Clause pénale : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/13236

·

·

Clause pénale : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/13236

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2023

N° 2023/ 98

Rôle N° RG 19/13236 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEYLS

Société PHARMACIE [T] COLOMBO-[T]

C/

SAS LOCAM

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sandra JUSTON

Me Alain KOUYOUMDJIAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d’Aix en Provence en date du 11 Mars 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 2018003066.

APPELANTE

SNC PHARMACIE [T] COLOMBO-[T] prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est [Adresse 2]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Johann LEVY, avocat au barreau de MARSEILLE substituant Me Thomas BELLUCCI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS LOCAM, prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège est sis [Adresse 1]

représentée et assistée de Me Alain KOUYOUMDJIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PRÉTENTIONS DES PARTIES ET PROCÉDURE :

Le 5 décembre 2012, la SNC Pharmacie [T] Colombo-[T] (Pharmacie [T]) a souscrit un contrat de location financière pour une durée de 21 trimestres et moyennant le paiement de loyers trimestriels de 1 435,20euros auprès de la SA Locam concernant un photocopieur TA DCC 6626H dont la société Copy Management est le fournisseur.

Le 5 décembre 2012, le matériel lui a été livré ainsi qu’en atteste le bon de livraison signé par elle.

Par courrier recommandé réceptionné le 2 décembre 2017,la SA Locam l’a mise en demeure de régler les échéances d u 30 mars au 30 septembre 2017.

Par ordonnance du 15 janvier 2018, le Président du tribunal de commerce d’Aix en Provence a fait injonction à la SNC Pharmacie [T] d’avoir à payer la somme de 7 282,80euros et 728,28euros à la SAS Locam.

Le 26 février 2018, la SNC Pharmacie [T] a formé opposition à cette ordonnance.

Par jugement du 11 mars 2019, le tribunal de commerce d’Aix en Provence a condamné la SNC Pharmacie [T] à payer à la SA Locam la somme de 7 282,20euros et 728,28euros et la somme de 500euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Le 12 août 2019, la SNC Pharmacie [T] Colombo-[T] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses conclusions déposées et notifiées le 8 février 2023, elle demande à la cour de :

Réformer le jugement rendu le 11mars 2019 par le tribunal de commerce de Marseille,

A titre principal :

Constater que la société Locam ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une créance et de son montant,

Constater que les conditions générales de ventes de la société Locam n’ont été ni connues ni acceptées par la SNC Pharmacie [T] Colombo-[T],

Juger que la société Locam ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un contrat principal qui aurait été convenu entre la société INPS et la SNC Pharmacie [T] Colombo [T] dont le contrat de location financière dépend en application du principe de l’interdépendance des contrats,

Juger que la société Locam ne rapporte pas la preuve de l’existence de l’obligation dont elle réclame l’exécution,

Juger que les conditions générales de ventes de la société Locam sont inopposables à la société Pharmacie [T],

Débouter la SAS Locam de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire :

Requalifier l’indemnité sollicitée par la société Locam en clause pénale,

Juger que le principe de non-cumul de la clause pénale avec l’exécution forcée de l’obligation principale ne permet pas à la société Locam de solliciter de la société Pharmacie [T] le paiement d’une facture antérieure à la date de la résiliation et le paiement de la clause pénale,

Débouter la SAS Locam de ses demandes,

A titre plus subsidiairement :

Juger que la clause pénale est manifestement excessive,

Modérer la clause pénale à 100euros,

Débouter la SA Locam de ses demandes, fins et conclusions,

A titre encore plus subsidiairement :

Juger que la situation de la société Pharmacie [T] et les besoins du créancier permettent d’échelonner dans la limite de 2 ans le paiement des sommes dues,

Accorder à la SNC Pharmacie [T] un échelonnement de sa dette en 24 échéances mensuelles d’un montant égal, la première intervenant dans le mois qui suivra la signification du présent jugement,

Débouter la SA Locam de ses demandes, fins et conclusions

En tout état de cause :

Condamner la SA Locam à lui verser la somme de 2 000euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne la SA Locam aux entiers dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 10 février 2020, la SA Locam demande à la cour de :

Confirmer le jugement rendu le 11 mars 2019 par le tribunal de commerce d’Aix en Provence,

Condamner la SNC [T] Colombo [T] à lui régler les sommes suivantes :

5 462,10euros au titre des échéances impayées de mars à septembre 2017,

546,21euros au titre de la clause pénale,

1 820euros échéance de décembre 2017,

182,20euros au titre de la clause pénale,

728,28euros au titre de la clause pénale,

Dire et juger que l’échéance contractuelle du 30 décembre 2017 ne saurait s’analyser en une clause pénale,

Dire et juger qu’elle ne saurait être qualifiée d’excessive,

Ordonner la capitalisation des intérêts,

Débouter la SNC Pharmacie [T] de ses demandes,

La condamner à lui payer la somme de 1 500euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 février 2023.

MOTIFS :

A l’appui de sa demande de condamnation à lui payer la somme de 7 282,80euros, la SA produit un contrat n° 995387 établi en son nom aux termes duquel elle consent à la société [T] Colombo-[T] la location d’un photocopieur de marque Triumph Adler de type DCC 6626H pour une durée de 21 trimestres moyennant le paiement de loyers trimestriels de 1 435,20euros, le contrat précise que le fournisseur du matériel est la société Copy Management.

Ce contrat a été signé le 5 décembre 2012 par Madame [T] [M] qui s’identifie comme étant la cogérante de la SNC Pharmacie [T]. Elle a le même jour apposé sa signature sur l’autorisation de prélèvement au profit du créancier, renseigné comme étant la SA Locam.

La société Locam produit également le procès-verbal de livraison et de conformité, identifiant le matériel comme étant un d’un photocopieur de marque Triumph Adler de type DCC 6626H, le créancier comme étant la SA Locam et le fournisseur comme étant la société Copy Management. Le timbre humide de la SNC Pharmacie [T] a été apposé sur le document ainsi que la signature de Madame [T].

Pour s’opposer au paiement de la créance contractuelle dont le paiement est réclamé par la SA Locam, la SNC Pharmacie [T] soutient que le contrat de location financière serait nul en l’absence de contrat ‘principal’ souscrit entre la société INPS Groupe (anciennement Copy management) et elle-même.

Toutefois s’il est acquis et non contesté que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une même opération financière sont interdépendants de sorte que l’anéantissement de l’un entraîne la caducité de l’autre, tel n’est pas le cas en l’espèce, la SA Locam, propriétaire du matériel et bailleresse, a mis son bien à la disposition de la SNC Pharmacie [T], locataire, moyennant le paiement d’un loyer, sans l’intervention d’une tierce partie liée par un contrat de maintenance.

Il s’agit d’un contrat de location financière par lequel une société de financement met en location un bien mobilier dont elle est devenue propriétaire, à la demande du locataire.

Cette convention ne réunit donc que deux personnes et un seul contrat. La SNC Pharmacie [T] ne conteste pas avoir apposé sa signature sur le contrat de location et le bon de réception et ne nie pas avoir pris possession du bien qui lui a bien état délivré.

L’absence de bon de commande préalable ou de contrat de contrat de maintenance concomitant est sans conséquence sur la validité du contrat de location.

La SNC Pharmacie [T] conteste devoir les sommes sollicitées en faisant valoir qu’en 2015 et 2016, elle a réglé des échéances à hauteur de 122,40euros par trimestre et qu’elle a restitué le matériel à la société Grenke Location le 23 novembre 2017.

Toutefois, outre que le lien entre la SA Locam et la société Grenke Location n’est pas explicitée dans les conclusions, il convient de relever que la SNC Pharmacie [T] a le 23 novembre 2017 restitué un photocopieur FK(Konica Minolta) D510240 en raison de l’arrivé du terme du contrat.

Le matériel restitué ne correspond à celui loué à la société Locam, les échéances trimestrielles ne sont pas d’un montant similaire et le n° de contrat est distinct puisque le bon de restitution fait état d’un contrat n° 061-025224 alors que le contrat conclu avec la LOCAM porte le n° 995387. Ainsi, la restitution et les règlements dont fait état la SNC Pharmacie [T] sont sans lien direct avec le présent litige.

La société Pharmacie [T] soutient également que l’indemnité de résiliation anticipée sollicitée par la SA Locam doit s’analyser en une clause pénale et qu’en application des dispositions de l’article 1229 dans sa rédaction applicable au litige du code civil, la clause pénale ne peut se cumuler avec l’exécution forcée de l’obligation principale.

L’article 1229 dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016 énonce que la clause pénale est la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l’inexécution de l’obligation principale. Il ne peut demander en même temps le principal et la peine, à moins qu’elle n’ait été stipulée pour le simple retard.

Toutefois en l’espèce, selon mise en demeure du 29 novembre 2017, la SA Locam sollicite le paiement des échéances impayées de mars à septembre 2017 et à compter de la date de la résiliation du contrat, l’indemnité de résiliation correspondant, selon la clause 12 du contrat, à une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majoré d’une clause pénale de 10%, ainsi qu’une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu’à la fin du contrat majorée de 10%.

La clause pénale est un engagement contractuel aux termes duquel les parties s’engagent, en cas d’inexécution de leur obligation principale, à verser à l’autre, à titre de dommages intérêts, une somme dont le montant est fixé forfaitairement.

En l’espèce, la SA Locam sollicite l’application de la clause pénale prévue au contrat et non l’exécution forcée du contrat de location.

Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier.

Pour réduire le montant d’une clause pénale, la juridiction doit rechercher en quoi le montant est manifestement excessif, notamment en comparant le montant de la peine conventionnelle fixé et celui du préjudice effectivement subi.

En l’espèce, le contrat conclu le 5 février 2012 pour une durée de 63 mois avec des loyers trimestriels de 1 435 euros a été résilié le 7 décembre 2017, de sorte que l’indemnité de résiliation fixée au loyer restant à échoir est disproportionnée au regard du préjudice effectivement subi par le crédit bailleur.

En effet, le contrat porte sur des biens à forte obsolescence et qui ont vocation à être fréquemment renouvelés et les conditions financières du contrat sont établies en tenant compte de la valeur vénale du bien et d’un taux d’intérêt permettant au bailleur d’amortir le coût financier de l’opération sur la durée de l’opération. La SNC Pharmacie [T] ayant réglé pendant plus de 5 ans les loyers, la clause d’indemnisation en ce y compris la clause de 10 % doit être réduite à la somme de 100euros.

Il convient d’infirmer la décision de première instance et de dire que la créance de la SA Locam s’élève à la somme de 6 258,42 euros au titre des échéances restées impayées au jour de la résiliation et la somme de 100euros au titre de la clause pénale soit la somme totale de

6 358,42euros.

Sur les délais de paiement :

La SNC Pharmacie [T] sollicite l’octroi des plus larges délais de paiement pour apurer sa dette.

La société Pharmacie [T], qui a en raison des délais de procédure déjà bénéficié des plus larges délais de paiement, ne justifie nullement des difficultés financières dont elle fait état. Il convient de la débouter de ses demandes à ce titre.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

La SNC Pharmacie [T] Colombo [T] succombant doit supporter les dépens. L’équité ne commande pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs, la cour statuant par arrêt contradictoire :

Confirme le jugement rendu le 11 mars 2019 par le tribunal de commerce d’Aix en Provence sauf sur le montant de la condamnation,

Statuant à nouveau sur les points réformés et y ajoutant :

Condamne la SNC Pharmacie [T] Colombo -[T] à payer à la SAS Locam la somme de 6358,42euros et ce avec capitalisation annuelle des intérêts,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SNC Pharmacie [T] Colombo-[T] aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x