Comptes courants d’associés : 17 janvier 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/02370

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Comptes courants d’associés : 17 janvier 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/02370

17 janvier 2023
Cour d’appel de Poitiers
RG
21/02370

2ème Chambre

ARRET N°23

FV/KP

N° RG 21/02370 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GKYU

S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU -CHARENTES

C/

[B]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 17 JANVIER 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/02370 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GKYU

Décision déférée à la Cour : jugement du 05 juillet 2021 rendu(e) par le Tribunal Judiciaire de NIORT.

APPELANTE :

S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU -CHARENTES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 4]

Ayant pour avocat plaidant Me Anne DE CAMBOURG de la SCP DUFLOS-CAMBOURG, avocat au barreau de POITIERS.

INTIME :

Monsieur [R] [B]

né le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Ayant pour avocat plaidant Benoit PALLARD de la SCP PAQUEREAU-PALLARD-MICHONNEAU CORNUAUD, avocat au barreau de DEUX-SEVRES.

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/8014 du 22/11/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de POITIERS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 08 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 19 septembre 2015, La CAISSE D’EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU (la Caisse d’Epargne) a consenti à l’EURL [G] [O] un prêt de 95.000€ remboursable en 84 mensualités au taux nominal de 2,500 % (TAEG 3,35 %) et recueilli, à titre de sûreté, les cautions solidaires de Madame [O] [G] et celle Monsieur [R] [B] dans la limite de 123.500 €.

Par jugement en date du 26 novembre 2019, le tribunal de commerce de Niort a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de L’EURL [G] [O].

La Caisse d’Epargne a déclaré sa créance le 20 décembre 2019 à hauteur de 41.610,18 €.

Par acte d’huissier daté du 05 octobre 2020, la Caisse d’Epargne a assigné M. [B] devant le tribunal de commerce de Niort en paiement des sommes suivantes :

– 42.229,14 €, selon décompte arrêté au 05 juin 2020 outre intérêts à 5.5% à compter du 6 juin 2020 ;

– 2.084,84 € à titre d’indemnité pour préjudice technique et financier, avec capitalisation des intérêts ;

– 1.500 € au titre des frais irrépétibles.

Par jugement daté du 05 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Niort a statué ainsi :

-Déclare irrecevable l’ensemble des demandes de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine-Poitou Charentes ;

-Laisse les dépens et frais irrépétibles à la charge de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine-Poitou Charentes.

Par déclaration en date du 26 juillet 2021, la Caisse d’Epargne a fait appel de cette décision en visant ses chefs expressément critiqués.

Suivant ordonnance datée du 21 février 2022, le conseiller de la mise en état de la deuxième chambre civile de Poitiers, a rejeté l’exception d’incompétence territoriale soulevée par M. [B], considérant que le prêteur l’avait assigné devant le tribunal judiciaire dans le ressort duquel il avait son dernier domicile connu.

Moyens

Dans ses dernières conclusions RPVA du 21 juillet 2022, la Caisse d’Epargne sollicite de la cour de :

Vu l’article 1134 (ancien) du Code civil,

Vu les articles 2288 du Code civil,

– Dire et juger recevable l’appel de la CAISSE D’EPARGNE à l’encontre du jugement rendu le 05 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Niort,

– Infirmer le jugement rendu le 5 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Niort,

Et statuant à nouveau :

– Déclarer recevables les demandes de la CAISSE D’EPARGNE,

– Condamner M. [B] à payer à la CAISSE D’EPARGNE :

-La somme de 42.229,14 €, somme arrêtée au 05 juin 2020, outre intérêts de retard majorés de 3 points, soit 5,5 %, à compter du 06 juin 2020 et jusqu’à complet paiement,

-La somme de 2.084,84 € au titre de l’indemnité pour préjudice technique et financier,

– Prononcer la capitalisation des intérêts,

– Déclarer irrecevable la demande de M. [B] au titre de la disproportion et la rejeter,

-Déclarer irrecevable la demande de M. [B] au titre du défaut de d’information de la caution et la rejeter,

– En tout état de cause, débouter M. [B] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

– Condamner M. [B] à payer à la CAISSE D’EPARGNE la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-Condamner M. [B] aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions RPVA du 03 juin 2022, M. [B] sollicite de la cour de :

A titre principal :

Vu les dispositions de l’article L.341-4 du code de la consommation devenu l’article L.332-1,

Vu les dispositions de l’article L.343-4 du Code de la consommation,

– Dire le cautionnement en date du 19 septembre 2015 innoposable à M. [B],

– Condamner la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU- CHARENTES à verser à Monsieur [B] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

-Condamner la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU-CHARENTES aux entiers dépens.

A titre subsidiaire :

Vu l’article L.341-6 du code de la consommation devenu l’article L332,

Vu l’article L.313-22 du code monétaire et financier,

Vu l’article L.313-9 du code de la consommation

– Dire la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU-CHARENTES déchue de tout droit et intérêts conventionnels ou de retard et de toute pénalité intervenue depuis la dernière information de la caution ou de la première défaillance de la société et rétablir l’imputation des paiements sur le principal,

A titre infiniment subsidiaire,

Vu les dispositions de l’article 1343-5 du code civil,

– Voir reporter à deux années le paiement des sommes dues,

– Débouter la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU CHARENTES de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– Condamner la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU CHARENTES aux entiers.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

L’instruction de l’affaire a été clôturée suivant ordonnance datée du 11 octobre 2022. L’affaire a été évoquée à l’audience du 08 novembre 2022 et mise en délibéré à ce jour.

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes de la Caisse d’Epargne à l’égard de la caution

1. Aux termes de l’article 122 du Code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

2. L’article L. 643-1 du Code de commerce dans sa version applicable à l’espèce dispose en son premier alinéa que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues. Toutefois, lorsque le tribunal autorise la poursuite de l’activité au motif que la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable, les créances non échues sont exigibles à la date du jugement statuant sur la cession ou, à défaut, à la date à laquelle le maintien de l’activité prend fin.

3. La Caisse d’Epargne fait valoir que l’EURL [G] [O] a cessé les règlements des échéances et une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à son encontre de sorte que les sommes qu’elle devait sont devenues exigibles et rappelle que le contrat de cautionnement prévoyait qu’en cas de liquidation judiciaire de ‘l’Emprunteur’, la déchéance du terme interviendrait à l’égard de la caution du fait même de l’arrivée de cet événement.

Par ailleurs, indique l’appelante, une lettre recommandée avec accusé de réception a été envoyée à M. [B] pour prononcer la déchéance du terme à son égard.

4. M. [B] ne conclut pas sur ce point.

5. Il ressort de l’acte de caution signé par M. [B] versé aux débats (pièce n°3 de l’appelante), en sa page 3, que la caution reconnaît et accepte que la déchéance du terme affectant le débiteur s’applique de plein droit à son égard. Il est en outre reconnu par la caution qu’en cas de liquidation judiciaire de l’emprunteur, sauf poursuite de l’activité telle que prévue à l’article L.643-1 du Code de commerce, ainsi qu’en cas de jugement prononçant la cession son encontre, la déchéance du terme interviendra à son égard du fait même de l’arrivée de cet événement.

6. Aux regard de ce qui précède, la banque est fondée à se prévaloir de l’exigibilité des sommes qu’elle réclame à M. [B], la déchéance du terme ayant été prononcé par application des dispositions précitées et par le jeu de la mise en demeure qui lui a été adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception datée du 18 décembre 2019.

7. La décision sera réformée de ce chef, la demande en paiement présentée à l’égard de M. [B], en sa qualité de caution, étant recevable.

Sur la disproportion de l’engagement de la caution

Sur la recevabilité de cet argument au regard de l’article 910-4 du Code de procédure civile

8. En application de l’article 910-4 du code de procédure civile, dans sa version issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910 l’ensemble de leurs prétentions sur le fond ; l’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

L’alinéa 2 dispose que, néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 783, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

9. La Caisse d’Epargne fait valoir que M. [B] n’a présenté cette prétention au titre de la disproportion que dans son 3ème jeu de conclusions et qu’en vertu du texte précité, sa demande doit être jugée irrecevable

10. La cour rappelle que le moyen par lequel la caution fait valoir le caractère disproportionné de son engagement pour s’opposer au paiement du créancier au visa de l’article L. 341-4 du Code de la consommation constitue une défense au fond, et non pas une prétention, de sorte qu’il peut être invoqué par l’intimé à tout moment en vertu de l’article 563 du Code de procédure civile et n’est pas soumis au principe de concentration des prétentions de l’article 910-4 précité.

11. La fin de non-recevoir présentée par la Caisse d’Epargne sera donc rejetée.

Sur le fond

12. L’article L.341-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, devenu articles L.332-1 et L.343-4 du même code, dispose qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Au sens de ces dispositions, la disproportion s’apprécie, lors de la conclusion du contrat de cautionnement, au regard du montant de l’engagement ainsi souscrit et des biens et revenus de la caution, en prenant en considération son endettement global dont le créancier avait ou pouvait avoir connaissance, y compris l’endettement résultant d’autres engagements de caution.

13. En application des précisions apportées par la jurisprudence quant aux conditions de mise en oeuvre de l’article susvisé, il appartient à la caution de démontrer la disproportion alléguée au jour de la conclusion de son engagement.

Cependant, il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, soit au jour où la caution est assignée, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.

14. La disproportion du cautionnement aux biens et revenus de la caution suppose que cette dernière se trouve, lorsqu’elle s’engage, dans l’impossibilité manifeste de faire face à son obligation avec ses biens et revenus, la jurisprudence considère qu’il y a disproportion manifeste dès lors que l’engagement de la caution, même modeste, est de nature à la priver du minimum vital nécessaire à ses besoins et à ceux des personnes qui sont à sa charge.

15. La disproportion doit s’apprécier en fonction de tous les éléments du patrimoine de la caution, actifs comme passifs, tant en ce qui concerne les biens propres que les biens communs, en prenant en considération l’endettement global de la caution y compris celui résultant d’engagements de caution, et l’actif constitué par les parts sociales et la créance inscrite en compte courant d’associé dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée.

– Sur la proportionnalité de l’engagement à la date de la souscription

16. Sur ce point, M. [B] fait valoir que, par jugement du tribunal de commerce de Niort en date du 25 janvier 2022, le cautionnement souscrit par Mme [G] pour les besoins de ce crédit a été déclaré inopposable à cette dernière, dans la mesure où cet ‘engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus’ et que la Caisse d’Epargne n’en a pas interjeté appel.

Pour le surplus, il entend se prévaloir des informations reportées sur le ‘questionnaire confidentiel caution patrimoniale’ complété le 29 juillet 2015 par les deux cautions solidaires, Mme [G] et lui-même qui ne pouvait qu’inciter la banque à ne pas accepter la demande de prêt et à leur faire signer un acte de caution à hauteur de 123.000 €.

17. La Caisse d’Epargne objecte que M. [B] se contente de reprendre les éléments évoqués dans le jugement du 25 janvier 2022 et se garde bien de justifier de ses revenus et biens à l’époque de son engagement.

Selon le prêteur, le fait pour les cautions d’être inscrits à Pôle Emploi ne signifie pas qu’ils ne percevaient aucun revenu. D’ailleurs, indique la Caisse d’Epargne, le jugement auquel se réfère M. [B] retient un niveau de rémunération mensuelle pour Mme [G] de 1.017,50 €

18. La Caisse d’Epargne explique qu’en réalité, M. [B] a bénéficié d’une rupture conventionnelle le 1er septembre 2015, après avoir exercé l’emploi de monteur animateur en métallurgie pendant 19 ans, ce qui lui a valu une indemnité de licenciement de 12.652,16 € ainsi qu’en témoigne le dossier remis à la banque.

Le prêteur rappelle que les échéances mensuelles des autres prêts, pour un total de 878,16 €, étaient partagées avec Mme [G] et que chacun supportait ainsi la somme de 439,08 €.

19. Selon la Caisse d’Epargne, M. [B] a signé et certifié l’ensemble des informations rapportée au questionnaire confidentiel caution et en l’absence d’anomalies apparentes, elle était en droit de se fier aux informations fournies par ce dernier sans en vérifier l’exactitude.

20. La cour observe que c’est le prêteur qui fournit et s’appuie sur un ‘questionnaire confidentiel caution (personne physique)’ à ‘compléter de la main de la caution’ en application des ‘articles L. 341-1 et suivants du Code de la consommation’ (pièce n°8) pour démontrer l’absence de disproportion au moment de l’engagement de M. [B] en qualité de caution.

21. La cour se réfère ainsi expressément à ce questionnaire dont il ressort que M. [B], qui a un enfant avec Mme [G] avec qui il est lié par un pacte civile de solidarité, dispose :

– d’un patrimoine immobilier estimé par les cautions à 171.000 € détenu pour moitié chacun ;

– d’un compte épargne de 6.800 € ;

– mais doit faire face à un endettement (du ménage) à hauteur de 168.608 € (capital restant dû) pour les besoins de trois prêts souscrits auprès du Crédit Foncier, emportant paiement de mensualités de 878,16 € par le couple ;

– d’aucun revenu, la rubrique ‘les revenus du ménage’ située en page 3 de cette fiche n’en mentionnant aucun, les seules indications étant que Mme [G] est au chômage et que M. [B] doit l’être à partir du 1er septembre 2015.

22. La cour rappelle à la suite qu’elle ne peut se fonder sur les autres éléments fournis par la Caisse d’Epargne dès lors que celle-ci indique que le ‘questionnaire confidentiel caution’ dont elle se prévaut ne comporte aucune anomalie apparente et que sa pièce n°9, pour partie composée de la fiche de renseignement établie sur trois pages et d’une synthèse décisionnelle, établie sur quatre pages, est un élément interne d’aide à la prise de décision du prêteur puisque non signé par l’emprunteur principal ou les cautions.

23 Ainsi, au regard du ‘questionnaire confidentiel caution’ auquel la Caisse d’Epargne entend ‘se fier’, la situation patrimoniale de M. [B] lors de la souscription du cautionnement peut être évaluée comme suit :

– revenus annuels de 0,00 € et charges annuelles d’emprunts de 5.268,96 €, (878,16/2×12 mois) soit un déficit net de 5.268,96 € ;

– actif patrimonial de 171.000 € et prêts en cours pour 168.608 €, soit un patrimoine net de prêts de 2.392 € dont la moitié lui revenait ;

– engagement de caution non déclaré mais porté à la somme de 123.500 € pour les besoins du prêt de 95.000 € ;

24. Il ressort de ce qui précède qu’à la date de l’engagement, ni le patrimoine net, ni les ressources nettes, ne permettaient à M. [B] de faire face à l’ensemble des engagements sans le priver du minimum vital nécessaire à ses besoins et à ceux des personnes qui sont à sa charge.

25. Il appartient ainsi désormais à la Caisse d’Epargne, qui entend se prévaloir de cet engagement, de démontrer qu’à la date de l’assignation du 05 octobre 2020, le patrimoine de la caution, net des dettes existantes et y compris postérieures au cautionnement, permettait de faire face à cette obligation.

– Sur la capacité de la caution à faire face à son engagement à la date où elle a été appelée

26. La Caisse d’Epargne fait valoir que M. [B] n’apporte aucun justificatif sur sa situation financière et patrimoniale en 2020, puisque ses pièces concernent l’année 2022.

Selon elle, c’est volontairement que l’appelant n’indique pas ce qui est advenu du bien immobilier figurant sur la fiche patrimoniale et dont la valeur a probablement augmenté et rappelle que, quand bien même les partenaires divorceraient et vendraient le bien qui leur appartenait en indivision, M. [B] doit recevoir une part d’environ 85.500,00 €.

27. La Caisse d’Epargne explique que M. [B] n’est redevable que des sommes de 42.229,14€ en principal, outre les intérêts conventionnels et de 2.084,84 €, au titre de l’indemnité pour préjudice technique et financier, soit un total de 44.313,98 €.

28. L’intimé ne conclut pas sur ce point.

29. La cour observe que la Caisse d’Epargne tente de renverser la charge de la preuve en faisant observer que M. [B] n’apporte pas de justificatifs contemporains de la date de l’assignation. En effet, la charge de la preuve qui pèse sur la banque lui impose de démontrer ses allégations quant à l’existence de ressources et d’un patrimoine financier dont serait titulaire la caution susceptible de lui permettre de payer les sommes réclamées en exécution de son engagement de caution, ce qu’elle ne réalise pas en l’espèce.

30. Par ailleurs, il résulte des motifs d’un jugement du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Niort en date du 30 août 2021 prononçant le divorce de Mme [G] et de M. [B] que ceux-ci ne sont propriétaires d’aucun bien immeuble commun de sorte que sans autre élément de preuve produit au débat par la Caisse d’Epargne, à la date de l’assignation, M. [B] n’était propriétaire d’aucun actif net lui permettant de régler la somme de 44.313,98€ qu’elle lui réclame en qualité de caution.

31. La demande formée par la Caisse d’Epargne à ce titre sera rejetée sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner le grief qui lui est adressé tenant au défaut d’information délivrée à la caution en application de l’article L. 341-6 du Code de la consommation ou la demande de délai de paiement.

Sur les frais de procès

32. Il apparaît équitable de condamner la Caisse d’Epargne à payer à M. [B] une somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande formée au même titre par l’appelante.

33. La Caisse d’Epargne supportera les dépens générés par la procédure d’appel.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme dans toutes se dispositions contestées le jugement du tribunal judiciaire de Niort daté du 05 juillet 2021,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare recevable la CAISSE D’EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU en son action en paiement contre Monsieur [R] [B], en sa qualité de caution de l’EURL [G] [O],

Dit que l’engagement de caution de Monsieur [R] [B] par acte d’engagement de caution solidaire en date du 19 septembre 2015 est disproportionné,

Dit que la CAISSE D’EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU ne peut se prévaloir du cautionnement souscrit par Monsieur [R] [B],

Dit n’y avoir lieu à examiner les autres demandes,

Condamne la CAISSE D’EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU à payer à Monsieur [R] [B] une indemnité de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne la CAISSE D’EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 

 


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