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COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
N° RG 23/00240 – N° Portalis DBVK-V-B7H-P2JF
O R D O N N A N C E N° 2023 – 241
du 15 Mai 2023
SUR SECONDE PROLONGATION DE RETENTION D’UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L’ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
dans l’affaire entre,
D’UNE PART :
Monsieur X se disant [O] [V]
né le 02 Janvier 1953 à [Localité 1]
de nationalité Sénégalaise
retenu au centre de rétention de [Localité 3] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire,
Comparant et assisté de Maître Laura FERRIER, avocat commis d’office,
Appelant,
D’AUTRE PART :
1°) Monsieur PREFET DE L’HERAULT
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par M. [H] [D], dûment habilité,
2°) MINISTERE PUBLIC :
Non représenté
Nous, Jonathan ROBERTSON conseiller à la cour d’appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Sophie SPINELLA, greffière,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l’arrêté du 11 avril 2023 de Monsieur PREFET DE L’HERAULT portant obligation de quitter le territoire national sans délai pris assortie d’une interdiction de retour d’une durée de un an à l’encontre de Monsieur X se disant [O] [V],
Vu la décision de placement en rétention administrative du 11 avril 2023 de Monsieur X se disant [O] [V], pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire,
Vu l’ordonnance du 10 mai 2023 notifiée le même jour, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpîgnan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours,
Vu la saisine de Monsieur PREFET DE L’HERAULT en date du pour obtenir une seconde prolongation de la rétention de cet étranger,
Vu l’ordonnance du 11 mai 2023 à 15h34 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpîgnan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de trente jours,
Vu la déclaration d’appel faite le 12 Mai 2023 par Monsieur X se disant [O] [V] , du centre de rétention administrative de [Localité 3], transmise au greffe de la cour d’appel de Montpellier le même jour à 12h30,
Vu les télécopies et courriels adressés le 12 Mai 2023 à Monsieur PREFET DE L’HERAULT, à l’intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l’audience sera tenue le 15 Mai 2023 à 10 H 30,
Vu l’appel téléphonique du 12 Mai 2023 à la coordination pénale afin de désignation d’un avocat commis d’office pour l’audience de 15 Mai 2023 à 10 H 30 .
L’avocat et l’appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de l’accueil de la cour d’appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l’entretien, en la seule présence de l’interprète , et ce, sur le temps de l’audience fixée, avec l’accord du délégué du premier président de la cour d’appel de Montpellier.
L’audience publique initialement fixée à 10 H 30 a commencé à 11h02.
PRETENTIONS DES PARTIES
Monsieur X se disant [O] [V] confirme son identité telle que mentionnée dans l’ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l’audience : ‘ Je suis né le 02 Janvier 1953 à [Localité 1]. Je suis sénégalais, mais de nationalité française car je suis né sous la colonisation. J’ai 70 ans, je suis venu en France en 1978. J’ai fait une carrière juridique et judiciaire. J’ai un deug en AES. J’ai eu un enfant. Je suis artiste dans l’art, je me suis reconverti. Ma femme est décédée il y a moins d’un an. J’habite chez elle. Nous sommes ensemble depuis 28 ans, elle n’a pas d’enfant. Nous ne sommes pas mariés. Je suis président d’une association ici à [Localité 2]. J’ai travaillé bénévolement aux restaus du coeur. Je suis conscient que je n’ai pas le droit de rester. J’ai eu une carte de résident pendant 10 ans quand je suis arrivé en France, elle se renouvelait. Mais je suis devenu SDF presque quand je me suis séparé de ma femme. A [Localité 2], j’ai rencontré des gens qui m’ont aidé à rétablir ma situation. Entre temps, j’ai eu mes papiers, on m’a donné une carte de séjour de un an, puis encore une fois. J’ai été une fois au Sénégal depuis 1978.’
L’avocat, Me [N] [E] développe les moyens de l’appel formé contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l’étranger. Maitre [E] abandonne le moyen tenant à l’absence de fiche actualisée mais soulève un nouveau moyen tendant à l’état de santé de Monsieur [O] qui serait incompatible avec un maintien prolongé en rétention.
Monsieur le représentant, de Monsieur PREFET DE L’HERAULT, demande la confirmation de l’ordonnance déférée et indique à l’audience : ‘ Le nouveau moyen soulevé est irrecevable car il est déposé au delà des 24 heures. Monsieur a accès à un médecin au centre de rétention. L’assignation à résidence est exclue en l’absence de passeport.’
Monsieur X se disant [O] [V] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l’audience : ‘ J’ai un document de mon psychiatre, je devais aller dans un centre psychiatrique à [Localité 5] mais le médecin qui devait m’y emmener est décédé. Mais ma place n’est pas là bas. ‘
Le conseiller indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.
SUR QUOI
Sur la recevabilité de l’appel :
Le 12 Mai 2023, à 12h30, Monsieur X se disant [O] [V] a formalisé appel motivé de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 3] du 11 Mai 2023 notifiée à 15h34, soit dans les 24 heures de la notification de l’ordonnance querellée, qu’ainsi l’appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.
Sur l’appel :
Dans la déclaration d’appel, Monsieur [O] conteste la régularité de la procédure, estimant que la requête du préfet est irrecevable pour défaut de pièces utiles et qu’il n’y pas de copie actualisée du registre du CRA.
A l’audience Monsieur [O] abandonne le moyen tiré du défaut de copie actualisée du registre du CRA, maintenant le premier moyen tout en soulevant un nouveau moyen lié à l’absence de prise en compte par le préfet de son état de vulnérabilité.
Ces moyens ne pourront qu’être rejetés dans la mesure où, d’une part, Monsieur [O] ne mentionne pas dans sa déclaration d’appel quelles pièces utiles feraient défaut dans la présente procédure, et, d’autre part, le moyen tiré de son état de vulnérabilité constitue un moyen nouveau comme ayant été soulevé au-delà du délai de 24 heures suivant la notification de l’ordonnance querellée, donc irrecevable.
SUR LE FOND
Selon l’article L742-4 du CESEDA’: «’Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d’urgence absolue ou de menace d’une particulière gravité pour l’ordre public ;
2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;
b) de l’absence de moyens de transport.
L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours.’»
En application des dispositions de l’article L612-2 du CESEDA: ‘Par dérogation à l’article L. 612-1, l’autorité administrative peut refuser d’accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :
1° Le comportement de l’étranger constitue une menace pour l’ordre public ;
2° L’étranger s’est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;
3° Il existe un risque que l’étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l’objet.’
Et selon l’article L 612-3 du ceseda: ‘Le risque mentionné au 3° de l’article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
2° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
3° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois après l’expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;
6° L’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un des États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ;
7° L’étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ou a fait usage d’un tel titre ou document ;
8° L’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité, qu’il a refusé de communiquer les renseignements permettant d’établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu’il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l’article L. 142-1, qu’il ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu’il s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.’
En l’espèce, l’intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure et ne peut en toute hypothèse pas bénéficier d’une mesure d’assignation à résidence en l’absence de passeport.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l’ordonnance déférée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Vu l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,
Déclarons l’appel recevable,
Déclarons irrecevable le moyen tenant à l’état de vulnérabilité de Monsieur [O],
Rejetons le moyen de nullité et la demande d’assignation à résidence,
Confirmons la décision déférée,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l’article R 743-19 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile,
Fait à Montpellier, au palais de justice, le 15 Mai 2023 à 11h31.
Le greffier, Le magistrat délégué,