Compte personnel de formation : 10 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/08179

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Compte personnel de formation : 10 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/08179
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AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 19/08179 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MXAP

[T]

C/

Société GMD

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 31 Octobre 2019

RG : F16/02905

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 10 MAI 2023

APPELANTE :

[C] [T]

née le 26 Février 1960 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Karine GAYET de la SELARL MORELL ALART & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société GMD

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Laurence URBANI-SCHWARTZ de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Audrey FARDIN, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Présidente

Nathalie ROCCI, Conseiller

Anne BRUNNER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Mai 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société GMD est une société holding, créée par ses trois associés, membres d’une même fratrie, M.[R] [T], Mme [C] [T] et Mme [I] [T].

La Société holding est mère de deux filiales :

– la Société GECIL PROCESS, en France ;

– la Société GT INSTRUMENTS, aux États-Unis (société détenue à 50 % par GECIL PROCESS et à 50 % par [R] [T], puis par GMD à compter de 2022).

La Société GECIL PROCESS a été créée par la famille [T], en 1967. Elle a pour activité, la fabrication des appareils de distillation automatique des pétroles bruts et leur commercialisation. Il s’agit d’un marché de niche, très spécialisé, qui s’adresse aux laboratoires de raffinerie ou aux centres de recherches.

La Société GECIL PROCESS compte moins de 11 salariés.

M. [R] [T], salarié de la Société GMD, est le Président Directeur Général de la Société GT INSTRUMENTS.

Mme [C] [T], l’appelante, exerçait en qualité de salariée de la Société GMD, les fonctions de Directrice Commerciale Export au sein de la filiale GECIL PROCESS.

En effet, la Société GECIL PROCESS a embauché Mme [C] [T] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er novembre 1994, en qualité de Responsable Commercial et Export, position 3 de la Convention Collective de la Métallurgie du Rhône applicable à son contrat de travail.

Par une convention de transfert tripartite, signée le 24 décembre 2007 entre la société Gecil Process et la société GMD, et prenant effet à compter du 1er janvier 2008, le contrat de travail de Mme [T] a été transféré à la Société GMD lors de sa création.

La rémunération de Mme [T] est composée d’une partie fixe et d’une partie variable.

Mme [T] a été placée en arrêt maladie par son médecin traitant à compter du 9 février 2015 en raison d’un burn-out et d’un syndrome anxio-dépressif.

Par courrier adressé à la société GMD le 21 juin 2016, Mme [T] indiquait que sa situation professionnelle serait à l’origine de son burn-out et d’une maladie professionnelle et transmettait le certificat médical d’arrêt de travail en date du 20 juin 2016.

Par acte du 1er août 2016, Mme [T] a saisi le Conseil de Prud’hommes de Lyon d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de demandes d’indemnisation au titre du harcèlement moral, de l’exécution déloyale du contrat de travail, d’un licenciement nul ainsi que de demandes de rappels de rémunération variable.

Par une décision notifiée le 08 Septembre 2017, la CPAM a pris en charge le syndrome anxio-dépressif consécutif au burn-out au titre d’une maladie professionnelle.

La société GMD a contesté la décision de prise en charge et le caractère professionnel de la pathologie de Mme [T], d’une part devant la commission de recours amiable de la CPAM, d’autre part devant le Pôle social du Tribunal Judiciaire de Lyon.

Dans l’intervalle, la Commission de recours amiable a notifié, le 18 décembre 2018 à la société GMD, une décision accueillant sa contestation, constatant l’irrégularité de la procédure en raison de l’absence d’information donnée à l’employeur sur la saisine de la CRRMP, les éléments et points susceptibles de lui faire grief, ainsi que la possibilité de consulter le dossier avant transmission audit comité, et prononçant l’inopposabilité à l’employeur de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle rendue par la CPAM.

Mme [T] a fait l’objet d’une visite de reprise, le 9 septembre 2019, à l’issue de laquelle le médecin du travail l’a déclarée inapte à tous postes dans l’entreprise en visant expressément la mention : « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 septembre 2019, la société GMD a convoqué Mme [T] à un entretien préalable en vue de procéder à son licenciement pour inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement.

Par un courrier recommandé avec accusé de réception date du 4 Octobre 2019, la société GMD a procédé au licenciement de Mme [T] au motif d’une impossibilité de reclassement consécutive à une inaptitude d’origine non professionnelle.

Par jugement en date du 31 octobre 2019, le Conseil de prud’hommes de Lyon a :

– Dit et jugé que le contrat de travail liant Mme [C] [T] à la SAS GMD relevait des dispositions de la Convention collective de la Métallurgie du Rhône, et qu’il n’y a pas lieu de faire une distinction entre le CCN de la Métallurgie du Rhône et la CCN de la Métallurgie ‘Ingénieurs et cadres’

– Dit et jugé que les minima conventionnels de la convention collective de la Métallurgie du Rhône ont été correctement appliqués par la SAS GMD

– Dit et jugé que les heures supplémentaires réclamées par Mme [C] [T] ne sont pas prouvées et qu’il n’y a pas lieu de condamner la SAS GMD à payer des dommages-intérêts pour travail dissimulé

– Dit et jugé que la demande au titre de rappel de la rémunération variable n’est pas prouvée

– Dit et jugé que le harcèlement moral dont Mme [C] [T] se dit victime n’est pas avéré

– Dit et jugé que l’exécution déloyale du contrat de travail dont Mme [T] se dit victime n’est pas avéré

– Rejeté la demande de rappel de congés payés

En conséquence

– débouté Mme [C] [T] de l’ensemble de ses demandes ;

– débouté la Société GMD de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile; – condamné Mme [C] [T] aux entiers dépens.

La cour est saisie de l’appel interjeté le 28 novembre 2019, par Mme [C] [T].

Par conclusions notifiées le 17 janvier 2023, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, Mme [T] demande à la cour de :

– Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de Prud’hommes de Lyon

Et statuant à nouveau :

A titre principal

1- Juger que la société GMD s’est rendue coupable de faits de harcèlement moral matérialisés notamment au travers d’une surcharge de travail et du comportement fautif du dirigeant

– Condamner en conséquence la société GMD à verser 77 500 euros nets de dommages-intérêts en réparation du harcèlement moral subi

2- Juger que les accords nationaux de la métallurgie et les accords des ingénieurs et cadres de la métallurgie s’appliquent à la relation de travail

– Juger qu’elle bénéficiait d’une classification en statut cadre – Niveau IIIC

– Juger qu’elle n’a pas bénéficié de la rémunération minimale conventionnelle attachée à

son positionnement de cadre- Niveau IIIC

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser les sommes suivantes :

‘ Rappel de salaire (minima conventionnel) : 16 023,28 euros bruts

‘ Congés payés afférents : 1 602,32 euros bruts

3- Juger que la société GMD n’a pas versé la partie variable de la rémunération 2015 conformément au contrat de travail

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser les sommes suivantes :

‘ Rappel de rémunération variable 2015 : 25 023,45 euros bruts

‘ Congés payés afférents : 2 502,35 euros brut

4- Juger que la société GMD a exécuté le contrat de travail de manière déloyale avant l’arrêt de travail, pendant l’arrêt maladie et lors de la procédure de licenciement

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser 77 500 euros nets de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

5. Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société GMD au regard de ses graves manquements contractuels

– Juger qu’au regard des faits de harcèlement moral à l’origine de la résiliation judiciaire, cette dernière produit les effets d’un licenciement nul

– Fixer à 6 273,72 euros bruts la moyenne des trois derniers mois de salaire reconstitué

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser les sommes suivantes :

*reliquat d’indemnité conventionnelle de licenciement : 59 826,52 euros bruts

*indemnité compensatrice de préavis : 37 642.34 euros bruts

*congés payés afférents : 3 764.23 euros bruts

*reliquat d’indemnité compensatrice de congés payés (27 jours) : 10 635,47 euros bruts

* dommages-intérêts pour licenciement nul : 155 000,00 euros nets

A titre subsidiaire :

1-Juger qu’elle a accompli des heures supplémentaires non rémunérées au-delà des 39 heures contractuellement définies en raison de la charge de travail imposée

-Juger que l’infraction de travail dissimulé est constituée

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser les sommes suivantes :

*heures supplémentaires 2013 : 563,19 euros bruts

*congés payés afférents : 56,31 euros bruts

*heures supplémentaires 2014 : 2 762,24 euros bruts

*congés payés afférents : 276,22 euros bruts

*heures supplémentaires 2015 : 263,51 euros bruts

*congés payé afférents : 26,35 euros bruts

*dommages-intérêts pour travail dissimulé : 37 642,32 euros nets

2-Juger que la société GMD n’a pas versé la partie variable de la rémunération conformément aux engagements contractuels et qu’elle est bien fondée à obtenir a minima une prime sur

la base des clients en portefeuille au jour de son arrêt maladie

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser les sommes suivantes :

*rappel de rémunération variable 2015 : 12 073,30 euros bruts

*congés payés afférents : 1 207,33 euros bruts

3- Juger qu’au regard des différents manquements de l’employeur, la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser 155 000 euros nets de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi

4- Fixer à 5 583,50 euros bruts la moyenne des douze derniers mois de salaire perçus

– Condamner en conséquence la société GMD à lui verser les sommes suivantes :

*reliquat d’indemnité conventionnelle de licenciement : 48 653,41 euros bruts

*indemnité compensatrice de préavis : 33 500,98 euros bruts

*congés payés afférents : 3 350,09 euros bruts

* reliquat d’indemnité compensatrice de congés payés : 8 647,62 euros bruts

A titre infiniment subsidiaire :

– Condamner la société GMD à verser les reliquats d’indemnité de rupture consécutives au licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle dans les conditions suivantes :

Si la moyenne des salaires retenues est fixée à 6 273,72 euros bruts, condamner la société GMD dans les conditions suivantes :

*reliquat d’indemnité spéciale de licenciement : 54 132,49 euros bruts

*indemnité équivalente au préavis : 18 821.17 euros bruts

*reliquat d’indemnité compensatrice de congés payés (27 jours) : 10 635.47 euros bruts

Si la moyenne des salaires retenues est fixée à 5 583,50 euros bruts, condamner la société GMD dans les conditions suivantes :

*reliquat d’indemnité spéciale de licenciement : 43 585.83 euros bruts

*indemnité équivalente au préavis : 16 750.49 euros bruts

*reliquat d’indemnité compensatrice de congés payés (27 jours) : 8 647.62 euros bruts

En toute hypothèse :

1-Ordonner la remise des documents de fin de contrat sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

2- Condamner la société GMD à verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions notifiées le 23 janvier 2023, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, la société GMD demande à la cour de :

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de

Lyon en ce qu’il a débouté Mme [T] de l’ensemble de ses demandes

*Sur les demandes formulées au titre de l’exécution du contrat de travail :

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a débouté Mme [T] de l’ensemble de ses demandes au titre du harcèlement moral

-Sur les demandes de rappels de minima conventionnels et, à titre subsidiaire, de

rappels d’heures supplémentaires

A titre principal,

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a débouté Mme [T] de ses demandes au titre du non respect de la classification et des salaires minima conventionnels

A titre subsidiaire,

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a débouté Mme [T] de ses demandes au titre d’un rappel d’heures supplémentaires et au titre du travail dissimulé

A titre infiniment subsidiaire,

– Réduire de manière drastique les demandes de Mme [T] de rappels de salaire au titre d’heures supplémentaires

– Dire et juger que l’existence de travail dissimulé n’est nullement démontrée

En conséquence,

– Débouter Mme [T] de l’intégralité de ses demandes à ce titre

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a débouté Mme [T] de ses demandes au titre de la rémunération variable

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a débouté Madame [T] de ses demandes au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a débouté Mme [T] de ses demandes au titre des indemnités complémentaires de prévoyance

* Sur les demandes formulées au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail :

– Confirmer le jugement rendu le 31 octobre 2019 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a débouté Mme [T] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail

* Sur les demandes formulées par Mme [T] au titre d’un reliquat d’indemnité :

– Débouter Mme [T] de ses demandes de reliquat d’indemnité conventionnelle ou

d’indemnité spéciale de licenciement

– Débouter Mme [T] de sa demande d’une indemnité compensatrice de préavis

– Débouter Mme [T] de ses demandes de congés payés et d’indemnité compensatrice de congés payés sur son solde de tout compte

* A titre subsidiaire sur les demandes indemnitaires de Mme [T] :

– Réduire à de plus justes proportions les diverses indemnités sollicitées par Mme [T]

* En tout état de cause :

– Rejeter la demande de Mme [T] s’agissant du paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– Condamner Mme [T] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens de la présente instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 26 janvier 2023.

MOTIFS

I- Au titre du harcèlement moral, Mme [T] invoque :

1-des agissements répétés et une dégradation des conditions de travail caractérisés par :

a) un comportement tyrannique, un dénigrement et des insultes réitérées de la part du dirigeant

Mme [T] verse aux débats :

– l’attestation de Mme [U], son assistante administrative du 7 janvier 2013 au 30 avril 2014 ( pièce n°38) qui atteste avoir entendu à plusieurs reprises, l’utilisation par le PDG de la société, des termes suivants: « tous des connards, nuls, petits cons, conasses’ même au téléphone ou dès son arrivée dans l’entreprise, et qui évoque par ailleurs des menaces de morts pour lesquelles Mme [T] a demandé des excuses le 3 septembre 2013 ;

– l’attestation de M. [J] ( pièce n°40), acheteur au sein de l’entreprise de 2005 à 2008 et ex compagnon de Mme [T] qui témoigne dans les termes suivants :

« A plusieurs reprises, j’ai été témoin de ses colères. De nombreux salariés ne sont pas restés dans l’entreprise à cause de la pression subie, de la charge de travail importante et non valorisée et surtout du caractère lunatique et irascible de [R] [T]. J’en ai moi-même fais les frais »;

– la réponse de M. [T] au message d’absence laissé par Mme [T] pour la journée du 8 mai 2014 : « Je ne savais pas que j’avais autorisé un autre pont. Informer notre chère responsable export que ce genre de message est inacceptable. Si on est absent pour convenance personnelle, on fait suivre ses emails sur [Courriel 5]. Le monde n’a aucun intérêt à connaître de la fainéantise française et du communisme rampant.

Merci d’imprimer ce mail et de faire suivre à qui de droit » ;

– l’attestation de M. [F] [P], technico-commercial pour la société FAURE TECHNOLOGIES de 2009 à 2015 ( pièce n°39), lequel indique:

« Avoir assisté lors de mes visites dans l’entreprise GECIL PROCESS en 2013 à des insultes proférées par [R] [T] (patron GECIL PROCESS) à l’encontre de ma cliente [C] [T] au sujet de fournitures dont j’étais fournisseur. Ces insultes ont été faites dans le bureau de l’assistante de Madame [C] [T] devant moi-même ainsi que son assistante.

L’attitude de Monsieur [R] [T] était très irrespectueuse et violente. Une fois fini, il a quitté le bureau nous laissant interloqué par son attitude ».

b) une surcharge de travail :

Mme [T] expose qu’en plus de ses fonctions de Directrice commerciale export, elle :

-assurait également des fonctions de responsable Achats, d’approvisionneuse, de secrétaire, de standardiste, de relais des techniciens, de responsable qualité, de responsable de la gestion de l’ERP au quotidien, d’assistante administration des ventes ;

– suppléait également le service comptabilité en s’occupant de la négociation bancaire relative aux ratios bancaires appliqués selon les types de cautions ainsi que les lignes crédit annuelles à prévoir avec le responsable des affaires internationales de la banque ;

– assurait également la coordination et la mise au planning en production, achat, expédition, administration des ventes des commandes clients ;

– faisait aussi parfois l’emballage ou le magasin pour les expéditions.

Mme [T] s’appuie sur :

– le témoignage de M. [F] [P], sus-visé qui atteste que Mme [T] était son interlocutrice au sein de la société GECIL PROCESS pour les questions des achats et de la qualité ;

– le rapport d’enquête de la CPAM dans le cadre de l’instruction sur la maladie professionnelle et notamment sur les déclarations de M. [T] qui indique qu’il lui avait laissé carte blanche pour gérer la société et sur celles de Mme [I] [T] qui indique qu’elle était multi-tâches ;

– les fiches journalières d’activité ( pièce n°60) qu’elle remettait à la Direction et l’analyse qu’elle en a faite ( Pièce n°71), dont il ressort qu’elle effectuait chaque année plus de 200 heures supplémentaires (391 heures supplémentaires en 2012, l’année de son premier burn-out) et que la moitié de son temps de travail était dévolue à des tâches autres que ses fonctions de Directrice export ;

– un tableau synthétique des mails, courriers, fax qu’elle traitait, destiné à démontrer que:

*elle rédigeait plus de 90% des offres commerciales

*elle traitait 50% des mails, fax, courrier s;

– l’attestation de M. [V], directeur technique de la société 1LIFE (Pièce n°74), qui confirme l’implication de Mme [T] à tous les niveaux dans le changement de l’ERP de l’entreprise Gecil Process.

Mme [T] invoque par ailleurs un premier burn out en 2012, année au cours de laquelle elle a dû assumer un nombre important de déplacements à l’étranger compte tenu de l’opération de la hanche de M. [T]. Elle produit :

– le certificat médical du docteur [E] qui certifie qu’elle a été arrêtée du 15/06/2012 au 04/07/2012 pour burn out ;

– un mail que lui a adressé le 7 octobre 2012, M. [H] ( Pièce n°81) à la fois client de la société Gecil Process, en tant qu’agent sur le Maroc et également responsable des ventes sur la même zone d’un fabricant français d’instruments d’analyses pour les laboratoires pétroliers indiquant: « Tu devrais avoir plus de support pour les ventes, pas possible de continuer comme cela’ Si tu veux vendre, dis-moi, je pourrais voir avec Normalab ».

Enfin, Mme [T] indique qu’à la suite de son arrêt maladie en 2015, la société GMD a passé des annonces pour un poste de secrétaire de direction et pour un poste de

responsable des achats (Pièce n°35), admettant ce faisant que deux recrutements étaient nécessaires pour la remplacer et absorber ses multiples tâches.

La société GMD conteste toute valeur probante aux attestations sus-visées, qu’elle considère comme ayant été établies pour les besoins de la cause :

– celle de Mme [U], au motif, d’une part, que cette dernière omet de préciser qu’elle a travaillé pour le compte de la société Gecil PROCESS à deux reprises, du 20 novembre 1995 au 29 juin 1997, puis à compter de 2013, ce qui rend son témoignage peu crédible sur le climat tyrannique créé par M. [T] ; au motif, d’autre part, qu’elle n’a jamais été témoin direct des agissements imputés par Mme [T] à son frère; enfin, Mme [U] évoque une altercation qui aurait eu lieu une semaine après le 3 septembre 2013, alors qu’ à compter du 9 septembre 2013, M. [R] [T] étant aux Etats-Unis (billet d’avion en date du 9 septembre 2013 versé aux débats), ne pouvait être dans les locaux français de la Société GECIL PROCESS ;

– celle de M. [J], au motif que l’attestant est l’ex-concubin de Mme [C] [T], et père de sa fille, [B] [J] ;

– celle de M. [P] dés lors que M. [R] [T] a été en conflit avec ce dernier sur la qualité d’un type de matériel en particulier, en l’espèce ‘les sondes de température T1 1/10 ème DIN’, de sorte que les relations commerciales entre M. [T] et M. [P] sont depuis lors tendues.

Quant aux courriels produits, la société GMD souligne leur faible nombre en 20 ans de relation professionnelle :

– celui du 27 avril 2012 mal interprété par Mme [T] ;

– celui du 18 mars 2014 attribué à Mme [U] pour annoncer sa démission mais sur la provenance duquel la société GMD émet un doute.

La société GMD soutient par ailleurs que Mme [T] n’ a pas communiqué à la direction la pièce adverse n°61-d correspondant à un prétendu récapitulatif mensuel des heures travaillées par elle, de sorte que ce document n’a aucune valeur et comporte notamment une contradiction relative à la journée du 8 mai 2014 notée fériée mais récupérée le lendemain.

Sur la charge de travail, la société GMD expose que :

– Mme [T] n’avait pas une autonomie totale au sein de la Société, ni la responsabilité de plusieurs missions ;

– Mme [T] n’est pas titulaire d’un diplôme d’Ingénieur Technique mais possède un diplôme dans le domaine commercial ;

– lors de l’entrée de Mme [T] au sein de la Société GECIL PROCESS en 1994, le réseau de distributeurs à l’étranger avait déjà été mis en place par M. [R] [T] entre les années 1980 et 1995 ; une importante partie du Chiffre d’affaires dégagé par la Société provient de commandes de clients fidèles, qui procèdent soit au remplacement de leur unité de distillation soit à une mise à jour au dernier design, sans qu’il soit utile de procéder à une prospection commerciale ;

– l’activité de Mme [T] se limitait à suivre les procédures existantes pour établir les offres standard ;

– Mme [T] affirme sans en faire la démonstration avoir apporté 54 « nouveaux clients », mais seuls 7 clients ont potentiellement été prospectés par elle, ce qui représente 0,35 clients par an en 20 années de relation contractuelle ;

– le nombre de ventes d’unités MINIDIST PLUS a baissé après 1994 ;

– Mme [T] ne produit aucun mail de M. [T] lui imposant certaines tâches ;

– dans les suites du départ de Mme [U] le 30 avril 2014, la Société GECIL a fait appel à

des intérimaires; ainsi Mme [K] a été embauché en mai/juin 2014 en qualité d’assistante et Mme [O] a été embauchée à compter du 24 novembre 2014, en contrat à durée indéterminée, en qualité d’assistante administrative et export ;

– Mme [C] [T] n’a pas été remplacée à son poste de Directrice commerciale export. La société GECIL PROCESS est une TPE comptant un effectif de moins de 11 salariés et vendant, outre les pièces détachées des appareils, 5 à 15 unités de distillation par an en moyenne. Actuellement, M. [R] [T] assure la partie commerciale de l’activité de GECIL PROCESS, en sus de ses fonctions de Direction et de développement des appareils pour GECIL PROCESS, ainsi que du commercial / mise en route pour GT INSTRUMENTS. Il travaille avec :

– une assistante commerciale export, Mme [Y], embauchée depuis octobre

2017 qui assure l’assistanat commercial export, les achats et lancements production et un comptable à temps partiel, M.[G], remplaçant depuis novembre 2022 M. [D], lequel avait été embauché suite au départ à la retraite de Mme [I] [T].

La société GMD ajoute qu’un ingénieur technico-commercial a été embauché en novembre 2022 en vue du départ à la retraite de M.[R] [T] et que l’entreprise emploie également deux câbleurs et deux techniciens bureau d’étude électronicien et chimiste.

2- Une atteinte à ses droits, à sa dignité et à sa santé mentale et physique caractérisée par :

a) la dégradation de son état de santé :

b) la conscience par l’employeur du lien de causalité entre l’arrêt maladie et les conditions de travail :

Mme [T] produit à ce titre :

– un mail d’excuse adressé par M. [T] le 5 mars 2015 (Pièce n°34) soit un mois après le début de l’arrêt maladie :

« J’ai appris que ton arrêt maladie a été prolongé que tu dois te reposer.

Il semble que je sois la cause de ce burnout et je m’en excuse. Ne pouvant te parler, j’utilise

Internet.

Sache que nous ferons tout pour que tu passes cette épreuve et nous mettrons en place

l’organisation permettant de soulager ton activité à GECIL.

Ta présence est indispensable et ton absence se fait ressentir chaque jour malgré toute notre

bonne volonté. Nous devrions nous en sortir malgré tout, forcément moins bien. But nobody is perfect.

L’important est de te reposer le mieux possible et de restaurer un dialogue constructif dans

l’intérêt de l’entreprise et de la famille ».

– un mail de [I] [T] ( pièce n°83) :

« J’espère que tu arrives à te reposer et te motiver pour faire des petites choses qui te redonnent l’envie.

Je suis passée par là, quand on a plus de jus et que la tête ne suit pas, ce n’est pas terrible on a envie de rien et on a l’impression d’être à côté de ses pompes même si on fait tout pour ne pas l’être »

c) la reconnaissance de la maladie professionnelle

d) son taux d’incapacité

Mme [T] invoque le rapport remis par le Docteur [L], expert psychiatre mandaté par la CPAM , le 24 juin 2019, dont les conclusions sont les suivantes :

« Madame [T] a présenté un premier épisode anxio-dépressif réactionnel à des facteurs

professionnels en 2012. Il n’y a pas d’antécédents psychiatriques indépendants du travail.

Au jour de l’examen clinique, Madame [T] présente des symptômes :

– EDM chronique, tristesse, douleur morale, perte de confiance en soi, sentiment d’incapacité, fatigabilité, perte énergie, retrait social, repli au domicile, doute, indécisions, troubles cognitifs évoluant depuis plus de 6 mois.

– Trouble anxieux généralisé, hyper réactivité émotionnelle aux événements quotidiens.

– Anxiété sociale, altération des compétences sociales, retrait social, repli au domicile.

La symptomatologie est stable depuis plus de 6 mois, altère significativement l’ensemble des domaines de la vie sociale, familiale, affective et professionnelle.

Conclusion :

Madame [T] présente un EMD chronique, trouble anxieux généralisé, anxiété sociale, consolidée au jour de l’examen clinique, le 21 juin 2019, sans état antérieur.

Les séquelles de maladie professionnelle se chiffre à 30% ».

Le 17 Octobre 2019, la CPAM a notifié à Mme [T] un taux d’incapacité permanente de

38% dont 8% pour taux professionnel.

Sur l’état de santé de Mme [T], la société GMD soutient que les éléments adverses ne matérialisent aucunement un lien de causalité entre les conditions de travail, l’état de santé et l’inaptitude, dés lors que :

– les arrêts de travail de Mme [T] sont des arrêts de droit commun (a) ;

– les éléments médicaux produits ne font que reprendre les allégations de l’appelante sans opérer aucun constat concernant une prétendue origine professionnelle de la pathologie (b) ;

– le médecin du travail n’a en aucun cas visé une inaptitude d’origine professionnelle lors de

ses avis (c).

– si la Caisse a décidé de prendre en charge la maladie de Mme [T] au titre de la législation professionnelle, cette décision est totalement contestable et ne saurait être prise

en compte par la Cour pour statuer sur l’origine de la pathologie, la Commission de recours

amiable de la Caisse ayant elle-même admis que sa décision, menée sur la base d’une

instruction insuffisante et non contradictoire, basée sur les seuls dires de Mme [T], était

inopposable à la société intimée.

– aucune décision juridictionnelle n’est intervenue pou reconnaître le prétendu caractère professionnel de la pathologie de Mme [T] (e).

La société GMD ajoute que deux mois avant son arrêt de travail, Mme [T] indiquait, dans un échange de courriels avec M.[R] [T], daté du 18 novembre 2014, qu’elle souffrait lourdement de ses cervicales et ne dormait plus, information qu’elle n’a pas communiquée

au médecin psychiatre qui l’a placée en arrêt de travail en février 2015.

Concernant le taux d’incapacité permanente retenu, la société GMD fait valoir que ce taux fixe les séquelles de la dépression de Mme [T] et potentiellement de ses douleurs aux cervicales, mais ne vient en rien confirmer l’existence d’un lien entre la pathologie et les conditions de travail de l’appelante au sein de la société.

****

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Et il résulte de l’article L. 1154-1 du code du travail que lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral; dans l’affirmative, il appartient à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifié par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le dénigrement, les insultes réitérées et de façon générale le comportement tyrannique de M. [R] [T] sont essentiellement illustrés par trois témoignages, celui de Mme [U], de M. [J] et de M. [P] qui décrivent un comportement colérique, irrespectueux et violent de M. [R] [T] à l’égard de Mme [C] [T], mais aussi, de façon habituelle à l’égard de l’ensemble des autres salariés, Mme [U] attestant notamment avoir été elle-même l’objet des foudres de M. [T] quand [C] [T] était en voyage d’affaires et avoir démissionné le 18 mars 2014 pour ‘ne pas voir sa santé se dégrader’.

Les liens d’amitié et de famille unissant les témoins à Mme [T], ainsi que leur propre perception du comportement de M. [T] à leur égard, font de ces témoignages des éléments subjectifs dont la cour souligne par ailleurs qu’ils sont peu circonstanciés dés lors qu’ils décrivent surtout une ambiance générale.

Un fait précis est cependant évoqué par Mme [U]; il s’agit de menaces de morts que M. [T] aurait proférées contre Mme [T] le 2 septembre 2013 et dont il se serait excusé le lendemain en présence de Mme [U]. Sur cet événement, le témoignage de Mme [U] est un témoignage indirect dés lors qu’il est constant qu’elle n’a pas assisté à la scène de menaces, mais seulement à celle d’excuses. Dés lors, en l’absence de tout autre élément objectif de nature à venir corroborer l’existence de menaces de mort contre Mme [T], ce fait n’est pas suffisamment établi.

Enfin, s’agissant du courriel adressé par M. [T] le jeudi 8 mai 2014, s’il révèle incontestablement une personnalité acariâtre, il apparaît que la réponse de Mme [T] qui évoque ‘les conséquences désastreuses de ton management sur le personnel’, dénonce le comportement de M. [T] à l’égard de l’ensemble des personnels et pas seulement envers elle. Elle poursuit dans les termes suivants :

‘Je passe sur les commentaires gratuits qui finissent ton e mail qui sont insultants pour tous ceux qui travaillent à GECIL ou à GMD et particulièrement de la part d’un patron. Ceci n’est pas digne de toi.

Si ces commentaires étaient lus par quelqu’un d’autre que moi cela remettrait à nouveau le feu aux poudres au sein de ton personnel, au lieu d’en faire une équipe soudée!

Je te rappelle que grâce à ce type d’attitude, le personnel ne s’implique plus. Tu as perdu une première équipe avec un procès, une seconde, et depuis 3 mois un technicien et une secrétaire ont donné leur démission suite à tes propos injurieux constants.

Il est temps que tu te fasses aider par un professionnel afin d’apprendre à gérer tes humeurs comme je te l’ai déjà dit suite à ta menace de mort à mon encontre qui a choqué plus d’une personne (…)’

Il en résulte que le comportement tyrannique de M. [R] [T] est illustré par des éléments peu fournis, et qu’à les supposer établis, les accès de colère du dirigeant apparaissent peu circonstanciés à l’exception des deux événements sus-visés; qu’ils étaient le plus souvent dirigés ‘erga omnes’ et ne manquaient pas de donner lieu, de la part de Mme [T], à des propos de ‘recadrage’ auxquels M. [T] ne répondait pas. Le dénigrement et les insultes réitérées à l’égard de Mme [T] ne sont par conséquent pas suffisamment établis.

S’agissant de la charge de travail, Mme [T] s’appuie sur les attestations sus-visées, ainsi que sur l’enquête administrative diligentée par la CPAM, sur ses fiches journalières de travail, sur un document de synthèse des voyages professionnels réalisés au cours de la relation contractuelle, sur les attestations de M. [R] [Z], technicien d’usinage et de M. [N] [V], directeur technique de la société ‘1 Life’, lesquels désignent Mme [T] comme leur seule interlocutrice dans des domaines aussi variés que la négociation tarifaire des pièces, l’envoi des bons de commande, l’organisation des délais de livraison, mais aussi le déploiement du logiciel de gestion ERP au sein de la société GECIL PROCESS.

Mme [T] a déclaré dans le cadre de l’enquête administrative de la CPAM qu’elle a assumé sa charge de travail sans problèmes pendant de nombreuses années, mais qu’elle a subi un accroissement exponentiel de cette charge de travail en raison d’une part du départ de M. [J], l’unique acheteur de la société et son compagnon, en 2007, d’autre part, des absences régulières et surtout de la personnalité de M. [T] à compter de la création de la holding en 2008.

L’activité multi-tâches de Mme [T] n’apparaît pas sérieusement contestable , et le débat ouvert par la société GMD sur les compétences supposées limitées de Mme [T] au domaine commercial est sans objet. Il résulte en effet des propres déclarations de M. [R] [T] dans le cadre de l’enquête administrative de la CPAM, qu’il lui avait donné carte blanche pour gérer l’entreprise GECIL PROCESS, témoignage d’une confiance totale accordée à Mme [T] et non réservée au domaine commercial, ce que la société GMD n’est pas fondée à remettre en cause aujourd’hui. L’activité multi-tâches, également attestée par Mme [I] [T], comptable et également actionnaire de la société, apparaît en accord d’une part avec la nature de l’entreprise, soit une PME familiale, d’autre part avec les fonctions de directrice générale que Mme [C] [T] a exercé à la tête de la société GECIL PROCESS au décès du père de la fratrie et fondateur de la société.

Le caractère multi-tâches est cependant insuffisant à établir une surcharge de travail et la cour observe que la demande formulée par Mme [T] à titre subsidiaire au titre des heures supplémentaires ne traduit pas la surcharge de travail alléguée dés lors qu’elle fait état :

* pour 2013, de 107,38 heures supplémentaires non prescrites (période du 29 juillet au 31 décembre 2013 ), soit une moyenne de 5,3 heures supplémentaires par semaine sur la période ;

* pour 2014, de 295,75 heures supplémentaires, soit une moyenne de 6,16 heures supplémentaires par semaine ;

* pour la période du 1er janvier 2015 au 6 février 2015, de 31,75 heures supplémentaires, soit une moyenne de 5,29 heures par semaine.

Les déplacements professionnels effectués par Mme [T] à l’étranger et récapitulés par la société GMD, soit un déplacement en 2008, deux en 2009, trois en 2010, un en 2011, trois en 2012, un en 2013 et un en 2014, ne sont pas significatifs d’une charge de travail anormale et ce d’autant plus qu’il résulte des bulletins de salaires de Mme [T] qu’elle a bénéficié de façon régulière de repos compensateurs.

Enfin, s’agissant de son état de santé, Mme [T] produit les arrêts maladie établis par son médecin traitant le docteur [E] à compter du 9 février 2015, lesquels visent une ‘anxiété réactionnelle-Burn out’, la dépression ou encore un syndrome anxio-dépressif ainsi que la déclaration de maladie professionnelle datée du 15 août 2016.

Mme [T] produit également :

– l’avis spécialisé rédigé le 21 octobre 2016, par le docteur [A], psychiatre, à la demande du médecin conseil. Ce médecin spécialisé conclut d’une part à l’existence d’un syndrome psychotraumatique avec ses complications dépressives, anxieuses et psychosomatiques, chez une patiente sans antécédents psychiatriques, d’autre part, à l’origine professionnelle de l’intégralité des troubles présentés par Mme [T] ;

– le rapport établi par le docteur [L], médecin spécialiste agréé en psychiatrie, le 24 juin 2019 qui constate la persistance d’une fragilité émotionnelle à l’évocation de la rupture familiale secondaire aux événements professionnels, un sentiment de culpabilité, une douleur morale (…). Le docteur [L] conclut que:’ Mme [T] présente un EDM (épisode dépressif majeur), chronique, trouble anxieux généralisé, anxiété sociale, consolidés au jour de l’examen clinique, le 21 juin 2019, sans état antérieur’ ;

– une attestation du docteur [E] datée du 20 juillet 2020 selon laquelle : ‘Mme [T] présentait des troubles musculo-squelettiques depuis 2012, diagnostiqués par le docteur [M] qui la suivait à l’époque , et pour lesquels elle a bénéficié de plusieurs traitements sans beaucoup d’efficacité.

Depuis la prise en charge de son Burn out et son arrêt de travail depuis 2015 les douleurs se sont progressivement améliorées jusqu’à disparaître.’

La dégradation de l’état de santé psychologique de Mme [T] est avéré et un lien est établi par l’ensemble des praticiens, avec l’activité professionnelle, ce qui a conduit d’une part à une déclaration de maladie professionnelle qui pour être tardive repose néanmoins sur des arrêts maladie évoquant un syndrome anxio-dépressif réactionnel à un burn-out, d’autre part, à une reconnaissance de maladie professionnelle même si la commission de recours amiable a prononcé l’inopposabilité de cette décision à l’employeur.

Enfin, il est constant que Mme [T] s’est vue notifier le 17 octobre 2019 un taux d’incapacité permanente de 38% dont 8% pour le taux professionnel et l’attribution d’une rente au titre des séquelles d’un épisode dépressif majeur chronique reconnu en maladie professionnelle avec trouble anxieux généralisé, anxiété sociale, douleur morale, perte de confiance en soi et troubles cognitifs.

Mais, au terme des débats, il apparaît que les injures et le dénigrement ne sont pas établis, que la charge de travail décrite par Mme [T] correspond à une charge soutenue mais n’est pas caractéristique d’une charge anormalement élevée au regard des responsabilités exercées par elle au sein de l’entreprise, et que le lien entre les conditions de travail et la dégradation de l’état de santé, si grave soit-elle, n’est pas démontré, de sorte que ces éléments, pris dans leur ensemble, ne laissent pas supposer l’existence d’un harcèlement moral, et la cour observe que le docteur [A] interrogé sur l’existence de facteurs personnels ou extra professionnels susceptibles d’avoir favorisé la genèse ou la décompensation des troubles présentés par l’assurée, a retenu par ailleurs un facteur personnel tiré du dévouement de Mme [T], dans les termes suivants : ‘le dévouement de la patiente à l’entreprise qui ne peut être retenu comme un facteur pathologique dans la mesure où le poste de cadre dirigeant suppose un très fort investissement dans la société allant au delà des difficultés interpersonnelles pour favoriser l’efficacité professionnelle, ce dont a fait preuve Mme [T].’

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de ses demande au titre du harcèlement moral.

II-Sur le rappel de salaire lié à la rémunération minimale conventionnelle

A- sur la convention applicable :

Mme [T] soutient qu’elle relevait automatiquement, de par son statut cadre, des accords nationaux de la métallurgie et des accords spécifiques applicables aux ingénieurs et cadres (cf. Article 1 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie).

Mme [T] en veut pour preuve :

– l’application d’une classification niveau III alors que les accords de la métallurgie du Rhône ne classifient que par coefficient.

– l’octroi de trois jours de congés payés supplémentaires pour ancienneté (article 14)

– le paiement des compléments de salaire (en février 2018 !) pour l’arrêt maladie du 9 février 2015 au 31 mars 2016

Elle conclut à la nullité et à l’inopposabilité de la clause de renonciation à la convention collective de la métallurgie insérée dans la convention tripartite dans les termes suivants :

« Mme [C] [T] déclare expressément accepter ledit transfert dans les conditions

susmentionnées à compter du 1er janvier 2008 et renoncer à l’application de la convention

collective de la métallurgie, étant précisé que la société GMD ne relève d’aucune convention

collective ».

A titre subsidiaire et si par extraordinaire, la clause de renonciation contenue dans la convention de transfert tripartie devait recevoir son plein effet, Mme [T] soutient :

– d’une part que la société a continué d’appliquer volontairement les dispositions relatives à la convention collective de la métallurgie ainsi qu’en attestent :

*les bulletins de salaire qui continuent de faire référence aux accords de la métallurgie du Rhône qui renvoient expressément aux accords nationaux de la métallurgie et aux accords nationaux des ingénieurs et cadres de la métallurgie,

*les 3 jours de congés payés supplémentaires pour ancienneté qui ont continué à lui être crédités conformément aux accords nationaux pour les ingénieurs et cadres de la métallurgie,

*la pièce adverse n°20 établie par la société GMD et qui présente son détail (faux) du

calcul des maintiens de salaires dans le cadre de l’arrêt maladie suivant les dispositions conventionnelles applicables aux ingénieurs et cadres (maintien de salaire à 100% les 6 premiers mois puis à 50% les 6 mois suivants)

– d’autre part que la société GMD est couverte par le champ d’application des accords nationaux de la métallurgie et des accords spécifiques applicables aux ingénieurs et cadres.

La société GMD expose que :

– la Société GECIL PROCESS indiquait très clairement appliquer la convention collective de la métallurgie du Rhône au contrat de travail de Mme [T]

– une novation du contrat est intervenue par la signature de la convention de transfert tripartite signée le 24 décembre 2007 entre les Sociétés GECIL PROCESS et GMD et Mme [T], de sorte que l’article L.2261-14 (relatif aux conditions d’applicabilité des conventions et accords) ne trouvait pas à s’appliquer,

– toutefois, il apparaît qu’en dépit de ce qui était indiqué aux termes de cette convention tripartite, la Société GMD maintenait l’application au contrat de travail de Mme [T] de la convention collective de la métallurgie du Rhône ;

et en réponse aux arguments de Mme [T], que :

– les sociétés GECIL PROCESS et GMD n’entrent pas dans le champ d’application de l’accord national du 16 janvier 1979 de la métallurgie; en effet, s’agissant des sociétés Holdings, l’article 1er de l’accord national du 16 janvier 1979 vise uniquement les sociétés dont le code APE est « 7600 » et «détenant des participations dans des entreprises incluses dans le présent champ d’application, pour un montant supérieur à la moitié de la valeur de leur portefeuille : ce montant et cette valeur sont retenus tel que figure au poste «immobilisation» du bilan arrêté à la fin du dernier exercice clos ». Or, la société GMD, dont le Code APE est 6420Z (Activités des sociétés holding), et dont la filiale

n’entre pas dans le champ d’application de l’article 1er de l’accord du 16 janvier 1979, ne remplit aucun de ces deux critères ;

– les sociétés GECIL PROCESS et GMD n’ont pas l’obligation d’appliquer les dispositions conventionnelles de la branche de la métallurgie, ces dernières ne relevant obligatoirement d’aucune convention collective ;

– la société GECIL PROCESS a fait le choix d’appliquer à Mme [C].[T] la convention collective de la métallurgie du Rhône et uniquement celle-ci, que cette application a été maintenue par la société GMD ;

– en aucun cas la société GECIL PROCESS ou la société GMD, n’a entendu appliquer les

accords nationaux ingénieurs et cadres de la métallurgie, qui ne sont pas obligatoirement applicables.

****

L’article L 2261-2 du code du travail énonce que : ‘ la convention collective applicable est celle dont relève l’activité principale exercée par l’employeur.

En cas de pluralité d’activités rendant incertaine l’application de ce critère pour le rattachement d’une entreprise à un champ conventionnel, les conventions collectives et les accords professionnels peuvent, par des clauses réciproques et de nature identique, prévoir les conditions dans lesquelles l’entreprise détermine les conventions et accords qui lui sont applicables.’

Et il résulte de l’accord national du 16 janvier 1979 relatif au champ d’application des accords nationaux conclus dans la branche de la métallurgie, que les holdings entrent dans ce champ d’application lorsqu’elles détiennent ‘des participations dans des entreprises incluses dans le champ d’application, pour un montant supérieur à la moitié de la valeur de leur portefeuille : ce montant et cette valeur sont retenus tels qu’ils figurent au poste ‘immobilisations’ du bilan arrêté à la fin du dernier exercice clos.’

Or, en l’espèce, il résulte des comptes annuels pour l’exercice 2015, que la société GECIL PROCESS est détenue par la SAS GMD à hauteur de 75% du capital.

Et il n’est pas contesté que l’activité principale de la société GECIL PROCESS, à savoir :

‘ création, constitution, réalisation d’équipements se rapportant à l’électronique. Domaines informatique, automatisme et à la réalisation de tous process de laboratoires et industriels en pétrochimie et chimie.’, entre dans le champ d’application de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, étendue par arrêté du 27 avril 1973 (IDCC 650)

La société GMD n’est par conséquent pas fondée à soutenir que ni sa filiale, ni elle n’entrent dans le champ d’application de l’article 1er de l’accord du 16 janvier 1979.

Elle n’est pas davantage fondée à se prévaloir de la renonciation contractuelle de Mme [T] à l’application de la convention collective de la métallurgie, dès lors qu’un engagement comportant renonciation au bénéfice d’une convention collective a un caractère illicite.

La société GMD soutient par ailleurs qu’elle a toujours appliqué la convention collective de la métallurgie du Rhône et qu’elle n’est soumise à aucune obligation d’appliquer les dispositions conventionnelles de la branche de la métallurgie, dés lors qu’elle ne relève obligatoirement d’aucune convention collective.

La convention collective des mensuels des industries métallurgiques du Rhône ( IDCC 0878) visée par le contrat de travail de Mme [T] et par ses bulletins de salaires, s’applique, selon les termes de son préambule, aux rapports entre les employeurs signataires et leurs ouvriers, techniciens, dessinateurs, agents de maîtrise des deux sexes des industries métallurgiques, mécaniques, connexes et similaires du département du Rhône, du canton de [Localité 8] et de la commune de [Localité 6].

Elle s’applique en outre aux mensuels des établissements métallurgiques qui ne ressortissent pas directement par leur profession à la métallurgie (…)

L’article 31 de la convention collective prévoit que la classification des mensuels est effectuée d’après la classification figurant en annexe 1. Ladite annexe prévoit une classification des ouvriers selon quatre niveaux, une classification des administratifs-techniciens suivant cinq niveaux et une classification des agents de maîtrise suivant cinq niveaux également.

Mme [T] a été engagée en qualité de responsable commercial et export à la position III sans plus de précisions. La description de ses fonctions lui confère un statut de cadre, et il est constant que ses bulletins de salaire mentionnent initialement un emploi de ‘cadre expo’, puis un emploi de ‘directrice export’ relevant de la catégorie ‘dirigeants’ et que ces bulletins de salaires mentionnent également une cotisation à la retraite et prévoyance des cadres.

Enfin Mme [C] [T] a reçu en juillet 2013, une procuration de M. [R] [T] pour signer tout contrat commercial pour le compte de la société GECIL PROCESS.

Il en résulte qu’il n’est pas contestable que Mme [T] a exercé au sein de la société GECIL PROCESS des fonctions d’encadrement et non des fonctions d’agent de maîtrise.

Or, il est constant que la convention collective des mensuels des industries métallurgiques du Rhône ne classe pas les cadres, de sorte que lorsque la société GMD invoque le niveau III de la dite convention, elle considère que Mme [T] relève, au mieux, de la catégorie ‘agents de maîtrise’, ce qui ne correspond ni à sa fiche de poste telle qu’elle résulte du descriptif contractuel des fonctions, ni aux mentions de ses bulletins de salaire, ni aux responsabilités qui lui sont conférées en vertu de l’organigramme et de la délégation de pouvoirs versés aux débats.

Mme [T] soutient par ailleurs qu’elle a bénéficié des dispositions de l’article 14 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie dés lors qu’elle a bénéficié d’un congé supplémentaire de 3 jours au regard de son âge et de son ancienneté.

La société GMD soutient au contraire que Mme [T] a bénéficié des dispositions de l’article 43 de la convention collective de la métallurgie du Rhône qui prévoient, notamment que:

‘(…) Les mensuels totalisant plus de 10 ans d’ancienneté dans l’entreprise bénéficieront d’un jour ouvrable de congé supplémentaire, porté à 2 jours après 15 ans et à 3 jours après 20 ans d’ancienneté. (…)’

Mais Mme [T] ne relevant pas de la catégorie des mensuels de la convention collective de la métallurgie du Rhône, c’est à tort que la société GMD invoque l’application des dispositions de l’article 43 de cette convention.

Il en résulte que Mme [T] est fondée à invoquer l’application de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, étendue par arrêté du 27 avril 1973 (IDCC 650).

B- Sur le non-respect de la rémunération minimale conventionnelle

Mme [T] expose que depuis 1994, date de son embauche, elle est classifiée au niveau III, sans que l’employeur n’ait jamais fait figurer l’indice A, B ou C et que le débat porte donc uniquement sur l’indice applicable et la rémunération minimale conventionnelle associée.

Ainsi, Mme [T] revendique la position III C au visa des dispositions de l’article 21 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, qui définit la position III C de la manière suivante :

« L’existence d’un tel poste ne se justifie que par la valeur technique exigée par la nature de

l’entreprise, par l’importance de l’établissement ou par la nécessité d’une coordination entre

plusieurs services ou activités.

La place hiérarchique d’un ingénieur ou cadre de cette position lui donne le commandement

sur un ou plusieurs ingénieurs ou cadres des positions précédentes.

L’occupation de ce poste exige la plus large autonomie de jugement et d’initiative.

Une telle classification résulte aussi de l’importance particulière des responsabilités

scientifique, technique, commerciale, administrative ou de gestion confiées à l’intéressé en

raison du niveau de son expérience et de ses connaissances sans que sa position dans la

hiérarchie réponde à la définition ci-dessus ni même à celles prévues aux repères III A et III

B ».

Mme [T] expose qu’elle est ingénieur diplômée des arts et métiers; qu’elle a exercé les fonctions de directrice générale de la société GECIL PROCESS du 1er août 1996 au 31décembre 2003 et qu’en sa qualité de directrice commerciale export, elle avait, en toute autonomie, la responsabilité de :

– l’animation commerciale directe de la clientèle, que ce soit les agents ou les clients par prospection, la formation commerciale partout dans le monde à l’exception du continent américain ;

– la recherche de nouvelle clientèle et nouveaux agents avec formation de ceux-ci

– la participation à des salons professionnels à l’étranger et l’organisation de séminaires tant à l’étranger qu’en France ;

– la démonstration auprès de la clientèle française et étrangère ;

– l’élaboration des tarifs ;

– l’élaboration des offres commerciales et techniques intra UE et hors UE, leurs conditions

d’application selon les dernières réglementations internationales en vigueur INCOTERM (International Commercial Terms), ainsi que les termes et modalités de paiement en conformité avec les dernières Règles et Usances en vigueur RUU (Rules & Usances Uniform) ;

– la négociation et la signature de contrats commerciaux engageant la responsabilité de l’entreprise, la négociation des termes juridiques desdits contrats et le montage financier de ceux-ci ;

– la signature de contrat de négoce supplémentaire à l’activité standard de GECIL Process ;

– la demande d’engagements de l’entreprise auprès de la banque pour tout établissement de

cautions : soumission, Bonne exécution, Bonne fin, restitution d’acompte’.

– la relation avec le service international des banques pour le montage de certains dossiers.

Mme [T] en déduit que la convention applicable :

– impose la rémunération au forfait pour les cadres de niveau IIIB et IIIC.

– ne fait pas de différence en matière de rémunération minimale annuelle garantie entre les cadres au forfait heures, ceux au forfait jours et ceux sans référence horaire.

Mme [T] sollicite en conséquence un rappel de salaire de 16 023,28 euros bruts, outre

1 602,32 euros bruts de congés payés afférents, correspondant à la différence entre la rémunération minimale annuelle brute garantie par les accords conventionnels et la rémunération annuelle brute effectivement perçue au titre des années 2013, 2014 et 2015.

La société GMD s’oppose à cette demande en soutenant que :

– en l’absence d’application volontaire des accords nationaux ingénieurs et cadres de la métallurgie, la classification ou les minima conventionnels prévus par les dits accords ne sont pas applicables à la relation de travail ;

– le niveau III existe également s’agissant des administratifs, agents de maîtrise de la métallurgie (coefficient 240 de la convention collective de la métallurgie du Rhône) et la position ou le niveau III se retrouve donc dans les deux conventions collectives ;

-Mme [T] a bénéficié d’une rémunération bien supérieure aux minima conventionnels, notamment aux classifications les plus élevées, prévus par l’application de la convention collective de la métallurgie du Rhône,

– les barèmes salariaux prévus pour les années 2013, 2014 et 2015 ne permettraient pas à

Mme [T] de solliciter des rappels de salaire, bien au contraire.

La société GMD soutient en tout état de cause, si par exceptionnel, la cour suivait Mme [T] dans son argumentation, que la position hiérarchique III C revendiquée de la convention collective de la métallurgie des cadres lui est inapplicable dés lors que cette position se définit de la manière suivante :

« L’existence d’un tel poste ne se justifie que par la valeur technique exigée par la nature de l’entreprise, par l’importance de l’établissement ou par la nécessité d’une coordination entre plusieurs services ou activités ».

Enfin, la Société GMD conclut qu’elle pourrait, par extraordinaire, si la Cour estimait que les accords ingénieurs et cadres de la métallurgie étaient applicables à la relation de travail, concevoir que les fonctions de Mme [T] puissent correspondre à la position repère III B des accords nationaux ingénieurs et cadres de la métallurgie, dont elle se prévaut, dont la définition est la suivante :

«Ingénieur ou cadre exerçant des fonctions dans lesquelles il met en ‘uvre des connaissances théoriques et une expérience étendue dépassant le cadre de la spécialisation ou conduisant à une haute spécialisation.

Sa place dans la hiérarchie lui donne le commandement sur un ou plusieurs ingénieurs ou cadres des positions précédentes dont il oriente et contrôle les activités, ou bien comporte, dans les domaines scientifique, technique, commercial, administratif ou de gestion, des responsabilités exigeant une très grande autonomie de jugement et d’initiative ».

Sur le rappel de salaire demandé, la société GMD oppose à Mme [T] que :

– l’absence de mention de la durée du travail dans un contrat de travail ne fait absolument pas présumer l’existence d’une convention de forfait, mais fait seulement présumer l’existence d’un contrat de travail à temps complet, ce qui n’est nullement contesté en l’espèce ;

– la convention de forfait, en heures ou en jours, ne peut en aucun cas être imposée par une convention collective ;

– la convention de forfait, en heures ou en jours, ne se présume pas, mais requiert l’accord express du salarié concerné ;

– en l’espèce, les bulletins de paie de Mme [T] font expressément référence à une durée mensuelle du travail de 169 heures et mentionnent par ailleurs le paiement de 17,33 heures supplémentaires par mois, de sorte que les barèmes salariaux sur lesquels se base Mme [T] pour formuler ses rappels de salaire ne lui sont pas applicables.

****

Il résulte des débats que Mme [T] a calculé un rappel de salaires sur la base des salaires minima annuels des salariés au forfait en application des barèmes applicables aux salariés ayant conclu une convention de forfait en application de l’accord national du 28 juillet 1998 modifié par avenant du 29 janvier 2000 étendu.

Or il résulte des dispositions de l’article L. 3121-55 du code du travail que la forfaitisation de la durée du travail doit faire l’objet de l’accord du salarié et d’une convention individuelle de forfait établie par écrit et il est constant qu’il n’existe pas de convention de forfait entre Mme [T] et la société GMD, de sorte que Mme [T] ne peut procéder au calcul d’un rappel de salaire sur la base de rémunérations minimales prévues pour des salariés soumis à un forfait annuel en heures.

La cour examinera par conséquent la demande de Mme [T] formulée à titre subsidiaire au titre des heures supplémentaires.

III- Sur les heures supplémentaires et la demande au titre du travail dissimulé :

Mme [T] indique qu’étant rémunérée sur une base de 39 heures par semaine, elle sollicite uniquement les heures supplémentaires effectuées à partir de la 40ème heure. Elle appuie sa demande sur :

– des fiches journalières de travail remplies par elle-même et dont elle indique d’une part qu’elles étaient remises à la direction, exploitées ensuite par le service comptabilité pour la comptabilité analytique, notamment pour les calculs de marge et la gestion du temps de travail des collaborateurs, d’autre part, qu’elles n’ont jamais été contestées par la partie adverse qui a pu s’en prévaloir dans le débat (pièces n°60-a, b, c et d) ;

– des récapitulatifs mensuels mentionnant les heures d’arrivée et de départ et le nombre d’heures de travail réalisées chaque jour , de janvier 2012 à février 2015 (pièces n°6-a, b, c et d) ;

– la valorisation des heures supplémentaires pour les années 2013, 2014 et 2015 (pièces n°62-a, b et c).

Mme [T] sollicite un rappel de salaires au titre des heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 heures, calculé comme suit :

– heures supplémentaires 2013 (29 juillet-31décembre 2013) : 563,19 euros bruts

– congés payés afférents : 361,17 euros bruts

– heures supplémentaires 2014 : 2 762,24 euros bruts

– congés payés afférents : 276,22 euros bruts

– heures supplémentaires 2015 : 263,51 euros bruts

– congés payé afférents : 26,35 euros bruts

La société GMD conclut au rejet de cette demande aux motifs que :

– Mme [T] était soumise à un horaire collectif de travail de 39 heures et que compte tenu de l’horaire collectif de travail, la société n’avait aucune obligation de mettre en place un suivi individuel des temps de travail,

– les décomptes de Mme [T] sont basés sur ses seules allégations infondées et erronées ;

– la Société n’a jamais demandé à Mme [T] d’accomplir la moindre heure supplémentaire au-delà de ses 39 heures hebdomadaires contractuelles ;

– la charge de travail de Mme [T] ne justifiait absolument pas l’accomplissement d’heures supplémentaires au-delà de la durée du travail prévue au contrat ;

– Mme [T] n’a jamais estimé utile d’alerter son employeur concernant la réalisation d’heures supplémentaires qui ne lui auraient pas été rémunérées ;

– la mise en place des fiches journalières a été décidée par la Société GECIL PROCESS afin de vérifier les calculs des prix de revient par affaire qui servent de base aux calculs des prix de vente, étant précisé que ces fiches journalières ne mentionnent que les références des dossiers traités et le temps passé sur ces dossiers ;

– Mme [T] n’a jamais transmis les dites fiches à la Direction ;

– elle n’a jamais eu connaissance des récapitulatifs mensuels ;

– en tout état de cause, ces fiches sont incohérentes et ne mentionnent pas les jours de récupération.

****

Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1, L. 3171-3, et L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Les éléments produits par Mme [T] à l’appui de sa demande répondent parfaitement à l’exigence de précision rappelée ci-avant et permettent à la société GMD d’y répondre en faisant valoir ses propres arguments.

Que la finalité des fiches de travail journalières ait été la vérification du prix de revient par affaire, n’invalide nullement pour autant ces documents comme éléments d’appréciation du temps de travail effectif, et Mme [T] propose, en tout état de cause, un récapitulatif très précis de son temps de travail qu’il appartient le cas échéant à l’employeur de combattre par des éléments contraires.

La société GMD invoque l’absence de sollicitation pour la réalisation d’heures supplémentaires, non justifiées par la nature des tâches à accomplir, mais il résulte des débats que Mme [T] exerçait des responsabilités multiples à la tête de la société GECIL PROCESS, qu’elle était selon les propres explications de M. [T] et de Mme [I] [T], ‘multi-tâches’, qu’elle avait un statut de cadre, ce qui ne lui permettait pas de réaliser l’ensemble de ses missions dans l’horaire collectif standard de 39 heures hebdomadaires.

La société GMD ne peut par ailleurs invoquer le caractère inédit de la demande de Mme [T] relative au paiement d’heures supplémentaires, dés lors que cette circonstance ne laisse pas présumer que la salariée aurait renoncé à faire valoir ses droits.

La société GMD souligne encore le manque d’honnêteté des fiches horaires qui ne mentionneraient ni les temps de pause méridienne, ni les journées de récupération.

Ainsi, la société GMD reproche à Mme [T] de prétendre à 23,25 heures sur le mois de janvier 2015 au-delà de 35 heures, soit 5,92 heures en sus des 17,33 heures supplémentaires qui ont été rémunérées chaque mois (23,25 -17,33 = 5,92), sans tenir compte des deux journées de « récupération » qu’elle a posées et qui n’ont aucunement impacté sa rémunération.

La société GMD soutient que ces 2 journées de « récupération » (vendredis 23 janvier et 30 janvier) représentent 15,6 heures de repos (7,8 x 2 = 15,6 jours de récupération), soit une rémunération d’environ 400 euros bruts, bien supérieure à la somme réclamée, congés payés inclus.

Dans le même sens, la société GMD souligne qu’un nombre différent de jours de « récupération » est mentionné d’une pièce adverse à l’autre, dés lors que la pièce adverse n°62-a mentionne 23,5 jours de récupération sur la période d’août 2013 à février 2015 tandis que la pièce adverse n°61-a mentionne 15,5 jours de récupération sur cette même période, soit une différence de 8 jours de « récupération » d’un décompte à l’autre.

La société GMD conclut à l’incohérence des décomptes de Mme [T] et demande de déduire :

* a minima, 15,5 journées de « récupérations » rémunérées, soit la somme de 3 120,4 euros bruts, de la demande au titre des heures supplémentaires,

*au plus fort, 23,5 journées de «récupération» rémunérées, soit la somme de 4 408,96 euros bruts, de la demande au titre des heures supplémentaires.

La cour observe que :

-il résulte des pièces 61-1 et 61-b de l’appelante, un total de 23 jours de récupérations du mois d’août 2013 au 9 février 2015 ;

– la valorisation par la société GMD de ces journées de récupération, d’un montant de 4 408, 96 euros n’est pas contestée par Mme [T] ;

– cette somme est supérieure à la demande de Mme [T] au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents pour la période du 1er août 2013 au 9 février 2015 ;

Il en résulte que Mme [T] a régulièrement bénéficié de repos compensateurs au cours de la période d’août 2013 au 9 février 2015 et il ne résulte pas des débats qu’elle n’aurait pas en conséquence été remplie de ses droits au titre des heures supplémentaires invoquées.

Mme [T] sera dés lors déboutée de sa demande de paiement d’heures supplémentaires ainsi que de sa demande subséquente d’indemnité pour travail dissimulé. Le jugement déféré sera confirmé en ce sens.

IV – Sur la demande de rappel de rémunération variable :

Au terme de l’avenant contractuel signé le 14 novembre 2008, la rémunération variable de Mme [T] était calculée de la manière suivante :

« La partie variable de la rémunération à compter de l’exercice 2007 est égale à 3% de la marge commerciale annuelle de l’activité Pétrole GECIL PROCESS tel que calculée par la compta analytique.

Cette rémunération variable ne s’applique qu’à partir d’un chiffre d’affaires net de l’activité

pétrole calculer supérieur à (un million) 1 000 000 ,00 euros

Cette rémunération variable s’applique au taux de 3% jusqu’à un chiffre d’affaires net de l’activité pétrole de (deux millions) 2 000 000.00 euros.

Pour un chiffre d’affaires net supérieur à (deux millions) 2 000 000.00 euros, le taux de rémunération variable sera négocié entre les parties pour la partie dépassant les (deux millions) 2 000 000.00 euros.’

Mme [T] expose que si elle a réussi à obtenir la comptabilité analytique de 2008 à 2012 lui permettant de vérifier les primes versées de 2009 à 2013, elle ne dispose pas en revanche de la comptabilité analytique pour les années 2013 à 2016 et la société GMD a toujours refusé de déférer à la sommation de communiquer ladite comptabilité analytique pour la période concernée.

Mme [T] ajoute que malgré ses nombreuses réclamations, elle n’a pas perçu sa rémunération variable au titre de l’exercice 2015, et forme en conséquence ses demandes :

– à titre principal, sur la base des éléments communiqués par la société GMD en première instance, à la somme de 25 023,45 euros bruts, outre 2 502,34 euros bruts de congés payés afférents au titre de l’exercice 2015,

– à titre subsidiaire, sur la base des affaires conclues et en portefeuille au 9 février 2015 (date de son dernier jour de travail), à la somme de 12 073,30 euros bruts, outre 1 207,33 euros bruts de congés payés afférents.

La société GMD s’oppose à cette demande et rappelle pour mémoire que :

* Mme [T] a perçu les sommes suivantes au titre de sa rémunération variable :

– 25 162 euros bruts : au titre de l’exercice 2012, versés en avril 2013 ;

– 24 050 euros bruts : au titre de l’exercice 2013, versés en 2014 ;

– 28 852 euros bruts : au titre de l’exercice 2014, versés en avril 2015 alors qu’elle était depuis le 9 février en arrêt de travail ;

*Durant toutes ces années, sa rémunération variable était, conformément à sa clause, versée l’année N+1, et calculée sur la marge commerciale nette réalisée sur l’activité pétrole au titre de l’exercice N-1 ;

*Cette rémunération variable était ainsi versée, au regard de la marge commerciale de l’année N-1, peu important la date de la commande, de l’offre, de la fabrication de l’unité ou

de sa livraison, de sorte que cette rémunération variable n’a jamais été assise sur un portefeuille de commandes ainsi que le soutient Mme [T].

* Mme [T] n’ayant réalisé sa prestation de travail que du 1er janvier au 9 février 2015, elle n’est pas en mesure de solliciter un rappel de salaire sur l’intégralité du chiffre d’affaires réalisé sur l’année 2015 ;

*Si par extraordinaire la Cour devait retenir comme fondé dans son principe le rappel de salaire sur rémunération variable pour la période travaillée du 1er janvier au 9 février 2015, il ne pourrait être que du montant suivant: 2 085,29 euros (834 115,07 / 12 x 3%).

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Le calcul de Mme [T] résulte de l’application du taux de 3% au montant de la marge commerciale de l’activité Pétrole telle qu’elle résulte de la pièce adverse n°13 non validée par un expert comptable ou un commissaire aux comptes, soit un montant de marge commerciale de 834 115,07 euros. Cette base de calcul est également validée par la société GMD dans sa proposition formulée à titre subsidiaire.

Et, la partie variable de la rémunération étant due au salarié en contrepartie de son activité, elle s’acquiert au prorata du temps de présence de la salariée dans l’entreprise au cours de l’exercice, de sorte que la somme due à Mme [T] au titre de sa rémunération variable s’élève à 2 085,28 euros.

Mme [T] sera en conséquence déboutée de sa demande pour le surplus et le jugement déféré qui a rejeté sa demande sera infirmé en ce sens.

V- Sur la demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail :

Mme [T] invoque :

– l’exécution déloyale du contrat de travail avant son arrêt maladie de février 2015, caractérisée par :

* une charge de travail excessive et le comportement du dirigeant

* le non-paiement de la rémunération minimale conventionnelle

* le non-paiement de la rémunération variable EMS (automatisation, mesures électroniques, variateur de vitesse).

* l’absence de suivi médical, faute de visite médicale depuis son embauche en 2008

– l’exécution déloyale du contrat de travail pendant la période d’arrêt maladie, caractérisée par :

* le non reversement de l’intégralité des compléments de salaire avec une régularisation intervenue pour un montant de 10 576,49 euros sur le bulletin de salaire de février 2018

* une multiplication des incidents tels que l’envoi tardif des bulletins de salaire, le versement de salaire inférieur au bulletin de salaire, l’absence de réponse sur le calcul des cotisations retraites en arrêt maladie, sur la rémunération variable due sur l’activité EMS et sur l’activité Pétrole GECIL PROCESS, sur la résiliation de la carte bancaire à son nom, le défaut de virement du salaire de janvier 2017, l’absence de suivi des heures de DIF et des heures alimentant le Compte personnel de formation, la suspension de l’article 83 et les difficultés dans la mise en place de la prévoyance

– l’exécution déloyale dans le cadre de la mise en ‘uvre de la procédure de

licenciement et ses suites.

Mme [T] demande en conséquence la somme de 77 500 euros nets correspondant à 12 mois de salaire au titre de l’exécution déloyale de son contrat de travail.

La société GMD conclut au rejet de cette demande et fait valoir que :

– Mme [C] [T] a bénéficié d’un suivi médical périodique pendant treize années au sein de la Société GECIL PROCESS, mais ne s’est jamais rendue aux rendez-vous médicaux ;

– de manière totalement involontaire, la Société GMD n’a pas, suite à sa création, adhéré au service de santé au travail en sus de l’adhésion de la Société GECIL PROCESS ;

– Mme [C] [T], en qualité de salariée et d’associée de la Société GMD, n’a jamais alerté la Société sur l’absence de suivi médical périodique ;

– le 27 septembre 2016, suite à un courrier de Mme [T] sollicitant les coordonnées du médecin du travail, la société a pris conscience du fait qu’elle n’avait pas mis en place le suivi médical périodique et a immédiatement adhéré à un service de santé et inscrit ses trois salariés pour mettre en place un suivi médical périodique ;

– contrairement à ce qu’elle avance, Mme [C] [T] a été informée de ses heures acquises au titre du DIF, notamment par courrier du 16 décembre 2015, puis par courriel du 21 février 2017, à la demande de Mme [C] [T] datée du 14 février 2017.

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Compte tenu des développements ci-avant, aucune exécution déloyale ne saurait résulter ni d’une charge de travail excessive, ni du défaut de paiement de la rémunération minimale conventionnelle, ni du non-paiement de la rémunération variable EMS, les deux premiers manquements n’étant pas retenus par la cour et le troisième, objet d’une demande de rappel de rémunération rejetée par les premiers juges, ne faisant plus l’objet d’aucune demande de la part de Mme [T] en cause d’appel.

S’agissant du suivi médical, Mme [I] [T] atteste que Mme [C] [T], lorsqu’elle était salariée de GECIL PROCESS, ne se rendait pas aux convocations de la médecine du travail, mais la société GMD ne produit, pour cette période, que deux convocations partiellement illisibles, dont il résulte que M. [W] a été convoqué en qualité de salarié suppléant de Mme [C] [T] le 11 avril 1996 et le 1er septembre 2001. Ces éléments sont très insuffisants à justifier d’un suivi médical régulier et d’une supposée opposition de Mme [T] au dit suivi.

Pour la période postérieure au transfert du contrat de travail, la société GMD admet avoir, par négligence, omis d’inscrire ses trois salariés, M. [R] [T], Mme [I] [T] et Mme [C] [T] auprès d’un service de santé au travail, en soulignant d’une part qu’elle est une petite société familiale dont l’intégralité du service comptable et ressources humaines était gérée par Mme [I] [T], d’autre part qu’elle accordait une importance particulière à la santé de ses salariés/associés en mettant en place des régimes et assurances frais de santé et de prévoyance, très protecteurs, comportant de multiples garanties.

Mais il résulte des débats et de l’aveu même de la société GMD, une prise de conscience tardive du manque de suivi médical, laquelle prise de conscience apparaît largement postérieure au placement de Mme [T] en arrêt maladie pour un burn-out et syndrome anxio-dépressif . Or, Mme [T] justifie d’un précédent arrêt de travail pour un motif similaire dés 2012 et il est constant qu’elle souffrait également de troubles musculo-squelettiques qui auraient pu être pris en compte dans le cadre d’un suivi médical régulier. Ces éléments relatifs à l’état de santé de Mme [C] [T] auraient dû alerter la société GMD sur la nécessité d’un suivi médical préventif.

Il en résulte que l’absence de suivi médical pendant l’intégralité de la relation contractuelle et l’absence de prévention des risques tant psycho-sociaux que musculo-squelettiques ont causé un préjudice à Mme [T] qui justifie d’un état de santé très dégradé.

S’agissant du défaut de versement des l’intégralité des compléments de salaire, la société GMD soutient que les organismes de sécurité sociale et APICIL lui ont versé pour la période février 2015 à juin 2016, la somme totale de 46 081,35 euros nets tandis qu’elle a versé à Mme [T] la somme totale de 69 801,82 euros nets pour la même période, de sorte que la salariée a perçu de la part de la société GMD 23 720,47 euros nets de plus que ce qui a été versé par les organismes de sécurité sociale et de prévoyance.

Il résulte cependant du tableau de calculs objet de la pièce n°66 de la salariée, que :

– Mme [T] a perçu, pour la période de février 2015 à février 2016, la somme totale de 48 157,42 euros bruts (34 532,27 euros + 13 625,15 euros),

– la société GMD a perçu au titre de la subrogation, la somme totale de 44 602,52 euros (19 215,23 euros + 25 387,29 euros)

– Mme [T] soutient, par application des dispositions de la convention collective de la métallurgie, qu’elle aurait dû percevoir 100% de sa rémunération au cours des six premiers mois soit la somme de 33 346,62 euros + 25 387,29 euros correspondant aux sommes versées par les organismes sociaux pour la période de septembre 2015 à février 2016, soit un total de 58 733,91 euros ;

– Mme [T] établit ainsi un différentiel de 10 576,49 euros entre les salaires et indemnités journalières qu’elle a perçus pour la période et le montant total qu’elle aurait dû percevoir.

Si la société GMD expose qu’en dépit de ce dernier versement, elle ne reconnaît en aucun cas le bien-fondé des prétentions de Mme [T] compte tenu d’un salaire de référence totalement excessif et du visa des dispositions conventionnelles des accords nationaux des ingénieurs et cadres de la métallurgie, d’une part, il résulte des développements ci-avant que Mme [T] est fondée à se référer aux accords nationaux de la métallurgie, d’autre part, qu’en faisant droit à sa demande et lui versant le solde réclamé au titre du maintien de sa rémunération pendant son arrêt maladie, la société GMD a validé le calcul effectué par la salariée tant en ce qui concerne le salaire de référence que l’applicabilité des accords nationaux de la métallurgie.

Et il apparaît en outre que la société GMD a fait droit à la demande de Mme [T] dés lors qu’elle a procédé, sur le bulletin de salaire de février 2018, à une régularisation d’indemnités au titre de la maladie du 9 février 2015 au 31 mars 2016, d’un montant de 10 768,93 euros, légèrement supérieur au différentiel sus-visé.

En ce qui concerne les incidents invoqués par Mme [T] au cours de son arrêt maladie, celle-ci verse aux débats un courrier de réclamations daté du 21 juin 2016 relatif aux modalités de calcul du maintien de salaire, aux sommes versées par l’APICIL ainsi qu’à la partie variable de sa rémunération notamment sur l’activité EMS et demande expressément la suppression des cartes bancaires ‘corporate’ GECIL PROCESS et GMD établies à son nom. Elle produit par ailleurs deux courriels relatifs à une erreur affectant la paye du mois de janvier 2017.

L’absence de réponse écrite à ces différentes demandes n’est pas de nature à caractériser un manquement à l’exécution loyale du contrat de travail, étant précisé que :

– Mme [T] a en définitive obtenu satisfaction sur la question du maintien de salaire,

– qu’elle n’a formulé aucune demande en cause d’appel au titre de la rémunération variable sur l’activité EMS alors qu’elle a été déboutée de cette demande par le conseil de prud’hommes,

– s’agissant des cartes bancaires, la société GMD a fait le nécessaire auprès de la banque dés le 24 juin 2016 suivant un courriel adressé par Mme [I] [T] au CIC.

L’erreur affectant la paye du mois de janvier 2017 n’est pas davantage de nature caractériser une exécution déloyale du contrat de travail dés lors qu’elle a été régularisée à première demande.

Le grief relatif à la suspension de l’article 83, fait référence à la suspension, par la société GMD, du régime de retraite complémentaire collectif et obligatoire à cotisations définies mis en place en faveur du collège Cadre auprès de la compagnie AVIVA VIE, pour une durée indéterminée à compter du 31 mars 2017. Mme [T] n’articule pas ce grief.

Enfin, s’agissant du compte personnel de formation et du nombre d’heures au titre du Droit Individuel à la Formation, Mme [C] [T] a demandé à Mme [I] [T], par courriel du 14 février 2017, de lui indiquer le nombre d’heures au titre du DIF, faute de voir figurer cette information sur ses bulletins de salaire.

Mme [T] a reçu en retour le courrier qui lui a été adressé le 16 décembre 2015 par la société GMD (que la salariée produit également en pièce n°32-2), l’informant que le nombre d’heures acquises et non utilisées au titre du DIF s’élevait à 120 heures au 31 décembre 2014 et qu’elle pouvait consulter son compte personnel de formation ouvert depuis le 5 janvier 2015.

Aucun manquement n’est dés lors caractérisé quant à l’information de la salariée sur son droit individuel à la formation.

Mme [T] conclut enfin à l’exécution déloyale du contrat de travail dans le cadre de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement et de ses suites.

Mme [T] soutient que :

– la CPAM a reconnu sa maladie professionnelle,

– en ajoutant spécifiquement : ‘Mme [T] [C] est inapte à son poste de directrice export dans l’entreprise et/ou le groupe’, le médecin du travail a entendu lier l’inaptitude aux conditions de travail,

– la société GMD a complété et signé le formulaire attestation de demande d’indemnité temporaire d’inaptitude remis par le médecin du travail et visant l’accident du travail ou la maladie professionnelle,

– dés le 11 septembre 2018, la société GMS adressait une convocation à entretien préalable en vue de procéder ‘à votre licenciement pour inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement’,

– en réalité, en cours de procédure, la société GMD a décidé de modifier l’origine de l’inaptitude considérant, dans la convocation à entretien préalable, qu’il s’agissait d’une origine professionnelle puis dans la lettre de licenciement, qu’il s’agit d’une origine non professionnelle.

En droit, les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

Le droit du travail étant autonome par rapport au droit de la sécurité sociale, l’application de ces dispositions protectrices n’est pas liée à la reconnaissance du caractère professionnel d’un accident ou d’une maladie par un organisme de sécurité sociale.

En conséquence, la mise en oeuvre du régime protecteur est seulement subordonnée à l’origine professionnelle de l’accident et à sa connaissance par l’employeur.

En l’espèce, il résulte des pièces versées au débat que le docteur [S] [X] certifie avoir établi le 9 septembre 2019 un avis d’inaptitude pour Mme [T] susceptible d’être en lien avec l’accident du travail ou la maladie professionnelle en date du 20 juin 2016 et que ce médecin a remis à Mme [T] un formulaire CERFA visant l’article D. 4624-47 du code du travail aux termes duquel :’ Lorsque le médecin du travail constate que l’inaptitude du salarié est susceptible d’être en lien avec un accident ou une maladie d’origine professionnelle, il remet à ce dernier le formulaire de demande prévu à l’article D. 433-3 du code de la sécurité sociale’. Il est constant que la société GMD a complété et signé ce formulaire le 4 octobre 2019 avant de l’adresser à l’organisme d’assurance maladie.

L’employeur avait donc connaissance de l’origine au moins partiellement professionnelle de l’inaptitude de Mme [T]. Dans ces conditions, la question de l’inopposabilité de la prise en charge de la maladie de Mme [T] au titre de la législation professionnelle, à la société GMD, est indifférente, de même que la question de savoir si le visa, par la lettre de convocation à l’entretien préalable, d’une inaptitude d’origine professionnelle, résulte d’une erreur matérielle de la société GMD.

La société GMD aurait dû faire bénéficier Mme [T] des règles protectrices en matière d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

En définitive, l’exécution déloyale résulte de l’absence de suivi pendant la totalité de la relation contractuelle, du défaut partiel de maintien du salaire pendant l’arrêt maladie et du refus d’application des règles protectrices en matière de maladie professionnelle. Les autres manquements invoqués ne sont pas caractérisés. Les manquements retenus par la cour ont causé à Mme [T] un préjudice qui sera réparé par l’allocation de la somme de 5 000 euros et Mme [T] sera déboutée de sa demande pour le surplus.

– Sur la demande de résiliation judiciaire et ses conséquences indemnitaires :

L’inexécution de certaines dispositions résultant d’un contrat de travail peut justifier la résiliation du dit contrat si elle présente une gravité suffisante de nature à en empêcher la poursuite.

En l’espèce, les manquements retenus ci-avant, lesquels ont donné lieu à une indemnisation au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail, ne constituent pas des manquements suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et des demandes indemnitaires subséquentes.

– Sur la demande de reliquat des indemnités de rupture suite au licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle :

Mme [T] ayant été déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre des minima conventionnels des accords nationaux de la métallurgie, le salaire de référence est celui des douze derniers mois, soit 5 583,50 euros, plus favorable que celui des trois derniers mois.

1°) sur la demande d’indemnité équivalente au préavis :

Mme [T] demande, au visa de l’article L. 1226-14 alinéa 1 du code du travail , la somme de 16 750,50 euros (5 583,5 euros x 3).

La société MGD s’oppose à cette demande au visa des dispositions de l’article L. 1226-4 alinéa 3 du code du travail au terme desquelles le salarié licencié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, dont le contrat de travail prend fin à la date de notification du licenciement, n’a pas droit à l’indemnité compensatrice de préavis.

Mais la société MGD vise des dispositions applicables à une inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel alors qu’il a été jugé ci-avant que Mme [T] était fondée à bénéficier des règles protectrices en matière de maladie professionnelle.

L’article L. 1226-14 du code du travail énonce que :

« La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis prévue à l’article L. 1234-5 ainsi qu’à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité prévue par l’article L. 1234-9.»

La société GMD sera par conséquent condamnée à payer à Mme [T] la somme de 16 750,50 euros ( 5 583,50 euros x 3) à titre d’indemnité équivalente au préavis.

2°) Sur l’indemnité spéciale de licenciement :

Mme [T] expose qu’elle a perçu, à titre d’indemnité de licenciement, la somme de 41 730 euros et sollicite un reliquat de 43 585,83 euros sur la base d’une indemnité spéciale de licenciement de 85 315,82 euros égale au double de l’indemnité légale de licenciement

(42 657,91 x 2) et d’une ancienneté de 25 ans et trois mois à l’issue du préavis théorique de trois mois retenu.

La cour fait droit à la demande de Mme [T] et condamne la société MGD à lui verser la somme de 43 585,83 euros à titre de reliquat d’indemnité spéciale de licenciement.

3°) Sur l’indemnité compensatrice de congés payés :

Mme [T] expose que:

– au terme de la période 2013/2014, il lui restait un arriéré de congés payés de 19 jours ouvrés correspondant aux jours de congés qu’elle n’avait pas pu prendre du fait de sa surcharge de travail ;

– elle a constaté sur le bulletin de salaire du mois de décembre 2015, que son compteur de

congés payés acquis avait été amputé de 16 jours ouvrés passant ainsi de 44 jours ouvrés à 28 jours ouvrés, soit l’annulation de 16 jours de congés payés ;

– elle ne s’est pas vu créditer, au titre de l’exercice 2013/2014, et contrairement aux années précédentes, ses trois jours de congés payés pour ancienneté dus en application de la

convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie ;

– elle a continué à acquérir ses congés payés pendant douze mois, soit jusqu’en janvier 2016.

Mme [T] demande en conséquence le paiement de :

– 47 jours (43,38 arrondis à 44 + 3 jours d’ancienneté 2013/2014) au titre des exercices précédents

– 20 jours (19,64 arrondis) au titre de l’exercice 2015/2016

– 3 jours d’ancienneté au titre de l’exercice 2015/2016

– 2 jours de fractionnement au titre de l’exercice 2015/2016

Soit au total : 72 jours

Mme [T] qui a reçu en vertu du solde de tout compte la somme de 7 432,85 euros au titre de 45 jours de congés payés, réclame un solde de 27 jours , soit à titre principal la somme de 10 635,46 euros bruts et à titre subsidiaire la somme de 8 647,63 euros bruts ( 5 583,50 x 72/25) – 7 432,85 euros.

La société GMD s’oppose à cette demande aux motifs que :

– Le solde de congés payés de Mme [T], au 1er juin 2014, était de :

* 20,46 jours (19 jours de report + 2 jours d’ancienneté)

* + 24,96 jours acquis au titre de la période juin 2013 à mai 2014.

Soit un solde de 45.42 jours de congés payés ;

– Mme [T] a acquis, sur la période de juin 2014 à janvier 2015 :

*16,64 jours de congés payés : 2,08 jour par mois de travail effectif : soit, de juin 2014 à janvier 2015, 8 mois : (2,08 x 8 = 16,64).

* 2 jours de congés payés d’ancienneté : (3 jours d’ancienneté après 20 ans d’ancienneté, au prorata de 8 mois de travail : (3/12 = 0,25) ; (0,25 x 8 mois = 2 jours) ;

Soit un total de 18.64 jours de congés payés acquis sur la période de juin 2014 à

janvier 2015 (16.64 jours + 2 jours) ;

– Mme [T] n’a pas acquis de droit à congés payés à compter du mois de février 2015 dés lors qu’elle était en arrêt de travail pour maladie simple,

– si Mme [T] n’avait pris, sur la période de juin 2014 à février 2015, aucun jour de congés payés, elle disposerait donc d’un solde de 64,6 jours de congés payés (45,42 + 18,64) ;

– les calculs de Mme [T] omettent un certain nombre de jours de congés et procèdent à une confusion, un certain nombre de jours étant comptabilisés à la fois comme des jours de congés et comme des jours de récupération.

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour considérerait que l’arrêt de travail de Mme [T] est un arrêt pour maladie professionnelle, la société GMD conclut qu’il ne pourrait être fait droit à la demande de Mme [T] aux motifs que :

– elle ne pouvait acquérir des congés payés que dans la limite d’un an après son arrêt de travail: soit, de février 2015 à février 2016, soit un total de 28 jours de congés payés (solde de 24,96 jours + 3 jours d’ancienneté) [(2.08 jours par mois x 12 mois = 24.96) + (3 jours d’ancienneté [3 jours d’ancienneté / 12 mois, multiplié par 12 mois de février 2015 à février 2016]).

– aucun jour de fractionnement ne peut être attribué à Mme [T],

En effet, les jours supplémentaires de fractionnement sont attribués lorsque le salarié prend

une partie de son congé principal en dehors de la période des congés payés. Or, Madame [T], qui n’a pas repris le travail lors de la période considérée n’est absolument pas concernée par cette situation.

– sur le solde de 45 jours de congés payés, qui a donné lieu au versement de l’indemnité compensatrice de congés payés de 7 432,85 euros (solde de tout compte), Mme [T] a acquis, en tout état de cause, en sus de ses droits, du fait de la non comptabilisation, par la Société, de nombreux jours de congés pris par la requérante.

****

L’article L.3141-3 du code du travail énonce que le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut pas excéder trente jours ouvrables.

Au termes de l’article L. 3141-5 du code du travail, sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé, ‘les périodes, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an, pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle.’

Et il est constant que l’énumération des périodes assimilées à des périodes de travail effectif qui résulte de l’article L. 3141-5 du code du travail est d’interprétation restrictive, de sorte que les périodes de maladie ne sont pas assimilées à des périodes de travail effectif.

En considérant que Mme [T] a acquis des droits à congés payés uniquement sur la période du 1er juin 2014 au 31 janvier 2015 et qu’à compter de février 2015, elle n’acquérait plus de droits à congés payés dés lors que son contrat a été suspendu pour maladie simple, alors qu’il résulte des développements ci-avant que l’arrêt de travail de Mme [T] est en lien avec une maladie professionnelle, la société GMD a fait une application inexacte des dispositions sus-visées.

La lecture des bulletins de salaire de Mme [T] révèle au 30 novembre 2015 un total de congés restant de 43, 38 jours lequel passe à 28 jours de congés restant au 31 décembre 2015 sans explications et ce en dépit des réclamations formulées par Mme [T] par courriel du 17 mars 2016 dans lequel elle indiquait notamment: ‘ En fait il semble que le logiciel de paye remet a priori les compteurs à zéro quelques soient les situations.’

Il en résulte que la société GMD ne justifie pas la suppression des 16 jours de congés payés restant au titre des exercices précédents. Le décompte de Mme [T] fait une juste application des principes sus-visés à l’exception des deux jours de fractionnement qui ne sont pas dus, Mme [T] n’ayant pas repris le travail à l’issue de son arrêt de travail.

La société GMD sera condamnée en conséquence à payer à Mme [T] la somme de :

8 200,95 euros se décomposant comme suit : 5 583,50 x 70/25 – 7 432,85

– Sur les demandes accessoires :

Il n’y a pas lieu d’assortir l’obligation de remise de documents de fin de contrat d’une astreinte qui n’est pas justifiée par les circonstances.

Les dépens de première instance et d’appel, suivant le principal, seront supportés par la société GMD, partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande fondée sur le harcèlement moral, débouté Mme [T] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé, rejeté la demande de rappel de salaire au titre des minima conventionnels, rejeté la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

INFIRME le jugement déféré pour le surplus de ses dispositions

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société GMD à payer à Mme [T] les sommes suivantes :

* 2 085, 28 euros à titre de rappel de rémunération variable outre 208,52 euros au titre des congés payés afférents

* 5 000 euros de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

* 16 750,50 euros à titre d’indemnité équivalente au préavis

* 43 585,83 euros à titre de reliquat d’indemnité spéciale de licenciement

* 8 200,95 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés

ORDONNE à la société GMD de remettre à Mme [T] un certificat de travail, une attestation destinée au Pôle Emploi et un bulletin de salaire conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de sa signification,

CONDAMNE la société GMD à payer à Mme [T] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d’appel,

CONDAMNE la société GMD aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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