Compte personnel de formation : 2 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/03339

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Compte personnel de formation : 2 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/03339
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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 5

ARRET DU 12 MAI 2022

(n° 2022/ , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/03339 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB3W3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MEAUX – RG n° 18/00131

APPELANT

Monsieur [A] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Nathalie BAUDIN-VERVAECKE, avocat au barreau de MEAUX

INTIMEES

S.C.P. BTSG En la personne de Maître [P] es qualité de mandataire liquidateur de la SARL SWORD SECURITE PRIVEE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Non comparant, non représenté

Déclaration d’appel signifiée à personne habilitée le 06 août 2020

Association AGS CGEA IDF OUEST UNEDIC Délégation AGS CGEA IDF OUEST représentée par sa Directrice, [L] [U]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Janvier 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Nelly CAYOT, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre,

Madame Nelly CAYOT, Conseillère

Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

– réputé contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Victoria RENARD, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

M. [Z] a été engagé par la société Sword sécurité privée dite Ssp par contrat de travail à durée indéterminée du 29 avril 2014 au poste d’agent de sécurité cynophile au salaire de 1 505,93 euros en rémunération d’un temps plein.

La convention collective des entreprises de prévention et sécurité est applicable et la société occupait à titre habituel au moins 11 salariés.

Par lettre du 31 janvier 2018, M. [Z] a pris acte de la rupture de son contrat de travail et le 20 février 2018, il a saisi le conseil de prud’hommes de demandes liées à l’exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Par jugement du 18 octobre 2018, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société Sword sécurité privée et a désigné la société BTSG prise en la personne de Maître [P] en qualité de mandataire liquidateur.

Par jugement du 30 mars 2020, auquel la cour renvoie pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties et en présence de la Scp BTSG prise en la personne de Maître [N] [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Sword sécurité privée et du Cgea idf ouest, le conseil de prud’hommes de Meaux a :

– pris acte de la remise à la barre par Me [P], ès-qualités de mandataire liquidateur de la sarl Sword sécurité privée , à M. [Z] d’un chèque n°6014472 d’un montant de 2 212,97 euros au titre du salaire de janvier 2018 ainsi que d’un bulletin de paie de février 2018 et un reçu pour solde de tout compte ;

– requalifié la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par M. [Z] qui s’analyse en une démission ;

– débouté M. [Z] de toutes les demande qui en découlent ;

– débouté M. [Z] de l’intégralité de ses demandes ;

– débouté M. [Z] de sa demande d’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné M. [Z] aux entiers dépens y compris les frais éventuels d’exécution par voie d’huissier du jugement.

M. [Z] a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 5 juin 2020.

Par conclusions transmises et notifiées par le réseau privé virtuel des avocats dit RPVA le 3 juillet 2020 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l’article 455 du code de procédure civile, M. [Z] demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris ;

statuant à nouveau, à titre principal,

– prononcer la prise d’acte du contrat de travail aux torts exclusifs de la sarl Sword sécurité privée ;

– ordonner que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– juger les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail inconventionnelles ;

– fixer au passif de la sarl Sword sécurité privée prise en la personne de son mandataire liquidateur la somme de 32 331,16 euros au bénéfice de M. [A] [Z] au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

à titre subsidiaire,

– fixer au passif de la sarl Sword sécurité privée prise en la personne de son mandataire liquidateur au bénéfice de M. [Z] la somme de 6 806,56 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause

– fixer au passif de la sarl Sword sécurité privée prise en la personne de son mandataire liquidateur au bénéfice de M. [A] [Z] les sommes suivantes :

‘ 31 726,62 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de formation obligatoire,

‘ 1 546,88 euros à titre de rappel de salaire sur le mois de janvier 2018,

‘ 154,68 euros au titre des congés payés s’y rapportant,

‘ 3 403,28 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

‘ 340,33 euros au titre de congés payés sur préavis,

‘ 1 666,19 euros à titre d’indemnité légale de licenciement ;

– condamner Me [P] mandataire liquidateur à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– laisser les dépens à la charge de la liquidation ;

– dire le jugement opposable à l’Ags cgea idf ouest sauf en ce qui concerne l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions transmises et notifiées par le RPVA le 4 juillet 2020 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l’article 455 du code de procédure civile, l’Unédic délégation Ags – Centre de Gestion et d’Étude Ags (CGEA) d’Ile-de-France demande à la cour de :

– confirmer le jugement entrepris ;

– débouter [A] [Z] de ses demandes ;

à titre subsidiaire,

– limiter à 3 mois le montant de l’indemnité pour licenciement abusif ;

– fixer au passif de la liquidation les créances retenues ;

– dire le jugement opposable à l’Ags dans les termes et conditions de l’article L 3253-19 du code du travail ;

vu les articles L. 3253-6, L. 3253-8 et L. 3253-17 du code du travail.

– dans la limite du plafond 6 toutes créances brutes confondues ;

– exclure de l’opposabilité à l’Ags la créance éventuellement fixée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– exclure de l’opposabilité à l’Ags l’astreinte ;

vu l’article L 621-48 du code de commerce,

– rejeter la demande d’intérêts légaux ;

– dire ce que de droit quant aux dépens sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’Ags.

La SCP BTSG, prise en la personne de Me [P], mandataire liquidateur de la sarl Sword sécurité privée, n’a pas constitué avocat. En application de l’article 954 du code de procédure civile, le défaut de conclusions produit les effets d’une demande de confirmation.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 Janvier 2022.

La déclaration d’appel et les conclusions de l’appelant ayant été régulièrement signifiées à la SCP BTSG, la décision sera réputée contradictoire.

MOTIVATION :

Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de la société Sword sécurité privée

M. [Z] soutient que le 31 janvier 2018, il a été contraint de rompre son contrat de travail en raison des manquements de la société Ssp notamment dans le maintien de son employabilité. Selon le salarié, la société Ssp était avisée de la nécessité de renouveler sa carte professionnelle d’agent cynophile et elle a négligé la mise en place de la formation nécessaire puis a tardé dans l’organisation de cette formation ce qui a entraîné pour M. [Z] la perte de sa qualification d’agent de sécurité cynophile au 1er janvier 2018.

L’Unedic Ags fait valoir que les manquements invoqués par M. [Z] dans son courrier de prise d’acte étant des faits anciens, ils ne peuvent pas être retenus comme des manquements graves empêchant la poursuite du contrat de travail.

Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission.

Seuls peuvent être de nature à justifier la prise d’acte de la rupture, des manquements de l’employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Le salarié doit rapporter la preuve des manquements qu’il invoque. En cas de doute sur les faits allégués, il profite à l’employeur.

En l’espèce, M. [Z] fait valoir les manquements suivants de son employeur :

– à l’obligation de formation ;

– à l’obligation de maintien de son employabilité et du financement de la formation ;

– à l’obligation du maintien du salaire pendant la formation ;

– la perte de la carte professionnelle ;

– l’incitation à commettre une infraction ;

– l’exécution déloyale du contrat de travail ;

– la violation du droit au repos ;

– le non paiement d’heures supplémentaires ;

– une modification de ses tâches de travail entraînant une modification de sa rémunération ;

– une absence de visite médicale d’embauche ;

– sur le paiement tardif des salaires.

Il convient de relever que certains de ces manquements relèvent des mêmes faits qui seront examinés ensemble. Ainsi, M. [Z] reproche à la société Ssp de ne pas avoir veillé à sa qualification d’agent cynophile en n’organisant pas le stage nécessaire au renouvellement de sa carte professionnelle ce qui a conduit à la perte de sa qualification. Ces faits renvoient à trois des manquements cités à l’appui de la prise d’acte soit le manquement à l’obligation de formation et de maintien de l’employabilité, à l’obligation du financement de la formation et celui lié à la perte de la carte professionnelle.

Les premiers juges ont considéré qu’aucune disposition du code de la sécurité intérieure ne mettait à la charge de l’employeur ou du salarié l’obligation d’effectuer les démarches relatives à l’inscription en renouvellement de la carte professionnelle et que M. [Z] pouvait demander au conseil national des activités privées de sécurité, dit Cnaps, le renouvellement de sa carte professionnelle conformément au décret N°2009-137 du 9 février 2009. Les premiers juges, ayant écarté les autres griefs énoncés au soutien de la prise d’acte pour défaut de preuve, en ont déduit que la prise d’acte de M. [Z] n’était pas fondée sur des manquement suffisamment graves pour en imputer la responsabilité à la société Ssp et lui donner les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions des articles L. 6321-1 et L. 6313-1 du code du travail, l’employeur veille à l’adaptation des salariés à leur poste de travail et à leur capacité à occuper un emploi.

Aux termes de l’article R. 631-15 du code de la sécurité intérieure, les entreprises et leurs dirigeants s’interdisent d’employer ou de commander, même pour une courte durée, des personnels de sécurité et de recherches ne satisfaisant pas aux conditions de qualification professionnelle ou ne possédant pas les autorisations valides requises pour exercer leurs missions.

En conséquence, il appartenait à la société Ssp de s’assurer de l’adéquation des compétences de M. [Z] aux missions confiées et il lui appartenait en sa qualité d’employeur au sein d’une entreprise de sécurité de s’assurer de ce que le salarié était titulaire d’une carte professionnelle en cours de validité.

La demande de renouvellement de la carte professionnelle doit émaner du salarié et ne peut être effectuée plus de trois mois avant son échéance et aux termes de l’arrêté du 27 février 2017 sur la formation des agents privés de sécurité, le salarié doit depuis le 1er janvier 2018 effectuer un stage devenu obligatoire de maintien et d’actualisation des compétences dans les 24 mois précédant l’échéance.

M. [Z] à l’appui de ses prétentions produit les éléments suivants :

– le courrier du 29 septembre 2017 adressé par le conseil national des activités privées de sécurité, dit Cnaps à M. [Z] relevant que sa carte professionnelle expirant le 1er janvier 2018, le salarié devait justifier d’un stage de maintien et d’actualisation des compétences de formation continue obligatoire à compter de cette date ;

– par mail du 6 octobre 2017, M. [Z] a transmis le courrier du Cnaps à M. [J], dont la qualité n’est pas précisée, et l’a interrogé sur les modalités de mise en place d’un stage dans le cadre du fongecif et de son compte personnel de formation ;

– par mail du 16 octobre 2017, M. [Z] a fait connaître à M. [J] les dates de son stage du 20 au 29 novembre et il lui a annoncé l’envoi d’un prochain devis ;

– le 13 octobre 2017, le Cnaps a relancé M. [Z] au sujet de la justification du suivi de son stage ;

– par mail du 20 octobre 2017, M. [Z] a interrogé son employeur au sujet de son inscription à la formation et sur son financement devant être assumé par la société Ssp chargée de former son salarié pour le maintien dans son emploi ;

– par un mail du même jour, la société a répondu en proposant à M. [Z] un rendez-vous au sujet de ce stage le 23 octobre ;

– les mails d’envoi du 10 novembre 2017 de la convention signée entre la société Ssp et la société de formation ;

– la convocation de M. [Z] à une formation à compter du 20 novembre 2017 et la demande de congés de M. [E] sur cette période de formation ;

– le 17 novembre, la formation a été annulée par la société de formation et il a été proposé de la déplacer au 8 janvier 2018 ;

– le 19 novembre, suite à cette annulation, M. [Z] a demandé à son employeur à être planifié sur la période des congés initialement prévue sur la période de formation ;

– le 20 novembre, la société Ssp a rappelé à M. [Z] qu’il devait assumer ses choix de formation ; elle a cependant accepté de le planifier sur sa période de congés initiale ;

– le 11 décembre 2017, M. [Z] a contesté la diminution de son salaire liée à la modification unilatérale de ses fonctions ;

– le 19 décembre 2017, M. [Z] a écrit à la société pour rappeler à son employeur ses obligations à l’égard de son employabilité ainsi que ses manquements depuis 2017 et l’interroger sur la suite qui allait être donnée au défaut de renouvellement de carte professionnelle ;

– le 21 décembre 2017, la société lui a adressé son planning pour janvier 2018 ;

– M. [Z] et la société Ssp ont échangé le 2 janvier 2018 sur le renouvellement de la carte ;

– le 3 janvier, M. [Z] a insisté pour savoir s’il était programmé comme agent cynophile alors qu’il ne pouvait plus travailler en cette qualité ;

– un échange de courriels entre la société Spp et le centre de formation qui a de nouveau annulé la formation devant débuter le 8 janvier 2018 ;

– le 18 janvier 2018, la société envoie à M. [Z] un nouveau planning et une convocation à une formation du 12 au 19 février 2018 ;

– le 25 janvier 2018, elle lui envoie son planning du mois de février 2018 ;

– le 31 janvier 2018, M. [Z] prend acte de la rupture ;

– le courrier du 2 mars 2018 de la société Onet indiquant avoir été informé par le Cnaps du refus de renouvellement de la carte professionnelle de M. [Z] et qu’en conséquence son contrat de travail était rompu de plein droit.

Il est établi que la société Ssp était obligatoirement avisée de la durée de validité de la carte professionnelle de M. [Z] et de la nécessité de la renouveler avant le 31 janvier 2018. En outre il lui appartenait d’être informée de la nouvelle réglementation et de veiller à la mise en place d’un stage de maintien et d’actualisation des compétences indispensable au renouvellement de la carte professionnelle.

En l’espèce, M. [Z] a pris l’initiative de solliciter sa carte professionnelle et la société Ssp a financé le stage rendu obligatoire. Cependant elle n’a entrepris aucune démarche avant cette demande de renouvellement de carte afin d’anticiper le risque de la perte de la carte professionnelle du salarié ni postérieurement à la demande de renouvellement effectuée par le salarié et à l’annulation du stage auprès de l’administration pour tenter de remédier à cette situation. Il est démontré par les mails échangés que la société se considérait extérieure à ce stage de maintien des compétences alors qu’elle en était responsable au premier chef au regard des textes précités.

Il est donc établi que la société Ssp a manqué de diligence dans le cadre de son obligation de veiller à la capacité professionnelle du salarié. La perte par M. [Z] de sa carte professionnelle lui rendait impossible l’exercice de son métier d’agent de sécurité cynophile et l’exécution de son contrat de travail. Dès lors, ce manquement de la société Ssp est suffisamment grave à lui seul pour empêcher la poursuite du contrat de travail et la prise d’acte doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres manquements visés par le salarié. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur les demandes liées à la rupture du contrat de travail

M. [Z] sollicite la fixation de sa créance au titre des indemnités de rupture qui lui sont dues sur la base de son salaire brut et de son ancienneté dont il est justifié au titre d’une indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité de congés payés afférents.

En application des dispositions des articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail, il est ordonné la fixation au passif de la société Sword sécurité privée des créances de M. [Z] à hauteur des sommes suivantes:

– 1 666,19 euros à tire d’indemnité légale de licenciement ;

– 3 403,28 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 340,32 euros à titre d’indemnité de congés payés afférents.

Le jugement est infirmé de ces chefs.

M. [Z] sollicite également des dommages intérêts en écartant les dispositions légales en raison de leur inconventionnalité et à titre subsidiaire, il présente une demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. [Z] demande à la cour d’écarter les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail. Il soutient que l’article 24 de la Charte sociale européenne et l’article 10 de la convention n°158 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sont d’application directe. Il fait valoir que, dès lors, ‘ les limitations prévues par l’article L.1235-3 du code du travail, précité, et visant à plafonner les indemnités octroyées en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, sont susceptibles de contrevenir à l’applicabilité directe tant de l’article 24 de la Charte sociale européenne qu’à l’article 10 de la convention n°158 de l’OIT, en ce qu’une indemnité adéquate ou une réparation appropriée peut nécessairement dépasser les montants prévus.’

Aux termes de l’article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par le même article.

Selon l’article L. 1235-3-1 du même code, l’article 1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues à son deuxième alinéa. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut étre inférieure aux salaires des six derniers mois.

Enfin, selon l’article L. 1235-4 du code du travail, dans le cas prévu à l’article L. 1235-3, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Aux termes de l’article 24 de la Charte sociale européenne, en vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les parties s’engagent à reconnaître :

a) le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service ;

b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée.

A cette fin les Parties s’engagent à assurer qu’un travailleur qui estime avoir fait l’objet d’une mesure de licenciement sans motif valable ait un droit de recours contre cette mesure devant un organe impartial.

L’annexe de la Charte sociale européenne précise qu’il est entendu que l’indemnité ou toute autre réparation appropriée en cas de licenciement sans motif valable doit être déterminée par la législation ou la réglementation nationales, par des conventions collectives ou de toute autre manière appropriée aux conditions nationales.

La Charte réclame des Etats qu’ils traduisent dans leurs textes nationaux les objectifs qu’elle leur fixe. En outre, le contrôle du respect de cette charte est confié au seul Comité européen des droits sociaux dont la saisine n’a pas de caractère juridictionnel et dont les décisions n’ont pas de caractère contraignant en droit français.

Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de l’Union européenne dispose d’une compétence exclusive pour déterminer s’il est d’effet direct, les stipulations d’un traité international, régulièrement introduit dans l’ordre juridique interne conformément à l’article 55 de la Constitution, sont d’effet direct dès lors qu’elles créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l’intention exprimée des parties et à l’économie générale du traité invoqué, ainsi qu’à son contenu et à ses termes, elles n’ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requiérent l’intervention d’aucun acte complémentaire pour produire des effets à l’égard des particuliers.

Il résulte dès lors de ce qui précède que l’article 24 de la Charte sociale européenne n’a pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.

Aux termes de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT), si les organismes mentionnés à l’article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ou d’ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

Comme le soutient à juste titre M. [Z], ces stipulations sont d’effet direct en droit interne dès lors qu’elles créent des droits entre particuliers, qu’elles n’ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l’intervention d’aucun acte complémentaire.

Le terme ‘adéquat’ signifie que l’indemnité pour licenciement injustifié doit, d’une part être suffisamment dissuasive pour éviter le licenciement injustifié, et d’autre part raisonnablement permettre l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi.

Il résulte des dispositions du code du travail précitées, que le salarié dont le licenciement est injustifié bénéficie d’une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l’ancienneté du salarié et que le barème n’est pas applicable lorsque le licenciement du salarié est nul ce qui permet raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi. En outre, le juge applique d’office les dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail. Ainsi, le caractére dissuasif des sommes mises à la charge de l’employeur est également assuré et les trois articles du code du travail précités sont de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT.

Il n’y a donc pas lieu d’écarter les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail qui sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention de l’OIT et il appartient à la cour d’apprécier la situation concrète du salarié pour déterminer le montant de l’indemnité due entre les montants minimaux et maximaux déterminés par cet article.

En l’espèce, M. [Z] justifie de ses difficultés financières à la suite de son licenciement perdurant en 2018 et il convient en conséquence de fixer sa créance à la somme de 6 806,56 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur les dommages intérêts pour défaut de formation obligatoire

M. [Z] sollicite des dommages intérêts en réparation du préjudice causé par la société Ssp qui selon lui n’a pas respecté son obligation de formation et de maintien de la qualification du salarié. Le salarié présente au soutien de cette demande les faits justifiant de sa prise d’acte en lien avec la perte de sa carte professionnelle.

La cour ayant déjà retenu ce manquement, il convient d’allouer à M. [Z] des dommages intérêts à ce titre qui ne devront cependant pas indemniser une seconde fois le préjudice lié à la perte de son emploi.

En considération de ces éléments, il convient de fixer la créance de M. [Z] à titre de dommages intérêts à la somme de 5 000 euros. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur le rappel de salaire du mois de janvier 2018

M. [Z] soutient que son salaire du mois de janvier 2018 ne lui a pas été réglé et que c’est à tort que les premiers juges l’ont débouté de cette demande au motif qu’il ne rapportait pas la preuve du rejet d’un chèque ou du non paiement du salaire.

L’AGS soutient que le salarié ne rapporte pas de preuve au soutien de ses allégations.

En réalité, il est mentionné dans la partie motivation du jugement que le salarié a reçu le jour de l’audience du 25 juin 2018, un chèque avec ses documents de fin de contrat et ses congés payés sur le bulletin de salaire de février 2018 et dans le dispositif il est indiqué qu’il est pris acte de la remise à la barre par Me [P], ès-qualités de mandataire liquidateur de la sarl Sword sécurité privée , à M. [Z] d’un chèque n°6014472 d’un montant de 2 212,97 euros au titre du salaire de janvier 2018 ainsi que d’un bulletin de paie de février 2018 et un reçu pour solde de tout compte. Cette dernière mention fait référence à l’audience du 15 avril 2019 après réouverture des débats suite à la procédure de liquidation judiciaire de la société Ssp.

Il est donc justifié de la remise par le liquidateur judiciaire d’un chéque au titre du salaire de janvier 2018 qui offre toutes les garanties d’être provisionné de sorte que M. [Z] sera débouté de sa demande à ce titre. Le jugement est confirmé de ce chef. En revanche, il n’est pas fait mention de l’indemnité de congés payés afférente et il convient de fixer la créance de M. [Z] à ce titre à la somme de 154,68 euros.

Sur la garantie de l’Unédic Délégation AGS – Centre de Gestion et d’Étude Ags (CGEA) d’Ile-de-France Ouest

Il convient de rappeler que l’Unedic Ags doit sa garantie dans les limites légalement fixées quant à la nature des sommes et quant au plafonnement de la garantie.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La Scp BTSG prise en la personne de Maître [P], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Sword sécurité privée sera condamnée au paiement des dépens. Elle sera en outre condamnée à payer à M. [Z] la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la décision des premiers juges étant infirmée à ces titres.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition,

Infirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté M. [A] [Z] de sa demande de salaire du mois de janvier 2018,

Statuant de nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Fixe les créances de M. [A] [Z] à valoir au passif de la procédure collective de la société Sword sécurité privée aux sommes suivantes :

– 5 000 euros à titre de dommages intérêts pour défaut de formation obligatoire ;

– 154,68 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents au salaire de janvier 2018 ;

– 3 403,28 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

– 340,33 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents ;

– 1 666,19 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement ;

– 6 806,56 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Rappelle que l’Unédic Délégation AGS – Centre de Gestion et d’Étude Ags (CGEA) d’Ile-de-France Ouest doit sa garantie dans les limites légales,

Déboute M. [A] [Z] de ses autres demandes,

Condamne la SCP BTSG, prise en la personne de Me [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Sword sécurité privée, à payer à M. [A] [Z] la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCP BTSG, prise en la personne de Me [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Sword sécurité privée aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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