alors que les rapports d’expertises privées qu’elle a versés aux débats retenaient un coût de reprise allant de 48 623 à 70 000 euros. Elle demande donc au besoin qu’une nouvelle expertise judiciaire soit ordonnée à ce titre.
Sur ce point, la SARL Omnium agencement indique formuler sa demande de bonne foi. Elle rappelle d’abord que le rapport d’expertise judiciaire ne lie pas la cour conformément à l’article 246 du code de procédure civile et que les rapports d’expertises privées ont été soumis à une libre discussion entre les parties. Elle précise ensuite qu’elle a respecté ses obligations liées à l’exécution provisoire du jugement entrepris, de sorte que sa demande ne constitue pas une man’uvre dilatoire.
La SARL Omnium agencement conteste les allégations adverses selon lesquelles elle aurait modifié le marché de base et se serait immiscée dans l’exécution des travaux, de sorte qu’elle estime n’avoir commis aucune faute durant les travaux. Elle affirme que les désordres constatés sont bien imputables à la SAS Soprema entreprises, aucune autre entreprise n’étant intervenue sur le chantier.
En ce sens, elle affirme que la SAS Soprema entreprises a violé de nombreuses règles techniques à l’occasion des travaux, de sorte que cette dernière doit être condamnée à lui verser la somme de 70 000 euros, HT actualisable par BD 49 à compter d’avril 2016, TVA en sus au taux en vigueur au jour de l’exécution des travaux de reprise à ce titre, outre une indemnité au titre du défaut esthétique de l’ouvrage qu’elle a causé augmentée à 7 500 euros sur le fondement des articles 565 et 566 du code de procédure civile.
Sur l’argumentation subsidiaire de l’appel incident de la SAS Soprema entreprises, la SARL Omnium agencement expose que même si l’évaluation de l’expert judiciaire était retenue, la SAS Soprema entreprises serait tout de même tenue de réparer l’entier préjudice qu’elle a causé.
La SARL Omnium agencement demande aussi la compensation des créances réciproques.
Par conclusions déposées le 10 mars 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la SAS Soprema entreprises, prise en la personne de son représentant légal, demande à la cour de :
– rejeter l’appel de la SARL Omnium agencement et le dire mal fondé,
– la recevoir au contraire en son appel incident et le dire bien fondé,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :
– l’a condamnée à payer à la SARL Omnium agencement la somme de 7 482,47 euros HT au titre des reprises des désordres,
– a dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– a fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties,
Et statuant à nouveau sur ces seuls points,
– rejeter la demande reconventionnelle de la SARL Omnium agencement et la dire mal fondée,
Subsidiairement,
– réduire le montant des réfections des désordres à la somme de 5 722,47 euros,
– débouter la SARL Omnium agencement du surplus de sa demande,
– condamner la SARL Omnium agencement en tous les frais et dépens de première instance y compris les frais d’expertise ainsi qu’au paiement d’une somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu’elle a exposés en première instance,
– confirmer le jugement entrepris pour le surplus en ce qu’il a condamné la SARL Omnium agencement à lui payer les sommes de :
– 63 287,71 euros au titre du solde du marché, avec intérêts au taux contractuel de 1,5 fois le taux d’intérêt légal et ce, à compter de l’assignation,
– 9 493,15 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de son prononcé,
– condamner la SARL Omnium agencement en tous les frais et dépens d’appel ainsi qu’au paiement d’une somme supplémentaire de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu’elle a exposés en appel.
Au soutien de ses prétentions, la SAS Soprema entreprises soutient que la SARL Omnium agencement n’est pas fondée à invoquer l’exception d’inexécution pour s’opposer au paiement des travaux, cette dernière ayant renoncé à sa demande tendant à la voir exécuter son obligation contractuelle en nature en première instance.
Elle ajoute que la SARL Omnium agencement a reconnu lui devoir la somme de 63 287,71 euros au titre du solde des travaux en première instance, de sorte que celle-ci ne peut contester cet aveu judiciaire sans violer le principe d’estoppel.
De surcroît, la SAS Soprema entreprises affirme que les réserves et désordres allégués par la débitrice ont été réceptionnés et levés expressément à l’occasion du procès-verbal du 29 octobre 2012, de sorte que sa créance est à la fois certaine, liquide et exigible.
Elle ajoute que la clause pénale n’est contestable ni dans son principe ni dans son quantum, celle-ci ayant été acceptée par la SARL Omnium agencement dans les conditions générales du devis des travaux et son montant n’apparaissant pas manifestement excessif. Elle souligne que l’application de cette clause est justifiée, la SARL Omnium agencement n’ayant réglé que 7,5 % du montant des travaux depuis 2012 et lui causant de ce fait un préjudice conséquent.
Sur la demande reconventionnelle de la SARL Omnium agencement, elle soutient que les désordres relatifs au bardage ne lui sont pas imputables, ceux-ci étant imputables à l’intervention de la SARL Omnium agencement sur le chantier ainsi qu’à sa décision de modifier le marché de base sur ces points. Elle estime ainsi avoir exécuté correctement son obligation d’exécution des travaux, de sorte qu’il n’y a pas lieu de la condamner à payer le coût des travaux de reprise.
La SAS Soprema entreprises ajoute que la SARL Omnium agencement ne peut pas se prévaloir des garanties biennales, décennales ou de parfait achèvement ainsi que de la responsabilité contractuelle de droit commun à son encontre, les défauts de conformité allégués étant apparents au moment de la réception de l’ouvrage en 2012 et n’ayant pas été dénoncés.
Par ailleurs, la SAS Soprema entreprises demande l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il l’a condamnée au paiement des travaux de reprise des évacuations d’eaux pluviales, ces travaux ne faisant pas partie du marché de base.
A titre infiniment subsidiaire, la SAS Soprema entreprises demande la confirmation du jugement la condamnant au paiement de la somme de 7 482,47 euros au titre des travaux de reprise. Elle soutient que ce montant est justifié, son devis contenant l’offre de reprise ayant été vérifié préalablement par l’expert judiciaire et soumis à la libre discussion des parties. Elle sollicite ainsi le rejet de la demande adverse d’un montant de 70 000 euros au titre des travaux de reprise, aux motifs que l’expert judiciaire a déjà écarté une réfection totale du bardage et que cette demande est fondée sur un rapport d’expertise non contradictoire et erroné.
La SAS Soprema entreprises ajoute que la demande de contre-expertise judiciaire de la SARL Omnium agencement constitue une man’uvre dilatoire, celle-ci intervenant dix ans après la réception des travaux, et demande ainsi son rejet.
La SAS Soprema entreprises demande enfin le rejet de la demande de la SARL Omnium agencement tendant à voir indemniser son préjudice esthétique allégué, en ce que ni l’existence, ni l’imputabilité de ce préjudice à son encontre ne sont caractérisées.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 1er septembre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
– Sur la créance de la SAS Soprema entreprises au titre du prix des travaux :
Conformément à l’ancien article 1134 du code civil, repris aux articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et doivent être exécutés de bonne foi.
Il ressort de la pièce n° 1 de l’intimée que la SARL Omnium agencement a accepté le 13 février 2012 le Devis quantitatif estimatif de la SA Soprema entreprises d’un montant de 60 000 euros hors taxes et 71 760 euros TTC, et qu’elle a en outre nécessairement eu connaissance des conditions générales des travaux jointes et les a acceptées, puisqu’elle a faxé le même jour, le 13 février 2012 entre 17h02 et 17h03, non seulement le devis, mais également les conditions générales jointes qui constituent la 8ème et dernière page du fax (cf mentions relatives au fax émanant de « Omnium Agencement » en haut de chaque page).
Il en ressort dès lors que les deux parties se sont engagées l’une à exécuter les travaux prévus au devis, l’autre à en payer le prix ainsi fixé, et à respecter les conditions générales jointes.
Les motifs pertinents du tribunal, constatant notamment l’existence d’une réception ainsi qu’il ressort du procès-verbal de réception contradictoire des travaux signé par les deux parties le 29 octobre 2012, sont adoptés par la cour.
Il y a sera ajouté que la SARL Omnium Agencement ne conteste pas dans le détail, poste par poste, le chiffrage des travaux facturés par la SAS Soprema entreprises tels qu’indiqués dans le décompte définitif, aboutissant à un total de 57 219,20 euros hors taxes soit 68 434,16 euros TTC, ni la déduction d’une somme de 5 146,45 euros au titre des règlements déjà effectués.
La SARL Omnium Agencement est tenue contractuellement de payer le prix des travaux commandés, réalisés et réceptionnés. Le fait que la SAS Soprema entreprises ait mal réalisé certains travaux justifie qu’elle soit condamnée à indemniser le préjudice qui en résulte pour la SARL Omnium Agencement, mais ne dispense pas celle-ci de ses propres obligations contractuelles au paiement du prix des travaux.
En conséquence le jugement est confirmé en ce qu’il condamne la SARL Omnium Agencement à payer à la SAS Soprema entreprises la somme en principal de 63 287,71 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 1,5 % fois le taux d’intérêt légal, à compter de l’assignation du 11 janvier 2013.
Sur la créance en dommages-intérêts de la SARL Omnium Agencement :
La SARL Omnium agencement se prévaut expressément de la responsabilité contractuelle de la SAS Soprema entreprises, et ne fonde pas sa demande sur l’article 1792 du code civil.
En page 2 de ses dernières conclusions la SARL Omnium agencement se considère comme maître de l’ouvrage. En page 9 de ses dernières conclusions la SAS Soprema entreprises estime que la SARL Omnium agencement avait la triple qualité de maître de l’ouvrage, de maître d »uvre et de sachant.
Ainsi la qualité de maître de l’ouvrage de la SARL Omnium agencement n’est pas discutée entre les parties. En outre les comptes rendus de réunion de chantier désignent la société Omnium agencement comme maître d’ouvrage.
Par ailleurs il a déjà été observé que l’ouvrage a été réceptionné.
Après réception, s’agissant de désordres qui ne remplissent pas l’un des critères de gravité prévus par l’article 1792 du code civil, la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur qui a réalisé l’ouvrage réceptionné n’est engagée sur le fondement de l’ancien article 1147 devenu article 1231-1 du Code Civil que s’il est démontré une faute de sa part.
La SARL Omnium agencement soutient en substance dans ses conclusions que les travaux réalisés ne sont pas conformes à la commande et ne respectent pas les règles de l’art et notamment le DTU, de sorte qu’elle allègue expressément des fautes imputables à la SAS Soprema entreprises.
Il y a dès lors lieu de rechercher si les conditions de la responsabilité contractuelle de droit commun après réception sont réunies, et notamment si les désordres invoqués résultent d’une faute imputable à la SARL Soprema entreprises, s’ils étaient cachés à la réception, et quel est le préjudice certain qui en découle le cas échéant.
– s’agissant de la demande d’expertise :
Les pièces produites permettant de statuer, la demande d’expertise n’est pas justifiée.
– s’agissant des travaux de bardage :
L’expert judiciaire a constaté que les travaux de bardage et d’isolation réalisés par la SAS Soprema entreprises sont affectés de désordres résultant d’erreurs commises lors de l’exécution des travaux, avec une non-conformité aux normes en vigueur et aux règles de l’art (p. 33 du rapport de M. [G]). Les rapports d’expertises privées produites par l’appelante confirment l’existence de manquements aux règles de l’art.
Ainsi les fautes de la SAS Soprema entreprises sont prouvées.
La SAS Soprema entreprise ne démontre pas que la SARL Omnium agencement avait décidé de supprimer les raccords d’étanchéité thermique entre le bardage et le bâtiment en partie basse et au droit des ouvertures. En effet les annotations faites à la main par M. [O], produites en pièce 64 et annexées à un mail du 03 avril 2012 en pièce 50, ne rendent pas compte d’un souhait de suppression de raccords d’étanchéité, mais d’un souhait de fourniture de détails techniques et de dessins plus précis et côtés.
Il est de plus observé que les travaux de bardage facturés par la SAS Soprema entreprises dans son décompte définitif comportent les mêmes postes et le même chiffrage, totalisant 21 317,34 euros Hors Taxes, que le devis initial, et comprennent notamment un bardage « double peau » comportant un isolant d’une épaisseur de 110 mm ayant une fonction d’isolation thermique.
En conséquence il ne peut pas être retenu que l’absence d’isolation en partie basse du bardage et l’absence d’un profil bas obturant le passage d’air proviendrait d’un choix du maître de l’ouvrage.
Par ailleurs il ressort du rapport d’expertise judiciaire que le désordre résultant d’une circulation de l’air extérieur entre l’ancien bardage existant et le nouveau bardage posé par la SAS Soprema entreprises n’était pas apparent à la réception. En effet l’expert indique en page 31 de son rapport avoir procédé au démontage partiel du bardage avant d’avoir réalisé ses constatations en date du 29 janvier 2014. Il en ressort que ces constatations n’auraient pas été possibles sans démontage partiel.
En outre si le plan d’exécution « façade détails » réalisé par Soprema en date du 16 mars 2012 permettait à un professionnel de comprendre, par un examen très attentif du « détail A » et du « détail B », que les plateaux de bardage isolant ne seraient pas accolés contre le « bardage existant », puisqu’ils seraient fixés aux avancées de « l’ossature existante », ce qui laisserait un vide rempli d’air sur l’ensemble des façades, en revanche rien dans les divers croquis de ce même document ne révèle que cet espace vide ne serait pas enfermé, et qu’une infiltration de l’air extérieur serait ainsi possible en partie basse. L’absence de fermeture en partie basse du bardage n’est pas indiquée sur les documents techniques élaborés par la SAS Soprema entreprises. En particulier ni la « coupe de principe ‘ pied de bardage et couvertine » figurant sur le document « façade détail » du 16 mars 2012, ni le croquis « Bas de bardage », «Détail 1 – Indice A » du carnet de détails du 22 mars 2012 ne font apparaître l’absence de fermeture d’un espace vide en partie basse. Au contraire le croquis « Bas de bardage », «Détail 1 – Indice A » du carnet de détails du 22 mars 2012 réalisé par la SAS Soprema entreprises montre que la bavette basse sous le nouveau bardage est en jonction avec un élément maçonné, ce que M. [C] souligne dans son rapport d’expertise privée.
Il ressort en outre du rapport d’expertise judiciaire qu’en raison de la circulation de l’air entre la structure existante et le système de bardage mis en place par la SAS Soprema entreprises l’isolation thermique mise en place par celle-ci est totalement inefficace.
Ainsi les manquements aux règles de l’art et l’ampleur de leurs conséquences n’étaient pas apparents lors de la réception.
Dès lors la SAS Soprema entreprises est tenue de réparer le préjudice engendré par ses manquements aux règles de l’art.
L’expert judiciaire a fait le choix inapproprié de demander à la SAS Soprema entreprises de chiffrer le coût des réparations du préjudice qu’elle a elle-même causé. Ce chiffrage qui n’est pas corroboré par des devis d’entreprise tierces et neutres dans le litige est dépourvu de valeur probante quant au coût effectif des travaux de réparation à entreprendre.
En outre l’expert judiciaire n’explique pas pourquoi une simple fermeture en partie basse de l’espace vide, et son isolation thermique en partie basse, et au pourtour des ouvertures, serait suffisante pour garantir l’efficacité de l’isolation thermique attendue par le maître de l’ouvrage, ni comment le cas échéant elle pourrait être mise en ‘uvre en partie basse.
Enfin l’expert judiciaire a estimé à 1 920 euros HT, sans solliciter de devis, la fourniture et mise en ‘uvre d’une isolation thermique en partie basse et au pourtour des ouvertures, y compris dépose et repose de l’habillage, ce qui paraît manifestement sous-évalué.
M. [C], expert intervenu à la demande de la SAS Omnium agencement, observe que la pose d’une isolation en partie basse du bardage nécessiterait des travaux importants de décaissement des terres le long du bâtiment, avec un risque de déstabilisation de celui-ci, et un coût supérieur à celui du remplacement du bardage litigieux. M. [I] conteste quant à lui de manière très argumentée la solution de l’expert judiciaire consistant à calfeutrer le vide d’air.
Ainsi s’agissant de l’évaluation du préjudice, le rapport judiciaire, qui ne lie pas la cour, n’est pas convaincant. Il ressort des rapports d’expertise privée de MM. [C] et [I] que le bardage litigieux doit être déposé et qu’une isolation doit être mise en ‘uvre contre la paroi existante, avant repose du bardage déposé.
Compte tenu de l’ensemble des pièces produites par les parties, le devis de 66 439,45 euros HT et 79 727,34 euros TTC datant de 2016 de la société Shala incluant notamment la dépose et la repose du bardage et une isolation, qui corrobore le rapport de M. [I] et y est annexé, doit être pris en compte pour évaluer la réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime. En outre ainsi que le relève M. [I], ce devis est cohérent au regard de la surface de bardage de 285 m² posée par celle-ci et prévue par le devis de l’entreprise Shala. Par ailleurs M. [I] a procédé à une actualisation à 70 000 euros HT dans son rapport du 8 juillet 2021, qui explique le montant sollicité par la SAS Omnium agencement dans le dispositif de ses conclusions. Enfin il doit être tenu compte de l’évolution des prix depuis le marché initial du 13 février 2012 jusqu’à ce jour. Au vu de ces éléments de preuve concordants le préjudice est évalué par la cour à la somme de 70 000 euros HT à ce jour (actualisation déjà incluse), à laquelle s’ajoute la TVA au taux applicable au jour de l’exécution des travaux.
Par ailleurs la SARL Omnium Agencement ne démontre pas qu’un préjudice esthétique serait à la fois imputable aux travaux de l’appelante, et, le cas échéant, non réparé par la dépose et repose soigneuse du bardage prévue ci-dessus. Dès lors la demande en paiement d’une somme de 7 500 euros pour « défaut esthétique de l’ouvrage esthétique (bardage bombé, détérioration du matériel et du macadam ) » n’est pas justifiée.
– s’agissant de l’étanchéité :
L’expert judiciaire a constaté que les travaux d’étanchéité réalisés par la SAS Soprema entreprises sont affectés de désordres.
Le devis de l’entreprise Shala actualisé à 70 000 euros hors taxe ne concerne pas la réfection de l’étanchéité, mais seulement celle du bardage et de son isolation.
La SARL Omnium Agencement ne formule pas de demande en dommages-intérêts concernant spécifiquement la réfection de l’étanchéité dans le dispositif de ses dernières conclusions, de sorte qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce point, conformément à l’article 954 du code de procédure civile.
Sur la clause pénale et la demande de réduction :
Il a déjà été observé que les conditions générales de travaux de la SA Soprema entreprises, annexées à son devis et retournées par fax par la SARL Omnium Agencement avec le devis accepté, sont entrées dans le champ contractuel.
Ces conditions générales prévoient qu’en cas d’action contentieuse les sommes non payées à leur échéance prévue seront majorées de 15 % à titre de dommages-intérêts avec un minimum de 200 euros.
Alors que ce taux de 15 % a été convenu contractuellement, il n’est pas démontré qu’il serait manifestement excessif.
En revanche la SARL Omnium Agencement fait valoir à juste titre qu’il est manifestement excessif que cette majoration de 15 % s’applique à l’ensemble des travaux facturés et non payés, alors qu’elle détient une contre-créance en réparation des malfaçons affectant les travaux d’isolation/bardage.
Le prix des travaux d’isolation/bardage facturé par la SAS Soprema entreprise représente 25 495,54 euros.
Dès lors, ainsi que prévu par l’article 1231-5 du code civil, il y a lieu de réduire la pénalité, manifestement excessive, à 15 % du solde impayé du marché concernant les seuls travaux d’étanchéité en toiture, soit (63 287,71 – 25 495,54) x 15 % = 5 668,82 euros.
Sur la compensation des créances réciproques :
Il y a lieu d’ordonner la compensation judiciaire des créances réciproques des parties.
Sur les dépens et l’indemnité prévue par l’article 700 du code de procédure civile :
Les dispositions du jugement statuant sur les dépens et indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance sont confirmées.
Au regard de la solution du litige il y a lieu de partager les dépens de la procédure d’appel entre les parties, et de rejeter leurs demandes réciproques sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Confirme le jugement en ce qu’il a :
– condamné la SARL Omnium Agencement à payer à la SAS Soprema entreprises la somme en principal de 63 287,71 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 1,5 % fois le taux d’intérêt légal, à compter de l’assignation du 11 janvier 2013,
– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties ;
Infirme le jugement en ce qu’il a :
– condamné la SARL Omnium agencement à payer à la SAS Soprema entreprises 9 493,15 euros à titre de dommages et intérêts prévus aux conditions générales de vente de la demanderesse,
– condamné la SAS Soprema entreprises à payer à la SARL Omnium agencement la somme de 7 482,47 euros HT au titre des désordres ;
Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées :
Condamne la SAS Soprema entreprises à payer à la SARL Omnium agencement la somme de 70 000 euros HT, à titre de dommages-intérêts, à laquelle s’ajoute la TVA au taux applicable au jour de l’exécution des travaux ;
Condamne la SARL Omnium agencement à payer à la SAS Soprema entreprises une pénalité de
5 668,82 euros ;
Ordonne la compensation des créances réciproques des parties ;
Y ajoutant,
Condamne la SAS Soprema entreprises à supporter la moitié des dépens de la procédure d’appel, et condamne la SARL Omnium agencement à supporter l’autre moitié ;
Déboute les parties de leurs demandes d’indemnité prévue par l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel.
La greffière La présidente de chambre