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ARRÊT DU
27 Janvier 2023
N° 107/23
N° RG 21/01198 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TXK4
PS/VM
Jugement du
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LENS
en date du
22 Juin 2021
(RG F 19/00118 -section 4 )
GROSSE :
Aux avocats
le 27 Janvier 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
– Prud’Hommes-
APPELANTE :
Mme [V] [D] ÉPOUSE [R]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Marjorie THUILLIEZ, avocat au barreau d’ARRAS
INTIMÉE :
S.A.S. VETIR (ENSEIGNE GEMO)
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Anne-Emmanuelle THIEFFRY, avocat au barreau de LILLE substituée par Me Romain THIESSET, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Marie LE BRAS
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Alain MOUYSSET
: CONSEILLER
Patrick SENDRAL
: CONSEILLER
GREFFIER lors des débats : Valérie DOIZE
DÉBATS : à l’audience publique du 29 Novembre 2022
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2023,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 08 Novembre 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
La SAS VETIR commercialise des articles vestimentaires dans un réseau de magasins à l’enseigne GEMO. Mme [V] [D] y a été embauchée le 3 septembre 2002 en qualité de directrice adjointe de magasin. En 2010 elle a été nommé directrice adjointe du magasin de Vendin dont son époux, M.[R], était le directeur. Le 13 juillet 2017 elle est physiquement intervenue avec celui-ci dans le magasin pour s’opposer à des vols de la part d’auteurs restés non identifiés. À compter de cette date elle a été placée en arrêt de travail. Dans le cadre de la visite de reprise du 14 mai 2018 le médecin du travail l’a déclarée inapte en précisant que ‘tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’». Le 21 juin 2018 elle a été licenciée pour inaptitude d’origine professionnelle et impossibilité de reclassement.
C’est dans ce contexte que le 8 avril 2019 elle a saisi le conseil de prud’hommes de Lens aux fins d’obtenir la condamnation de son employeur au paiement de diverses sommes et que par décision du 22 juin 2021 la juridiction prud’homale a’:
-jugé que la société Vêtir a fourni à Mme [D] les formations adaptées et que le contrat de travail a été exécuté de bonne foi,
-jugé fondé son licenciement
-débouté Mme [D] de l’intégralité de ses demandes,
-débouté la société Vêtir de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
Par déclaration reçue au greffe le 12 juillet 2021, Mme [D] a interjeté appel du jugement.
Dans ses dernières conclusions déposées le 7 octobre 2021 elle demande à la cour de l’infirmer et de’:
-requalifier la rupture en licenciement abusif pour non-respect de l’obligation de formation
-juger que la SAS Vêtir n’a pas exécuté le contrat de bonne foi, qu’elle a manqué à son obligation de délivrance des documents de fin de contrat et qu’elle ne l’a pas indemnisée de son DIF
-la condamner en conséquence au paiement des sommes suivantes’:
-22 800 euros à titre de dommages-intérêts pour compenser la perte d’emploi subie en raison de son accident de travail,
-5000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du retard dans la communication des documents de fin de contrat,
-1000 euros pour non-respect des engagements repris lors de l’audience de conciliation et d’orientation de mai 2019,
-2000 euros à titre de dommages-intérêts pour compenser la perte des 240 heures de DIF qu’elle a accumulées,
-1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 5 janvier 2022 la SAS Vêtir demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner l’appelante à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
MOTIFS DE LA DÉCISION’
Il ressort des débats que le 13 juillet 2017 Mme [D] a surpris avec son mari deux voleurs dans le magasin et que dans le cadre de son intervention elle a subi des blessures légères. Suite aux faits elle a été placée en interruption temporaire de travail pendant 5 jours et en arrêt-maladie avant d’être déclarée inapte par le médecin du travail des suites de cet accident du travail. Elle fait plaider que son inaptitude est résulté de l’absence de préparation suffisante au risque d’agression, que le risque était nécessairement connu de l’employeur et qu’il ne lui a pas apporté un soutien suffisant après les faits.
Sur ce,
Les moyens invoqués par la salariée au soutien de son appel ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents que la Cour adopte sans qu’il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail de leur argumentation. Il sera ajouté, vu les justificatifs versés aux débats, qu’en vertu de l’article L 1232-1 du code du travail tout licenciement doit avoir une cause réelle et sérieuse. Le licenciement pour inaptitude est sans cause réelle et sérieuse lorsqu’il est démontré que l’inaptitude est consécutive à une faute de l’employeur. L’article L 4121-1 du code du travail prévoit quant à lui que celui-ci doit prendre toutes les mesures pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs: actions de prévention, de formation, d’information et mise en place d’une organisation et de moyens appropriés et adaptés conformément aux principes généraux de prévention énumérés par l’article L 4121-2 du même code.
Il résulte des justificatifs versés aux débats qu’entre 2013 et 2016 Mme [D] a bénéficié au sein de l’entreprise de 42 heures de formation généraliste comportant un volet relationnel avec les clients. Elle s’est vu remettre par son mari directeur en septembre 2013 un guide des «’bonnes pratiques sécurité, vol et agressions’» élaboré par l’employeur en concertation avec le CHSCT. Dans ce guide était détaillée, de manière exhaustive et concrète, la conduite à tenir en présence de voleurs. Il résulte d’attestations concordantes produites aux débats que les salariés du magasin connaissaient les consignes en la matière, le guide des bonnes pratiques leur ayant été remis par M.[R] et qu’en sa qualité de directrice adjointe Mme [D] avait connaissance des consignes.
Sans qu’il y ait lieu de déterminer si elle a méconnu les préconisations, ce qu’aucune pièce ne démontre dans la mesure où les données de l’enquête pénale ne sont pas produites, il ressort des développements précédents que la salariée avait été suffisamment formée par l’employeur au risque d’agression. Il sera ajouté que la formation à laquelle celui-ci était tenu devait être adaptée au risque, relativement faible, d’agression dans ce type de commerce et qu’elle ne pouvait revêtir la forme d’actions mises en oeuvre dans des secteurs d’activité plus exposés au risque d’agression des personnels. Il n’est d’ailleurs ni établi ni même allégué que d’autres agressions du personnel aient eu lieu dans des magasins du secteur concerné, la salariée évoquant un risque fréquent de violence sans le caractériser. Il est donc sans fondement soutenu que la société VETIR aurait manqué à son obligation de sécurité. L’absence de soutien de la hiérarchie après les faits n’est du reste pas établie, étant observé que son directeur n’étant autre que son conjoint et qu’aucun manquement précis de l’employeur n’est allégué ni mis en évidence postérieurement à l’agression, alors même que le contrat de travail a immédiatement été suspendu par des arrêts-maladie prolongés.
Mme [D] ajoute que la société VETIR l’a informée le 30 janvier 2018 de son intention de pourvoir le poste de directrice adjointe en raison de son absence depuis le 15 juillet 2017 mais l’employeur n’a commis aucune faute en l’informant, loyalement, de son intention de nommer un directeur adjoint dans l’attente de son retour.
Il se déduit de ce qui précède que l’inaptitude n’a pas été causée par un manquement de l’employeur et que la demande de dommages-intérêts pour licenciement infondé sera rejetée.
La demande de dommages-intérêts pour manquements à l’occasion de la remise des documents de fin de contrat
Dans le dispositif de ses écritures Mme [D] réclame 5000 euros de dommages-intérêts pour retard dans la communication des documents de fin de contrat mais dans leurs motifs elle reproche, confusément, à la société VETIR’:
– une absence de règlement complet de l’indemnité compensatrice de congés payés
– un retard dans le règlement de l’allocation de retour à l’emploi
– des irrégularités dans l’attestation Pôle Emploi (absence de motif de la rupture, montant du solde de tous comptes, de l’indemnité de préavis, absence de mention de l’origine professionnelle de l’inaptitude, erreur sur le montant du salaire).
Il résulte des courriers versés aux débats que 7 jours après le licenciement la société VETIR lui a adressé, sans qu’elle ait besoin de les réclamer sur place, l’ensemble des documents de fin de contrat parmi lesquels seule l’attestation Pôle Emploi était entachée d’erreurs. La salariée ne réclame aucune somme à titre d’indemnités de rupture et salaires. Il s’en déduit qu’elle a été remplie de ses droits et que les erreurs, non fautives, ne ne lui ont pas préjudicié. Les parties ont eu de nombreux échanges par écrit après que l’employeur a admis des erreurs sur l’attestation Pôle Emploi. Suite à ces correspondances l’attestation a été rectifiée sur des points mineurs. Il résulte par ailleurs des justificatifs que Mme [D] a été remplie de ses droits en matière de congés payés étant observé qu’elle ne forme aucune demande spécifique à ce titre et que son allégation imprécise n’est étayée d’aucun justificatif. Enfin, il ne ressort d’aucune pièce que la salariée ait été pénalisée dans ses relations avec Pôle Emploi. Les conditions d’une indemnisation au titre de la responsabilité civile n’étant pas réunies sa demande de dommages-intérêts sera donc rejetée.
La demande de dommages-intérêts pour manquements aux obligations en matière de droit individuel à la formation
Mme [D] reproche à son ancien employeur de ne pas l’avoir informée de son droit individuel à la formation mais au moment de son licenciement le droit individuel à la formation avait été remplacé par le compte personnel de formation. Dans ce cadre l’employeur n’avait pas à l’informer de ses droits au moment de la rupture. En l’absence de manquement sa demande de dommages-intérêts sera rejetée.
La demande de dommages-intérêts pour non respect des engagements pris devant le bureau de conciliation et d’orientation
Mme [D] se borne, sans la moindre explication, à réclamer une somme mais elle n’explicite pas sa demande alors qu’en vertu des articles 6 et 9 du code de procédure civile il incombe aux parties d’alléguer les faits utiles au soutien de leur demande et de les prouver. Elle se prévaut d’un engagement de l’employeur, non contenu dans le jugement frappé d’appel, sans le matérialiser. La demande sera donc rejetée.
Il serait inéquitable de condamner l’une ou l’autre des parties au paiement d’une somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR
CONFIRME le jugement
DEBOUTE Mme [D] de ses demandes
DIT n’y avoir lieu à condamnation au paiement d’une indemnité au titre des frais non compris dans les dépens
CONDAMNE Mme [D] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER
Annie LESIEUR
LE PRÉSIDENT
Marie LE BRAS