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COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 mars 2021
Rejet
Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président
Arrêt n° 301 F-D
Pourvoi n° Z 19-17.900
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 31 MARS 2021
La société Pricewaterhousecoopers Corporate Finance, société par actions simplifiée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° Z 19-17.900 contre l’arrêt n° RG : 18/01821 rendu le 31 janvier 2019 par la cour d’appel de Versailles (14e chambre), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. F… S… A… M…,
2°/ à Mme T… D…, épouse S… A… M…,
domiciliés tous deux […], et pris tant en leur nom propre qu’au nom de leurs enfants mineurs E… et L… S… A… M…,
3°/ à Mme X… S… A… M…, domiciliée […] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Pricewaterhousecoopers Corporate Finance, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. F… S… A… M… et de Mme T… D…, épouse S… A… M…, ès qualités, et de Mme X… S… A… M…, et l’avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l’audience publique du 9 février 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt sur compétence attaqué (Versailles, 31 janvier 2019, RG n° 18/01821), la société Pricewaterhousecoopers Corporate Finance (la société PWCCF) est spécialisée dans l’activité du conseil pour les affaires et autres conseils de gestion.
2. M. F… S… A… M…, son épouse, Mme T… D…, épouse S… A… M… (M. et Mme A… ), et leurs trois enfants mineurs, sont actionnaires majoritaires de la société Kolmi-Hopen (la société KH).
3. Le 25 octobre 2010, des actionnaires majoritaires de la société KH, dont M. A… , ont confié à la société PWCCF la mission de les conseiller dans la perspective d’une cession des titres de la société KH.
4. S’estimant victime d’un dol, la société cessionnaire a recherché la responsabilité de M. et Mme A… , lesquels ont été condamnés à lui payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts.
5. Reprochant à la société PWCCF d’avoir commis une faute professionnelle à l’origine des condamnations prononcées contre eux, M. et Mme A… , agissant en leur nom propre et pour le compte de leurs enfants mineurs, l’ont assignée devant le tribunal de grande instance de Nanterre, le premier, sur le fondement de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, et la seconde, sur le fondement de l’article 1382, devenu 1240, du même code, en réparation de leurs préjudices.
6. La société PWCCF a soulevé devant le juge de la mise en état les exceptions d’incompétence d’attribution et territoriale du tribunal de grande instance de Nanterre au profit du tribunal de commerce de Paris.
7. Devenue majeure, Mme X… S… A… M… est intervenue volontairement en cause d’appel.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
8. La société PWCCF fait grief à l’arrêt de confirmer l’ordonnance ayant rejeté les exceptions d’incompétence qu’elle avait soulevées, alors « que le tribunal de commerce est compétent pour connaître des contestations nées à l’occasion d’une cession de titres d’une société commerciale, peu important que la cession ait une nature commerciale, que le litige porte sur la cession elle-même ou sur un acte préparatoire ou accessoire et que la contestation soit fondée sur une action délictuelle ou contractuelle ; qu’en retenant la compétence du tribunal de grande instance, après avoir constaté que “relève de la compétence commerciale le litige relatif à une mission préparatoire à la cession du contrôle d’une société revêtant un caractère commercial, confiée à un conseil financier et qui est exclusivement affectée à la réalisation de cette convention principale qui en constitue sa cause” et qu’ “il est établi que la mission de conseil et d’assistance confiée à la société commerciale PWCCF, préparatoire à la cession de contrôle de la société KH, était exclusivement affectée à la réalisation de la convention principale constituant sa cause et que la société PWCCF justifie dès lors de la compétence de la juridiction consulaire pour connaître des litiges nés de l’exécution de ladite mission”, motifs pris que les demandes indemnitaires de Mme A… et de ses enfants, non-commerçants et non-signataires de la lettre de mission confiée par M. A… à la société PWCCF, étaient fondées sur la responsabilité délictuelle et qu’il y avait lieu d’instruire et juger ensemble l’ensemble des demandes dirigées contre les époux A… compte tenu de leur lien de connexité étroit, cependant qu’il importait peu que la contestation soit fondée sur une action contractuelle ou délictuelle et qu’elle émane de tiers pourvu qu’elle se rattache à la cession de titres de la société KH, de sorte que le tribunal de commerce était compétent pour traiter les demandes des consorts A… , la cour d’appel a violé l’article L. 721-3 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
9. L’arrêt retient que la juridiction consulaire est compétente pour connaître des litiges nés de l’exécution de la mission de conseil et d’assistance confiée à la société PWCCF, dès lors que cette mission était préparatoire à la cession du contrôle de la société KH et exclusivement affectée à la réalisation de la convention principale constituant sa cause. Il relève ensuite que Mme A… et ses enfants ne sont ni commerçants, ni signataires de la lettre de mission, ce dont il résulte qu’ils disposaient d’une option de compétence leur permettant de saisir valablement le juge civil de leurs demandes indemnitaires fondées sur la responsabilité délictuelle de la société PWCCF. Il estime enfin que les demandes de M. A… , Mme A… et leurs enfants sont unies par un lien de connexité si étroit qu’il y a lieu de les instruire et juger ensemble. En cet état, et dès lors que le tribunal de commerce ne dispose pas d’une compétence d’ordre public dans le domaine litigieux, la cour d’appel a pu retenir la compétence du tribunal de grande instance, juridiction de droit commun, pour connaître de l’entier litige.
10. Le moyen n’est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Pricewaterhousecoopers Corporate Finance aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Pricewaterhousecoopers Corporate Finance et la condamne à payer à M. F… S… A… M…, Mme T… D…, épouse S… A… M…, agissant en son nom propre et au nom de ses enfants mineurs E… et L… S… A… M…, et Mme X… S… A… M… la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille vingt et un.