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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 4
ARRET DU 12 AVRIL 2023
(n° , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05551 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCIWN
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Mars 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 19/06362
APPELANT
Monsieur [B] [O]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Anne-françoise ABECASSIS, avocat au barreau de PARIS, toque : T10
INTIMEE
S.A.R.L. SOCIETE D’EXPLOITATION HOTELIERE [Localité 3] [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Jonathan BELLAICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : K103
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme BLANC Anne-Gaël, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. de CHANVILLE, président de chambre
Mme BLANC Anne-Gaël, conseillère, chargée, conseiller
Mme MARQUES Florence, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Justine FOURNIER
ARRET :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par contrat de travail à durée indéterminée du 19 juin 2014, M. [B] [O], né en 1973, a été engagé en qualité de pizzaïolo par la SARL Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] qui exploite un hôtel restaurant à [Localité 5] (92).
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants.
En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [O] était de 2.791,34 euros.
Par lettre du 2 novembre 2015, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 10 suivant, avec mise à pied conservatoire. Le 16 novembre, il a été licencié pour faute grave au motif qu’il ferait preuve d’un manque d’implication et de professionnalisme, d’insubordination à l’égard de ses supérieurs hiérarchiques, qu’il serait agressif voire harcelant avec ses collègues, qu’il préparerait son repas à partir d’ingrédients trouvés sur son lieu de travail bien que percevant une indemnité de repas, qu’il sortirait fumer pendant le service ce qui désorganiserait le service, qu’il jouerait avec son téléphone en mettant les écouteurs ce qui l’empêcherait d’entendre les commandes et qu’il quitterait son poste en avance.
Le 8 janvier 2016, contestant son licenciement et demandant la condamnation de son employeur au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, M. [O] a saisile conseil de prud’hommes de Paris qui, par jugement du 3 mars 2020, a constaté la péremption de l’instance et rejeté l’ensemble des demandes.
Par déclaration du 16 août 2020, M. [O] a fait appel de cette décision, notifiée le 16 juillet précédent.
Dans ses dernières conclusions remises au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 19 septembre 2022, M. [O] demande à la cour d’infirmer le jugement et, statuant à nouveau et y ajoutant, de :
– constater l’absence de péremption d’instance ;
– prononcer la nullité du licenciement ou, subsidiairement, le juger abusif ;
– condamner la Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 1.077,41 euros net de rappel de complément de salaire d’avril, mai, juin et du 1er au 6 juillet 2015, outre 107,74 euros net de congés payés afférents ;
– condamner la Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 18.000 euros de dommages et intérêts pour nullité du licenciement ou, subsidiairement, licenciement abusif ;
– condamner la Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 837,40 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement ;
– condamner la Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 2.791,34 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 279,13 euros de congés payés afférents au préavis ;
– condamner la Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 1.395,67 euros à titre de rappel de salaire de la période de mise à pied conservatoire, outre 139,56 euros de congés payés incidents ;
– condamner la société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 2.791 euros pour non respect de la procédure ;
– condamner la Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 5.000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral du fait de la maltraitance subie, de la violation de l’obligation de sécurité, et santé au travail, de l’atteinte à l’exercice loyal du contrat de travail et du caractère brutal et vexatoire du licenciement ;
– assortir la condamnation des intérêts au taux légal avec capitalisation des intérêts ;
– ordonner la remise de documents sociaux conformes ;
– condamner la société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à lui payer 2.250 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens.
Dans ses conclusions remises au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 16 février 2021, la société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] demande à la cour de :
– principalement, confirmer la décision en jugeant que l’instance est périmée ;
– subsidiairement, juger le licenciement justifié et débouter M. [O] de ses demandes ;
– à titre infiniment subsidiaire, ramener les prétentions de M. [O] à de plus justes proportions et limiter l’indemnité de licenciement à 790,88 euros ;
– en tout état de cause, condamner M. [O] à lui payer 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 31 janvier 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 27 février 2023.
Pour l’exposé des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1 : Sur la péremption
Il résulte des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que les dispositions de l’article R. 1452-8 du code du travail demeurent applicables aux instances d’appel dès lors que le conseil de prud’hommes a été saisi avant le 1er août 2016.
En l’espèce, le conseil a été saisi le 8 janvier 2016 de sorte que l’article R.1452-8 ancien, qui disposait qu’en matière prud’homale, l’instance n’était périmée que lorsque les parties s’abstenaient d’accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui avaient été expressément mises à leur charge par la juridiction, reste applicable au litige malgré son abrogation.
Par ailleurs, il est constant que dès lors que le magistrat chargé d’instruire l’affaire a ordonné aux parties d’accomplir des diligences procédurales, le délai de péremption court à compter de la notification de cette décision.
Au cas présent, par décision du 30 juin 2017, le conseil de prud’hommes a radié l’instance introduite par M. [O] en précisant que l’affaire pourrait être rétablie lorsque la partie demanderesse aura fait la preuve de la communication définitive de ses pièces et de ses moyens.
Cette décision de radiation a été notifiée à M. [O] le 8 août 2017 en sorte que son délai pour accomplir les diligences mises à sa charge sous peine de péremption de l’instance expirait le jeudi 8 août 2019 à minuit.
Or, il est suffisamment établi que ce dernier a sollicité le rétablissement de son affaire le 28 juin 2019 et qu’il s’est acquitté de la communication de ses conclusions et pièces le 1er juillet suivant.
Dès lors, les diligences à sa charge ayant été accomplies avant l’expiration du délai de péremption, celle-ci n’était pas acquise lorsque le conseil a statué.
Ainsi, le jugement aux termes duquel le conseil a constaté la péremption et n’a pas examiné les demandes au fond sera infirmé.
2 : Sur l’exécution du contrat de travail
2.1 : Sur le rappel de complément de salaire en tant que co-responsable du restaurant
Alors que l’employeur le conteste, il n’est pas établi par les seuls courriers de réclamation que le salarié verse aux débats que les parties ont convenu d’une augmentation de la rémunération de son salaire contractuel en raison de sa promotion comme responsable du restaurant.
La demande de rappels de salaire à ce titre sera rejetée et le jugement complété en ce sens.
2.2 : Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral du fait de la maltraitance subie, de la violation de l’obligation de sécurité et de santé au travail et de l’atteinte à l’exercice loyal du contrat de travail
Aux termes de l’article L.4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1 ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
Par ailleurs, l’article L.1222-1 dispose que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Au cas présent, le salarié se prévaut de pressions de son employeur, du retrait de ses outils de travail à son poste à son retour de congés, de l’agressivité de collègues de travail et de propos discriminants en raison de ses origines pendant l’entretien préalable.
Cependant, au soutien de ses allégations, les pièces produites par M. [O] sont, pour l’essentiel d’entre elles, des courriers rédigés par ses soins ou des documents qui rapportent ses seuls dires qui ne suffisent pas à établir les manquements dont il se prévaut.
Pour le surplus, le courrier de son employeur invoquant la suppression de son poste pour motif économique et le compte-rendu d’entretien préalable établi par le conseiller du salarié ne démontrent pas davantage les manquements invoqués, la simple évocation, à la supposée avérée, d’une origine commune de deux salariés par le gérant et du fait qu’il devrait s’entendre de ce fait étant certes maladroite mais pas intrinsèquement discriminante.
La demande indemnitaire à ce titre sera rejetée et le jugement complété en ce sens.
3 : Sur le licenciement
3.1 : Sur la nullité du licenciement
Il est constant que le licenciement pour inaptitude qui trouve son origine dans le harcèlement moral dont le salarié a été victime est nul.
Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Par ailleurs en application de l’article L.1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application de cet article, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Cependant, alors que le salarié n’invoque pas spécifiquement de faits au soutien du harcèlement moral évoqué, il ressort de ce qui précède que les manquements allégués par ailleurs ne sont pas établis.
Dès lors, M. [O] ne présente aucun élément de fait de nature à établir le harcèlement dont il se prévaut.
Celui-ci ne sera donc pas retenu et, en l’absence d’autre moyen de nullité, il n’y a pas lieu de juger que le licenciement est nul.
Le jugement sera complété de ce chef.
3.2 : Sur la faute grave
L’article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié. Aux termes de l’article L.1232-1 du même code, le licenciement par l’employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise.
Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l’espèce, aux termes de la lettre de rupture du 16 novembre 2015, M. [O] a été licencié pour faute grave au motif qu’il ferait preuve d’un manque d’implication et de professionnalisme, d’insubordination à l’égard de ses supérieurs hiérarchiques, qu’il serait agressif voire harcelant avec ses collègues, qu’il préparerait son repas à partir d’ingrédients trouvés sur son lieu de travail bien que percevant une indemnité de repas, qu’il sortirait fumer pendant le service ce qui le désorganiserait, qu’il jouerait avec son téléphone en mettant les écouteurs ce qui l’empêcherait d’entendre les commandes et qu’il quitterait son poste en avance.
Cependant, alors que le salarié soutient que les faits fautifs sont prescrits, conteste leur matérialité et produit un courrier lui annonçant la prochaine suppression de son poste de pizzaïolo en raisons de difficultés économiques, l’employeur qui a la charge exclusive de la preuve de la faute grave, ne produit aucune pièce de nature à dater et à démontrer les manquements invoqués dans le courrier de rupture.
La faute grave n’est donc pas établie et le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera complété en ce sens.
3.3 : Sur les conséquences de la rupture
3.3.1 : Sur le rappel de salaire sur mise à pied et les congés payés afférents
En l’absence de faute grave, M. [O] ne pouvait pas être mis à pied. En conséquence, son employeur sera condamné à lui payer la somme de 1.395,67 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre 139,56 euros de congés payés afférents.
Le jugement sera complété en ce sens.
3.3.2 : Sur l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents
En application de l’article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit s’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d’un mois. L’article L.1234-5 dispose par ailleurs que, lorsque le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.
Le salarié est donc en droit de percevoir une indemnité compensatrice de préavis d’un mois de salaire soit une somme de 2.791, 34 euros majorée des congés payés afférents, soit 279,13 euros.
Le jugement sera complété sur ce point.
3.3.3 : Sur l’indemnité de licenciement
Aux termes de l’article L.1234-9 du code du travail dans sa version applicable au présent litige dispose que le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.
Au titre de l’article R 1234-2 du même code dans sa version applicable au litige, l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté.
Au cas présent, le salarié qui avait une année et demie d’ancienneté, préavis inclus, peut prétendre au paiement d’une indemnité de licenciement de 837,40 euros.
Le jugement sera complété sur ce point.
3.3.4 : Sur les dommages et intérêts pour licenciement abusif
En application de l’article L.1235-5 du code du travail dans sa version applicable au litige, le salarié qui avait moins de deux ans d’ancienneté peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.
Au regard de l’âge du salarié, de son ancienneté et des ses difficultés de retour à l’emploi entraînant une perte de revenus, une somme de 4.000 euros lui sera accordée à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.
3.3.5 : Sur les dommages et intérêts pour non respect de la procédure
IL résulte du rapprochement des articles L.1235-2 et L.1235-5 du code du travail que, lorsque le licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté survient sans que la procédure requise ait été observée, le salarié ne peut prétendre à une indemnité pour irrégularité de la procédure, sauf en cas de méconnaissance des dispositions relatives à l’assistance du salarié par un conseiller. Dans ce cas le salarié peut prétendre à une indemnité pour irrégularité de la procédure, qu’il s’agisse ou non d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse.
En l’espèce, il apparaît que l’irrégularité alléguée, à savoir le fait que certains griefs figurant dans le courrier de rupture n’auraient pas été mentionnés pendant l’entretien préalable, n’est pas une méconnaissance des dispositions relatives à l’assistance du salarié par un conseiller. Il s’en suit que M. [O] n’a droit à aucune indemnité à ce titre.
3.3.6 : Sur les dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire
Aux termes de l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il résulte de ces dispositions que l’octroi de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des circonstances brutales et vexatoires du licenciement nécessite, d’une part, la caractérisation d’une faute dans les circonstances de la rupture du contrat de travail qui doit être différente de celle tenant au seul caractère abusif du licenciement, ainsi que, d’autre part, la démonstration d’un préjudice distinct de celui d’ores et déjà réparé par l’indemnité allouée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au cas présent, la faute distincte du seul caractère abusif de la rupture n’est pas démontrée.
La demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire sera rejetée et le jugement complété de ce chef.
4 : Sur les intérêts
Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les intérêts au taux légal courent sur les créances salariales à compter de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et du présent arrêt pour le surplus.
La capitalisation des intérêts qui est de droit lorsqu’elle est demandée comme c’est le cas en l’espèce sera ordonnée.
Le jugement sera complété sur ce point.
5 : Sur les demandes accessoires
La remise des documents sociaux conformes au présent arrêt, qui est de droit, sera ordonnée et devra intervenir dans les quinze jours de la signification.
Au regard du sens de la présente décision, le jugement sera infirmé sur la charge des dépens.
Les dépens seront supportés par l’employeur qui sera également condamné au paiement de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour :
– Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 3 mars 2020 ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
– Rejette la demande tendant à voir constater la péremption de l’instance ;
– Rejette la demande de complément de salaire d’avril, mai, juin et du 1er au 6 juillet 2015 et de congés payés afférents ;
– Rejette la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral du fait de la maltraitance subie, de la violation de l’obligation de sécurité/santé au travail et de l’atteinte à l’exercice loyal du contrat de travail
– Rejette la demande de nullité du licenciement ;
– Juge le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– Condamne la SARL Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à payer à M. [B] [O] la somme de 1.395,67 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre 139,56 euros de congés payés afférents ;
– Condamne la SARL Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à payer à M. [B] [O] la somme de 2.791, 34 euros d’indemnité de préavis majorée des congés payés afférents, soit 279,13 euros ;
– Condamne la SARL Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à payer à M. [B] [O] la somme de 837,40 euros d’indemnité de licenciement ;
– Condamne la SARL Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à payer à M. [B] [O] 4.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
– Rejette la demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire ;
– Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les créances salariales à compter de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et du présent arrêt pour le surplus ;
– Ordonne la capitalisation des intérêts ;
– Ordonne la remise des documents sociaux conformes sous quinzaine de la signification du présent arrêt ;
– Condamne la SARL Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] à payer à M. [B] [O] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles ;
– Condamne la SARL Société d’exploitation hôtelière [Localité 3] [Localité 5] aux dépens de la première instance et de l’appel.
La greffière Le président