Clause attributive de compétence : 13 octobre 2020 Cour d’appel de Rennes RG n° 17/06404

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Clause attributive de compétence : 13 octobre 2020 Cour d’appel de Rennes RG n° 17/06404
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3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N° 365

N° RG 17/06404

N° Portalis DBVL-V-B7B-OHDJ

Société DAF TRUCKS N.V.

C/

SARL ASSAINISSEMENT BONNIN GROLLIER

Société SOCIETE INDUSTRIELLE DE DISTRIBUTION AUTOMOBILE

Société ZF [Localité 5] AG

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Demidoff

Me Varoquaux

Me Bonte

Me Verrando

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller, rapporteur,

GREFFIER :

Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 30 Juin 2020

ARRÊT :

contradictoire, prononcé publiquement le 13 Octobre 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Société DAF TRUCKS N.V., société de droit néerlandais, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 6]

[Localité 4] (PAYS BAS)

Représentée par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN-DEMIDOFF, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Maureen HENRY substituant Me Marinka SCHILLINGS de la SELARL AMSTEL & SEINE AVOCATS, plaidant, avocats au barreau de PARIS

INTIMÉES :

Sarl ASSAINISSEMENT BONNIN GROLLIER (ABG), immatriculée au RCS de Nantes sous le n° 380 084 863, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvain VAROQUAUX de la SARL ACTALEX VAROQUAUX AVOCAT, postulant, avocat au barreau de NANTES

Représentée par Me Jean-David COHEN de l’AARPI JAD & ASSOCIES, plaidant, avocat au barreau de PARIS

Sa SOCIETE INDUSTRIELLE DE DISTRIBUTION AUTOMOBILES NANTAISE (S.I.D.A.N), immatriculée au RCS de Nantes sous le n° 317 642 809, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Mikaël BONTE, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Philippe CARON de la SELARL ARMEN, plaidant, avocat au barreau de NANTES

Société ZF [Localité 5] AG société de droit allemand, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège.

[Adresse 7]

[Localité 5] ALLEMAGNE

Représentée par Me Camille SUDRON substituant Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, postulant, avocats au barreau de RENNES

Représentée par Me Sara VEDADI CARCA substituant Me Etienne KOWALSKI du LLP SIMMONS & SIMMONS LLP, plaidant, avocats au barreau de PARIS

FAITS ET PROCEDURE

Le 9 octobre 2007, la SARL Assainissement Bonnin Grollier (ci-après la société ABG) passait commande d’un camion neuf au prix de 87.906 € TTC auprès de la Société Industrielle de Distribution Automobile Nantaise (la société SIDAN), concessionnaire français du constructeur automobile néerlandais, la société Daf Trucks NV (la société Daf Trucks).

Livré à la société ABG, le véhicule était mis en circulation le 23 juillet 2008.

Entre 2010 et 2013, le véhicule connaissait plusieurs pannes similaires à l’origine d’une immobilisation d’une durée totale de 529 jours.

A l’issue de plusieurs expertises amiables ainsi que d’une expertise judiciaire ordonnée par ordonnance de référé du 6 novembre 2012, l’origine de la panne était identifiée comme provenant d’un dysfonctionnement de la boîte de vitesse, elle-même fournie à la société Daf Trucks par la société ZF [Localité 5] AG (la société ZF), société de droit allemand.

N’étant pas parvenue à obtenir une reconnaissance de responsabilité de la part de quiconque et alors qu’elle avait fait l’avance de l’ensemble des frais de réparation du véhicule, la société ABG saisissait le tribunal de commerce de Nanterre, par assignation du 11 mars 2014, d’une action en garantie des vices cachés.

Par jugement du 26 février 2015, le tribunal de commerce de Nanterre se déclarait incompétent au profit de celui de Nantes qui, par un autre jugement du 20 juillet 2017 :

– rejetait l’exception d’incompétence soulevée par la société ZF qui, se prévalant d’une clause attributive de compétence insérée dans le contrat de fourniture la liant à la société Daf Trucks, contestait la compétence de la juridiction commerciale française pour statuer sur l’appel en garantie formé par le constructeur automobile à son encontre’ ;

– rejetait la fin de non-recevoir soulevée par la société ZF tirée de la prescription biennale de l’action intentée par la société ABG ;

– jugeait que le véhicule acquis par la société ABG était affecté, au niveau de sa boîte de vitesse, d’un vice caché préexistant à la vente’ ;

– jugeait que la société SIDAN était directement responsable de ce vice ;

– jugeait que les sociétés Daf Trucks et ZF étaient également responsables, solidairement avec la société SIDAN, des conséquences de ce vice ;

– en conséquence, condamnait solidairement les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF à payer à la société ABG une somme de 48.829,49 € HT en réparation de son préjudice matériel ainsi qu’une somme de 82.560 € en réparation de son préjudice d’exploitation ;

– déboutait la société ABG de ses demandes au titre d’un préjudice immatériel et d’un préjudice moral ;

– déboutait les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

– ordonnait l’exécution provisoire ;

– condamnait solidairement les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF à payer à la société ABG une somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamnait solidairement les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF aux entiers dépens comprenant ceux de référé.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 31 août 2017, la société Daf Trucks interjetait appel principal de ce jugement.

Saisi par la société SIDAN d’une requête en omission de statuer sur l’appel en garantie qu’elle avait dirigé à l’encontre des sociétés Daf Trucks et ZF, le tribunal, statuant par jugement du 22 février 2018, déclarait cette requête irrecevable eu égard à l’appel déjà pendant devant la cour.

La société Daf Trucks notifiait ses dernières conclusions le 11 juin 2020, la société ABG les siennes le 15 juin 2020, la société SIDAN les siennes le 4 septembre 2019, enfin la société ZF les siennes le 8 août 2019.

Finalement, la clôture de la mise en état intervenait par ordonnance du 30 juin 2020.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société Daf Trucks demande à la cour de :

Vu le Règlement UE n° 1215/2012 du 12 décembre 2012,

Vu la Convention de Lugano du 30 octobre 2007,

Vu les articles 74 et 75 du code de procédure civile,

Vu les articles anciens 1251 et 1134 du code civil,

Vu le rapport d’expertise judiciaire,

– infirmer partiellement le jugement et statuant à nouveau :

A titre liminaire :

– dire que l’exception d’incompétence soulevée par la société ZF se heurte à une fin de non-recevoir et par conséquent juger que l’exception soulevée est purement et simplement irrecevable ;

Sur le fond :

– constater l’absence de responsabilité de la société Daf Trucks et la mettre hors de cause ; débouter en conséquence les sociétés ABG et SIDAN de l’intégralité de leurs demandes contre la société Daf trucks ;

– subsidiairement, ramener la réclamation de la société ABG à de plus justes proportions, comme l’a fait le tribunal, et retenir en outre une part de responsabilité de cette dernière ;

– dire qu’in fine, si la cour retient une responsabilité in solidum entre les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF, la société ZF devra supporter la charge finale de l’intégra|ité des condamnations, de sorte qu’elle devra rembourser à la société Daf Trucks l’intégralité des sommes que cette dernière a payées à la société ABG au titre du jugement attaqué, soit la somme de 47.333,22 €, et la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à l’encontre de la société Daf Trucks par la cour, avec intérêts de droit à compter de l’arrêt à intervenir ;

En tout état de cause :

– confirmant le jugement, débouter la société SIDAN de sa demande au titre de frais de gestion et d’article 700 à l’égard de la société Daf Trucks ; débouter également la société ZF de l’intégralité de ses demandes contre la société Daf Trucks ;

– condamner la société ZF ou toute partie succombante à payer à la société Daf Trucks la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la partie succombante aux entiers dépens, en ce compris les frais de procédure de référé et les frais d’expertise judiciaire.

Au contraire, la société ABG demande à la cour de :

Vu les articles 1149 (1231-2 nouveau), 1382 (1240 nouveau), 1603, 1625, 1641 et suivants du code civil,

Vu les articles 9, 16, 122, 695 et suivants, 2229, 2241 et 2242 du code de procédure civile,

– recevoir la société ABG en ses demandes, fins, appel incident et conclusions ; l’en dire bien fondée ;

– débouter les sociétés SIDAN, ZF et Daf Trucks de toutes leurs demandes, fins et prétentions à l’encontre de la société ABG ;

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

* dit que le tribunal de commerce de Nantes était compétent pour juger du litige opposant la sociérté ABG aux sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF ;

* dit que l’action de la société ABG n’était pas prescrite et donc qu’elle était recevable ;

* dit que le véhicule était affecté d’un vice caché au niveau de la boite de vitesse, ayant préexisté à la vente par la société SIDAN ;

* dit que la société SIDAN était directement responsable du vice caché au niveau de la prise de force du véhicule qu’elle a vendu à la société ABG ;

* dit que la société SIDAN était directement responsable de l’ensemble des préjudices consécutifs au vice caché et subis par la société ABG ;

* dit que les sociétés Daf Trucks et ZF étaient solidairement responsables avec la société SIDAN des conséquences de ce vice caché ;

* débouté les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

* ordonné l’exécution provisoire de la décision ;

* condamné solidairement les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF à payer à la société ABG la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Infirmant le jugement uniquement sur le préjudice moral et sur le quantum des préjudices matériel et immatériels, et y ajoutant ;

– dire et juger que la demande de prescription de la société ZF est atteinte d’une fin de non-recevoir par application de la règle selon laquelle «nul ne peut se contredire au détriment d’autrui», au sein d’une même procédure judiciaire ;

– constater que le jugement entrepris a omis de déterminer la perte d’exploitation relative à l’exercice clos le 30/09/13 ;

– dire et juger que les préjudices matériels de la société ABG se sont élevés à la somme de 66.608,02€ HT, soit 76.749,66 € TTC ;

– dire et juger la perte d’exploitation relative à l’exercice clos le 30/09/13 :

* soit conformément au calcul du cabinet FIGURA, soit pour un montant de 378 € HT/jour multiplié par le nombre de jours d’immobilisation, soit 378 € X 446 jours = 168.588 € X 18,30 % = 30.851,60 €, soit pour un montant de 137.736 € ;

* à défaut, conformément à la méthode retenue par le tribunal, pour une somme de 72.970€ ;

En conséquence,

– condamner solidairement, et à tout le moins in solidum, le(s) succombant(s) à réparer le préjudice subi par la société ABG et à l’indemniser comme suit :

* 66.608,02 € HT, soit 76.749,66 € TTC au titre des préjudices matériels ;

* 3.864,10 €, au titre des frais liés aux emprunts bancaires (intérêts et assurances) ;

* 200.005 € au titre de la perte d’exploitation subie par la société ABG par suite de l’immobilisation du véhicule au titre des exercices clos les 30/09/11, 30/09/12 et 30/09/13 ; et à tout le moins à une somme de 155.530 € HT ou à tout autre montant que la cour retiendra ;

– condamner solidairement, et à tout le moins in solidum, le(s) succombant(s) à réparer le préjudice moral subi par la société ABG à hauteur de 20.000 € ;

En outre, et en tout état de cause,

– débouter les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

– condamner solidairement, et à tout le moins in solidum, le(s) succombant(s) à payer à la société ABG la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile s’agissant de l’instance d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens.

La société SIDAN demande quant à elle à la cour de :

– recevoir son appel incident ;

– réformer le jugement en ce qu’il n’a pas :

* mis hors de cause la société SIDAN ;

* retenu à titre subsidiaire la garantie des sociétés Daf Trucks et ZF à l’égard de la société SIDAN ;

* fait droit aux demandes reconventionnelles de la société SIDAN ;

* retenu la faute de la société ABG dans le cadre de l’indemnisation du préjudice matériel ;

– confirmer le jugement en ce qu’il a :

* retenu le préjudice matériel à hauteur de 48.829, 49 € HT ;

* pris en compte les différents frais sollicités par la société ABG au titre de l’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

* débouté la société ABG de toutes ses autres demandes et notamment au titre du préjudice moral ;

En conséquence,

– débouter la société ABG de son appel incident ;

– constatant les différents travaux effectués par des tiers, sans l’intervention de la société SIDAN, sur la boîte de vitesse équipant initialement le véhicule et vu les modifications intervenues, dire et juger que la société ABG ne peut venir dès lors rechercher la société SIDAN sur le fondement des vices cachés, le véhicule vendu par la société SIDAN n’étant plus dans sa configuration initiale sur laquelle s’appuie la société ABG pour fonder son action ;

– débouter la société ABG de toutes ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de la société SIDAN ;

Recevant la demande reconventionnelle de la société SIDAN,

– condamner la société ABG à payer à la société SIDAN la somme de 1.570,66 € au titre des frais de gestion ;

– condamner la société ABG à payer à la société SIDAN la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– pour le cas où la cour devrait estimer inclure les frais de gestion dans l’indemnité au titre des frais irrépétibles, condamner la société ABG à payer à la société SIDAN la somme de 21.570,06 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Subsidiairement, si par impossible la cour n’estimait pas devoir mettre hors de cause la société SIDAN,

– dire et juger qu’en tout état de cause, la responsabilité technique de cette dernière n’est pas engagée par le vice affectant la boîte de vitesse équipant le véhicule que la société SIDAN a elle-même acquis auprès de la société Daf Trucks ;

– constatant que l’expert met en avant la responsabilité de la société ZF en qualité de fabricant de ladite boîte de vitesse, dire et juger que les sociétés Daf Trucks et ZF doivent leur pleine et entière garantie à l’égard de la société SIDAN ;

– condamner en conséquence in solidum les sociétés Daf Trucks et ZF à payer à la société SIDAN l’ensemble des sommes tant en principal, intérêts, accessoires que frais auxquelles cette dernière pourrait être condamnée au profit de la société ABG ;

Egalement dans ce cadre,

– condamner in solidum les sociétés Daf trucks et ZF à payer à la société SIDAN :

* la somme de 1.570,66 € au titre des frais de gestion ;

* la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– pour le cas où la cour devrait estimer inclure les frais de gestion dans l’indemnité au titre des frais irrépétibles, condamner in solidum les sociétés Daf Trucks et ZF à payer à la société SIDAN la somme de 21 570,06 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

En tout état de cause,

– dire et juger que la société ABG ne peut prétendre qu’à la moitié de son préjudice immatériel, soit la somme de 41.580 € ;

– condamner la société ABG ou, à défaut, in solidum les sociétés Daf Trucks et ZF aux entiers dépens, dans lesquels seront compris les frais de procédure de référé ainsi que les frais d’expertise.

Enfin, la société ZF demande à la cour de :

– déclarer la société Daf Trucks ainsi que toutes autres parties non fondées en leurs appels principal et incident en tant que dirigés contre la société ZF et les en débouter ;

In limine litis,vu la Convention de Lugano du 30 octobre 2007,

– dire et juger que le contrat de fourniture de la boîte de vitesse litigieuse entre les sociétés Daf Trucks et ZF prévoit la compétence des juridictions de Zürich en Suisse pour la résolution des différends entre les parties ;

– dire et juger que la clause attributive de juridiction doit recevoir application ;

En conséquence,

– infirmer le jugement entrepris en ce que le tribunal a retenu sa compétence pour juger des demandes de la société Daf Trucks à l’encontre de la société ZF, avec toutes suites et conséquences ;

– renvoyer la société Daf Trucks à mieux se pourvoir ;

A titre principal,

Vu l’article 1648 du code civil,

– déclarer que l’action en réparation des vices cachés de la société ABG est prescrite ;

En conséquence,

– infirmer le jugement entrepris en ce que le tribunal a retenu que l’action de la société ABG n’était pas prescrite et était recevable ;

– déclarer irrecevable l’action de la société ABG en réparation des vices cachés ;

– débouter la société ABG et par conséquent les sociétés SIDAN et Daf Trucks de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

Vu les articles 1641 et suivants du code civil,

– dire et juger que la boîte de vitesse installée sur le camion Daf n’est affectée d’aucun vice caché existant antérieurement à sa vente par la société ZF à la société Daf Trucks ;

En conséquence,

– infirmer le jugement en ce qu’il a retenu que le véhicule était affecté d’un vice caché au niveau de la boîte de vitesse ayant préexisté à la vente par la société SIDAN ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité solidaire des sociétés Daf Trucks, SIDAN et ZF, pour les conséquences du vice caché ayant affecté la boîte de vitesse du véhicule ;

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné solidairement les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ZF à verser à la société ABG :

* au titre du préjudice matériel la somme de 48.829, 49 € HT,

* au titre de la perte d’exploitation la somme de 82.560 € HT,

* au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 10.000 € HT,

* aux entiers dépens de la procédure compris les frais de procédure de référé,

* aux frais de greffe du tribunal ;

– débouter les sociétés SIDAN, ABG et Daf Trucks de toutes leurs demandes, fins et prétentions à l’égard de la société ZF, y compris les demandes de garanties formulées par les sociétés Daf Trucks et SIDAN à l’encontre de la société ZF ;

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société ABG de ses demandes au titre de préjudices immatériels, dont les frais liés aux emprunts bancaires, et du préjudice moral invoqué ;

– condamner in solidum les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ABG aux entiers dépens ;

– condamner in solidum les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ABG à payer à la société ZF la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

Vu l’article 4 du Règlement Rome II n°864/2007,

Vu l’article 1240 (anc.1382) du code civil,

– dire et juger que la loi française s’applique aux rapports entre la société ZF et les sociétés Daf Trucks et SIDAN ;

– dire et juger que les sociétés Daf Trucks et SIDAN ne démontrent aucune faute commise par la société ZF à l’origine des dommages subis par la société ABG ;

– débouter les sociétés SIDAN, ABG et Daf Trucks de toutes leurs demandes, fins et prétentions à l’égard de la société ZF, y compris les demandes de garanties formulées par les sociétés Daf Trucks et SIDAN à l’encontre de la société ZF ;

En tout état de cause,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu la responsabilité solidaire des sociétés Daf Trucks, SIDAN et ZF, pour les conséquences du vice caché ayant affecté la boîte de vitesse du véhicule ;

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné solidairement les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ZF à verser à la société ABG :

* au titre du préjudice matériel la somme de 48.829, 49 € HT,

* au titre de la perte d’exploitation la somme de 82.560 € HT,

* au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 10.000 € HT,

* aux entiers dépens de la procédure compris les frais de procédure de référé,

* aux frais de greffe du tribunal ;

– débouter les sociétés SIDAN, ABG et Daf Trucks de toutes leurs demandes, fins et prétentions à l’égard de la société ZF, y compris les demandes de garanties formulées par les sociétés Daf Trucks et SIDAN à l’encontre de la société ZF ;

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société ABG de ses demandes au titre de préjudices immatériels, dont les frais liés aux emprunts bancaires, et préjudice moral ;

– condamner in solidum les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ABG aux entiers dépens ;

– condamner in solidum les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ABG à payer à la société ZF la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

A titre très subsidiaire,

Vu les articles 1641 et suivants du code civil,

– confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré les sociétés Daf Trucks et ZF solidairement responsables avec la société SIDAN des conséquences des vices cachés ayant affecté la boîte de vitesse ;

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société ABG de ses demandes au titre de préjudices immatériels, dont les frais liés aux emprunts bancaires, et préjudice moral ;

– ramener les préjudices matériels et la perte d’exploitation allégués par la société ABG à de plus justes proportions ;

– débouter les sociétés SIDAN et Daf Trucks de toutes leurs demandes, fins et prétentions à l’égard de la société ZF, y compris les demandes de garanties formulées par les sociétés Daf Trucks et SIDAN à l’encontre de la société ZF ;

En tout état de cause,

– condamner in solidum les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ABG aux entiers dépens ;

– condamner in solidum les sociétés Daf Trucks, SIDAN et ABG à payer à la société ZF la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– allouer à l’avocat soussigné le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’exception d’incompétence de la juridiction commerciale française’ :

La société ZF récuse la compétence de la juridiction commerciale française pour statuer sur l’appel en garantie formé à son encontre par la société Daf Trucks, le fabricant de la boîte de vitesse en cause se prévalant en effet de la clause insérée à l’article 31.2 du contrat de fourniture conclu le 10 décembre 2004 entre les deux sociétés qui désigne la «’cour de Zurich’» (Suisse) pour trancher tout litige susceptible de les opposer.

– Sur la recevabilité de l’exception :

Se prévalant des dispositions de l’article 74 du code de procédure civile, la société Daf Trucks fait valoir que cette exception est tardive et par suite irrecevable, dès lors que dans ses écritures de première instance, la société ZF a développé des moyens de fond et des fins de non-recevoir avant de soulever l’incompétence du tribunal.

Cependant, la cour rappelle :

– que, du fait de l’oralité de la procédure applicable devant le tribunal de commerce, les prétentions des parties, notamment les exceptions de procédure, peuvent être formulées verbalement au cours de l’audience, peu important que des conclusions écrites aient été préalablement échangées entre les parties, et ce qu’elles fassent mention ou non de ces exceptions et quel que soit l’ordre de leur présentation’ ;

– qu’en l’espèce, le jugement déféré mentionne en page 38 que l’exception d’incompétence a été soulevée ‘in limine litis’, mention qui démontre qu’elle l’a été, au moins oralement, avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

En conséquence, réitérée devant la cour, à nouveau avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, cette exception est recevable.

– Sur la compétence de la juridiction commerciale française pour connaître de l’appel en garantie formé par la société Daf Trucks à l’encontre de la société ZF :

Pour affirmer la compétence de la juridiction commerciale française pour connaître du litige qui l’oppose à la société ZF, la société Daf Trucks se prévaut de la compétence dite «’spéciale’» prévue à l’article 6.2 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 qui prévoit qu’une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat lié par la Convention peut être attraite, dans un autre Etat lié par la Convention, s’il s’agit d’une demande en garantie ou d’une demande en intervention, devant le tribunal saisi de la demande originaire, à moins qu’elle n’ait été formée que pour traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé.

Ainsi, rappelant qu’elle est elle-même intervenue à une instance initiée par la société ABG devant le tribunal de commerce et que ce n’est qu’à l’occasion de cette instance qu’elle a assigné en garantie la société ZF devant cette juridiction, la société Daf Trucks en déduit que la juridiction commerciale française est également compétente pour connaître de cet appel en garantie nonobstant l’existence d’une clause attributive de compétence désignant la juridiction suisse pour connaître des litiges pouvant opposer le constructeur néerlandais à son fournisseur allemand.

Cependant et ainsi que la société ZF le fait justement valoir, l’article 31.2 du contrat de fourniture qu’elle a conclu avec la société Daf Trucks instaure, avec une précision suffisante qui ne fait d’ailleurs l’objet d’aucune contestation, le principe d’une compétence exclusive de la cour de Zurich pour connaître de toute «’résolution de disputes’» susceptibles d’opposer les deux parties au contrat, cette compétence recouvrant ainsi, notamment, l’hypothèse d’un appel en garantie formé par le constructeur automobile à l’encontre de son fournisseur, alors par ailleurs que cette compétence exclusive prime la compétence spéciale prévue à l’article 6.2 précité.

En revanche et à défaut de se voir reconnaître le droit d’agir elle-même à l’encontre de la société ZF devant la juridiction commerciale française, la société Daf Trucks se prévaut aussi d’une action subrogatoire, expliquant en substance qu’en agissant à l’encontre de la société ZF, elle ne fait qu’exercer les droits appartenant aux sociétés ABG et SIDAN, droits dans lesquels elle s’estime subrogée, la société Daf Trucks admettant en effet qu’elle est susceptible de devoir les garantir des vices cachés pouvant affecter la boîte de vitesse qu’elle n’a certes pas fabriquée mais qu’elle ne leur a pas moins vendue en l’incorporant au véhicule assemblé par elle.

Or, il est constant que dans la mesure où il n’est pas établi ni même allégué que les sociétés ABG et SIDAN auraient elles-mêmes accepté la clause attributive de juridiction convenue entre les sociétés Daf Trucks et ZF, cette clause ne saurait leur être opposée, ne pouvant pas non plus, dès lors, être opposée à la société Daf Trucks subrogée dans les droits des sociétés ABG et SIDAN.

A cet égard, c’est en vain que pour tenter de s’opposer à ce raisonnement, la société ZF fait valoir que les conditions de la subrogation ne sont pas réunies, la cour observant en effet qu’il ne lui appartient pas, du moins pas au stade de l’examen d’une exception d’incompétence, de statuer sur le bien-fondé de l’appel en garantie que la société Daf Trucks prétend exercer.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu la compétence du tribunal de commerce de Nantes pour statuer sur l’ensemble des demandes formées par les parties, y compris sur l’appel en garantie intenté par la société Daf Trucks à l’encontre de la société ZF.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action intentée par la société ABG’ :

Pour s’opposer à l’ensemble des demandes formées à son encontre, la société ZF soulève la prescription de l’action en garantie des vices cachés intentée par la société ABG, le fournisseur de la boîte de vitesse en cause faisant valoir en substance :

– que la société ABG a elle-même reconnu, dès les premières opérations d’expertise amiable diligentées en 2011, qu’elle savait, et ce depuis la mise en service du véhicule en juillet 2008, que la prise de force de la boîte de vitesse présentait des difficultés d’enclenchement’ ;

– que dès lors, il lui aurait fallu agir en justice avant le mois de juillet 2010, et non attendre mars 2014 pour saisir le tribunal comme elle l’a fait par sa première assignation au fond’ ;

– qu’à supposer même que puisse être retenu, pour point de départ du délai de la prescription biennale prévue à l’article 1648 du code civil, la date de la première panne effective du véhicule, soit le 23 décembre 2010, il lui aurait fallu agir en justice au plus tard le 23 décembre 2012′ ;

– qu’à cet égard, n’a pas pu valablement interrompre le délai de prescription la saisine du juge des référés aux fins d’expertise judiciaire par assignation du 13 septembre 2012, dès lors que celle-ci a émané, non pas de la société ABG, mais de la société SIDAN ‘;

– que si, à l’occasion de cette instance de référé, la société ABG a certes elle-même formé une demande reconventionnelle tendant à l’allocation d’une provision pour vice caché, pour autant elle en a été déboutée par l’ordonnance du 6 novembre 2012 qui, par ailleurs, a ordonné l’expertise sollicitée par la seule société SIDAN’ ;

– que de ce fait et par application de l’article 2243 du code civil, et à supposer même qu’il puisse être considéré que cette demande reconventionnelle ait valu interruption de la prescription au profit de la société ABG, son rejet définitif a conféré à cette interruption un caractère non avenu’ ;

– qu’ainsi et nonobstant l’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire qui a perduré jusqu’au dépôt du rapport en date du 8 octobre 2013, la prescription biennale n’a jamais été valablement interrompue au bénéfice de la société ABG.

La cour partage cette analyse, rappelant en effet’ :

– qu’en application de l’article 1648 du code civil, l’action en garantie des vices cachés doit être intentée par l’acquéreur «’dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice’»’ ;

– que contrairement à ce que la société ABG soutient, ce n’est pas l’identification de la cause du vice, a fortiori sa qualification juridique éventuelle de «’vice caché’», qui fait courir le délai de prescription, mais seulement sa découverte, tel étant notamment le cas lorsque le véhicule connaît une panne à l’origine de son immobilisation’ ;

– qu’ainsi, le délai de prescription a commencé à courir à l’encontre de la société ABG au plus tard le 23 décembre 2010, date de la première immobilisation du camion ainsi qu’il résulte des éléments non contestés par les parties’ ;

– que si par application de l’article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription, et si par application de l’article 2239 du même code, la prescription est alors suspendue pendant la durée des opérations d’expertise, pour autant encore faut-il que celle-ci ait été demandée par l’acquéreur lui-même, l’interruption de la prescription ne pouvant en effet profiter qu’à celui qui a agi aux fins de l’interrompre ;

– qu’or, il résulte de l’ordonnance de référé du 6 novembre 2012 qui a ordonné la mesure d’expertise, que la société SIDAN est seule à l’origine de cette demande, la société ABG s’étant au contraire opposée à toute mesure d’instruction (cf également en ce sens les conclusions déposées par la société ABG à l’audience du 16 octobre 2012) ‘;

– qu’elle a certes formé, à titre reconventionnel, une demande d’allocation de provision, elle aussi fondée sur la garantie des vices cachés, ayant ainsi manifesté sa volonté d’interrompre le délai de prescription’ ;

– que toutefois, elle a été expressément déboutée de cette demande par l’ordonnance du 6 novembre 2012 dont elle n’a pas interjeté appel et qui, dès lors, est devenue définitive ‘;

– qu’or, l’article 2243 du code civil dispose que l’interruption de la prescription est non avenue lorsque la demande est définitivement rejetée’ ;

– que tel a été le cas en l’espèce, la société ABG, déboutée de sa demande de provision fondée sur la garantie des vices cachés, n’ayant jamais valablement interrompu la prescription avant son assignation au fond délivrée le 11 mars 2014, soit à une époque où la prescription était déjà acquise (puisque l’ayant été au plus tard le 23 décembre 2012, soit deux ans après la découverte du vice au sens de l’article 1648 du code civil).

Ainsi l’action en garantie des vices cachés intentée par la société ABG est-elle irrémédiablement prescrite, la décision déférée devant être infirmée en ce qu’elle a jugé le contraire.

Par voie de conséquence et en l’absence de toute possibilité d’examen de l’affaire au fond, la décision sera également infirmée en ce qu’elle a’ :

– jugé que le véhicule acquis par la société ABG était affecté, au niveau de la boîte de vitesse, d’un vice caché préexistant à la vente’ ;

– jugé que la société SIDAN était directement responsable de ce vice ;

– jugé que les sociétés Daf Trucks et ZF étaient elles aussi responsables, solidairement avec la société SIDAN, des conséquences de ce vice ;

– condamné solidairement les sociétés SIDAN, Daf Trucks et ZF à indemniser la société ABG de son préjudice matériel ainsi que de son préjudice d’exploitation.

Sur les autres demandes ‘:

La société ABG échouant en toutes ses demandes, qu’elles soient dirigées contre le concessionnaire SIDAN, le constructeur Daf Trucks ou contre le fournisseur ZF, les appels en garantie formées réciproquement entre ces trois sociétés sont sans objet ; elles en seront donc déboutées.

Les «’frais de gestion’» réclamés par la société SIDAN à hauteur d’une somme de 1.570,66 € consistant en réalité en des frais de déplacement exposés à l’occasion des opérations d’expertise, frais qui relèvent des frais irrépétibles, ils ne sauraient donner lieu à une condamnation distincte de celle susceptible d’être prononcée au titre de l’article 700 du code de procédure civile’; la société SIDAN en sera donc déboutée.

L’ensemble des parties seront déboutées de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la société ABG supportera les entiers dépens de première instance et d’appel, à l’exception seulement des frais de référé et d’expertise dont la société SIDAN, seule demanderesse de cette mesure d’instruction, conservera la charge définitive.

PAR CES MOTIFS,

La cour’:

– confirme le jugement en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la société ZF ;

– l’infirmant pour le surplus de ses dispositions, statuant à nouveau et y ajoutant :

* faisant droit à la fin de non-recevoir soulevée par la société ZF, déclare prescrite l’action en garantie des vices cachés engagée par la société ABG ;

* déboute toutes les parties du surplus de leurs demandes, y compris sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

* condamne la société ABG aux entiers dépens de première instance et d’appel, à l’exception seulement des frais de référé et d’expertise dont la société SIDAN onservera la charge définitive.

Le greffierLe président

 


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