Clause attributive de compétence : 22 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/15528

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Clause attributive de compétence : 22 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/15528
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3

ARRÊT AU FOND

DU 22 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/279

Rôle N° RG 19/15528 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BE7OJ

Association ASSOCIATION DE PREFIGURATION DE L’INCUBATEUR INTER -UNIVERSITAIRE DE L’ACADEMIE D'[Localité 4]-[Localité 6]

C/

SASU PANAXIUM

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Patrick BANNWARTH

Me Robin STUCKEY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 05 Septembre 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 2018F00896.

APPELANTE

ASSOCIATION DE PREFIGURATION DE L’INCUBATEUR INTER -UNIVERSITAIRE DE L’ACADEMIE D'[Localité 4]-[Localité 6], ci-après dénommée IMPULSE, poursuites et diligences de son président,

dont le siège social est sis [Adresse 5] – [Localité 2]

représentée et assistée de Me Patrick BANNWARTH de la SELAS DELOITTE SOCIETE D’AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS PANAXIUM, prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 3] – [Localité 1]

représentée par Me Robin STUCKEY de la SELARL ONE, avocat au barreau de MARSEILLE

assistée de Me Emilie ALLEGRINI, avocat au barreau de MARSEILLE substituant Me Robin STUCKEY

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 24 Mai 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Mme GERARD, président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Valérie GERARD, Président de chambre

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Muriel VASSAIL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022,

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

L’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] (l’incubateur Impulse) a pour objet de promouvoir et aider au développement d’entreprises technologiques issues ou appuyées sur les compétences des laboratoires publics et privés de recherche ou organismes publics de recherche et d’enseignement supérieur.

La SAS Panaxium, immatriculée le 17 août 2016, a pour activité la recherche et le développement, la conception, l’industrialisation et la commercialisation d’équipements et/ou composants électroniques.

L’incubateur Impulse et M. [U] [P], agissant au nom et pour le compte de la SAS Panaxium en formation, ont conclu le 21 avril 2016, un contrat cadre d’incubation, accompagné de six annexes sur les conditions particulières d’accompagnement du projet Panaxium, sa nature, les charges et modalités de la prise en charge, le retour sur investissement notamment.

À la suite de l’embauche par la SAS Panaxium d’un salarié démissionnaire de l’incubateur, ce qui constitue une violation des dispositions de l’annexe 5 du contrat d’incubation relative notamment à la prévention des conflits d’intérêts, la résiliation du contrat a été constatée par courrier du 19 septembre 2017 et la SAS Panaxium a remboursé les sommes prévues à l’article 3.1.a) du contrat.

Soutenant que la SAS Panaxium lui devait également l’émission de bons de souscription d’actions (BSA) l’incubateur Impulse a fait assigner la SAS Panaxium et M. [U] [P] devant le tribunal de commerce de Marseille, lequel, par jugement du 5 septembre 2019 :

– concernant le litige opposant l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] à M. [U] [P] :

– s’est déclaré matériellement et territorialement incompétent pour connaître du litige opposant l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d’Aix- Marseille à M. [U] [P] au profit du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence ;

– a dit et jugé que sur production du certificat de non-appel, sollicité par le greffe du tribunal de commerce auprès du greffe de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, le dossier de procédure sera transmis au greffe de la juridiction désignée ci-dessus ;

– a condamné l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]-[Localité 6] à payer à M. [U] [P] la somme de 1 000 € (mille euros) au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– concernant le litige opposant l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] à la SAS Panaxium :

– s’est déclaré matériellement et territorialement compétent pour juger du litige entre l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] et la SAS Panaxium ;

– a débouté l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]-[Localité 6] de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la SAS Panaxium ;

– a condamné l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] à payer à la SAS Panaxium la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre des frais irrépétibles occasionnés par la procédure ;

– conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, a laissé à la charge de l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] les dépens toutes taxes comprises de l’instance

– a rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement.

L’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] a interjeté appel par déclaration du 8 octobre 2019.

Par conclusions du 26 décembre 2019, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile, l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]- [Localité 6] demande à la cour de :

– infirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille en ce qu’il a rejeté les demandes de l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d’Aix-Marseille et l’a condamnée à payer à Panaxium la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, lui laissant la charge des entiers dépens ;

statuant à nouveau

– condamner la SAS Panaxium à payer à l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]-[Localité 6] la somme de 40.000 euros de dommages-intérêts ;

– condamner la SAS Panaxium à payer à l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]-[Localité 6] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamner la SAS Panaxium aux entiers dépens.

Par conclusions du 25 mars 2020, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile, la SAS Panaxium demande à la cour de :

à titre principal et in limine litis,

– infirmer le jugement rendu le 05 septembre 2019 par le tribunal de commerce de Marseille en ce qu’il s’est déclaré territorialement et matériellement compétent pour juger du litige entre l’association Impulse et la SAS Panaxium ;

et statuer à nouveau :

– juger réputée non écrite la clause attributive de compétence insérée au contrat d’incubation entre l’association Impulse et la SAS Panaxium ;

– en conséquence juger incompétent territorialement le tribunal de commerce de Marseille ;

– juger incompétent matériellement le tribunal de commerce de Marseille ;

– renvoyer l’association Impulse à mieux se pourvoir au fond par-devant la juridiction compétente,

à titre subsidiaire, sur le fond,

si par extraordinaire la Cour confirmait le jugement de première instance ou jugeait au fond le présent litige, il lui est demandé de bien vouloir :

– confirmer le jugement rendu le 05 septembre 2019 par le tribunal de commerce de Marseille en ce qu’il a débouté l’association Impulse de toutes ses demandes ;

en tout état de cause,

– condamner l’association Impulse au paiement de la somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIFS

Sur l’incompétence du tribunal de commerce de Marseille :

La SAS Panaxium soutient que c’est à tort que le tribunal de commerce de Marseille s’est déclaré compétent alors qu’il était incompétent tant territorialement que matériellement. Elle souligne que la clause attributive de compétence était inapplicable, que le seul tribunal de commerce d’Aix-en-Provence était territorialement compétent et qu’en tout état de cause les juridictions commerciales n’étaient pas compétentes pour statuer sur le litige.

Il est exact qu’en application de l’article 48 du Code de procédure civile, une clause dérogeant à la compétence territoriale est réputée non écrite si elle n’a pas été convenue entre des personnes ayant contracté en qualité de commerçant. Or, il n’est pas soutenu que l’appelante, constituée sous forme d’association, accomplit en réalité des actes de commerce et doit être considérée comme commerçante.

La clause est donc réputée non écrite à son égard et elle ne peut renoncer à l’application des dispositions protectrices de l’article 48 du Code de procédure civile.

L’intimée, société commerciale, a son siège social à Aix-en-Provence et l’association appelante pouvait donc saisir à son choix, le tribunal de commerce ou le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence. C’est à tort que le tribunal de commerce de Marseille s’est déclaré compétent.

En application de l’article 90 du Code de procédure civile, la cour, lorsqu’elle infirme du chef de la compétence, statue néanmoins sur le fond du litige si la cour est juridiction d’appel relativement à la juridiction qu’elle estime compétente, ce qui est le cas en l’espèce, tant pour le tribunal de commerce que pour le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence.

Sur le fond :

L’incubateur Impulse, rappelant que la rupture du contrat d’incubation est dû exclusivement à la déloyauté de l’intimée qui avait violé les dispositions de l’annexe 5 du contrat interdisant l’embauche des salariés de l’incubateur accompagnant son projet, soutient que : dans le cadre d’un déroulement normal des relations contractuelles, la création des BSA au bénéfice réservé de l’incubateur dans les 12 mois est une obligation prévue par la loi contractuelle. Ainsi, durant la première période dite « phase d’incubation » telle que stipulée à l’annexe 5, les BSA doivent être créés et ceci, par hypothèse incontournable, quelle que soit l’option de règlement qui sera ensuite choisie avec l’incubateur parmi celles énoncées aux articles 3.1.a. à 3.1.d. durant la deuxième période dite de « latence », comme indiqué à l’annexe 5 précitée.

Il en déduit que la résiliation intervenue en application des dispositions de l’article 10 ne dispensait pas la SAS Panaxium de s’acquitter de ses obligations figurant à l’annexe 3 consistant en l’émission de bons de souscription d’actions (BSA) laquelle devait être remplie pendant la première période de 12 mois de l’incubation. Elle sollicite l’indemnisation de son préjudice, né de cette défaillance contractuelle, à hauteur de la somme de 40 000 euros.

La SAS Panaxium réplique, en rappelant les dispositions de l’article 10 du contrat sur la résiliation et de l’annexe 3 du contrat, qu’elle s’est acquittée de l’ensemble de ses obligations à la suite de la résiliation du contrat d’incubation et que l’émission des BSA n’intervient qu’en cas de remboursement différé des sommes dues à l’incubateur, ce qui n’est nullement le cas en l’espèce. Elle ajoute qu’aucune des dispositions du contrat ne vient confirmer la thèse de l’incubateur selon laquelle aucun droit d’option en cas de résiliation n’était ouvert avant une période de 24 mois.

Sur ce, il n’est discuté par aucune des parties que, d’une part, la résiliation est imputable à la SAS Panaxium qui a embauché un salarié de l’incubateur Impulse en violation des dispositions contractuelles (annexe 5) et, d’autre part, que la SAS Panaxium s’est acquittée des sommes dues en application de l’article 10.3 lequel stipule : Dans tous les cas de résiliation, le « Porteur de Projet » devra rembourser immédiatement toutes les sommes avancées par l’«Incubateur » majorées de 20%. Il est précisé en tant que de besoin que l’échec du projet n’est pas considéré comme cas de résiliation.

L’émission des BSA, contrairement à ce que soutient l’appelant, n’est nullement évoqué dans l’annexe 5, laquelle règle les conditions particulières d’accompagnement en distinguant effectivement deux périodes pour le contrat : une première période de 24 mois correspondant à la phase de développement initial et une seconde période de 24 mois correspondant à une période de latence durant laquelle doit être négocié un échéancier de remboursement au terme de ces 24 mois. Les modalités de remboursement sont décrites dans l’annexe 3.

La résiliation du contrat, y compris pour une faute contractuelle commise par l’incubé, est prévue aux articles 10.1 à 10.3, ce dernier texte prévoyant le remboursement majoré de 20% de toutes les sommes avancées par l’incubateur.

L’annexe 3 du contrat, intitulée « retour sur investissement » prévoit le remboursement des sommes avancées par l’incubateur au profit de l’incubé à l’issue du contrat. Aux termes de l’article 3.1 du contrat où l’incubé s’engage « irrévocablement » à rembourser diverses sommes, ne figurent pas les BSA qui n’apparaissent qu’à l’article 3.2.

Pour le remboursement des sommes avancées, l’article 3.1 décrit quatre modes de remboursement possibles, le dernier prévoyant une combinaison des 3 précédents. L’emploi du mot « soit » à chaque paragraphe montre qu’il s’agit bien d’une option offerte à l’incubé. L’article 3.2 prévoit que dans l’hypothèse où le porteur de projet n’aurait pas opté pour le règlement direct ou anticipé prévu au 3.1.a et en complément des engagements prévus aux 3.1.b, 3.1.c, ou 3.1.d au regard du différé de remboursement proposé (‘) le porteur de projet s’engage également et de manière irrévocable à mettre en ‘uvre le système de participation suivant (‘) en distinguant entre sociétés créées sous forme de SARL ou sous forme de SA ou SAS et, pour ces dernières la création des BSA litigieux.

Il résulte de la simple lecture de ces dispositions que la souscription des BSA n’est nullement un engagement irrévocable dû en tout état de cause, mais seulement dans l’hypothèse où l’incubé n’aurait pas préalablement opté pour un règlement direct ou anticipé.

Enfin, l’article 3.1.a) stipule : Soit par règlement direct ou anticipé : s’entend ici, soit par règlement des sommes susvisées immédiatement à l’issue de la période d’incubation qui s’entend soit de l’arrivée du terme des 24 mois d’incubation, soit de sa fin prématurée du fait d’une résiliation anticipée autorisée par la présente convention ou d’une résolution judiciaire s’il y a lieu. Dans ce cas le porteur de projet remboursera les sommes avancées, sauf exception des cas de résiliation mentionnés à l’article 10 du présent contrat.

Il en résulte que pour les cas de résiliation prévus à l’article 10, dont la résiliation pour une faute contractuelle commise par l’incubé, celui-ci devra rembourser immédiatement toutes les sommes avancées par l’incubateur majorées de 20%.

C’est dire que l’incubé ne bénéficie d’aucune des options favorables édictées à l’article 3 et est redevable d’une pénalité de 20%.

L’émission de BSA n’est qu’une modalité de remboursement parmi d’autres, ne constitue pas une sanction et n’est pas applicable à la résiliation intervenue entre les parties.

Les demandes dirigées contre la SAS Panaxium sont rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Marseille du chef de la compétence s’agissant des demandes dirigées contre la SAS Panaxium,

Dit que la juridiction compétente était le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence ou le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence, au choix du demandeur, personne morale civile,

Vu l’article 90 du Code de procédure civile,

Rappelle que la cour d’appel d’Aix-en-Provence est la juridiction d’appel du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence et du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence,

Statuant au fond,

Déboute l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]-[Localité 6] de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la SAS Panaxium ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]-[Localité 6] à payer à la SAS Panaxium la somme de cinq mille euros,

Condamne l’association de préfiguration de l’incubateur interuniversitaire de l’académie d'[Localité 4]-[Localité 6] aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

 


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