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MINUTE N° 22/498
NOTIFICATION :
Pôle emploi Alsace ( )
Clause exécutoire aux :
– avocats
– délégués syndicaux
– parties non représentées
Le
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE – SECTION A
ARRET DU 24 Mai 2022
Numéro d’inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/02058
N° Portalis DBVW-V-B7F-HSB4
Décision déférée à la Cour : 03 Mai 2021 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE SCHILTIGHEIM
APPELANTE :
Madame [O] [U]
7 rue Neuve
67202 WOLFISHEIM
Représentée par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la Cour
INTIMEE :
Société DIRECT CENTER KOMMUNIKATIONSSYSTEM KNOLL GMBH
Prise en la personne de son représentant légal
Siebenlindenstrasse 38
DE-72108 ROTTENBURG
72108 ROTTENBURG AM NECKAR
Représentée par Me Aude LEMEE, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 Octobre 2021, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. EL IDRISSI, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, et, Mme PAÜS, Conseiller
chargés d’instruire l’affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme DORSCH, Président de Chambre
M. EL IDRISSI, Conseiller
Mme PAÜS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme THOMAS
ARRET :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,
– signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Madame [O] [U], née le 10 janvier 1968, a été embauchée selon contrat de travail en date du 29 octobre 2014 à effet au 1er janvier 2015 en qualité de programmeur et cheffe d’équipe par la société de droit allemand Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH dont le siège social est situé à Rottenburg-am-Neckar, en Allemagne.
Madame [U] exerçait initialement son activité à Kehl, en Allemagne puis était rattachée au siège de la société en Allemagne et a eu recours au télétravail depuis domicile situé en France.
Un arrêt de travail pour cause de maladie lui a été prescrit au mois de novembre 2018. La suspension de son contrat de travail s’est prolongée jusqu’à la notification de la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail à son employeur sur le fondement du droit français.
En effet, par courrier du 10 janvier 2020 notifié le 20 janvier 2020, Madame [U], par l’intermédiaire de son conseil, prenait acte de la rupture de son contrat de travail en reprochant à son employeur, d’une part de lui avoir subitement demandé de venir travailler au siège de l’entreprise situé à plus d’une centaine de kilomètres de son domicile alors qu’elle avait recours au télétravail depuis deux ans, d’autre part d’avoir modifié ses codes d’accès à distance, mais encore de lui avoir confié une charge de travail considérable la veille de son départ en congé et elle invoquait un comportement de l’employeur constitutif de harcèlement moral.
Le 19 mars 2020, elle a saisi le conseil des prud’hommes de Schiltigheim aux fins de juger que le contrat de travail la liant à la société Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH est soumis au droit français et d’obtenir diverses sommes liées à l’exécution et à la rupture de son contrat de travail.
Par jugement du 03 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Schiltigheim, faisant droit à l’exception d’incompétence soulevée in limine litis par la société Direct center kommunikationssystem Knoll GmbH, s’est déclaré incompétent pour connaître du litige au fond, a débouté la société défenderesse de sa demande au titre des frais irrépétibles et a condamné Madame [U] aux entiers frais et dépens de l’instance.
Par déclaration du 18 mai 2021, Madame [U] a interjeté appel de cette décision.
Elle déposait, jointes à la déclaration d’appel, une requête afin d’être autorisée à assigner à jour fixe, ses conclusions d’appel, ainsi qu’un bordereau de communication de pièces.
Par ordonnance du 04 juin 2021, l’appelante a été autorisée à assigner la société Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH avant le 15 juillet 2021 à l’audience du 26 octobre 2021.
L’assignation à comparaître à jour fixe a été délivrée le 20 août 2021.
Selon conclusions du 25 octobre 2021, Madame [U] demande à la cour de déclarer l’appel compétence recevable et bien fondé et d’infirmer dans son intégralité le jugement entrepris.
Elle sollicite qu’il soit dit et jugé que le conseil de prud’hommes est compétent pour connaître du litige.
Madame [U] conclut, à titre principal, à ce que la cour ordonne le renvoi du dossier au fond devant le conseil de prud’hommes de Schiltigheim pour que celui-ci statue au fond.
L’appelante demande subsidiairement à la cour, statuant sur évocation, de’:
”juger que le contrat de travail liant les parties est soumis au droit français ;
”juger que la juridiction de céans est compétente pour trancher le présent litige ;
”condamner en tout état de cause la partie défenderesse et intimée à payer à la partie demanderesse et appelante les montants suivants’:
* p.m au titre des arriérés de salaire’;
* 7.588 € au titre du préavis’;
* 758 € au titre des congés payés sur préavis’;
* 4.742 € à titre d’indemnités de licenciement’;
* 91.056 € à titre de dommages et intérêts.
Elle conclut à la condamnation de l’intimée aux intérêts légaux depuis la date de la fin des relations contractuelles, sinon depuis la date de demande, de condamner la société intimée à lui payer 2.500 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, de la condamner à tous les frais et dépens de l’instance, y compris l’intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution de la présente par voie d’huissier, d’ordonner l’exécution provisoire du «’jugement à intervenir’», lui réserver tous autres droits, dus, moyens et actions, et notamment le droit exprès de majorer les différents chefs de demande suivant qu’i1 appartiendra.
Par conclusions du 27 septembre 2021, la société Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH conclut, à titre principal, au débouté de l’appel, à la confirmation du jugement déféré en ce qu’il s’est déclaré incompétent, à la condamnation de l’appelante aux entiers frais et dépens de l’instance en ce inclus les frais de traductions qu’elle a été amenée à exposer et à la condamnation de Madame [U] à lui verser une indemnité de 5.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’intimée demande à titre subsidiaire, si l’infirmation du jugement devait être prononcée, de dire n’y avoir lieu à évocation et à défaut, en cas d’évocation, de l’inviter à conclure au fond en vue d’une prochaine audience.
Pour l’exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Madame [U] reproche au conseil de prud’hommes de Schiltigheim de s’être déclaré incompétent alors qu’il est territorialement compétent pour connaître du litige compte-tenu de son lieu de travail habituel qu’elle situe en France.
La société Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH rétorque qu’il convient de l’attraire en Allemagne, devant l’Arbeitsgericht de Reutlingen, celle-ci faisant valoir en substance que son siège se situe à Rottenburg ‘ en Allemagne ‘ et que la salariée a majoritairement exercé son activité en Allemagne.
Sur l’incompétence des juridictions françaises
Madame [U] est fondée à se prévaloir de l’inapplicabilité du règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000 visé à tort par le conseil de prud’hommes de Schiltigheim.
En effet, aux termes de l’article 66 du règlement européen (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, les règles de compétence internationale sont déterminées par ledit Règlement pour toutes les actions judiciaires intentées à compter du 10 janvier 2015.
La requérante ayant introduit son recours par acte en date du 19 mars 2020, seules les dispositions de ce dernier Règlement trouvent à s’appliquer dans la détermination de la juridiction territorialement compétente pour connaître du litige, ce qu’au demeurant ne conteste pas la société intimée qui vise également les dispositions dudit Règlement dans ses écritures.
Ainsi, il résulte des règles de compétence prévues par les articles 20 et 21 du Règlement européen n°1215/2012 précité, appelé «’Règlement Bruxelles I bis’», qu’en matière de contrats individuels de travail, la compétence territoriale des juridictions est déterminée par la section 5, sans préjudice de l’article 6, de l’article 7, point 5), et, dans le cas d’une action intentée à l’encontre d’un employeur, de l’article 8, point 1).
Un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait’:
– devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile’;
– ou dans un autre État membre’:
devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail’;
– ou lorsque le travailleur n’accomplit pas ou n’a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l’établissement qui a embauché le travailleur.
Le lieu habituel de travail est entendu comme le lieu où, ou à partir duquel, le travailleur s’acquitte de fait de l’essentiel de ses obligations à l’égard de son employeur.
Il y a donc lieu d’apprécier les conditions effectives d’exécution du contrat de travail pour déterminer, d’une part si Madame [U] avait un lieu habituel de travail et, d’autre part, si ce lieu se trouvait en France et plus spécifiquement dans le ressort territorial du conseil de prud’hommes de Schiltigheim.
Lorsque l’accomplissement du travail confié au salarié s’étend sur le territoire de plusieurs États membres, le lieu d’exécution du contrat de travail est celui où ou à partir duquel le travailleur s’acquitte principalement de ses obligations à l’égard de son employeur.
En d’autres termes, ce lieu est celui où le salarié a établi le centre effectif des activités professionnelles et où ou à partir duquel, le travailleur s’acquitte de fait de l’essentiel de ces obligations.
Pour déterminer concrètement ce lieu, le cas échéant, il appartient à la juridiction de se référer à un faisceau d’indices.
Il a été considéré que le lieu de travail habituel est l’endroit où le travailleur accomplit la majeure partie de son temps de travail pour le compte de son employeur en tenant compte de l’intégralité de la période d’activité du travailleur.
En cas de périodes stables de travail dans des lieux successifs différents, le dernier lieu d’activité devrait être retenu dès lors que, selon la volonté claire des parties, il a été décidé que le travailleur y exercerait de façon stable et durable ses activités.
En l’espèce, le contrat de travail international de Madame [U], rédigé en allemand, conclu en Allemagne et soumis au droit allemand, s’est exécuté lors de sa prise d’effet à Kehl, en Allemagne, conformément aux stipulations de l’article 2 du contrat.
Résidant à Wolfisheim, en France, la salariée a bénéficié du statut de travailleur frontalier.
Le lieu habituel de travail concernant la première partie de la relation contractuelle est fixé par les parties en Allemagne, État au sein duquel sont établis les principaux partenaires de la société Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH avec lesquels la salariée conversait en langue allemande.
Concernant la poursuite du contrat de travail, il ressort des différentes pièces versées aux débats que le lieu de travail est éclaté dans l’espace, Madame [U] ayant exécuté son travail simultanément en France, État depuis lequel elle recourait au télétravail, et en Allemagne, État du siège de l’entreprise au sein duquel elle était amenée à se rendre régulièrement.
En cette circonstance, le lieu d’exécution habituelle du contrat correspond au lieu à partir duquel le travailleur s’acquitte principalement de ses obligations et il convient de rechercher le centre effectif de ses activités professionnelles.
Sur ce point, Madame [U] affirme avoir eu recours au télétravail et bénéficié de ce mode de travail durant la majeure partie de son temps de travail depuis la fin de l’année 2016 et en tout état de cause depuis la fermeture de l’établissement de Kehl en juin 2017. Les attestations concordantes produites par l’appelante confirment que celle-ci travaillait depuis son domicile, sans toutefois que la fréquence ne puisse être clairement établie.
Tout en reconnaissant avoir toléré le recours au télétravail, la société Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH rétorque que le lieu d’accomplissement habituel du travail de Madame [U] restait l’Allemagne.
Il n’est pas contesté que Madame [U] disposait, depuis la fin de l’année 2016 ou, à tout le moins, pour la période comprise entre juillet 2017 et octobre 2018, d’un téléphone portable, d’une ligne téléphonique française et d’un ordinateur fixe professionnels qui lui permettaient de recourir au télétravail depuis son domicile situé en France.
En dépit des incertitudes concernant les activités effectuées par la salariée au siège de la société, le lieu où les directives lui ont été données et la date de démarrage du travail à domicile, il ressort des notes de frais produites aux débats que Madame [U] continuait de se rendre régulièrement au siège de la société en Allemagne avec son véhicule de fonction.
La fréquence des déplacements vers l’Allemagne ne peut davantage être identifiée avec exactitude compte-tenu, en premier lieu de l’absence d’explication des parties concernant l’indemnité forfaitaire journalière de six euros et, en second lieu, de la mention constante du libellé du siège social comme lieu de destination des déplacements ayant donné lieu à des remboursements de frais de carburant. Si une telle indication sur les notes de frais suppose nécessairement des déplacements réguliers en Allemagne, la cour constate que le véhicule de fonction était également attribué pour un usage privé. Aussi, les frais de carburant, convertis en kilométrage parcouru, puis rapporté à la distance Wolfisheim (lieu de résidence) ‘ Rottenburg (siège social renseigné sur les fiches de frais) et à la consommation du véhicule Volkswagen Polo 5, 1,2 TSI moteur essence, permet de déterminer un nombre de déplacement moyen maximum de deux allers-retours par semaine du domicile de la salariée au siège social de l’entreprise.
Compte-tenu de la circonstance que l’exécution de la mission confiée à la salariée a été majoritairement assurée à partir de son domicile situé en France, à partir duquel elle exerçait ses activités pour son employeur et où elle télétravaillait entre chaque déplacement professionnel en Allemagne, le lieu à partir duquel la salariée s’acquitte principalement de ses obligations devrait être fixé, en l’absence d’autres facteurs déterminants, pour cette seconde période, en France.
Néanmoins, lorsque comme au cas d’espèce, le lieu de travail varie dans le temps, la Cour de justice européenne suggère de tenir compte de toute la durée de la relation de travail pour déterminer le lieu où l’intéressée a accompli habituellement son travail.
Dans ce cas, c’est le lieu où le travailleur a accompli la majeure partie de son temps de travail, soit en l’espèce l’Allemagne puisqu’il est établi ‘ ainsi que le constatait le conseil de prud’hommes ‘ que Madame [U] a travaillé à Kehl de son embauche le 1er janvier 2015, au moins jusqu’à la fin de l’année 2016, sinon jusqu’en juin 2017 au moins partiellement, et qu’elle a continué à se rendre régulièrement en Allemagne, État avec lequel le contrat de travail présente indéniablement les liens les plus étroits qu’avec la France, jusqu’à son arrêt de travail le 22 novembre 2018.
La salariée n’a plus exercé d’activité professionnelle pour le compte de l’employeur depuis son arrêt maladie le 22 novembre 2018, de sorte que le siège situé en Allemagne est constamment demeuré le centre effectif de ses activités professionnelles.
La jurisprudence admet que la période de travail la plus récente, même si elle est plus courte que la période précédente, peut être retenue pour déterminer le lieu d’exécution habituelle. Cela suppose alors une volonté claire des parties de décider que le travailleur y exercerait de façon stable et durable ses activités, condition qui fait défaut dans la présente affaire.
En effet, quand bien même il a été admis par les parties, au moins temporairement, que Madame [U] pouvait partiellement recourir au télétravail depuis son domicile français, les stipulations initiales du contrat de travail, en particulier l’article 16 fixant le lieu d’exécution et de juridiction au siège social de la société à Rottenburg, n’ont pas été modifiées. La localisation de son emploi en Allemagne n’a ainsi jamais été remise en cause.
Qui plus est, au cours d’une réunion qui s’est déroulée au siège de la société le 25 septembre 2018, soit antérieurement à la période d’arrêt de travail entamée en novembre 2018, l’employeur informait Madame [U] ‘ ainsi qu’en témoigne son mari qui était présent lors de la réunion ‘ de son souhait de mettre fin au télétravail (pièce n°18 de l’appelante).
En outre, il résulte d’un courrier en date du 24 octobre 2019 adressé par le conseil de Madame [U] à l’employeur que la salariée demandait la communication des mots de passe pour accéder à son espace de travail à distance. Ce nouvel élément démontre que l’employeur avait, avec constance depuis le 22 novembre 2018, réclamé le retour de la salariée en présentiel au siège allemand de l’entreprise, ce qui ne peut caractériser, indépendant de la clause attributive de compétence, une volonté claire des deux parties d’établir l’exercice des activités de Madame [U] de façon stable et durable depuis la France.
Enfin, et en tout état de cause, la cour de cassation a jugé qu’en cas de télétravail toléré par l’employeur, le lieu du travail est celui fixé dans le contrat et non le domicile du salarié, soit au présent cas également l’Allemagne.
Dans ces conditions, le domicile de Madame [U] situé à Wolfisheim sur le territoire français où elle est établie, ne peut être considéré comme le dernier lieu ni le lieu où elle a accompli habituellement son travail au sens de l’article 21, 1., b), i). du Règlement européen (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012.
L’article 21, 1., b), ii). du même Règlement européen n’est pas davantage applicable pour déterminer la compétence des juridictions françaises en ce qu’il reviendrait à attraire l’employeur devant la juridiction de l’État membre où il a son domicile, c’est-à-dire l’Allemagne.
L’appelante invoque enfin les dispositions d’ordre public et la protection des intérêts du salarié assurés par le droit français alors que, d’une part les règles de l’ordre public international et le principe de confiance mutuelle entre États membres de l’Union européenne ne permettent pas de déroger aux dispositions favorables instaurées pour les salariés par le Règlement appliqué, ces règles européennes s’imposant aux juridictions françaises qui ne peuvent pas, si elles sont saisies par un salarié d’une demande dirigée contre un employeur domicilié dans un autre État membre, se référer aux règles de droit interne pour déterminer la juridiction compétente, et d’autre part le présent litige relatif au conflit de compétence ne saurait être confondu avec un conflit de loi et certaines dispositions protectrices du Règlement Rome I.
***
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement ayant accueilli l’exception d’incompétence soulevée par l’employeur.
Madame [U], qui succombe est condamnée aux frais et dépens des procédures de première instance et d’appel, le jugement étant confirmé sur ce point, et par voie de conséquence sa demande de frais irrépétibles est rejetée.
L’équité commande par ailleurs qu’elle soit condamnée à payer à la société intimée une somme de 1.200 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La société intimée est en revanche déboutée de sa demande tendant à l’inclusion dans les dépens des frais de traduction de pièces par la traductrice qu’elle a elle-même choisie, alors que ces documents ne consistent pas en des débours relatifs à des actes, ou procédures judiciaires, et n’entrent donc pas dans le cadre de l’article 695 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement rendu par le conseil des prud’hommes de Schiltigheim le 03 mai 2021 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE Madame [O] [U] aux frais et dépens de la procédure d’appel,
DIT que les frais de traduction de pièces engagés par les parties ne sont pas compris dans les dépens,
CONDAMNE Madame [O] [U] à payer à société Direct center Kommunikationssystem Knoll GmbH une somme de 1.200 € (mille deux cents euros) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE Madame [O] [U] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022, signé par Mme Christine DORSCH, Président de Chambre et Mme Martine THOMAS, Greffier.
Le Greffier, Le Président,