Clause attributive de compétence : 14 juin 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 21/06122

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Clause attributive de compétence : 14 juin 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 21/06122
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COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 14 JUIN 2022

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 21/06122 – N° Portalis DBVK-V-B7F-PFVL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 05 OCTOBRE 2021

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PERPIGNAN

N° RG 2019j00485

APPELANTE :

E.U.R.L. VILALLONGUA prise en la personne de son représentant légal,

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Céline PIRET de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

INTIMEE :

S.A. ORANGE prise en la personne de son représentant légal en exercice,

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Sofia SAIZ MELEIRO, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représentée par Me Edith LAGARDE-BELLEC, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Ordonnance d’Assignation à jour fixe du 8 février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 AVRIL 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller

Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Audrey VALERO

ARRET :

– Contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.

*

**

FAITS et PROCÉDURE – MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES:

L’EURL Vilallongua qui exploite un fonds de commerce de restauration à [Localité 2] a souscrit auprès de la SA Orange, un contrat de service de téléphonie fixe, mobile, Internet et connexion à un TPE ayant donné lieu à la signature de deux avenants l’un en date du 16 novembre 2017 et le second le 12 juillet 2019.

Le 9 septembre 2019, l’EURL Vilallongua a mis en demeure la société Orange de réparer le manque à gagner du fait d’un dysfonctionnement de la ligne de téléphonie fixe et d’accès Internet subi, selon elle, depuis le 2 juillet 2019.

En raison de ces désordres affectant également l’accès au terminal de paiement électronique et sur la base d’un constat d’huissier de justice du 17 septembre 2019, l’EURL Vilallongua a, par exploit du 5 décembre 2019, fait assigner la SA Orange devant le tribunal de commerce de Perpignan pour obtenir le constat de la résolution du contrat aux torts de la société Orange.

Le tribunal, par jugement du 5 octobre 2021, a notamment :

– dit que l’exception soulevée par la SA Orange recevable en la forme,

– s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris,

– dit que le greffe procédera conformément aux prescriptions de l’article 82 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens.

Par ordonnance du 8 février 2022, le délégataire du premier président a autorisé l’EURL Vilallongua à assigner à jour fixe la société Orange devant la chambre commerciale, pour l’audience du mardi 19 avril 2022. Cette assignation a été délivrée à la société Orange par exploit d’huissier du 18 février 2022.

L’EURL Vilallonga demande à la cour, en l’état de ses conclusions déposées et notifiées le 13 avril 2022 via le RPVA, de :

Vu les articles 83 et suivants du code de procédure civile, et encore 46 et 48 du même code

– infirmer le jugement rendu le 5 octobre 2021 par le tribunal de commerce de Perpignan,

– débouter la société Orange de toutes ses demandes (‘),

– juger inopposable la clause attributive de compétence insérée dans le contrat Orange litigieux,

– juger le tribunal de commerce de Perpignan compétent pour connaître du litige,

– condamner la SA orange au paiement d’une somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

– la clause attributive de compétence territoriale invoquée par la société Orange n’a pas été rédigée de manière apparente et figure dans des conditions générales qui n’ont été ni paraphées ni ratifiées,

– elle figure dans un paragraphe qui ne se différencie pas de l’ensemble du document écrit en petits caractères, sans espaces et sans aération de sorte qu’il s’en trouve purement et simplement illisible,

– il n’existait entre les deux sociétés aucune relation d’affaires suivies et il ne peut donc lui être opposé qu’elle avait nécessairement connaissance de l’existence de ladite clause,

– le fait d’avoir payé les factures ne signifie pas qu’elle aurait souscrit à la clause attributive de compétence qui, en tant que composante des conditions générales de vente doit justement se démarquer par leur lisibilité étant inopérant d’invoquer l’agrément des conditions générales par une formule de type.

La société Orange sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 11 avril 2022 :

Vu les articles 48 du code de procédure civile et L. 110’3 du code de commerce

– confirmer le jugement rendu le 5 octobre 2021 par le tribunal de commerce de Perpignan,

– débouter l’EURL Vilallongua de ses demandes,

– condamner l’EURL Vilallongua à lui payer la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de la présente instance.

Elle expose en substance que :

– la clause attributive de compétence est rédigée de manière apparente dans un article spécifique dont l’intitulé l’est également,

– son contenu est parfaitement explicite et en acceptant le contrat en général, l’EURL Vilallongua avait accepté sa clause attributive de compétence en particulier qui n’avait pas à faire l’objet d’une acceptation expresse,

– le paiement sans réserves valait en outre acceptation tacite des conditions contractuelles et d’une clause figurant de façon habituelle dans les documents commerciaux de sorte qu’elle est nécessairement acceptée par ses cocontractants avec lequel elle est en relation d’affaires suivies,

– l’EURL Vilallongua la connaissait parfaitement pour s’être réengagée au cours du mois de juillet 2019 dans le cadre d’une offre Orange open pro office pour une durée de 24 mois, la clause ayant à l’identique été reproduite dans les conditions spécifiques de ce nouvel engagement,

– les clauses du contrat était de plus accessibles sur l’espace client Internet et par ces paiements, l’EURL Vilallongua avait encore confirmé son acceptation des conditions contractuelles.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L’article 48 du code de procédure civile dispose : « Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée ».

Il n’est pas discuté qu’un contrat de téléphonie fixe et mobile ainsi qu’un contrat d’accès à Internet a été conclu entre la SA Orange et l’EURL Vilallongua pour les besoins professionnels de cette dernière qui a la qualité de commerçante.

La société Orange justifie avoir transmis à l’EURL Vilallongua, les 14 juin 2017, 16 novembre 2017 et 13 juillet 2019, le descriptif de ses offres ainsi que le mandat de prélèvement à compléter et à retourner signé à l’adresse indiquée, l’ensemble se rapportant à un service Orange open pro office.

Les ‘documents contractuels’ ainsi transmis se rapportent au même numéro de compte Internet, au même identifiant de connexion et à la même ligne téléphonique, les deux derniers envois constituant les avenants à la convention initiale. Les conditions spécifiques de l’offre du 16 novembre 2017 se déclinent en 27 articles dont le dernier se rapporte à l’attribution de juridiction énonçant que ‘tout litige relatif aux conditions spécifiques sera soumis à la compétence exclusive du tribunal de commerce de Paris’. Les conditions générales de la troisième offre se déclinent en 19 articles, le dernier énonçant également que ‘toute difficulté relative à la validité, l’application ou l’interprétation du contrat seront soumises à défaut d’accord amiable au tribunal de commerce de Paris auquel les parties attribuent compétence territoriale, quelque soit le lieu d’exécution le domicile du défendeur’.

Les premiers juges ont estimé à juste titre que cette clause était parfaitement apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée. Bien que dactylographiée dans une police de taille identique à celle utilisée pour l’ensemble des 18 autres articles constituant le document de 12 pages invoqué par l’appelante, elle demeure cependant tout à fait lisible et compréhensible. Elle figure certes à la fin des conditions générales mais son intitulé est clair puisque le titre indique en majuscules : « attribution de juridiction » et son texte suffisamment synthétique et précis.

Il est ensuite constant que les conditions générales d’une convention ont une valeur contractuelle et ne sont opposables au client qu’à la double condition qu’elles soient entrées dans le champ contractuel et que l’intéressé ait pu en prendre connaissance.

La dernière offre adressée à l’EURL Vilallongua le 13 juillet 2019 reprenant en termes identiques la clause attributive de compétence figurant aux conditions spécifiques de l’avenant antérieur comporte la mention rédigée en ces termes : « en souscrivant cette offre, le client déclare avoir pris connaissance et accepté sans réserve les conditions générales Orange pro, les conditions spécifiques de l’offre, les documents tarifaires correspondant ainsi que les conditions spécifiques des conditions générales d’utilisation des services et options de l’offre, tels que mentionnés aux présentes conditions particulières. Pour plus d’informations, le client est invité à se renseigner sur le siteinternetorangepro.fr ou auprès de son conseil commercial habituel’.

L’EURL Vilallongua n’a jamais contesté avoir effectivement reçu les pièces jointes à ces envois et notamment celui du 13 juillet 2019 se rapportant à la dernière offre lui (re)spécifiant les données essentiellesdes services souscrits (numéro de la ligne téléphonique, identifiant et adresse de messagerie, renseignement du numéro mobile dans l’espace client pour réinitialiser le mot de passe par SMS en cas d’oubli etc…). En énonçant que la clause attributive de compétence est ‘noyée au milieu d’un document de 12 pages’, l’EURL Vilallongua se réfère bien aux conditions générales de l’offre du 13 juillet 2019 dont elle querelle la bonne exécution mais non la souscription

En souscrivant à cette offre rédigée dans les termes ci-dessus rappelés, l’EURL Vilallongua en a donc accepté les conditions générales au nombre desquelles la clause attributive de compétence donnant identiquement, par rapport au premier avenant souscrit deux ans plus tôt, compétence au tribunal de commerce de Paris pour connaître les litiges nés de son application.

Elle ne pourra en conséquence qu’être déboutée de sa demande tendant à ce que la clause attributive de compétence territoriale invoquée par la SA Orange lui soit déclarée inopposable, cette dernière étant a contrario fondée à en revendiquer l’application.

L’EURL Vilallongua qui succombe, devra supporter les dépens de l’instance et payer à la société Orange une somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Perpignan en date du 5 octobre 2021,

Déboute l’EURL Vilallongua de sa demande tendant à ce que la clause attributive de compétence invoquée par la SA Orange lui soit déclarée inopposable,

Dit que l’EURL Vilallongua supportera les dépens de l’instance et paiera à la société Orange une somme de 3000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

le greffier, le président ,

 


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