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délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 08 NOVEMBRE 2022
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 22/03105 – N° Portalis DBVK-V-B7G-POKJ
ARRET N°
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 30 MAI 2022
TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS
N° RG 2022001914
APPELANTE :
S.A.S. SIRIUS CONSEIL (ECHARGE)
[Adresse 4]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Lola JULIE, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.A.S. LA CONCEPTARIA agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Marie GALLE, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO – DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance d’assignation à jour fixe du 20 juin 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 SEPTEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller
M. Thibault GRAFFIN, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO
ARRET :
– Contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.
*
* *
FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES:
Suivant offre du 11 mars 2021, la SAS Sirius conseil (Echarge) a proposé à la SAS La Conceptaria la fourniture et la pose de quatre bornes électriques « EvTroniq50 » destinés à équiper des véhicules pour un montant total de 134 031,87 euros complétée par l’engagement écrit de sa part, le 22 mars 2021, de réaliser l’installation sous cinq semaines ; le 27 mai 2021, la société Conceptaria a accepté l’offre de la société Sirius conseil et a réglé un acompte de 40 209,56 euros.
Confrontée à des retards de production des bornes électriques commandées, la société Sirius conseil a, le 3 août 2021, informé son cocontractant de ce qu’elle ne pouvait procéder à la livraison et l’installation des bornes avant 16 à 20 semaines soit aux alentours du 15 septembre.
Par courriel du 24 août 2021, la société La Conceptaria a informé la société Sirius conseil qu’elle annulait sa commande et sollicitait le remboursement de l’acompte versé ; elle a réitéré sa demande par lettre recommandée du 1er décembre 2021, mettant en demeure la société Sirius conseil de lui restituer l’acompte sous dix jours.
Après une tentative de conciliation, la société La Conceptaria a, par exploit du 4 mai 2022, fait assigner à jour fixe la société Sirius conseil devant le tribunal de commerce de Béziers pour voir prononcer la résolution du contrat, ordonner la restitution de l’acompte d’un montant de 40 200 euros et condamner la défenderesse au paiement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices financiers et économiques.
Devant le tribunal, la société Sirius conseil a soulevé l’incompétence de la juridiction saisie au profit du tribunal de commerce de Bayonne, excipant d’une clause attributive de compétence insérée à l’article 14 « REGLEMENT DES LITIGES » de ses conditions générales de vente.
Le tribunal, par jugement du 30 mai 2022, a rejeté l’exception d’incompétence, a dit qu’il était compétent pour statuer sur le litige et a renvoyé l’affaire à une audience ultérieure pour qu’il soit statué sur le fond du litige.
Pour statuer comme il l’a fait, le tribunal, se fondant sur les dispositions de l’article 48 du code de procédure civile, a considéré que les clauses dérogeant aux règles de compétence territoriale doivent être spécifiées de façon très apparente, c’est-à-dire qu’elles doivent se différencier des autres clauses du contrat, ce qui n’était pas le cas en l’espèce puisque les conditions générales de vente signées par la société La Conceptaria montrent que, bien qu’il soit placé au-dessus de l’encadré réservé au cachet commercial, l’article 14 est rédigé avec les mêmes caractères que les autres articles desquels il ne se différencie pas, ce dont il se déduit que cet article n’est pas « très apparent ».
La société Sirius conseil a régulièrement relevé appel, le 10 juin 2022, de ce jugement et a été autorisée, par une ordonnance du délégataire du Premier président en date du 20 juin 2022, à assigner à jour fixe la société La Conceptaria devant la cour pour l’audience du 13 septembre 2022.
Elle demande à la cour, dans ses conclusions déposées le 31 août 2022 via le RPVA, d’infirmer le jugement entrepris, de juger la clause attributive de compétence prévue à l’article 14 de ses conditions générales de vente conforme et opposable aux parties et, en conséquence, de juger que le tribunal de commerce de Béziers est incompétent pour statuer sur le litige et de renvoyer l’affaire devant le tribunal de commerce de Bayonne, outre la condamnation de la société La Conceptaria à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La société La Conceptaria, dont les conclusions ont été déposées par le RPVA le 8 septembre 2022 sollicite de voir confirmer le jugement du 30 mai 2022 en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence territoriale, déclarer compétent le tribunal de commerce de Béziers pour statuer sur le fond du litige et condamner la société Sirius conseil à lui payer les sommes de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS de la DECISION :
Aux termes de l’article 48 du code de procédure civile : « Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contractées en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée ».
Dans le cas présent, les parties s’opposent sur le caractère « très apparent » de la clause attributive de compétence spécifiée dans les conditions générales de vente et de travaux annexées à l’offre de la société Sirius conseil du 11 mars 2021.
Pour considérer que la clause litigieuse n’avait pas été spécifiée de façon très apparente, le tribunal a considéré que celle-ci était rédigée avec les mêmes caractères que les autres articles des conditions générales desquelles elle ne se différenciait pas.
Or, les conditions générales de vente et de travaux, annexées à l’offre du 11 mars 2021, comportent quatorze articles, répartis en deux colonnes sur une même page au bas de laquelle le gérant de la société La Conceptaria a apposé sa signature précédée de la mention « bon pour accord » et le cachet de son entreprise ; les quatorze articles des conditions générales, dont l’article 14 intitulé « REGLEMENT DES LITIGES », qui contient la clause attributive de compétence litigieuse, sont rédigées avec la même typographie, en caractères parfaitement lisibles, de couleur noire et de taille normale ; la clause apparaît distinctement, au sein d’un texte ne comportant qu’un nombre raisonnable de lignes, regroupés en une page unique, au bas de laquelle le gérant a donc apposé sa signature, la mention « bon pour accord » et le cachet de son entreprise.
Il ne peut être soutenu qu’une clause attributive de compétence territoriale doit, pour être valable, être rédigée dans des caractères différents des autres clauses des conditions générales dans lesquelles elle ne se trouve insérée ; l’article 48 susvisé exige seulement qu’elle soit spécifiée de façon très apparente, ce qui est le cas en l’espèce eu égard à la typographie utilisée et à la situation de la clause dans le texte des conditions générales, l’attention du cocontractant, qui les a expressément acceptées, ayant ainsi été attirée sur l’existence et le contenu d’une telle stipulation présentée sous le titre en majuscules « REGLEMENT DES LITIGES » ; il convient dès lors de considérer, contrairement à ce qu’a estimé le tribunal, que la clause litigieuse est bien opposable à la société La Conceptaria.
Il est spécifié à l’article 14 desdites conditions générales que tout litige relatif aux ventes, travaux ou prestations conclus, même en cas de recours en garantie ou de pluralité de défendeurs, sera, à défaut d’accord amiable, de la compétence exclusive du tribunal compétent qui sera soit le tribunal de commerce si le client est une entreprise, soit le tribunal de grande instance si le client est un particulier dans le ressort duquel se trouve le siège de Sirius conseil.
En l’occurrence, le siège social de la société Sirius conseil se trouve à Bidart (Pyrénées-Atlantiques) et la société La Conceptaria a contracté en qualité de commerçant, ce dont il résulte que le litige relève de la compétence du tribunal de commerce de Bayonne.
La société Sirius conseil, dont l’exception d’incompétence territoriale est finalement accueillie, ne peut se voir reprocher un abus de droit dans l’exercice d’une voie de recours ; la demande de la société La Conceptaria en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ne peut dès lors qu’être rejetée.
Au regard de la solution apportée au règlement du litige, chacune des parties conservera à sa charge les dépens personnellement exposés en cause d’appel; il y a lieu, dans ces conditions, de rejeter les demandes présentées tant par la société La Conceptaria que la société Sirius conseil au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,
Dit que le tribunal de commerce de Bayonne est compétent pour connaître du litige,
Ordonne en conséquence le renvoi à cette juridiction du dossier de l’affaire,
Rejette la demande de la société Sirius conseil en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Dit que chacune des parties conservera à sa charge les dépens personnellement exposés en cause d’appel,
Rejette les demandes présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
le greffier, le président,