Compte personnel de formation : 21 février 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 20/01643

·

·

Compte personnel de formation : 21 février 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 20/01643
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

21 FEVRIER 2023

Arrêt n°

ChR/NB/NS

Dossier N° RG 20/01643 – N° Portalis DBVU-V-B7E-FPTE

S.A.S. LUDIVINE PASSION

/

[X] [M]

jugement au fond, origine conseil de prud’hommes – formation paritaire de clermont ferrand, décision attaquée en date du 20 octobre 2020, enregistrée sous le n° f18/00399

Arrêt rendu ce VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d’Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Frédérique DALLE, Conseiller

Mme Sophie NOIR, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

S.A.S. LUDIVINE PASSION

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, avocat constitué, substitué par Me Jonathan AZERAD, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

APPELANTE

ET :

Mme [X] [M]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-louis BORIE de la SCP BORIE & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMEE

Après avoir entendu M. RUIN, Président en son rapport, les représentants des parties à l’audience publique du 05 Décembre 2022, la Cour a mis l’affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l’arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La SAS LUDIVINE PASSION exerce une activité de commercialisation de maroquinerie. La convention collective nationale applicable est celle des commerces de détail non alimentaires N°325l (IDCC 1517).

Madame [X] [M], née le 9 février 1995, a été embauchée par la SAS LUDIVINE PASSION du 2 novembre 2016 au 25 février 2017, dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée à temps complet, en qualité de vendeuse statut employée, niveau 1. La relation contractuelle s’est ensuite poursuivie entre les parties à compter du 26 février 2017, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée, conclu le 20 février 2017 et mentionnant un emploi de vendeuse statut employée, niveau 2.

A compter de son embauche à durée indéterminée, la rémunération de Madame [X] [M] a été constituée, en plus du salaire fixe, d’un commissionnement variable en fonction du résultat :

– 1% du chiffre d’affaires si le CA de la boutique était en progression d’au moins 8% par rapport au CA de N-1 ;

– 1% supplémentaire si l’objectif du magasin était atteint sur le même mois en cours.

Madame [X] [M] a déclaré avoir été victime d’un accident du travail le 18 octobre 2017, en chutant d’un escabeau, à la suite duquel elle a été placée en arrêt de travail jusqu’au 5 novembre 2017.

Le 23 février 2018, Madame [M] s’est vue notifier par l’employeur un avertissement à raison de différents retards dans sa prise de poste

Le 30 mars 2018, Madame [X] [M] a été placée en arrêt de travail pour cause de maladie.

Le 16 avril 2018, Madame [X] [M] s’est vue notifier par l’employeur un second avertissement à raison d’une erreur de caisse.

Par courrier daté du 28 juin 2018, l’avocat de la salariée devait informer l’employeur de la volonté de sa cliente de saisir la juridiction prud’homale au regard des différents manquements contractuels qu’elle impute à la SAS LUDIVINE PASSION. Par courrier en réponse daté du 9 juillet 2018, l’employeur a contesté les griefs qui lui étaient imputés par Madame [M].

Parallèlement, au terme d’un examen médical organisé sur demande de la salariée le 5 juillet 2018, le médecin du travail a émis l’avis suivant : ‘L’état de santé de la salariée ne permettra pas de proposer des tâches aux postes existants dans l’entreprise et que la salariée pourrait exercer. Inaptitude totale et définitive est à prévoir en reprise. A voir en reprise’.

Le 10 juillet 2018, Madame [X] [M] a saisi le conseil de prud’hommes de CLERMONT-FERRAND d’une demande tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, la SAS LUDIVINE PASSION, et obtenir diverses sommes à titre de rappel de salaires et d’indemnités.

Aux termes de la visite de reprise intervenue le 7 août 2018, le médecin du travail a émis l’avis d’inaptitude suivant : ‘Inapte à tout poste dans l’entreprise. L’état de santé de la salariée ne permet pas de proposer des tâches aux postes existants dans l’entreprise et que la salariée pourrait exercer. Pas de reclassement professionnel possible dans l’entreprise ni par adaptation ou transformation du poste, ni par mutation sur un autre poste dans l’entreprise ou sur les autres entreprises appartenant au groupe. Une seule visite, examen de pré-reprise initiative salariée le : 05/07/2018. Conformément à l’article R 4624-42 du Code du travail. Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’.

Par courrier recommandé avec avis de réception expédié le 16 août 2018, la SAS LUDIVINE PASSION a convoqué Madame [X] [M] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 28 août suivant.

Par courrier recommandé avec avis de réception expédié le 31 août 2018, la SAS LUDIVINE PASSION a notifié à Madame [X] [M] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le courrier de notification du licenciement est ainsi libellé :

‘…

Par lettre recommandée du 16 août 2018, nous vous avons convoquée à un entretien préalable fixé au 28 août 2018, auquel vous ne vous êtes pas présentée.

Nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement pour le motif ci-après exposé.

Vous avez bénéficié d’une visite médicale de pré-reprise en date du 5 juillet 2018, à l’issue de laquelle le médecin du travail a formulé les recommandations suivantes : « ‘l’état de santé de la salariée ne permettra pas de proposer des tâches aux postes existants dans l’entreprise et que la salariée pourrait exercer. Inaptitude totale et définitive est à prévoir en reprise. A voir en reprise’ »

Une étude de votre poste et des conditions de travail a été réalisée par le médecin du travail le 10 juillet 2018. Des échanges ont eu lieu entre la société LUDIVINE PASSION et le médecin du travail, le 11 juillet 2018.

Puis, au terme de votre arrêt de travail, vous avez bénéficié d’une visite médicale de reprise en date du 7 août 2018, au terme de laquelle le médecin du travail vous a déclaré « ‘inapte à tout poste dans l’entreprise’ ».

Le médecin du travail a indiqué que « ‘l’état de santé de la salariée ne permet pas de proposer des tâches aux postes existants dans l’entreprise et que la salariée pourrait exercer. Pas de reclassement professionnel possible dans l’entreprise ni par adaptation ou transformation du poste, ni par mutation sur un autre poste dans l’entreprise ou sur les autres entreprises appartenant au groupe. Une seule visite, examen de pré reprise initiative salariée le : 05 juillet 2018. Conformément à l’article R 4624-42 du code du travail’ ».

Par ailleurs, le médecin du travail a précisé que « ‘tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’ ».

Compte tenu de votre inaptitude et de notre impossibilité de pourvoir à votre reclassement, ce dont nous vous avons informée par lettre du 14 août 2018, nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

La date de la notification de cette lettre marque ainsi la fin de nos relations contractuelles.

Nous vous adresserons par courrier séparé votre certificat de travail, reçu pour

solde de tout compte et attestation pole emploi.

Nous vous informons que vous pouvez consulter vos heures acquises au titre du compte personnel de formation, en vous connectant sur le site internet suivant : www.moncompteformation.gouv.fr.

Nous vous libérons de toute obligation de non concurrence que vous auriez contractualisée avec l’entreprise.

Enfin, nous vous informons que vous bénéficiez, à titre gratuit, dès le lendemain de la fin de votre contrat de travail et pour une période de 12 mois, du maintien des garanties prévues par le contrat de frais de santé en vigueur au sein de l’entreprise ainsi que du maintien des garanties prévues par le contrat de prévoyance en vigueur au sein de l’entreprise’ »

L’audience devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes de CLERMONT-FERRAND s’est tenue en date du 27 septembre 2018 et, comme suite au constat de l’absence de conciliation, l’affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.

Par jugement rendu contradictoirement le 20 octobre 2020, le conseil de prud’hommes de CLERMONT FERRAND a :

– dit et jugé les demandes formulées par Madame [X] [M] recevables et bien fondées ;

– dit et jugé que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [X] [M] aux torts exclusifs de son employeur était parfaitement justifiée, ce qui provoque les conséquences d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

– dit et jugé que Madame [X] [M] bénéficie de la qualification de responsable de magasin niveau 6 ;

En conséquence,

– condamné la SAS LUDIVINE PASSION, prise en la personne de son représentant légal, à payer et porter à Madame [X] [M] les sommes suivantes :

* 3.596 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 359 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 7.363,40 euros bruts au titre de rappel de salaire, outre 736,34 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire,

* 4.000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

* 700 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

– dit et jugé qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire du présent jugement ;

– en vertu des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, condamné la SAS LUDIVINE PASSION qui succombe aux éventuels entiers frais et dépens de la présente instance.

Le 16 novembre 2020, la SAS LUDIVINE PASSION a interjeté appel de ce jugement notifié à sa personne le 26 octobre 2020.

Vu les dernières écritures notifiées le 28 avril 2021 par Madame [X] [M],

Vu les dernières écritures notifiées le 13 juillet 2021 par la SAS LUDIVINE PASSION,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 7 novembre 2022

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures, la SAS LUDIVINE PASSION demande à la cour de :

– Sur l’appel principal, infirmant le jugement du conseil de prud’hommes de CLERMONT FERRAND en date du 20 octobre 2020 dont appel, débouter Madame [X] [M] de l’intégralité de ses demandes ;

– Sur l’appel incident, débouter Mme [M] de sa demande indemnitaire en réparation du préjudice prétendument subi d’un montant de 20.000 euros ;

– En tout état de cause, condamner Madame [X] [M] à lui verser la somme de 1.500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamner la même aux entiers dépens.

La société LUDIVINE PASSION conteste avoir commis de quelconques manquements à l’égard de la salariée susceptibles de justifier la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Elle fait plus spécialement valoir :

* sur l’absence de formation : Elle relève l’absence de tout élément objectif versé par la salariée pour objectiver cette allégation et soutient qu’elle n’avait aucune obligation d’assurer en l’espèce l’adaptation de la salariée à son poste de travail et le maintien de sa capacité à occuper un emploi en l’absence de toute évolution de son poste de travail ;

* sur le non-respect des dispositions conventionnelles : Elle conteste que la salariée ait occupé des fonctions de responsable de magasin en l’absence de gestion et de développement de l’activité du magasin et en l’absence de développement du chiffre d’affaires, et indique avoir procédé à son repositionnement (avec rappel de salaires subséquent sur la paie du mois de juin 2018) en suite de sa contestation sur le poste de vendeuse qualifiée, niveau 4, conformément aux fonctions qu’elle a réellement occupées et à sa qualification ;

* sur le non-versement de primes : Elle fait valoir que la salariée n’étaye pas sa demande en l’absence de toute indication tant sur la nature des primes revendiquées que sur la période concernée ;

* sur le non-respect des normes d’hygiène et de sécurité : Elle expose avoir, par suite de la visite de l’inspection du travail du 15 mars 2018 et de son courrier d’observations du 22 mars suivant, pris l’ensemble des mesures destinées à y satisfaire, à savoir le renouvellement de son matériel anti-incendie, la prise de rendez-vous avec un prestataire afin de procéder à la réparation du lavabo et l’installation d’un robinet mitigeur, la vérification de l’installation électrique, la prise de mesures afférentes au système de chauffage, l’acquisition d’un nouvel escabeau pour accéder aux marchandises stockées en hauteur ;

* sur l’absence de visite médicale : Elle indique que la salariée a bénéficié d’une visite de pré-reprise ainsi que d’une visite de reprise auprès du médecin du travail et conteste ainsi le bien fondé de cette critique ;

* sur les sanctions disciplinaires : Elle fait valoir que celles-ci étaient parfaitement fondées et que la salariée ne les a pas contestées au cours de la relation salariale.

L’appelante conclut au débouté de Madame [X] [M] s’agissant de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ainsi que de celle tendant à son repositionnement au poste de responsable de magasin.

Dans ses dernières écritures, Madame [X] [M] demande à la cour de :

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de CLERMONT FERRAND du 20 octobre 2020, sauf en ce qu’il lui a accordé 4.000,00 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

– réformant, condamner la SAS LUDIVINE PASSION à lui porter et payer 20.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, outre intérêt de droit à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus, et avec capitalisation des intérêts conformément aux règles légales;

– ordonner la remise d’un bulletin de salaire conforme aux condamnations prononcées ;

– condamner la SAS LUDIVINE PASSION à lui payer et porter la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens;

– débouter la SAS LUDIVINE PASSION de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Madame [X] valoir, au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, que l’employeur a commis différents manquements, à savoir :

* absence de formation : Elle a, dès son embauche, effectué seule sa prestation de travail en assurant la responsabilité du magasin, et ce sans avoir au préalable bénéficié d’un quelconque accompagnement ou formation ;

* non-respect des dispositions conventionnelles sur la qualification : Elle rappelle qu’elle a été embauchée en qualité de vendeuse, statut employée, niveau 1, et soutient avoir exercé les fonctions de responsable de magasin dès lors qu’elle a assuré, seule, la responsabilité de l’ensemble du magasin en toute autonomie et indépendance. Elle sollicite ainsi son repositionnement au niveau 6, outre le rappel de salaires afférent ;

* non versement de l’intégralité des primes auxquelles elle était en droit de prétendre. Elle fait valoir que l’employeur n’a jamais joint à ses bulletins de salaire une annexe mentionnant les éléments afférents au chiffre d’affaires afin qu’elle puisse vérifier le montant de la prime qu’il lui était dû conformément aux dispositions de l’article 5 de son contrat de travail qui prévoit que :« La collaboratrice percevra une commission mensuelle s’élevant à 1 % du chiffre d’affaire réalisé sur son code personnel, si le chiffre d’affaires de la boutique atteint au moins 8 % de la progression sur le mois en cours comparé au même mois de l’année précédente. La collaboratrice percevra une commission supplémentaire de 1 % du chiffre d’affaires réalisé sur son code personnel, si l’objectif du magasin est atteint sur le même mois en cours. » ;

* non respect des normes d’hygiène et de sécurité constitutif d’un manquement à l’obligation de sécurité : Elle explique avoir été contrainte de saisir l’inspection du travail à raison des mauvaises conditions d’hygiène et de sécurité, à savoir : mauvais état du système anti-incendie/ lavabo alimenté uniquement en eau froide/dangerosité du système électrique dans les cabinets d’aisance et absence de lumière/impossibilité d’utilisation du système de chauffage/absence de moyen pour accéder aux marchandises stockées en hauteur ;

* défaut de visite médicale auprès de la médecine du travail du fait du non-paiement des cotisations ;

L’intimée ajoute qu’elle a fait l’objet de sanctions injustifiées en expliquant que les retards qui lui ont été imputés au terme du premier avertissement ne sont que les horaires enregistrés après l’ouverture du système informatique du magasin et, au terme du second, qu’aucune erreur de caisse ne lui serait opposable.

Elle considère que les différents manquements susvisés sont suffisamment graves pour justifier que soit prononcée la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur et que celle-ci produise les effets d’un licenciement cause réelle et sérieuse.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

– Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail –

Lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il
reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d’autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat de travail, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée. C’est seulement dans le cas contraire qu’il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l’employeur.

En l’espèce, Madame [X] [M] a saisi le conseil de prud’hommes de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail alors que les relations contractuelles avec l’employeur n’étaient pas rompues et que le licenciement n’est intervenu que postérieurement.

Il y a donc lieu de statuer sur la demande de résiliation et de rechercher si les griefs articulés à l’encontre de l’employeur sont de nature à justifier celle-ci, la résiliation du contrat de travail ne pouvant être prononcée qu’en présence de fautes commises par l’employeur suffisamment graves pour emporter la rupture du contrat de travail.

– Sur les griefs avancés –

Madame [X] [M] fait état de 5 griefs à l’appui de sa demande :

* absence de formation

Madame [X] [M] se plaint d’avoir été, dès son embauche, laissée seule pour exécuter sa prestation de travail, d’avoir assuré la responsabilité du magasin sans qu’aucune formation ne lui soit dispensée et sans avoir été accompagnée par un responsable ou un salarié. Elle justifie avoir déposé plainte elle-même, le 20 décembre 2016, pour des faits de dégradation sur le rideau métallique du magasin. Elle souligne qu’elle a dû faire cette démarche parce qu’aucun responsable ne s’est déplacé et ne lui a précisé les démarches à suivre.

L’employeur conteste avoir manqué à ses obligations en expliquant qu’il avait le devoir d’assurer l’adaptation de la salariée à son poste de travail et le maintien de sa capacité à occuper un emploi mais que celle-ci ne se trouvait pas dans cette situation, son poste n’ayant pas évolué.

Cependant, nonobstant son obligation d’adaptation, l’employeur était, pour le moins, aussi, tenu lors de l’embauche, dans le cadre de son pouvoir de direction, de lui fournir la formation nécessaire ainsi qu’un certain accompagnement pour qu’elle puisse assurer normalement sa prestation de travail, même si le poste n’exigeait qu’une formation succincte.

L’employeur soutient que la salariée procède seulement par affirmations mais il ne conteste pas le fait que Madame [X] [M] a été laissée seule, dès son embauche, au sein du magasin, ni qu’elle n’ait bénéficié d’aucune formation ni d’aucun accompagnement pour les différentes tâches ou démarches auxquelles elle serait confrontée dans le cadre de ses attributions. Les circonstances dans lesquelles Madame [X] [M] a été amenée à déposer plainte et l’absence de tout accompagnement à cette occasion ne sont pas contestées et confirment la carence de l’employeur.

La société LUDIVINE PASSION ne peut, par conséquent, soutenir avoir satisfait à son obligation de formation.

* non-respect des dispositions conventionnelles sur la qualification

Aux termes du contrat de travail du 20 février 2017, Mme [M] a été embauchée en qualité de vendeuse, statut employé, niveau 2 de la convention collective. Ses attributions étaient ainsi précisées:

‘En sa qualité de vendeuse, Madame [M] sera chargée, sans que cette liste

soit limitative, des fonctions suivantes :

– l’accueil et le conseil des clients,

– l’ouverture et la fermeture du magasin au sein duquel elle exercera ses fonctions,

– encaissements, enregistrement informatique des ventes, clôture des caisses, dépôt

en banque journalier,

– surveillance des stocks, inventaires, réception, pointage et mise en rayon de la

marchandise,

– réassort,

– vente des produits et accueil de la clientèle,

– réalisation du visuel, étalage,

– assurer la petite maintenance du magasin,

– rendre compte à sa Direction du chiffre d’affaires du magasin au sein duquel elle

exercera ses fonctions

– respect de toutes les procédures et circulaires en vigueur (…).

Ces attributions seront exercées par Madame [M] sous l’autorité et dans le

cadre des instructions données par ses supérieurs hiérarchique (…)’.

Selon l’accord du 5 juin 2008 auquel se réfère l’employeur, le niveau 2 correspond à des emplois ‘qui requiert un minimum de connaissances professionnelles’ et s’applique à des salariés qui ‘exécute des tâches simples, répétitives et variées’, soit, dans la filière commerciale, les salariés occupant l’un des postes suivants : ’employé de vente ou de magasin’, ’employé de caisse (opérations de caisse de base)’, ‘hôte d’accueil’, ‘aide étalagiste’.

L’employeur explique que, suite à la réclamation de la salariée, il a accepté, en juin 2008, de lui attribuer le niveau 4 avec effet rétroactif à compter du mois de novembre 2016 et il soutient que cette classification correspond aux fonctions réellement exercées.

Selon l’accord du 5 juin 2008, le niveau 4 s’applique, dans la filière commerciale, aux

types d’emploi suivants : ‘vendeur qualifié’, ‘conseiller de vente ou d’achat qualifié’, ‘caissier ou hôte de caisse qualifié’, ‘étalagiste qualifié’, ‘assistant achats’, ‘assistant marketing’, ‘marchandiseur’. Il s’agit d’un ’emploi qui requiert un minimum de connaissances professionnelles correspondant à un niveau de formation équivalent au moins à bac + 2 ou résultant d’une expérience professionnelle équivalente’. A ce niveau, le salarié ‘effectue des opérations qualifiées nécessitant une bonne technicité et une spécialisation ou effectue des opérations qualifiées nécessitant une polyvalence sur plusieurs postes de niveaux inférieurs’. Il ‘fait preuve d’initiative dans la résolution des problèmes’.

Madame [X] [M] conteste l’une et l’autre de ces classifications qui relèvent de la catégorie employés et soutient qu’en raison de ses fonctions, elle aurait dû être classée dans la catégorie agent de maîtrise et bénéficier du niveau 6 qui s’applique aux emplois suivants : ‘responsable de rayon’, ‘responsable de caisse et d’accueil’, ‘responsable de magasin’, ‘adjoint de direction’. Les compétences requises sont des ‘compétences complexes qui peuvent être multiples’. A ce niveau, le salarié ‘effectue des opérations qualifiées et complexes du fait de métiers connexes, de difficultés techniques’. Il a la ‘responsabilité d’un magasin, d’un service sous l’autorité et les directives du chef d’entreprise, d’un directeur ou d’un responsable commercial’.

Madame [X] [M] soutient qu’elle a toujours exécuté seule son contrat de travail et qu’elle a assumé l’intégralité de la responsabilité du magasin, sans qu’aucune instruction ne lui soit jamais été donnée. Elle explique qu’elle avait notamment la responsabilité de recruter des salariés dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée, qu’elle était chargée d’établir les plannings de travail et les cahiers de formation, qu’elle était en possession des clefs du magasin et avait la responsabilité de son ouverture et de sa fermeture, qu’elle était chargée de faire les dépôts d’espèces et de chèques auprès de la banque et qu’elle assumait l’intégralité de la responsabilité du magasin ouvert de 10 heures à 19 heures.

A l’appui de ses prétentions, elle se prévaut de plusieurs attestations :

– Mme [A] et Mme [D], qui indiquent avoir travaillé au sein de la société, attestent avoir été recrutées, formées et suivies par Mme [M] et précisent qu’elles n’ont jamais rencontré la direction de la société. Selon elles, c’est Mme [M] qui leur a fourni leurs plannings, le cahier de formation, les clefs du magasin ainsi que la carte de dépôt d’espèces ;

– Mme [U], M. [O] et Mme [B], qui travaillent dans des commerces du centre commercial, attestent avoir toujours vu Mme [M] travailler seule au sein du magasin et n’avoir toujours vu qu’elle ouvrir et fermer le point de vente, réceptionner sa marchandise et servir la clientèle.

L’employeur soutient que la salariée ne possédait pas les compétences exigées pour accéder à la classification 6 et qu’elle occupait des fonctions de vendeuse mais il résulte, au contraire, des éléments d’appréciation versés aux débats et, notamment des attestations produites, qui ne font pas l’objet de contestations en elles-mêmes et qui ne sont pas démenties par des éléments de preuve contraire, que Madame [X] [M] exerçait des fonctions qui impliquaient un niveau de responsabilité et d’autonomie correspondant à un emploi de responsable de magasin relevant du niveau 6 de l’accord du 5 juin 2008.

Il s’ensuit que, compte tenu des tâches réellement effectuées par la salariée, l’employeur lui a attribué à tort, le niveau 2 puis le niveau 4.

* non versement de l’intégralité des primes

Madame [X] [M] se réfère à l’article 5 du contrat de travail qui prévoit expressément une rémunération variable ainsi décrite : ‘commission mensuelle s’élevant à 1 % du chiffre d’affaire réalisé sur son code personnel, si le chiffre d’affaires de la boutique atteint au moins 8 % de la progression sur le mois en cours comparé au même mois de l’année précédente. La collaboratrice percevra une commission supplémentaire de 1 % du chiffre d’affaires réalisé sur son code personnel, si l’objectif du magasin est atteint sur le même mois en cours’.

Madame [X] [M] se plaint de ne jamais avoir perçu cette commission et elle souligne que l’employeur n’a jamais joint aux bulletins de salaire un document annexe faisant figurer les éléments afférents au chiffre d’affaires pour qu’elle puisse vérifier la rémunération variable dont elle pouvait bénéficier.

Elle justifie avoir adressé à l’employeur plusieurs courriels pour s’enquérir de ses droits à rémunération variable.

L’employeur se borne à soutenir que la salariée ne rapporterait pas la preuve de ce qu’elle pourrait prétendre à une prime mais il n’apporte aucun élément d’appréciation permettant de vérifier si la salariée a été remplie de ses droits au titre de la rémunération variable alors que Mme [M] fait valoir, à juste titre, que, lorsque le calcul de la rémunération dépend d’éléments détenus par l’employeur, celui-ci est tenu de les produire afin de rendre la discussion contradictoire.

A défaut de justification des documents permettant de vérifier les éléments dont dépend le calcul de la rémunération variable, l’employeur ne peut soutenir avoir respecté ses obligations.

* non respect des normes d’hygiène et de sécurité

Pour soutenir que les normes d’hygiène et de sécurité n’étaient pas respectées au sein du magasin, Madame [X] [M] verse aux débats la lettre d’observation adressée le 22 mars 2018 par l’inspectrice du travail à la société LUDIVINE PASSION suite au contrôle effectué le 15 mars 2018.

Il ressort de ce courrier qu’ont été relevées différentes irrégularités en termes d’hygiène et de sécurité auxquelles il a été demandé de remédier :

‘- Le rapport de vérification des extincteurs du 31/01/2018 signale que les extincteurs ont plus de 10 ans, sont inutilisables et doivent être renouvelés.

– Le lavabo est alimenté uniquement en eau froide.

– Il n’y a pas de lumière dans les cabinets d’aisance et des fils électriques pendent au-dessus de la cuvette des toilettes.

– Le système de chauffage diffuse une forte odeur de moisissure dès qu’il est mis en marche et ne peut donc être utilisé.

– La réserve comporte des rayonnages jusqu’au plafond, garnis de marchandises et aucun moyen d’accès n’est prévu pour accéder aux marchandises stockées en hauteur, hormis un escabeau cassé et inutilisable’.

L’employeur ne conteste pas les constatations ainsi effectuées mais il soutient avoir immédiatement pris les mesures nécessaires destinées à se conformer aux observations adressées. Toutefois, les éléments d’appréciation qu’il apporte ne permettent pas de vérifier ses affirmations.

La société LUDIVINE PASSION se prévaut, certes, de la lettre en réponse adressée à l’inspectrice du travail le 19 avril 2018 mais il convient de relever que, pour la plupart des constatations effectuées (extincteurs incendie, lavabo, système de chauffage, réserve du magasin), l’employeur s’est contenté d’en prendre acte et d’annoncer des mesures correctives.

L’employeur produit un document attestant de la vérification des extincteurs effectuée en février 2018 ainsi qu’un devis accepté en mai 2018 mais il ne justifie pas du renouvellement des extincteurs jugés inutilisables, ainsi qu’il lui a été demandé.

Il verse aux débats les rapports de vérification électrique ainsi que le compte rendu de ces vérifications datés du 7 mars 2018 desquels il ressort que l’installation électrique ‘ne peut pas entraîner des risques d’incendie et d’explosion’.

Toutefois, Madame [X] [M] est bien fondée à faire observer que ces documents confirment l’existence de dysfonctionnements en ce que des réserves y sont émises sur l’installation des sanitaires (il est préconisé de ‘protéger mécaniquement les conducteurs de production, ce dernier traverse la cloison et reprendre la fixation de ce cadre’) et sur l’éclairage de sécurité (il est préconisé de ‘remettre en état de fonctionnement le dispositif de mise à l’état de repos de l’éclairage de sécurité’). Il convient, en outre, de relever que ces vérifications ont eu lieu avant le contrôle effectué par l’inspectrice du travail et qu’il n’est pas justifié de mesures correctives prises pour satisfaire aux observations faites par cette dernière. Il est seulement produit un devis antérieur du 17 janvier 2018 concernant la ‘remise en conformité électrique’ mais il n’est pas justifié de la réalisation de travaux.

Quant au système de chauffage, l’employeur ne verse aux débats que des courriers par lesquels il affirme avoir pris les mesures nécessaires sans qu’aucun élément ne permette de vérifier ces affirmations.

S’il est versé aux débats une facture d’achat d’un ‘marchepied’ présenté comme destiné, à remplacer l’escabeau jugé inutilisable, l’ensemble des éléments produits démontrent que la salariée exécutait sa prestation de travail dans les locaux où les normes de sécurité et d’hygiène n’étaient pas respectées et qu’il n’est pas justifié de mesures susceptibles de remédier aux dysfonctionnements constatés.

Cette carence est confirmée par le courrier adressé par l’inspectrice du travail à Mme [M] le 16 juillet 2018. Elle y indique, en effet, que la société LUDIVINE PASSION l’a informée avoir accepté des devis pour le remplacement des extincteurs et la vérification des installations électriques et elle précise qu’à l’occasion d’un second contrôle, elle a constaté que l’eau chaude et la lumière avaient été rétablies et qu’un escabeau de faible hauteur avait été mis à disposition dans la réserve mais elle a ajouté avoir adressé un nouveau courrier à l’employeur pour lui demander ‘ de se conformer à la totalité de (ses) demandes’.

L’employeur ne peut donc pas soutenir avoir satisfait à ses obligations en la matière.

* défaut de visite médicale auprès de la médecine du travail

Madame [X] [M] explique qu’ayant été victime d’un accident du travail consécutif à une chute lors de l’utilisation de l’escabeau défaillant, elle a souhaité bénéficier d’une visite auprès du médecin du travail et qu’il lui a été répondu qu’une telle visite était impossible, l’entreprise n’étant pas à jour de ses cotisations.

Elle verse aux débats le courrier adressé par son conseil à l’employeur le 28 juin 2018 pour se plaindre de ce que, à la suite de l’accident survenu en octobre 2017, elle n’a pu prendre rendez-vous auprès du médecin du travail en raison du non-paiement de ses cotisations par la société.

L’employeur produit l’attestation de l’association interprofessionnelle de santé au travail (AIST) selon laquelle elle est adhérente depuis le 17 octobre 2014 mais l’inspectrice du travail, dans son courrier du 16 juillet 2018, précise avoir été informée que la société LUDIVINE PASSION avait été radiée en 2017 et n’avait régularisé sa situation que le 22 mai 2018,ce qui confirme les dires de Mme [M].

– Sur les sanctions disciplinaires –

Bien que ces sanctions disciplinaires ne soient pas invoquées au soutien de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, Madame [X] [M] conteste les avertissements qui lui ont été notifiés les 23 février 2018 et 16 avril 2018.

Selon le courrier de notification du premier avertissement, il a été fait grief à la salariée de ne pas respecter ses horaires de travail. Il lui a été reproché d’avoir pris son poste, à 13 reprises, entre le 2 janvier 2018 et le 26 janvier 2018, avec un retard variant entre 2 et 10 minutes.

Madame [X] [M] conteste ces retards en faisant valoir, d’une part, qu’elle ne pouvait enregistrer son heure d’arrivée qu’après avoir procédé à l’ouverture du rideau métallique et du magasin lui-même ainsi qu’à la mise en route de l’ordinateur et, d’autre part, que le système de caisse permettant cet enregistrement était défaillant. Elle se prévaut du témoignage de Mme [D] qui confirme ce dysfonctionnement et d’une attestation sur l’honneur, rédigée par elle-même, de ce qu’elle ouvrait la boutique à 10 heures, attestation signée par 6 commerçants du centre commercial.

Compte tenu de ces indications et en l’absence de tout autre élément, le non-respect des horaires n’est pas démontré.

Par le second avertissement, il lui a été reproché une erreur de fond de caisse, l’employeur expliquant avoir reçu, le 29 mars 2018, la feuille de caisse transmise par la salariée faisant mention d’un fond de caisse de 99,75 euros alors que, selon lui, ce montant aurait été inférieur mais il n’apporte aucune indication ni justification en ce qui concerne le montant qu’il aurait constaté. Ce grief, contesté par Madame [X] [M], n’est donc pas établi.

– Sur les conséquences –

* Sur la demande de rappel de salaire

Compte tenu des tâches réellement effectuées par la salariée, ainsi qu’il a été vu ci-dessus, Madame [X] [M] est bien fondée à solliciter un rappel de salaire correspondant au niveau 6 de la grille de salaire.

Elle explique que la grille de salaire prévoit une rémunération brute mensuelle de 1 780,00 euros à compter de janvier 2016 et de 1 798,00 euros à compter de janvier 2017, ce qui représente, eu égard au salaire perçu, une différence de 6445,34 euros pour la période de novembre 2016 à août 2018, à laquelle s’ajoute la différence concernant les heures supplémentaires effectuées (17,33 heures par mois), soit 918,06 euros pour l’ensemble de la période.

Compte tenu des pièces justificatives produites et en l’absence de toute contestation sur le calcul présenté, le jugement sera confirmé en ce qu’il a alloué à la salariée la somme de 7. 363,40 euros brut, outre l’indemnité compensatrice de congés payés correspondante.

* Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

Il apparaît que les griefs formulés par la salariée sont établis et que l’employeur a laissé Madame [X] [M] effectuer sa prestation de travail et assurer la responsabilité du magasin, sans aucun accompagnement, ni formation, sans lui attribuer la qualification correspondant aux fonctions réellement exercées, sans lui fournir les éléments permettant de la remplir de ses droits au titre de la rémunération variable et sans respecter ses obligations au titre des normes d’hygiène et de sécurité.

Il s’ensuit que, pris globalement, ces manquements présentent un caractère de gravité tel qu’ils justifient la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

La résiliation judiciaire du contrat de travail à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Madame [X] [M] est en droit de solliciter une indemnité compensatrice de préavis qui, eu égard au salaire correspondant au niveau 6, sera fixée à 3.596,00 euros (2 mois de salaire pour un salarié relevant du niveau 6) à laquelle s’ajoute l’indemnité compensatrice de congés payés afférente, soit 359,60 euros. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Madame [X] [M], née en 1995, a vu son contrat de travail rompu après 22 mois d’ancienneté au service d’une entreprise dont il n’est pas contesté qu’elle emploie habituellement au moins 11 salariés, à l’âge de 23 ans. En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, compte tenu des éléments d’appréciation versés aux débats, et notamment du salaire de l’intéressée, de son ancienneté et de son âge, le préjudice résultant pour elle de la perte injustifiée de son emploi sera réparé en lui allouant la somme de 4.000 euros. Le jugement sera confirmé sur ce point.

– Sur les intérêts –

En application des dispositions des articles 1231-6 du code civil et R 1452-5 du code du travail, les sommes allouées dont le principe et le montant résultent de la loi, d’un accord collectif ou du contrat (rappel de salaire, indemnité de préavis, indemnités compensatrices de congés payés), porteront intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l’employeur à l’audience de tentative de conciliation valant mise en demeure, soit le 12 juillet 2018.

La somme allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse), produira intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2020, date du jugement du conseil de prud’hommes.

Les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l’article 1343-2 du code civil.

– Sur la demande de documents –

L’employeur doit remettre à la salariée un bulletin de salaire conforme aux présent arrêt.

– Sur les dépens et frais irrépétibles –

La SAS LUDIVINE PASSION, qui succombe au principal, devra supporter les entiers dépens de première instance et d’appel ce qui exclut qu’elle puisse prétendre bénéficier des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il serait par contre inéquitable de laisser Madame [X] [M] supporter l’intégralité des frais qu’elle a dû exposer pour faire assurer la défense de ses intérêts. Ainsi outre la somme de 700 euros déjà allouée par les premiers juges, laquelle mérite confirmation, une indemnité supplémentaire de 2.000 euros lui sera accordée en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

La SAS LUDIVINE PASSION sera condamnée aux entiers dépens d’appel ainsi qu’à verser à Madame [X] [M] une somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

– Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

– Dit que les sommes allouées à titre de rappel de salaire, d’indemnité de préavis et d’indemnités compensatrices de congés payés porteront intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2018, que la somme allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse produira intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2020 et que les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l’article 1343-2 du code civil ;

– Dit que la société LUDIVINE PASSION doit remettre à Madame [X] [M] un bulletin de salaire conforme aux présent arrêt ;

– Condamne la société LUDIVINE PASSION à payer à Madame [X] [M] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

– Condamne la société LUDIVINE PASSION aux dépens d’appel ;

– Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x