Your cart is currently empty!
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78F
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 16 MARS 2023
N° RG 22/05697 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VM73
AFFAIRE :
S.A.S. VITALLIANCE
C/
[X] [C]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Août 2022 par le Juge de l’exécution de NANTERRE
N° RG : 22/03344
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 16.03.2023
à :
Me Claire QUETAND-FINET, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Aurélia CORDANI de la SCP TOULLEC CORDANI, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.S. VITALLIANCE
N° Siret : 451 053 383 (RCS Nanterre)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Tristan HUBERT de la SARL EVERGREEN LAWYER LYON, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1178 Représentant : Me Claire QUETAND-FINET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 678
APPELANTE
****************
Madame [X] [C]
née le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 7] (Cameroun)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentant : Me Aurélia CORDANI de la SCP TOULLEC CORDANI, Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 217 – N° du dossier 2022025 – Représentant : Me Alexia NICOLAU de la SELARL NICOLAU AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller et Madame Florence MICHON, Conseiller entendu en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,
EXPOSÉ DU LITIGE
Aux termes d’un protocole d’accord transactionnel en date du 9 juin 2021, Mme [C], auxiliaire de vie, et la société Vitalliance, son employeur, ont mis fin au litige qui les opposait depuis le 11 août 2020 devant le conseil de prud’hommes de Grenoble, que Mme [C] avait saisi pour, notamment, obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, et le paiement de dommages et intérêts.
Par jugement contradictoire rendu le 29 novembre 2021, le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes de Grenoble a homologué le protocole susvisé et lui a conféré force exécutoire.
Estimant que la société Vitalliance n’avait pas respecté les engagements pris aux termes du protocole d’accord, Mme [C] a, selon acte d’huissier du 15 février 2022, fait signifier ce jugement à la société Vitalliance, avec commandement de payer aux fins de saisie-vente, pour avoir paiement de la somme de 13 299,37 euros en principal, intérêts et frais.
Par acte du 23 février 2022, la société Vitalliance a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre en contestation du dit commandement.
Par jugement contradictoire rendu le 1er août 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre a :
rejeté la demande de la société Vitalliance tendant à annuler le commandement de payer aux fins de saisie vente du 15 février 2022 délivré par Mme [C] à son encontre, au visa d’un jugement en date du 29 novembre 2021 rendu par le conseil de prud’hommes de Grenoble, pour la somme de 13 299,37 euros,
rejeté la demande de Mme [C] tendant à condamner la société Vitalliance au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
condamné la société Vitalliance aux dépens,
condamné la société Vitalliance à payer à Mme [C] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
rappelé que [sa] décision bénéficie de l’exécution provisoire de droit.
Le 12 septembre 2022, la société Vitalliance a relevé appel de cette décision.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 10 janvier 2023, avec fixation de la date des plaidoiries au 8 février 2023.
Aux termes de ses premières et dernières conclusions remises au greffe le 7 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société Vitalliance, appelante, demande à la cour de :
infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a : rejeté sa demande tendant à annuler le commandement de payer aux fins de saisie vente du 15 février 2022 délivré par Mme [C] à son encontre, au visa d’un jugement en date du 29 novembre 2021 rendu par le conseil de prud’hommes de Grenoble, pour la somme de 13 299,37 euros // l’a condamnée aux dépens // l’a condamnée à payer à Mme [C] la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile // a rappelé que [sa] décision bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;
Partant et statuant à nouveau :
constater qu’elle a parfaitement respecté les obligations prévues au protocole transactionnel homologué par le conseil de prud’hommes ;
Partant,
dire et juger infondée la créance objet du commandement aux fins de saisie vente ;
dire et juger nul le commandement aux fins de saisie vente à elle signifié ;
débouter Mme [C] de l’ensemble de ses demandes ;
condamner Mme [C] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
condamner Mme [C] aux entiers dépens.
Aux termes de ses premières et dernières conclusions remises au greffe le 28 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile, Mme [C], intimée, appelante incidente, demande à la cour de :
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nanterre du 1er août 2022 en ce qu’il a : rejeté la demande la société Vitalliance tendant à annuler le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 15 février 2022 par elle délivré à son encontre, au visa d’un jugement en date du 29 novembre 2021 rendu par le conseil de prud’hommes de Grenoble, pour la somme de 13 299,37 euros // condamné la société Vitalliance à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile // condamné la société Vitalliance aux dépens // rappelé que [sa ] décision bénéficie de l’exécution provisoire ;
infirmer le jugement pour le surplus, et,
Statuant à nouveau, y ajoutant,
condamner la société Vitalliance à lui verser la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive du débiteur, au titre de l’article L.121-3 du code des procédures civiles d’exécution ;
condamner la Société Vitalliance à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’au paiement des entiers dépens en cause d’appel ;
En tout état de cause,
débouter la Société Vitalliance de l’ensemble de ses demandes formulées en appel.
A l’issue de l’audience, l’affaire a été mise en délibéré au 16 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, sur l’étendue de la saisine de la cour
La cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions, pour autant qu’elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion, et qu’elle ne répond aux moyens que pour autant qu’ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions.
Elle rappelle également que les « dire et juger » et les « constater » qui sont des rappels des moyens invoqués à l’appui des demandes, ne conférant pas -hormis les cas prévus par la loi- de droit à la partie qui les requiert, ne sont pas des prétentions.
Sur la nullité du commandement de payer
Le litige opposant la société Vitalliance, qui soutient qu’elle ne doit aucune somme à Mme [C], et Mme [C], qui maintient, quant à elle, que la société Vitalliance est bien débitrice à son égard, porte sur l’exécution de la stipulation du protocole conclu par les parties relative à la prise en charge, par l’employeur, du financement d’une formation d’aide-soignante au bénéfice de Mme [C], au titre de laquelle cette dernière réclame, aux termes du commandement de payer litigieux :
5 700 euros au titre du remboursement de frais de formation,
7 398,38 euros au titre d’un maintien de salaire durant la dite formation, pour la période du 30 août 2021 au 22 janvier 2022.
Sur ce point, le protocole conclu par les parties, est ainsi libellé ( article 1 3°/) :
‘ À titre de concession supplémentaire, la société Vitalliance s’engage à prendre en charge la formation d’aide-soignante que souhaite suivre Mme [C] à compter du mois d’août 2021, sous déduction des droits que Mme [C] pourrait mobiliser au titre de son Compte Personnel de Formation.
Celle-ci s’engage ainsi à mobiliser l’ensemble de ses droits disponibles pour financer cette formation, la société acceptant de prendre en charge le surplus.
Il est précisé que cette formation, effectuée auprès de l’IFRSS [Localité 4] ou de l’IFAS (institut de formation d’aide-soignante) de [Localité 5], est d’un coût maximum de 6 500 euros.
La société procédera au remboursement des frais de formation exposés par Mme [C], dans la limite de 5 700 euros, par virement effectué sous 15 jours suivant la réception de la demande de la salariée, sous réserve que cette demande soit accompagnée des pièces justificatives suivantes :
– quittance de paiement des frais de formation ;
– justification de la mobilisation par Mme [C] de l’intégralité de ses droits acquis au titre du Compte Professionnel de Formation.
Les parties rappellent que cette formation pourra se dérouler, en tout ou partie, sur le temps de travail de Mme [C] et que la société maintiendra le salaire à temps plein de Mme [C] pendant le temps de formation qui aurait lieu sur son temps de travail.’
Pour considérer que Mme [C] était fondée à délivrer le commandement litigieux pour recouvrer les sommes visées ci-dessus, le premier juge, a retenu, notamment :
que le protocole ne met pas à la charge de Mme [C] une obligation de résultat ; qu’au demeurant, cette dernière justifie bien avoir tenté de mobiliser ses droits au titre de son CPF, dans le cadre de l’une des formations visées dans l’accord transactionnel, et qui devait débuter en août 2021, et qu’elle s’est vu opposer un refus de l’organisme, dont il n’est pas établi qu’il lui soit imputable ; qu’il ne peut être considéré qu’elle aurait tardé à effectuer les démarches nécessaires ;
que le titre exécutoire ne mentionne pas que la formation s’intégrerait dans le cadre d’un projet de transition professionnelle ( Transition Pro), qui au demeurant nécessite d’être anticipé longuement à l’avance, au vu des délais imposés par les articles R.6323-10 et suivants du code du travail, et ne met aucune obligation à la charge de la salariée en ce sens ;
que le maintien de salaire prévu par le protocole n’est pas conditionné – notamment- à l’issue d’une demande de prise en charge d’un projet de transition professionnelle adressé à la commission paritaire interprofessionnelle régionale compétente, ou encore à la mobilisation des droits au titre du CPF.
La société Vitalliance soutient que Mme [C] n’a pas rempli l’obligation lui incombant, aux termes du protocole, de mobiliser l’ensemble des droits à formation dont elle bénéficiait, notamment au titre du CPF, pour pouvoir bénéficier d’un maintien de salaire et d’une prise en charge de sa formation, dont elle s’était engagée pour sa part à prendre en charge le surplus.
Elle estime que, contrairement à ce qu’a retenu à tort le premier juge, la mention claire et non équivoque, dans le protocole, de la mobilisation par Mme [C] des droits à CPF et de ‘l’ensemble des droits disponibles pour financer cette formation’ emportait nécessairement obligation pour cette dernière d’entamer les démarches nécessaires à la mise en place du CPF-TP [Transition Professionnelle], observation faite que les mentions figurant dans le protocole d’une formation d’aide-soignant diplômante, se déroulant pendant le temps de travail, avec autorisation d’absence de l’employeur, renvoient à la définition du CPF de transition professionnelle.
Mme [C] ne justifie, selon la société Vitalliance, d’aucune demande de prise en charge soumise à l’association Transition Pro, qui seule, conformément aux dispositions du code du travail, donne un accord quant à la mobilisation par le salarié de ses droits à formation, et encore moins d’un refus opposé par Transition Pro, et plus généralement des démarches entreprises après la création de son compte Transition Pro, le jour-même de la signature du protocole, de sorte que c’est de manière totalement erronée que le premier juge a considéré qu’elle avait entrepris les démarches nécessaires en demandant à l’IFAS de [Localité 5] de mobiliser ses droits à CPF. Par ailleurs, affirme t-elle, les deux organismes mentionnés dans le protocole étaient bien éligibles au CPF.
Le délai de 120 jours avant le début du projet dans lequel le salarié doit adresser à son employeur une demande d’autorisation d’absence ne constituait en rien en l’espèce, soutient-elle, un obstacle à la réalisation du projet de Mme [C], la société ayant donné son accord à cette formation dans le protocole du 8 juin 2021, et ayant accepté, dans les 72 heures, les demandes d’absence adressées par Mme [C] au titre de la formation en cause ; ainsi, selon l’appelante, rien ne s’opposait à la constitution du dossier de Mme [C] dès le mois de juin 2021.
Enfin, si Mme [C] ne peut être tenue d’une obligation de résultat en matière de mobilisation de ses droits à formation, elle était tenue à une obligation de moyens, et sauf à inverser la charge de la preuve, comme l’a fait le premier juge, il lui appartient de démontrer qu’elle a accompli, avec diligence, les formalités nécessaires à la mobilisation de ses droits, ce qu’elle ne fait pas, faute de justifier des démarches entreprises. Pour l’appelante, Mme [C] a donc manqué à l’obligation de mobilisation de ses droits à formation prévue dans le protocole, et ne justifie aucunement que l’éventuel refus de prise en charge dont elle a fait l’objet ( et dont elle ne justifie même pas, alors que les articles R.6323-15 et suivants du code du travail prévoient que le salarié est informé par Transition Pro en cas de refus) résulterait d’une cause étrangère, d’une impossibilité de réaliser les démarches dans les délais compte tenu de la date de la signature du protocole, ou d’un événement qui ne lui serait pas imputable.
Mme [C] soutient, pour sa part, qu’elle a bien tenté de mobiliser ses droits à CPF, qui s’élevaient à 1 716,15 euros, mais qu’elle n’a pas pu le faire, l’institut de formation auquel elle était inscrite, l’IFAS, ne travaillant pas avec le CPF.
Elle considère que l’absence de prise en charge de ses salaires par Transition Pro pendant la durée de sa formation ne doit avoir aucune incidence sur la prise en charge de ses frais de formation, puisqu’à aucun moment il n’est convenu dans l’accord qu’elle doive supporter le refus de prise en charge de Transition Pro, et que par ailleurs, il n’a jamais été prévu dans la convention que le paiement de ses salaires était subordonné à l’accord de prise en charge des dits salaires par Transition Pro, ou à une quelconque décision relative au CPF.
Bien que, comme constaté par le premier juge, le protocole d’accord transactionnel ne fasse aucune référence au ‘projet de transition professionnelle’, elle souligne qu’elle s’est inscrite sur le site Transition Pro dès que cela lui a été demandé, et qu’elle a agi dès que l’accord transactionnel a été signé, en s’inscrivant dans le seul organisme de formation encore ouvert aux candidatures en juin 2021, mais que l’IFAS de Savoie, organisme de formation désigné d’un commun accord par les parties, lui a confirmé dès le 3 août 2021 qu’il n’était pas en mesure d’accepter un paiement de la formation avec le compte CPF, raison pour laquelle, malgré ses échanges avec Transition Pro, les 5 et 21 août 2021, elle ne pouvait de toutes façons pas faire prendre en charge par le CPF les frais de sa formation, ni le maintien des salaires par Transition Pro.
Enfin, fait-elle valoir, en signant un protocole d’accord en juin 2021, pour une rentrée en septembre 2021, la société Vitalliance ne pouvait sérieusement s’imaginer qu’elle allait pouvoir rentrer dans le processus de Transition Pro, raison pour laquelle, selon elle, ce processus n’est pas évoqué dans le protocole.
L’engagement qu’elle a pris ne recouvrant que le fait de formuler une demande de mobilisation de ses droits au CPF, ce qu’elle a fait, la société Vitalliance doit donc, selon Mme [C] :
rembourser les frais de formation par elle exposés, dans la limite de 5 700 euros, et donc, dans la mesure où ses droits disponibles sur son CPF n’étaient pas mobilisables pour cette formation, verser l’intégralité de cette somme,
maintenir son salaire pendant toute la durée de la formation, ce à quoi elle s’était engagée sans aucune condition.
Ceci étant exposé, il sera relevé que quand bien-même Mme [C] souligne l’usage du conditionnel ‘pourrait’, le protocole d’accord conclu par les parties met à sa charge, ainsi qu’il résulte de l’engagement qu’elle prend au présent de l’indicatif, une obligation de mobiliser l’ensemble de ses droits disponibles au titre de son compte personnel de formation, pour financer la formation qu’elle souhaite suivre.
Le projet de transition professionnelle, ou CPF de Transition, qui permet au salarié qui en bénéficie de s’absenter de son poste pour suivre une formation certifiante en vue d’un changement de métier ou de profession, et qui lui ouvre droit, selon l’article L.6323-17-5 du code du travail, à une rémunération minimale, qui, dans les entreprises d’au moins 50 salariés ( ce qui est le cas de la société Vitalliance) est versée par l’employeur, lequel est ensuite remboursé par la commission paritaire interprofessionnelle régionale mentionnée à l’article L. 6323-17-6, est une modalité particulière de mobilisation du compte personnel de formation, de sorte que l’engagement pris par la salariée de mobiliser l’ensemble de ses droits disponibles incluait nécessairement, celui de réaliser toutes démarches utiles lui permettant de bénéficier de ce dispositif, peu important que le protocole litigieux n’y fasse pas expressément référence.
Au demeurant, Mme [C] l’avait bien compris en ce sens, puisque, ainsi qu’elle l’indique elle-même, et que le souligne l’appelante, elle a créé un compte Transition Pro le jour-même de la signature du protocole d’accord, soit le 8 juin 2021, et a bénéficié avec cet organisme de deux rendez-vous, le 5 août 2021 et le 12 août 2021. Et elle a également écrit à son employeur, le 27 juillet 2021, pour faire une demande d’autorisation d’absence dans le cadre d’un Projet de Transition Professionnelle.
Aux termes du protocole, l’employeur s’engage à rembourser les frais de formation exposés par sa salariée sous réserve que celle-ci transmette, avec sa demande de remboursement :
une quittance de paiement des frais de formation ;
la justification de la mobilisation de l’intégralité de ses droits acquis au titre du Compte Professionnel de Formation.
Il incombe donc à Mme [C], qui par ailleurs justifie qu’elle a réglé 6 500 euros au titre de la formation suivie à l’IFAS, de justifier des démarches qu’elle a accomplies pour mobiliser les droits par elle acquis au titre de la formation professionnelle.
Mme [C] produit à cet égard :
un courrier électronique de l’IFAS, en date du 3 août 2021, qui contrairement à ce qu’elle soutient ne dit pas que cet institut ‘ne travaille pas avec le CPF’, mais dit : ‘ à ce jour, nous ne sommes pas en mesure d’accepter un paiement de la formation avec votre compte CPF’, ce qui n’est pas la même chose,
un justificatif de rendez-vous avec son conseiller ‘Transition Pro’, pour le 12 août 2021,
un courrier électronique de son correspondant au sein de Transition Pro, indiquant que son dossier ne peut pas être recevable au titre du CPF-PTP, parce qu’elle ne demande aucun financement auprès de ses services, et qu’il lui faut monter un dossier directement sur ‘mon compte formation’.
Par ces seuls éléments, Mme [C] n’apporte pas la démonstration que, conformément à ce à quoi elle s’est engagée, elle a accompli toutes les diligences qu’elle pouvait faire pour mobiliser l’ensemble de ses droits, ce qui conditionnait la prise en charge, par l’employeur, du financement de sa formation.
Bien qu’elle affirme n’avoir bénéficié d’aucun accompagnement de la part de son employeur, qu’elle mette en avant les délais de constitution de son dossier, ou qu’elle prétende, en substance que, en toute hypothèse, il n’aurait pas été possible, dans le délai de 3 mois dont elle disposait, d’accomplir le ‘parcours du combattant’ qui aurait peut être permis une prise en charge du coût de sa formation et de son salaire au titre d’un CPF de transition professionnelle, force est de constater que Mme [C] n’apporte aucun élément, ni explication, ni a fortiori justificatif, pour convaincre la cour du bien fondé de son argumentation.
A titre d’exemple, alors qu’il est relevé qu’elle a été informée par courrier du 5 juillet 2021 qu’elle était admise à suivre la formation d’aide-soignante à l’IFAS, session de septembre 2021, et qu’elle n’a écrit que le 27 juillet 2021 à son employeur pour solliciter une autorisation d’absence, elle se contente d’affirmer qu’elle n’aurait en aucun cas pu l’envoyer plus tôt, sans fournir aucun élément de nature à étayer ses affirmations, et susceptible d’expliquer son inertie pendant 3 semaines.
Et de la même manière, si elle déplore de n’avoir bénéficié d’aucun accompagnement de la société Vitalliance, elle ne justifie pas avoir sollicité un tel accompagnement – que lui proposait au demeurant Transition Pro ( cf mail de Mme [Z] du 27 août 2021 ‘ vous pouvez également vous faire accompagner par un conseiller en évolution professionnelle pour vos démarches, vous pouvez les joindre au [suit le numéro de téléphone]’).
Enfin, les pièces produites par la société Vitalliance infirment la thèse de la salariée selon laquelle elle n’aurait bénéficié d’aucun accompagnement. La société Vitalliance produit en effet deux courriers des 13 septembre 2021 et 25 octobre 2021 montrant qu’elle a mis en garde à plusieurs reprises Mme [C] sur le fait que l’absence de toute démarche de sa part risquait d’empêcher la prise en charge de son salaire durant son temps de formation, et qu’elle lui a suggéré de reporter sa formation pour éviter cette difficulté, en lui précisant que plusieurs instituts avec lesquels elle avait pris attache dispensaient des formations adaptées à son profil, débutant au mois de janvier 2022, et en lui faisant part d’emblée de son accord pour qu’elle s’absente à compter de cette date.
Et alors qu’il en ressort que l’employeur a ménagé à sa salariée les moyens de réussir sa démarche de formation, en étant prise en charge financièrement, cette dernière n’apporte aucun élément probant permettant de justifier qu’elle n’ait pas donné suite à cette proposition, se bornant à répéter que l’IFAS n’était pas éligible au CPF, ce qu’elle ne démontre pas comme dit ci-dessus, et à affirmer, sans le prouver en rien, que les formations débutant en janvier 2022 soit se déroulaient loin de [Localité 6] soit correspondaient à des sessions préparatoires.
S’agissant du paiement du salaire, c’est à tort également que le premier juge a considéré que le maintien du salaire constituait un engagement autonome de l’employeur, indépendant de la mobilisation de son CPF par Mme [C]. Aux termes du protocole, Mme [C] s’engage en effet à mobiliser l’ensemble de ses droits pour financer la formation qu’elle envisage, ce qui comprend d’une part le paiement du coût de la formation, d’autre part, la prise en charge de sa rémunération durant son absence autorisée par l’employeur, de sorte que pour prétendre à un maintien de son salaire par celui-ci, Mme [C] devait avoir accompli toutes les diligences permettant qu’une partie, à tout le moins, de sa rémunération durant son absence soit prise en charge au titre de son CPF, ce qui était possible dans le cadre d’un projet de transition professionnelle, l’employeur complétant ensuite pour permettre un maintien de son salaire, comme convenu dans le protocole.
Faute pour Mme [C] de justifier qu’elle a effectivement mobilisé l’ensemble des droits dont elle pouvait bénéficier au titre de son Compte Personnel de Formation, la société Vitalliance n’est tenue ni au règlement du coût de sa formation, ni au paiement de ses salaires durant son absence liée au suivi de cette formation.
Le jugement qui a retenu qu’elle était créancière de la société Vitalliance, et fondée à ce titre à lui faire signifier un commandement de payer, doit en conséquence être infirmé, et le commandement de payer signifié à la société Vitalliance pour une créance inexistante doit être annulé.
En l’absence de dette de la société Vitalliance à l’égard de Mme [C], cette dernière ne peut prétendre à aucun dommages et intérêts pour résistance abusive.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Partie perdante, Mme [C] doit supporter les dépens de première instance et d’appel.
La condamnation de la société Vitalliance en première instance sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile est infirmée, mais il n’est pas inéquitable de laisser la société Vitalliance supporter la charge des frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort,
INFIRME le jugement rendu le 1er août 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de Mme [C] tendant à condamner la société Vitalliance au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,
Déclare nul le commandement de payer aux fins de saisie-vente signifié le 15 février 2022 à la société Vitalliance,
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [X] [C] aux dépens.
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,