5 janvier 2023
Cour d’appel de Rouen
RG n°
21/03183
Ch. civile et commerciale
N° RG 21/03183 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I3GT
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRET DU 5 JANVIER 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
21/794
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE ROUEN du 22 Juin 2021
APPELANTES :
Société SC M ET M
[Adresse 3]
[Localité 4]
Société A.M.A.
[Adresse 1]
[Localité 6]
S.A.R.L. PEPINIERES PRIEUR
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentées et assistées de Me Béatrice OTTAVIANI, avocat au barreau de ROUEN
INTIMEE :
S.A.R.L. PEPINIERES DU VAL D’YERRES
[Adresse 8]
[Localité 7]
représentée par Me Vincent MOSQUET de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 05 Octobre 2022 sans opposition des avocats devant M. URBANO, Conseiller, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Mme FOUCHER-GROS, Présidente
M. URBANO, Conseiller
Mme BERGERE, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DEVELET, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 05 Octobre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 08 Décembre 2022, prorogé au 15 décembre 2022 puis au 5 janvier 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Rendu publiquement le 5 janvier 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme Foucher-Gros, Présidente et par Mme Develet, Greffière.
Exposé du litige
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
Le 15 septembre 1998, a été constituée la SARL Pépinières Prieur entre Mme [B] et la SARL Pépinières Du Val d’Yerres qui était titulaire de 439 parts sociales sur 440, Mme [B] était titulaire d’une part sociale.
Par acte sous seing privé du 7 août 2018, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres a cédé 215 parts à la société A.M.A. et 215 parts à la société SC M & M. L’acte prévoit une clause de garantie d’actif et de passif selon situation comptable intermédiaire, arrêtée au 31 mars 2018.
Postérieurement à la cession, l’établissement public Pôle Emploi, les sociétés Brie Poids Lourds, Nord Bassin Parisien Expertise, Groupama et la M.S.A. se sont déclarés créancières de la SARL Pépinières Prieur.
Les 26 octobre 2018, 8 et 12 juillet 2019, le conseil des cessionnaires a porté à la connaissance de la SARL Pépinières Du Val D’Yerres qu’il entendait mettre en ‘uvre de la garantie de passif.
Le 25 juillet 2019, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres a répondu aux mises en demeure des 8 et 12 juillet 2019 reconnaissant seulement une éventuelle dette à l’égard de Pôle Emploi et de la MSA et faisant état de l’existence d’un compte courant d’associé en sa faveur dans les comptes de la société Prieur.
Les sociétés SARL Pépinières Prieur, SC M&M et A.M.A. ont informé la SARL Pépinières Du Val D’Yerres de leur intention de mettre en jeu la garantie de passif pour la somme totale de 34 638,63 euros.
Le 27 mai 2020, le conseil des sociétés SARL Pépinières Prieur, SC M&M et A.M.A. a pris acte de la cession de créance de la SARL Pépinières Du Val D’Yerres à hauteur de 19 484,02 euros correspondant au solde créditeur de son compte courant d’associé et mettait en demeure la SARL Pépinières Du Val D’Yerres de régler le solde de sa dette au titre de la garantie de passif de 15 154,61 euros.
Le 28 septembre 2020, le conseil des cessionnaires a informé la SARL Pépinières Du Val D’Yerres d’une nouvelle mise en demeure qui avait été adressée à la société Prieur portant sur la redevance pour prélèvement d’eau au titre de l’année d’activité 2016 d’un montant de 748,27 euros.
Le 25 janvier 2021, la société Coriolis Telecom a adressé une mise en demeure de payer trois factures datées du 30 juin 2018, 31 juillet 2018 et 31 janvier 2019 pour une somme totale de 1476,28 € en principal outre 661,44 € de frais et intérêts.
La SARL Pépinières Du Val D’Yerres n’ayant pas réglé les sommes demandées, a été assignée par les cessionnaires par acte d’huissier du 3 mars 2021 afin qu’il soit jugé qu’elle devait garantir le passif de la SARL Pépinières Prieur à hauteur de 37 623,16 euros au 31 janvier 2021 et qu’elle soit condamnée à payer, à titre principal, le solde restant dû de 18 139,14 euros due après cession de la créance en compte courant détenue par elle dans la SARL Pépinières Prieur au profit des sociétés SC M et M et A.M.A à hauteur de 19.484,02 €.
Par jugement réputé contradictoire du 22 juin 2021, le tribunal judiciaire de Rouen a :
-dit n’y avoir lieu à ordonner une mesure de conciliation,
-dit que la société Pépinières Du Val D’Yerres était tenu au passif de la société Pépinières Prieur à hauteur de 8 243,38 euros arrêtée au 31 janvier 2021,
-condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres à payer à la société SC M et M, la société AMA et la société Pépinières Prieur la somme totale de 8243,38 euros au titre de sa garantie au passif,
-condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres à payer à la société SC M et M, la société AMA et la société Pépinières Prieur la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-rappelé que la présente décision était exécutoire de droit à titre provisoire,
-dit n’y avoir lieu à inclure dans les dépens les frais de mise en demeure,
-rejeté le surplus des demandes,
-condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres aux entiers dépens.
La société SC M et M, la société AMA et la société Pépinières Prieur ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 3 aout 2021.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 septembre 2022.
EXPOSE DES PRETENTIONS
Moyens
Vu les conclusions du 20 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de la société SC M et M, la société AMA et la société Pépinières Prieur qui demandent à la cour de :
Vu les articles 1103, 1104, 1112-1, 1231 et 1216-1 du code civil,
Vu la clause de garantie de passif du 07 août 2018,
Vu les pièces versées aux débats,
-confirmer le jugement du tribunal judiciaire du 22 juin 2021 en ce qu’il a : condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres au paiement de la somme de 8.243,38 euros au titre de la garantie de passif au titre de la créance de la M.S.A., de Pôle Emploi, Nord Bassin Parisien Expertise et redevance eau déduction faite de la cession de créance ; condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres aux dépens,
-prononcer l’irrecevabilité de la demande nouvelle en remboursement du compte courant de la société Pépinières Du Val D’Yerres,
-réformer le jugement du tribunal judiciaire du 22 juin 2021 en ce qu’il a débouté les sociétés SC M et M, AMA et Pépinières Prieur du surplus de leurs demandes et de leur demande de garantie de passif concernant les créances de Groupama et de Coriolis,
Statuant à nouveau,
-condamner la société Pépinières Du Val D’Yerres au paiement de la somme de 8.727,64 euros correspondant aux créances de Groupama pour 6.490,74 euros et Coriolis 2.236,90 euros au profit de la société SC M et M et de la société AMA,
Pour le cas où la cour ne reconnaitrait pas la cession de créance de la société pépinières Du Val D’Yerres au profit au profit de la société SC M et M et de la société AMA,
-condamner la société Pépinières Du Val D’Yerres au paiement de la somme de 25.658,08 euros, correspondant aux créances Pôle Emploi et M.S.A au profit de la société SC M et M et de la société AMA,
-débouter la société Pépinières Du Val D’Yerres de sa demande tendant au remboursement de son compte courant,
-débouter la société Pépinières Du Val D’Yerres de toutes ses autres demandes, fins et conclusions contraires,
-condamner la société Pépinières Du Val D’Yerres au paiement de la somme de 4.000 euros au titre des honoraires d’avocat exposés en cause d’appel,
-condamner la société Pépinières Du Val D’Yerres au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamner la société Pépinières Du Val D’Yerres en tous les dépens.
Vu les conclusions du 16 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de la société Pépinières Du Val D’Yerres qui demande à la cour de :
Vu l’acte de cession de parts du 07 août 2018,
-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a : dit que la société Pépinières Du Val D’Yerres était tenue au passif de la société Pépinières Prieur à hauteur de 8.243,38 euros arrêté au 31 janvier 2021 ; condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres à payer aux sociétés SC M et M, AMA et Pépinières Prieur la somme totale de 8.243,38 euros au titre de sa garantie de passif ; condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres à payer aux société SC M et M, AMA et Pépinières Prieur la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
-constater que la société Pépinières Du Val D’Yerres ne conteste pas devoir à la société Pépinières Prieur la somme de 7.283,38 euros correspondant aux créances Pôle Emploi, M.S.A. et redevance eau,
-condamner la société Pépinières Prieur à rembourser à la société Pépinières Du Val D’Yerres le solde de son compte courant d’associé, soit la somme de 33.796,02 euros,
-ordonner la compensation entre les sommes dues de part et d’autre entre la société Pépinières Du Val D’Yerres et la société Pépinières Prieur,
-rejeter toutes autres demandes plus amples ou contraires,
-condamner solidairement les sociétés SC M et M, AMA et Pépinières Prieur à payer à la société Pépinières Du Val D’Yerres la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles,
-condamner solidairement les sociétés SC M et M, AMA et Pépinières Prieur aux entiers dépens.
Motivation
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la clause de garantie du passif :
Exposé des moyens :
La SARL Pépinières Prieur, la société A.M.A. et la société SC M & M soutiennent que :
– la SARL Pépinières Du Val D’Yerres ne conteste pas les créances du Pôle Emploi de 7441,66 euros et de la Mutualité Sociale Agricole de 18 216,42 euros ;
– elles ont pu réunir les factures des sociétés Groupama et Coriolis qu’elles n’avaient pu produire en première instance démontrant l’antériorité de ces deux dettes par rapport à la cession des parts par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres ;
– la facture Nord Bassin Parisien Expertise concerne une prestation antérieure à la cession relevant de la garantie du passif due par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres et le fait que celle-ci ait négocié, au nom de la SARL Pépinières Prieur, l’obtention d’un avoir après la cession n’est pas opposable à la SARL Pépinières Prieur qui réclame le paiement de cette facture de 960 euros ;
– les factures et relevés de Groupama résultent de contrats souscrits avant la cession et la SARL Pépinières Du Val D’Yerres connaissait l’existence de ces impayés qui lui ont été notifiés par lettre recommandée avec accusé de réception reçu le 22 janvier 2020 et n’a jamais émis aucune contestation avant la présente procédure alors que l’acte de cession de parts stipule en son article 6.2 que tout silence gardé par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres pendant 20 jours vaudra acceptation de sa part ;
– aucune caducité ne peut leur être opposée et ce d’autant moins que les dettes étaient connues de la SARL Pépinières Du Val D’Yerres et qu’elle les a dissimulées à ses contractants;
– la facture Coriolis concerne huit lignes téléphoniques et a été notifiée à la SARL Pépinières Du Val D’Yerres le 3 février 2021, les mêmes moyens lui étant opposés ;
La SARL Pépinières Du Val D’Yerres soutient que :
– elle ne conteste pas devoir sa garantie pour les créances de Pôle Emploi et de la Mutualité Sociale Agricole à hauteur de 6 174,06 euros outre 361,05 euros ainsi que la redevance d’eau pour 748,27 euros ;
– elle conteste le surplus des demandes ;
– la société Nord Bassin Parisien Expertise a émis une facture de 960 euros mais qui a fait l’objet d’un avoir le 6 mars 2019 ce qui a été porté à la connaissance des appelantes le 25 juillet 2019 ;
– la prétendue créance alléguée par Groupama n’est pas démontrée et rien ne permet d’affirmer qu’elle correspondrait à une dette antérieure à la cession des parts ;
– l’article 6.2 de l’acte de cession prévoit à peine de caducité un délai de 10 jours entre le moment où les cessionnaires ont connaissance d’un passif antérieur et celui où ils doivent aviser le cédant ; en l’espèce, ils ont connu la prétendue créance de Groupama le 20 décembre 2019 visant une précédente réclamation du 6 décembre 2018 et n’ont avisé la SARL Pépinières Du Val D’Yerres que le 17 janvier 2021 ;
– la prétendue créance alléguée par Coriolis n’est pas démontrée et rien ne permet d’affirmer qu’elle correspondrait à une dette antérieure à la cession des parts ;
– le même moyen tirée de la caducité de la demande est soulevé.
Réponse de la cour
Les articles 1103 et 1104 du code civil prévoient que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi, à ceux qui les ont faits » et qu’ils « doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi ».
Par acte sous seing privé du 7 août 2018, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres a cédé sur les 439 parts sociales qu’elle détenait dans la société SARL Pépinières Prieur 430 parts à la SC M et M et SC AMA, à hauteur de 215 parts chacune.
L’acte prévoit en son article 6 une clause de garantie d’actif et de passif rédigée comme suit : «Il est expressément convenu entre les PARTIES que la cession objet des présentes donne lieu à l’établissement d’une garantie de la part du cédant, en considération de la situation comptable intermédiaire arrêtée au 31 mars 2018 annexée aux présentes et définie comme suit : garantie d’existence des actifs circulant, des passifs fiscaux, sociaux et commerciaux, nette de tous produits et incidence fiscale positive qu’ils génèreraient, dont l’origine serait antérieure à la signature de l’acte et qui n’aurait pas été comptabilisés, ni connus par les CESSIONNAIRES à cette date».
Selon ce même article, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres est tenue d’une garantie du passif portant sur « une réclamation, revendication, obligation ou évaluation à l’encontre de la société n’ayant pas fait l’objet d’une provision dans la situation comptable intermédiaire du 31 mars 2018. »
Il appartient à la SARL Pépinières Prieur, à la société A.M.A. et à la société SC M & M de justifier que les sommes qu’elles réclament à la SARL Pépinières Du Val D’Yerres au titre de sa garantie correspondent à des dettes de la SARL Pépinières Prieur nées antérieurement au 7 août 2018.
S’agissant des réclamations formées par le Pôle Emploi, les cessionnaires produisent un ensemble de contraintes émises au titre de contrats de sécurisation professionnelle conclus au cours du mois de juin 2017 par la SARL Pépinières Prieur ainsi qu’un décompte d’huissier de justice à hauteur de 7441,66 euros comprenant le principal, les intérêts et les frais de l’huissier poursuivant. Cette dette ayant son origine antérieurement au 7 août 2018, elle doit être assumée par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres au titre de sa garantie de passif.
S’agissant des réclamations formées par la Mutualité Sociale Agricole, les cessionnaires produisent un relevé de situation relative à des cotisations du 3ème trimestre 2017 réclamées à la SARL Pépinières Prieur à hauteur de 18 216,42 euros. Cette dette ayant son origine antérieurement au 7 août 2018, elle doit être assumée par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres au titre de sa garantie de passif.
S’agissant de la réclamation de Nord Bassin Parisien Expertise à hauteur de 960 euros, les cessionnaires produisent une facture relative à des prestations de comptabilité arrêtées au 30 juin 2018. Si la SARL Pépinières Du Val D’Yerres justifie que la SARL Nord Bassin Parisien Expertise a émis un avoir de 1600 euros (hors taxes) le 6 mars 2019 en faveur de la SARL Pépinières Prieur portant la mention « geste commercial, fin mission au 30/06/2018 », la SARL Pépinières Prieur déclare ne pas être concernée par cet avoir dès lors qu’elle a choisi de confier sa comptabilité à un autre cabinet. La SARL Pépinières Du Val D’Yerres n’explique pas comment elle a pu obtenir un avoir au nom de la SARL Pépinières Prieur. La dette de 960 euros ayant son origine antérieure au 7 août 2018 doit être assumée par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres au titre de sa garantie de passif.
S’agissant de la redevance d’eau de 748,27 euros, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres ne conteste pas devoir en assumer la charge.
S’agissant de la réclamation de la société Brie Poids Lourds à hauteur totale de 1168,39 euros, le premier juge a considéré que les deux factures émises par elle le 21 novembre 2018 pour des réparations sur véhicules dont la date d’exécution n’est pas précisée étaient insuffisantes pour justifier de l’antériorité des travaux à la cession. Ce motif étant pertinent et aucun argument n’étant avancé sur ce point par les cessionnaires, la somme de 1168,39 euros ne sera pas mise à la charge de la SARL Pépinières Du Val D’Yerres.
Sur la réclamation de la société Goupama Centre Manche :
L’article 6.2 du contrat de cession prévoit la procédure à respecter par les cessionnaires pour que la clause de garantie du passif produise ses effets à l’égard de la SARL Pépinière du Val d’Yerres. Il y est prévu entre autres dispositions que
« Les cessionnaires s’obligent à informer la SARL PEPINIERES DU VAL D’HYERRES par lettre recommandée avec accusé de réception ou lettre simple remise en main propre contre récépissé, de tout événement de nature à entraîner l’application de la présente garantie, dans un délai de 10 jours à compter de la date à laquelle les cessionnaires’en auront eu connaissance sous peine de caducité de la présente garantie »
« La SARL PEPINIERES DU VAL D’YERRES pourra demander aux CESSIONNAIRES (‘) tout document (‘) »
« La SARL PEPINIERES DU VAL D’YERRES devra faire la demande de documents ou manifester aux cessionnaires, par lettre recommandée avec accusé de réception, son intention de contester l’application de la garantie, ou le montant de la somme à garantir, dans le délai de 20 jours à compter de la réception de la lettre les informant (sic) de la mise en ‘uvre de la garantie. A défaut, ils (sic) seront réputés accepter le passif »
« Pour l’application du présent article, tout silence de la SARL PEPINIERES DU VAL D’YERRES à l’issue d’un délai de 20 jours sera réputé valoir acceptation de sa part »
S’agissant de la réclamation de Groupama Centre Manche à hauteur de 6 490,74 euros dont un principal de 6 075,14 euros, les cessionnaires produisent une mise en demeure adressée par une société Overland de recouvrement de créances du 20 décembre 2019 ainsi que diverses pièces émanant de Groupama dont il ressort que :
– la SARL Pépinières Prieur était assurée auprès de cet organisme au titre de divers contrats et pour l’année 2018, elle devait un total de 9 082,12 euros pour l’un des contrats et de 3 859,58 euros pour un autre contrat ;
– la somme de 9082,12 euros était payable par trimestres, 4416,40 euros le 1er janvier 2018 puis 1555,24 euros les 1er avril, juillet et octobre 2018 ;
– la somme de 3859,58 euros était payable par trimestres, 964,94 euros le 1er janvier 2018 puis 964,88 euros les 1er avril, juillet et octobre 2018 ;
La SARL Pépinières du Val D’Yerres a été avisée par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 janvier 2020 de l’intention des cessionnaires de mettre en jeu la garantie du passif pour la créance de la société Groupama d’un montant de 6 490 €. Cette lettre a été reçue le 22 janvier 2020 par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres qui n’a émis aucune contestation dans les vingt jours qui ont suivi. Dès lors, elle ne peut utilement se prévaloir de ce que le délai de 10 jours rappelé ci-dessus n’a pas été respecté par les cessionnaires.
La preuve de l’existence de la dette à l’égard de l’assureur à hauteur de 6 490,74 euros étant rapportée et cette dette ayant son origine antérieurement au 7 août 2018, elle doit être assumée par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres au titre de sa garantie de passif.
Sur la créance de la société Coriolis Telecom
S’agissant de la réclamation de Coriolis Telecom à hauteur de 2 236,90 euros dont un principal de 1 476,28 euros outre les intérêts, la clause pénale et l’indemnité forfaitaire, les cessionnaires produisent une mise en demeure adressée par une société CTDA de recouvrement de créances du 25 janvier 2021 (pièce n° 10) ainsi que diverses pièces émanant de Coriolis et de CTDA (pièces n° 15 et 16) desquelles il résulte que :
– la SARL Pépinières Prieur était bénéficiaire d’abonnements téléphoniques et qu’elle devait diverses factures des 30 juin 2018 et 31 janvier 2019;
– la mise en demeure du 25 janvier 2021 ne comporte aucun décompte des sommes réclamées.
La SARL Pépinières Du Val D’Yerres soulève également l’application de l’article 6.2 de l’acte de cession qui prévoit que les cessionnaires devaient l’informer dans les dix jours par lettre recommandée avec accusé de réception de l’existence de la réclamation et en faisant observer qu’un courrier émanant de CTDA (pièce n° 16) mentionne l’existence d’un précédent courrier du 8 octobre 2020 alors qu’elle n’a été avisée que par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er février 2021.
Outre que plus de dix jours ne se sont pas écoulés entre la mise en demeure de CTDA du 25 janvier 2021 et le courrier du 1er février 2021 avisant la SARL Pépinières Du Val D’Yerres, qui a été reçu le 3 de ce même mois, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres n’a émis aucune contestation dans les vingt jours qui ont suivi. Pour les même motifs que ceux développés précédemment le moyen tiré de la caducité de la garantie du passif est inopérant.
Le principe de la dette à l’égard de Coriolis étant incontestable, elle doit être assumée par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres au titre de sa garantie de passif pour les sommes dues antérieurement au 7 août 2018.
Les appelantes produisent leur pièce n° 15 constituée de diverses factures de la société Coriolis dont il résulte que certaines sont relatives à des abonnements postérieurs au 7 août 2018.
Les sommes correspondantes (153,96 euros, 128,30, et 83,21 euros pour trois factures du 31 janvier 2019 dont certaines visent des abonnements de février 2019) seront déduites de celle de 2236,90 euros soit un solde de 1871,43’ euros.
Il résulte de tout ce qui précède qu’au titre de sa garantie de passif, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres est tenue de prendre en charge 7441,66 + 18 216,42 + 960 + 748,27 + 6490,74 + 1871,43 = 35 728,52 euros.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a dit que la société Pépinières Du Val D’Yerres était tenu au passif de la société Pépinières Prieur à hauteur de 8 243,38 euros arrêtée au 31 janvier 2021 et condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres à payer à la société SC M et M, la société AMA et la société Pépinières Prieur la somme totale de 8 243,38 euros au titre de sa garantie au passif.
La SARL Pépinières Du Val D’Yerres sera condamnée à payer à la société A.M.A. et à la société SC M & M la somme totale de 35 728,52 euros.
Sur la demande de remboursement du compte courant d’associé formée par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres :
La SARL Pépinières Prieur la société A.M.A. et la société SC M & M soutiennent que
– cette demande est irrecevable comme étant nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile et elle est contraire à l’article 21 des statuts de la SARL Pépinières Prieur prévoyant une concertation préalable ;
– la SARL Pépinières Du Val D’Yerres a expressément lié les sommes qu’elle pourrait devoir au titre de la clause de garantie du passif et celles se trouvant sur son compte courant d’associé et a accepté une cession de créance portant sur ce compte courant ;
– il s’agit d’une cession de créance et non d’une compensation ;
– elles affirment que des assemblées générales ont été convoquées mais que la SARL Pépinières Du Val D’Yerres ne s’y est pas rendue et n’a pas retiré sa lettre de convocation ;
La SARL Pépinières Du Val D’Yerres soutient que :
– il s’agit d’une demande reconventionnelle recevable par application de l’article 567 du code de procédure civile ;
– dès lors qu’elle sollicite la compensation, sa demande est recevable par application de l’article 564 du code de procédure civile ;
– aucun accord n’étant intervenu entre la gérance et la SARL Pépinières Du Val D’Yerres, elle se trouve contrainte d’agir en justice pour obtenir son dû.
– elle conteste l’existence d’une quelconque cession de créance portant sur son compte courant d’associé.
Réponse de la cour :
Aux termes de l’article 564 du code de procédure civile : « A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. »
Il résulte des dispositions de l’article 567 du même code que les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.
Il existe un lien suffisant et manifeste entre la demande formée contre un ancien associé à qui est réclamée une garantie de passif et celle qu’il forme tendant à obtenir le remboursement de son compte courant d’associé.
Par ailleurs, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres sollicitant la compensation entre les sommes qu’il devrait aux cessionnaires et celles qui lui sont dues au titre de son compte courant d’associé, la demande est également recevable au titre de 564 du code de procédure civile
Si l’article 21 des statuts de la SARL Pépinières Prieur stipule que « les conditions de remboursement de ces sommes [mises à disposition de la société par un associé] ainsi que leur rémunération, sont déterminées par accord entre la gérance et l’associé intéressé », ce texte n’a prévu aucune procédure particulière devant être suivie par l’associé réclamant le paiement du solde de son compte courant. Faute d’une telle procédure, le texte ci-dessus ne saurait être analysé comme instituant une procédure de conciliation préalable interdisant le recours direct devant les tribunaux.
Les fins de non-recevoir soulevées par les cessionnaires seront rejetées.
Il résulte de l’extrait comptable au nom de la SARL Pépinières Prieur versé aux débats par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres que celle-ci bénéficie d’un compte courant d’associé présentant un solde en sa faveur de 33 796,02 euros.
Ce compte courant est remboursable à l’associé concerné à tout moment.
Aux termes de l’article 1322 du code civil, la cession de créance doit être constatée par écrit, à peine de nullité.
Dans une lettre du 25 juillet 2019 adressée au conseil des cessionnaires, la SARL Pépinières Du Val D’Yerres a indiqué : « Il faut savoir que nous n’avons été informés de la dette à POLE EMPLOI et de la dette à MSA qu’en mars 2019. Aucun document ne nous a été adressé avant cette date. En effet dès le mois d’août 2018 (date de la cession des parts sociales) nous ne recevions plus le courrier de la société PRIEUR, ce qui est normal.
Ce qui est anormal c’est que les repreneurs n’ont pas assuré la réception du courrier et ne nous ont jamais transmis ces documents lors de leur réception. Il nous était donc impossible d’intégrer ces éléments dans les comptes annuels et encore moins dans la situation établie au 31 mars 2018 réalisée le 5 avril 2018.
D’ailleurs, le compte rendu de mission accompagnant la situation au 31 mars 2018 précise bien que « s’agissant d’une situation comptable intermédiaire, celle-ci ne prétend pas à la rigueur d’un bilan de fin d’exercice et ne saurait, comme telle, engager la responsabilité de l’entreprise ou de ses conseils »
Si le fait générateur des sommes réclamées est réellement antérieur à la cession, en effet, ils pourraient devoir être pris en compte au titre de la garantie de passif visée. Cependant, dès à présent, il convient de ne pas oublier que la société PRIEUR a encore une dette de compte courant envers nous en raison des sommes que nous avons avancées à cette dernière après le 1er juillet 2018 pour un montant de 19.484,02 € selon état joint.
En outre, il est à noter que la société PRIEUR a bénéficié au titre de l’exercice 2017/2018 d’un abandon de créances supplémentaire d’un montant de 77.747,02 € par notre société (cf compte courant 45542000) en date du 30 juin 2018 ». La SARL Pépinières Du Val D’Yerres n’a nullement offert dans cette lettre de céder sa créance portant sur le compte courant. Dès lors, il ne peut être utilement soutenu que cette lettre constitue l’écrit visé par l’article 1322 du code civil.
La demande de compensation est également vouée à l’échec dès lors que les demandes pécuniaires sont formées par les seules sociétés A.M.A. et SC M & M alors que la débitrice du compte courant d’associé est la SARL Pépinières Prieur qui ne réclame aucune somme à la SARL Pépinières Du Val D’Yerres.
La SARL Pépinières Prieur sera condamnée à payer à la SARL Pépinières Du Val D’Yerres la somme de 33 796,02 euros au titre de son compte courant d’associé.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire ;
Déclare recevable la demande de remboursement de compte courant d’associé présentée en cause d’appel par la SARL Pépinières Du Val D’Yerres ;
Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Rouen du 22 juin 2021 en ce qu’il a dit que la société Pépinières Du Val D’Yerres était tenu au passif de la société Pépinières Prieur à hauteur de 8243,38 euros arrêtée au 31 janvier 2021 et qu’il a condamné la société Pépinières Du Val D’Yerres à payer à la société SC M et M, la société AMA et la société Pépinières Prieur la somme totale de 8243,38 euros au titre de sa garantie au passif ;
Statuant à nouveau :
Condamne la SARL Pépinières Du Val D’Yerres à payer à la société A.M.A. et à la société SC M & M la somme totale de 35 728,52 euros ;
Confirme pour le surplus le jugement entrepris ;
Y ajoutant :
Déclare recevable la demande de la société Pépinières du Val D’Yerres en remboursement de son compte courant d’associé ;
Rejette la demande de compensation entre le solde du compte courant d’associé et la somme de 35 728,52 euros ;
Condamne la SARL Pépinières Prieur à payer à la SARL Pépinières Du Val D’Yerres la somme de 33 796,02 euros au titre de son compte courant d’associé ;
Condamne la SARL Pépinières Du Val D’Yerres aux dépens de la procédure d’appel ;
Condamne la SARL Pépinières Du Val D’Yerres à payer à la société A.M.A. et à la société SC M & M la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente