Péremption d’instance : 19 mai 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 21/00500

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Péremption d’instance : 19 mai 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 21/00500
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COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 19/05/23

la SCP SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES

Me [B] [Z]

ARRÊT du : 19 MAI 2023

N° : 90 – 23

N° RG 21/00500 + N° RG 21/00838 –

N° Portalis DBVN-V-B7F-GKMF

+

N° Portalis DBVN-V-B7F-GJSX

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d’ORLEANS en date du 10 Décembre 2020 + Jugement du Tribunal de Commerce d’ORLEANS en date du 10 Janvier 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265262830328935 + 1265261151817461

Monsieur [J] [C]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 6]

Demeurant che Mme [X] – [Adresse 2]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Ladislas WEDRYCHOWSKI, membre de la SCP WEDRYCHOWSKI et Associé, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant, Me Eric SOYER, avocat au barreau de PARIS

D’UNE PART

INTIMÉE : – Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265259616553938 + 1265271506510328

Société SOCAMETT

Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 4]

[Localité 5]

Ayant pour avocat postulant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d’ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Eric SEBBAN, avocat au barreau de PARIS

D’AUTRE PART

DÉCLARATIONS D’APPEL en date du : 15 Février 2021 + 23 Mars 2021

ORDONNANCES DE CLÔTURE du : 12 janvier 2023

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l’audience publique du JEUDI 02 FEVRIER 2023, à 14 heures, Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d’Appel d’ORLEANS, en charge du rapport, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l’article 805 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d’Appel D’ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d’Appel d’ORLEANS,

Madame Fanny CHENOT, Conseiller,

Madame Ferréole DELONS, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le VENDREDI 19 MAI 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCEDURE :

La SAS Syninter, exerçant une activité d’entreprise de travail temporaire, a adhéré à la Société de Caution Mutuelle des Entreprises de Travail Temporaire (dite société Socamett) qui apporte une garantie financière aux sociétés de travail temporaire.

Par acte sous seing privé du 30 septembre 2010, M. [J] [C], président de la société Syninter, s’est porté caution solidaire des engagements de la société Syninter pour la période du 1er octobre 2010 au 31 mai 2011 à hauteur de 251.600 euros pour le cas où la garantie financière de la société Socamett serait mise en oeuvre.

Par jugement du 1er juin 2011, le tribunal de commerce d’Orléans a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société Syninter et désigné Me [S] en qualité de liquidateur.

Exposant avoir mis en ‘uvre sa garantie financière au profit de la caisse Réunica au titre des cotisations retraite et prévoyance dues par la société Syninter pour son personnel temporaire de 2009 à 2011, la société Socamett a sollicité la garantie de M. [J] [C] en sa qualité de caution, à hauteur de son engagement.

Par acte du 21 février 2012, la société Socamett a fait assigner M. [J] [C] en paiement de la somme de 251 600 euros, conformément à son engagement de caution, devant le tribunal de commerce d’Orléans et a sollicité le sursis à statuer dans l’attente du montant définitif du sinistre qu’elle aura à régler et donc de son action récursoire à l’encontre de M. [J] [C].

Par jugement du 28 février 2013, le tribunal de commerce d’Orléans a :

– déclaré valide la présente assignation,

Vu l’intérêt à agir de la Socamett,

– sursis à statuer sur la demande principale dans l’attente du montant définitif du sinistre que la Socamett aura à régler,

– sursis à statuer sur la demande de délais formée par M. [J] [C] et sur la demande des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– renvoyé l’affaire à l’audience du 19 septembre 2013,

– débouté les parties de leurs autres demandes, fins et conclusions,

– taxé et liquidé les frais de greffe du présent jugement à la somme de 82,17 euros,

– réservé les dépens.

M. [J] [C] a relevé appel de cette décision.

Par arrêt du 17 avril 2014, la cour d’appel d’Orléans a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et condamné M. [C] aux dépens d’appel, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Parallèlement, par jugement du 11 septembre 2013, le tribunal de commerce d’Orléans a clôturé la liquidation judiciaire de la société Syninter pour insuffisance d’actifs.

Par jugement du 4 septembre 2014, le tribunal de commerce d’Orléans a :

Vu l’article 381 du code de procédure civile,

Statuant par mesure d’administration judiciaire,

– ordonné la radiation de l’affaire opposant la société Socamett à M. [J] [C],

– mis les dépens à la charge de la société Socamett.

Par conclusions ‘aux fins de rétablissement au rôle et d’interruption de la péremption’ déposées au greffe le 28 janvier 2015, la société Socamett a sollicité le rétablissement de l’affaire au rôle et qu’il soit dit et jugé que l’instance est seulement suspendue jusqu’à ce que la société Socamett connaisse le montant total du sinistre à régler et non radiée et que cette suspension ne porte en aucun cas atteinte à la procédure en paiement dont le tribunal est saisi et que cette suspension ne concerne par le délai de deux anx de l’article 386 du code de procédure civile.

Par jugement du 18 juin 2015, le tribunal de commerce d’Orléans a :

– sursis à statuer sur la demande principale dans l’attente du montant définitif du sinistre que la Socamett aura à régler,

– renvoyé l’affaire à l’audience du 3 décembre 2015,

– taxé et liquidé les dépens du présent jugement à la somme de 71,52 euros,

– réservé les dépens.

Après plusieurs renvois sollicités par la société Socamett dans l’attente de la détermination de sa créance, le tribunal de commerce a, par jugement du 3 mars 2016, ordonné la radiation de l’affaire et mis les dépens à la charge de la société Socamett.

Par conclusions ‘aux fins de réenrôlement et au fond’ déposées au greffe le 7 mars 2018, la société Socamett a sollicité le réenrôlement de l’affaire précisant que le montant définitif de sa créance ne pourra être connu qu’à compter du 20 mai 2018 (soit 5 années après la fin de la garantie octroyée), selon l’article L.1251-49 du code du travail, et à nouveau un sursis à statuer dans cette attente. L’affaire a été réenrôlée.

M. [J] [C] a opposé la péremption de l’instance en application de l’article 386 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 10 janvier 2019, le tribunal de commerce d’Orléans a :

– constaté que la péremption d’instance n’est pas acquise,

– renvoyé les parties au fond à l’audience du 7 mars 2019 à 14 heures,

– dit qu’il n’y a lieu, à ce stade de l’instance, à statuer sur les demandes relatives aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– taxé et liquidé les frais de greffe du présent jugement à la somme de 68,02 euros,

– réservé les dépens.

 

Par jugement contradictoire du 10 décembre 2020, le tribunal de commerce d’Orléans a :

– constaté que la péremption d’instance n’est pas acquise et que l’instance n’est pas éteinte,

– condamné M. [J] [C] à payer à la Société de Caution Mutuelle des Entreprises de Travail Temporaire le solde des sommes dues soit la somme de 49.545,14 euros,

– dit que M. [J] [C] pourra s’acquitter de sa dette de 49.545,14 euros en 23 mensualités de 500 euros et le solde à la 24ème mensualité, le premier paiement

devant intervenir un mois après la signification du présent jugement,

– dit que le non paiement d’une seule des mensualités entraînera la déchéance du terme et rendra exigible immédiatement le solde restant dû,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement,

– condamné M. [J] [C] à verser la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

– condamné M. [J] [C] en tous les dépens y compris les frais de greffe liquidés à la somme de 74,54 euros.

Suivant déclaration du 15 février 2021, M. [J] [C] a interjeté appel du jugement du 10 décembre 2020 en ce qu’il a constaté que la péremption d’instance n’est pas acquise et que l’instance n’est pas éteinte, l’a condamné à payer à la société Socamett le solde des sommes dues soit la somme de 49.545,14 euros, ainsi que la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile (RG 21/500).

Suivant déclaration du 23 mars 2021, M. [J] [C] a interjeté appel du jugement du 10 janvier 2019 en ce qu’il a constaté que la péremption de l’instance n’est pas acquise et a renvoyé les parties au fond à l’audience du 7 mars 2019 à 14 heures et du jugement du 10 décembre 2020 en ses mêmes dispositions critiquées plus avant (RG 21/838).

 

Par ordonnance du 2 décembre 2021, le président de cette chambre chargé de la mise en état a notamment débouté la société Socamett de toutes ses demandes formées dans le cadre de l’incident porté devant le conseiller de la mise en état par conclusions du 17 août 2021 tendant à voir déclarer irrecevable l’appel du 23 mars 2021 formé contre les deux jugements des 10 janvier 2019 et 10 décembre 2020.

La société Socamett a déféré cette ordonnance à la cour qui, par un arrêt du 6 avril 2022, a confirmé l’ordonnance entreprise.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 14 décembre 2022 dans l’instance poursuivie sous le n° RG 21/500, M. [J] [C] demande à la cour de : 

Vu l’article 367 du code de procédure civile,

– ordonner la jonction de l’instance enregistrée sous le n° de RG 21/00500 et de l’instance enregistrée sous le n° de RG 21/00838,

Vu les articles 386 et suivants du code de procédure civile,

– constater qu’aucune diligence interruptive du délai de péremption n’a été accomplie dans l’instance n°2015 00068 dans le délai de deux ans suivant le jugement de radiation du 3 mars 2016 et précédant la date d’enregistrement, par le greffe du tribunal de commerce d’Orléans, des conclusions de la société Socamett aux fins de réenrôlement et de sursis, soit le 7 mars 2018,

– constater en conséquence qu’à la date de la demande, par la société Socamett, de rétablissement de l’affaire devant le tribunal, la péremption de l’instance était acquise,

– constater en conséquence que l’instance 2015 00068 était éteinte à la date de son réenrôlement sous le n° 2018 002257,

– infirmer en conséquence le jugement du tribunal de commerce d’Orléans du 10 janvier 2019 et le jugement du tribunal de commerce d’Orléans du 10 décembre 2020, et, statuant à nouveau, dire n’y avoir lieu à condamnation de M. [J] [C],

– condamner la société Socamett à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros majorée de la TVA en vigueur que M. [C] ne récupère pas, soit la somme totale de 3 600 euros, outre la condamnation de Socamett aux entiers dépens de l’instance périmée et de l’instance d’appel, qui seront recouvrés par la SCP Wedrychowski et Associés sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 10 janvier 2023 dans l’instance poursuivie sous le n° RG 21/500, la Société de Caution Mutuelle des Entreprises de Travail Temporaire (société Socamett) demande à la cour de :

Vu les dispositions de l’article 367 du code de procédure civile,

– joindre la présente procédure avec celle enrôlée sous le n° de RG 21/00838,

Vu l’absence de demande de l’appelant d’infirmation ou d’annulation du jugement du 10 janvier 2019,

Vu l’absence de demande de l’appelant tendant à voir déclarer la société Socamett irrecevable en ses demandes, ou déboutée,

Vu les articles 378 et 392 .2 du code de procédure civile,

– déclarer M. [C] mal fondé en ses appels, et l’en débouter,

– confirmer les jugements des 10 janvier 2019 et 10 décembre 2020,

– déclarer M. [C] irrecevable, en tous cas mal fondé, en toutes ses demandes, fins et conclusions, et l’en débouter,

– condamner M. [J] [C] à payer à la société Socamett la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel, et accorder à Me [Z] le droit prévu à l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 14 décembre 2022 dans l’instance poursuivie sous le n° RG 21/838, M. [J] [C] demande à la cour de : 

Vu l’article 367 du code de procédure civile,

– ordonner la jonction de l’instance enregistrée sous le n° de RG 21/00500 et de l’instance enregistrée sous le n° de RG 21/00838,

Vu les articles 386 et suivants du code de procédure civile,

– constater qu’aucune diligence interruptive du délai de péremption n’a été accomplie dans l’instance n°2015 00068 dans le délai de deux ans suivant le jugement de radiation du 3 mars 2016 et précédant la date d’enregistrement, par le greffe du tribunal de commerce d’Orléans, des conclusions de la société Socamett aux fins de réenrôlement et de sursis, soit le 7 mars 2018,

– constater en conséquence qu’à la date de la demande, par la société Socamett, de rétablissement de l’affaire devant le tribunal, la péremption de l’instance était acquise,

– constater en conséquence que l’instance 2015 00068 était éteinte à la date de son réenrôlement sous le n° 2018 002257,

– infirmer en conséquence le jugement du tribunal de commerce d’Orléans du 10 janvier 2019 et le jugement du tribunal de commerce d’Orléans du 10 décembre 2020, et, statuant à nouveau, dire n’y avoir lieu à condamnation de M. [J] [C],

– condamner la société Socamett à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros majorée de la TVA en vigueur que M. [C] ne récupère pas, soit la somme totale de 3 600 euros, outre la condamnation de Socamett aux entiers dépens de l’instance périmée et de l’instance d’appel, qui seront recouvrés par la SCP Wedrychowski et Associés sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 10 janvier 2023 dans l’instance poursuivie sous le n° RG 21/838, la Société de Caution Mutuelle des Entreprises de Travail Temporaire (société Socamett) demande à la cour de :

Vu les dispositions de l’article 367 du code de procédure civile,

– joindre la présente procédure avec celle enrôlée sous le n° de RG 21/00500,

Vu l’absence de demande de l’appelant d’infirmation ou d’annulation du jugement du 10 janvier 2019,

Vu l’absence de demande de l’appelant tendant à voir déclarer la société Socamett irrecevable en ses demandes, ou déboutée,

Vu les articles 378 et 392 .2 du code de procédure civile,

– déclarer M. [C] mal fondé en ses appels, et l’en débouter,

– confirmer les jugements des 10 janvier 2019 et 10 décembre 2020,

– déclarer M. [C] irrecevable, en tous cas mal fondé, en toutes ses demandes, fins et conclusions, et l’en débouter,

– condamner M. [J] [C] à payer à la société Socamett la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel, et accorder à Me [Z] le droit prévu à l’article 699 du code de procédure civile.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

La clôture de chacune des deux procédures a été prononcée par ordonnance distincte du 12 janvier 2023.

MOTIFS

Sur la jonction des instances enrôlées sous les numéros de RG 21/00500 et 21/00838:

Par application de l’article 367 du code de procédure civile, compte tenu du lien qui existe entre les deux litiges, il convient, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice et conformément à la demande des parties, de joindre les instances enrôlées sous les numéros 21/00500 et 21/00838.

Sur la péremption d’instance :

L’article 386 du code de procédure civile dispose que ‘l’instance est périmée lorsque aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans’. Elle a ainsi pour objet de santionner le défaut de diligences des parties.

En application de l’article 378 du code de procédure civile, ‘la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine’.

L’article 379 alinéa 1er du même code prévoit que ‘le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l’expiration du sursis, l’instance est poursuivie à l’initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d’ordonner, s’il y a lieu, un nouveau sursis’.

Selon l’article 392 alinéa 2 du code de procédure civile, le délai de péremption ‘continue à courir en cas de suspension de l’instance sauf si celle-ci n’a lieu que pour un temps ou jusqu’à la survenance d’un événement déterminé ; dans ces derniers cas, un nouveau délai court à compter de l’expiration de ce temps ou de la survenance de cet événement’. Il en résulte que seule une décision prise dans les conditions prévues par l’article 392 alinéa 2 peut suspendre le délai de péremption et que la décision de sursis à statuer ne suspend pas le délai de péremption lorsqu’elle est motivée par des diligences que le juge met à la charge d’une partie.

Lorsque la suspension du délai de péremption est la conséquence d’une décision de sursis à statuer jusqu’à la survenance d’un événement déterminé, un nouveau délai court à compter de la réalisation de cet événement.

M. [J] [C] fait valoir que le délai de péremption a recommencé à courir le 3 décembre 2015, date d’expiration du temps déterminé par la précédente décision de sursis à statuer, et a expiré le 2 décembre 2017 ; que les demandes de renvois postérieures au 3 décembre 2015 n’ont pas prolongé ce terme, pas plus que la décision de radiation résultant du jugement du 3 mars 2016. Il ajoute que si tant est que la demande de sursis à statuer présentée par la société Socamett à l’audience du 3 mars 2016 ait pu interrompre le délai de péremption ayant commencé à courir le 3 décembre 2015, la société Socamett n’a déposé ses conclusions expressément dénommées aux fins de réenrôlement et au fond au greffe que le 7 mars 2018, soit plus de deux ans après le jugement de radiation du 3 mars 2016, de sorte que la péremption de l’instance était indiscutablement acquise à la date de la demande de rétablissement de l’affaire devant le tribunal de commerce et partant l’instance éteinte.

La société Socamett réplique que le jugement du 18 juin 2015 a prononcé un sursis à statuer dans l’attente d’un événement déterminé, c’est-à-dire la connaissance par la société Socamett du montant définitif du sinistre qu’elle aura à régler, lequel montant ne pouvait être connu qu’à compter du 20 mai 2018 puisque les organismes sociaux disposent d’un délai particulier de 5 ans pour ajuster leur déclaration de créance, et que ce sursis à statuer suspend l’instance ainsi que le cours de la péremption ; qu’il importe peu que l’affaire ait été ré-enrôlée puis radiée, à nouveau ré-enrôlée à sa demande le 7 mars 2018, dès lors qu’il est établi qu’aucune diligence n’était mise à sa charge avant le 20 mai 2018 ; que la péremption d’instance ne peut donc lui être opposée.

Il apparaît qu’un premier sursis à statuer a été ordonné par jugement du 28 février 2013 ‘dans l’attente du montant définitif du sinistre que la Socamett aura à régler’, motifs pris de ce qu’ ‘un créancier devant être pris en charge par la Socamett peut encore se manifester et être relevé de la forclusion puisque les opérations de liquidation judiciaire ne sont pas clôturées, que les sommes devant être prises en charge au titre de la garantie Socamett ne sont pas encore parfaitement déterminées’. L’affaire a été renvoyée à l’audience du 19 septembre 2013, ‘date à laquelle le montant du sinistre devant être réglé par la Socamett devra être connu’.

Par jugement du 4 septembre 2014, le tribunal de commerce a ordonné la radiation de l’affaire, sans motivation mais au visa exprès de l’article 381 du code de procédure civile lequel dispose que ‘la radiation sanctionne dans les conditions de la loi le défaut de diligence des parties’.

A la suite de conclusions déposées par la société Socamett aux fins de rétablissement au rôle et d’interruption de la péremption, le tribunal de commerce a, par jugement du 18 juin 2015, à nouveau sursis à statuer ‘dans l’attente du montant définitif du sinistre que la société Socamett aura à régler’, motifs pris de ce que ‘les sommes devant être prises en charge au titre de la garantie Socamett ne sont pas encore déterminées’, et a renvoyé l’affaire à l’audience du 3 décembre 2015, ‘date à laquelle le montant du sinistre devant être réglé par la Socamette devra être connu’.

Par jugement du 3 mars 2016, le tribunal de commerce a ordonné la radiation de l’affaire, sans motivation et sans viser aucun texte.

Il résulte de ce qui précède d’une part que les deux sursis à statuer n’ont pas été ordonnés, comme le soutient la société Socamett, dans l’attente d’un événement déterminé, à savoir sa connaissance du montant définitif du sinistre mis à sa charge qui ne pouvait, selon cette dernière, être connu qu’à compter du 20 mai 2018, cette date ne figurant dans aucune des décisions du tribunal de commerce ; d’autre part qu’il n’existe pas un unique sursis à statuer dans l’attente de l’événement invoqué par la société Socamett mais deux décisions de sursis à statuer suivies chacune d’une décision de radiation. La première mesure de radiation du 4 septembre 2014 vise clairement le défaut de diligence des parties, et par conséquent de la société Socamett qui n’a pas fait connaître à la date de l’audience de renvoi le montant du sinistre. La seconde mesure de radiation du 3 mars 2016, sans viser l’article 381 du code de procédure civile, est intervenue dans les mêmes conditions que la première, à savoir qu’à la date de renvoi la société Socamett n’avait toujours pas fait connaître le montant du sinistre.

Il s’avère qu’après le premier jugement de radiation, la société Socamett a pris des conclusions déposées au greffe le 28 janvier 2015 visant notamment à interrompre la péremption, ce qui témoigne de ce qu’elle avait conscience que le délai de péremption d’instance courait sans être interrompu par la suspension du cours de l’instance du fait du premier sursis à statuer. Si aux termes de conclusions déposées au greffe le 7 mars 2018, la société Socamett n’a pas précisé que ses écritures avaient pour objet d’interrompre la péremption de l’instance, elle a sollicité à nouveau un sursis à statuer, consciente que le précédent sursis à statuer ordonné le 18 juin 2015 n’avait plus cours.

Or, entre le jugement de radiation du 3 mars 2016 et les conclusions de la société Socamett déposées au greffe le 7 mars 2018 plus de deux ans se sont écoulés sans qu’aucune diligence n’ait été accomplie et alors que les sursis à statuer prononcés les 28 février 2013 et 18 juin 2015 n’avaient plus cours et ne pouvaient suspendre le délai de péremption.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris du 10 janvier 2019 qui a constaté que la péremption de l’instance n’était pas acquise ainsi que le jugement du 10 décembre 2020 qui, relevant que la péremption d’instance n’était pas acquise et que l’instance n’était pas éteinte, a condamné M. [J] [C] puis, statuant à nouveau, de constater la péremption de l’instance. Il n’y a, dès lors, pas lieu de statuer au fond.

Sur les autres demandes :

La société Socamett, qui succombe, supportera la charge des dépens de première instance et d’appel et sera condamnée à verser à M. [J] [C] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Ordonne la jonction des instances enrôlées sous les numéros 21/00500 et 21/00838,

Infirme les jugements du 10 janvier 2019 et 10 décembre 2020 rendus par le tribunal de commerce d’Orléans en toutes leurs dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Constate la péremption de l’instance,

Dit n’y avoir lieu à statuer au fond,

Constate en conséquence l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour,

Condamne la Société de Caution Mutuelle des Entreprises de Travail Temporaire (société Socamett) aux dépens de première instance et d’appel, lesquels pourront être directement recouvrés par la SCP Wedrychowski et Associés, avocat, dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,

Condamne la Société de Caution Mutuelle des Entreprises de Travail Temporaire (société Socamett) à verser à M. [J] [C] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d’Appel d’ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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