Votre panier est actuellement vide !
C9
N° RG 21/02646
N° Portalis DBVM-V-B7F-K5LN
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SELARL CDMF AVOCATS
la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 04 MAI 2023
Appel d’une décision (N° RG 19/00953)
rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE
en date du 17 mai 2021
suivant déclaration d’appel du 15 juin 2021
APPELANT :
Monsieur [T] [Y]
né le 21 Août 1968 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 5]
représenté par Me Jean-luc MEDINA de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Romain JAY de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEE :
Association LA REMISE prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Laurent CLEMENT-CUZIN de la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Laura HAJ-HOUSSAIN, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,
DÉBATS :
A l’audience publique du 15 mars 2023,
M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président chargé du rapport et Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère, ont entendu les parties en leurs observations, assistés de Mme Carole COLAS,Greffière, en présence d’Elora DOUHERET, greffière stagiaire, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;
Puis l’affaire a été mise en délibéré au 04 mai 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L’arrêt a été rendu le 04 mai 2023.
EXPOSE DU LITIGE’:
M. [T] [Y] a été embauché le 7 décembre 2018 par l’association La Remise, suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, en qualité d’encadrant technique, pédagogique et social, niveau B de la convention collective nationale des ateliers et chantiers d’insertion (SYNESI).
Le contrat de travail prévoyait une période d’essai initiale de deux mois, courant jusqu’au 6 février 2019.
Par courrier en date du 23 janvier 2019, l’association La Remise a informé M. [T] [Y] de son souhait de renouveler sa période d’essai pour une période de deux mois supplémentaires.
En date du 3 février 2019, M. [T] [Y] a apposé sa signature sur une lettre d’accord pour renouveler la période d’essai jusqu’au 5 avril 2019 et dont le rédacteur fait l’objet d’une discussion entre les parties.
En date du 4 avril 2019, l’association La Remise a notifié à M. [T] [Y] la rupture de sa période d’essai.
Par courrier en date du 25 avril 2019, M. [T] [Y] a sollicité de l’association La Remise le paiement d’heures supplémentaires et l’employeur en a réglé 25,90 lors du solde de tout compte établi le 4 mai 2019.
La Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) a également été informée de la situation par M. [T] [Y] et plusieurs courriers ont été échangés entre elle et l’employeur au sujet des heures supplémentaires ainsi que de l’utilisation du véhicule personnel de M. [T] [Y] à des fins professionnelles.
Par requête en date du 12 novembre 2019, M. [T] [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Grenoble aux fins de contester le renouvellement et la rupture de sa période d’essai, d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires et d’une indemnité de travail dissimulé ainsi que le remboursement des frais engagés à des fins professionnelles.
L’association La Remise s’est opposée aux prétentions adverses.
Par jugement en date du 17 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Grenoble a’:
– dit que le renouvellement de la période d’essai est régulier,
– dit que la rupture du contrat de travail M. [T] [Y] pendant la période d’essai est régulière,
En conséquence,
– débouté M. [T] [Y] de toutes ses demandes à ce titre,
– débouté M. [T] [Y] de ses demandes au titre du paiement des heures supplémentaires, de l’indemnité pour travail dissimulé,
– débouté M. [T] [Y] de sa demande liée au remboursement des frais engagés à des fins professionnelles,
– débouté M. [T] [Y] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté l’association La Remise de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de la procédure civile,
– condamné M. [T] [Y] aux dépens de l’instance.
La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 18 mai 2021 par les deux parties.
Par déclaration en date du 15 juin 2021, M. [T] [Y] a interjeté appel à l’encontre dudit jugement.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 23février 2022, M. [T] [Y] sollicite de la cour de’:
Vu le code du Travail,
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces,
Vu les faits,
Vu le jugement de la section activités diverses du conseil de prud’hommes de Grenoble en date du 17 mai 2021 (RG : F19/00953)
Réformer le jugement de la section activités diverses du conseil de prud’hommes de Grenoble en date du 17 mai 2021 (RG : F19/00953) en ce qu’il a débouté M. [T] [Y] de l’intégralité de ses demandes et en ce qu’il l’a condamné aux entiers dépens ;
Statuant à nouveau :
A titre principal :
Dire et juger que le renouvellement de la période d’essai de M. [T] [Y] est irrégulier ;
En conséquence :
Dire et juger que la rupture du contrat de travail de M. [T] [Y] est abusive ;
Condamner l’association La Remise au paiement de la somme de 2 000 € nets pour rupture abusive du contrat de travail ;
A titre subsidiaire :
Dire et juger que la rupture de la période d’essai de M. [T] [Y] est abusive ;
En conséquence :
Dire et juger que la rupture du contrat de travail de M. [T] [Y] est abusive ;
Condamner l’association La Remise au paiement de la somme de 2 000 € nets pour rupture abusive du contrat de travail ;
En tout état de cause :
Condamner l’association La Remise au paiement de la somme de 1 771, 16 € bruts au titre des heures supplémentaires effectuées, outre la somme de 177, 12 € bruts au titre des congés payés afférents ;
Condamner l’association La Remise au paiement de la somme de 12 122, 64 € nets au titre de l’indemnité de travail dissimulé ;
Condamner l’association La Remise au paiement de la somme de 88, 32 € nets au titre du remboursement des frais personnels engagés à des fins professionnelles ;
Condamner l’association La Remise au paiement de la somme de 2 000 € nets sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de la procédure d’appel ;
Condamner l’association La Remise aux entiers dépens ;
Rejeter l’intégralité des demandes de l’association La Remise.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 25 novembre 2021, l’association La Remise sollicite de la cour de’:
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 17 mai 2021, en ce qu’il a :
– dit que le renouvellement de la période d’essai est régulier,
– dit que la rupture du contrat de travail M. [T] [Y] est abusive ;
En conséquence,
– débouté M. [T] [Y] de toutes ses demandes à ce titre,
– débouté M. [T] [Y] de ses demandes au titre du paiement des heures supplémentaires, de l’indemnité pour travail dissimulé,
– débouté M. [T] [Y] de sa demande liée au remboursement des frais engagés à des fins professionnelles,
– débouté M. [T] [Y] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [T] [Y] aux dépens de l’instance.
Réformer le jugement du conseil de prud’hommes du 17 mai 2021, en ce qu’il a :
– débouté l’association La Remise de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
Constater la régularité du renouvellement de la période d’essai de M. [T] [Y],
Constater la régularité de la rupture de la période d’essai de M. [T] [Y],
Constater que M. [T] [Y] a été parfaitement rempli de ses droits salariaux,
Dire et juger que la rupture du contrat de travail de M. [T] [Y] est régulière ;
En conséquence,
Débouter M. [T] [Y] de l’ensemble de ses demandes,
Condamner M. [T] [Y] au versement de la somme de 2 000 € à l’association La Remise au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 12 janvier 2023.
L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 15 mars 2023.
EXPOSE DES MOTIFS’:
Sur les heures supplémentaires’:
Premièrement, l’article L. 3171-4 du code du travail dispose qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
En conséquence, il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l’opposition à l’exécution de celle-ci de l’employeur se trouvant alors indifférente.
Le salarié peut revendiquer le paiement d’heures supplémentaires à raison de l’accord tacite de l’employeur.
Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l’employeur de la réalisation d’heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l’absence d’opposition de l’employeur à la réalisation de ces heures.
Deuxièmement, vu l’article L. 212-8 devenu l’article L. 3122-9 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 et l’article 20 V de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008
Selon le premier de ces textes, une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de l’année à condition que, sur un an, cette durée n’excède pas un plafond de 1607 heures.
Il résulte du deuxième de ces textes que les accords conclus en application de l’article L. 3122-9 du code du travail restent en vigueur.
L’accord de modulation qui relève de l’organisation collective du travail est, sauf disposition contractuelle contraire, applicable au salarié engagé postérieurement à sa mise en oeuvre au sein de l’entreprise.
Troisièmement, la convention collective nationale des ateliers et chantiers d’insertion stipule que’:
Article En vigueur étendu
Préambule (1)
La structure peut prévoir par accord d’entreprise de répartir la durée du travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année.
En l’absence d’accord collectif en matière d’aménagement du temps de travail, la structure peut organiser un tel aménagement dans les conditions fixées par les articles D. 3122-7-1 à D. 3122-7-3 du code du travail : la durée peut alors être organisée sous forme de période de travail d’une durée de 4 semaines au plus pour chacune.
(1) Le préambule est étendu sous réserve du respect de l’article L. 3121-45 du code du travail.
(Arrêté du 2 avril 2021 – art. 1)
Article 1er
En vigueur étendu
Il sera fait application des articles D. 3122-7-1 à D. 3122-7-3 pour les conditions d’aménagement du temps de travail. (1)
Chaque employeur établira le programme indicatif de la variation de la durée de travail et le soumettra pour avis soit au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.
Les salariés seront prévenus de leurs horaires de travail dans un délai de 7 jours ouvrés au moins avant la date à laquelle ce changement intervient.
La durée du travail peut être aménagée sur une période correspondant à l’année civile dans la limite de 1 607 heures par an et répondra aux obligations du code du travail, à savoir : 48 heures hebdomadaires maximum et 44 heures en moyenne sur 12 semaines consécutives, au maximum.
(1) La première phrase de l’article 1er de la section 5 du titre VII est exclue de l’extension comme étant contraire aux dispositions des articles D. 3122-7-1 à D. 3122-7-3 du code du travail.
(Arrêté du 31 octobre 2012, art. 1er)
Article 2
En vigueur étendu
L’aménagement de la durée du travail peut être révisé en cours de période, sous réserve d’un délai de prévenance des salariés de 7 jours ouvrés.
Article 3
En vigueur étendu
A la fin de la période de référence, si le calcul des heures de travail fait apparaître un solde d’heures supplémentaires en faveur du salarié, ces heures donneront lieu à des contreparties telles que définies aux articles3, 4 et 5 de la section 4 de ce présent chapitre.
Article 4
En vigueur étendu
Conditions de prise en compte pour la rémunération des salariés des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période
Il sera mis en place un suivi du temps de travail qui devra permettre un décompte fiable au terme de la période considérée des heures effectuées et un point sera fait sur les heures supplémentaires éventuellement imputables sur le contingent annuel.
En l’espèce, d’une première part, l’association verse certes aux débats un accord d’entreprise du 10 novembre 1998 en pièce n°10 et qui prévoit que’: «’exceptionnellement, il pourra être demandé aux salariés d’effectuer des heures complémentaires à cette durée de 35 heures, et ce dans la limite maximale de quatre heures par semaine, pour le bon fonctionnement de l’association La Remise. Cette limite maximale est ramenée à 10 % de la nouvelle durée du temps de travail prévue aux contrats des salariés à temps partiel. En cas de dépassement de la durée hebdomadaire du travail, ces heures complémentaires seront récupérées dans un délai de trois mois, d’un commun accord entre la direction et le salarié concerné.’».
Toutefois, cet accord n’était manifestement plus en vigueur au jour de l’embauche de M. [Y] dès lors que l’association se prévaut de la section 5 aménagement de la durée du travail de la convention collective des ateliers et chantiers d’insertion puis de ce qui s’analyse non en un accord collectif mais en une décision unilatérale de l’employeur, faute de signature d’un partenaire social, en date du 01 octobre 2011, étant relevé que ces éléments sont visés par le contrat de travail en préambule.
Toutefois, l’annualisation du temps de travail n’est pas opposable au salarié, qui effectue un décompte du temps de travail à la semaine, dans la mesure où elle n’a pas été faite dans le cadre d’un accord d’entreprise mais de manière unilatérale par l’employeur en contravention avec la convention collective applicable faisant un renvoi aux articles D. 3122-7-1 à D. 3122-7-3 du code du travail prévoyant tout au plus une organisation de la durée du travail non sur l’année mais sur quatre semaines au plus.
La référence dans le contrat de travail à la durée moyenne du travail de 35 heures hebdomadaires et aux accords internes d’entreprise en date du 01 octobre 2011 est dès inopposable au salarié.
M. [Y] présente en pages n°13 et 14 un décompte suffisamment précis de ses heures supplémentaires en indiquant semaine par semaine le volume horaire d’heures supplémentaires alléguées comme réalisées et non payées.
L’employeur ne justifie pas par sa pièce n°13 des horaires effectivement réalisés par le salarié par un système fiable d’enregistrement des heures de travail s’agissant d’un décompte établi a posteriori.
Le principe de la réalisation des heures supplémentaires est acquis et ce d’autant plus, que l’association La Remise a procédé au paiement de 25,90 heures supplémentaires en mai 2019.
M. [Y] produit aux débats, outre son décompte, ses agendas et des courriers échangés par l’employeur et l’administration du travail.
De son côté, l’employeur se prévaut d’un décompte en pièce n°13.
L’employeur ne saurait déduire les temps de pause dès lors qu’il n’établit pas de manière suffisante que M. [Y] a pu effectivement les prendre.
En outre, le décompte du salarié est erroné lorsqu’il procède pour le calcul des heures supplémentaires à une proratisation du temps de travail en fonction des absences les semaines incomplètes.
Il se déduit de l’ensemble de ces éléments un nombre d’heures supplémentaires réalisées de 116,5 heures, étant observé que l’employeur a déjà payé 25,90 heures.
Le rappel d’heures supplémentaires s’établit dès lors en conséquence à 1601,69 euros bruts, outre 160,17 euros bruts au titre des congés payés afférents.
Il convient, par infirmation du jugement entrepris, de condamner l’association La Remise au paiement de ces sommes et de débouter M. [Y] du surplus de ses prétentions de ce chef.
Sur le travail dissimulé’:
Au visa des articles L 8221-5 et L 8223-1 du code du travail, l’élément matériel du travail dissimulé ayant consisté à ne pas mentionner des heures supplémentaires réalisées sur les bulletins de salaire est établi mais pas l’élément intentionnel, M. [Y] se limitant à indiquer dans ses conclusions en page 18 § 1 que l’employeur se refuse sciemment à rémunérer l’intégralité des heures de travail de son salarié sans expliciter et encore moins prouver en quoi il s’agirait d’un fait intentionnel au cours de la relation de travail.
Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [Y] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé.
Sur le remboursement de frais professionnels’:
Les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur doivent être remboursés sans qu’ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu’il n’ait été contractuellement prévu qu’il en conserverait la charge moyennant le versement d’une somme fixée à l’avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC.
En l’espèce, par courrier en date du 20 mai 2019, M. [Y] a rappelé à son employeur ses différents lieux de travail à savoir le magasin Episol épicerie situé [Adresse 6] à [Localité 4], le camion Episol Mobile, stationné M.I.N [Adresse 1] à [Localité 4], le magasin la Remise 122 avec [B] [N] à [Localité 4] et le siège de l’association sis [Adresse 2] à [Localité 4].
L’employeur lui a répondu, par courrier du 11 juin 2019, lui avoir rappelé à deux reprises une organisation mise en place visant à éviter l’utilisation de son véhicule personnel pour les trajets entre le camion Episol Mobile et le magasin Episol.
Toutefois, il n’est aucunement justifié de cette consigne préalable et aucune réponse n’est apportée s’agissant des autres lieux de travail expressément désignés par le salarié.
S’agissant du fait que les achats ont été centralisés et confiés à Mme [L] [R], la cour observe qu’il s’agit d’une consigne ressortant d’un courriel le 24 janvier 2019 dont M. [Y] n’est pas destinataire, étant observé que les achats de petits matériels, que le salarié dit avoir réalisés avec son véhicule personnel, d’après sa pièce n°28, sont concentrés sur les dates du 18 au 25 janvier 2019.
Il s’ensuit que M. [Y] justifie suffisamment qu’il a dû utiliser son véhicule personnel pour les besoins de son activité professionnelle de sorte qu’infirmant le jugement entrepris, au vu du justificatif précis des trajets effectués qu’il produit en pièce n°28, il lui est alloué la somme de 88,32 euros nets à titre de remboursement de frais engagés à des fins professionnelles.
Sur l’irrégularité du renouvellement de la période d’essai’:
L’article 1 de la section 3 de la convention collective des chantiers et ateliers d’insertion stipule que’:
Pour les salariés recrutés sous contrat de travail à durée indéterminée, la période d’essai est fixée à 2 mois pour les employés et 4 mois pour les cadres.
La période d’essai pourra être renouvelée une fois pour une durée au plus équivalente à la période initiale.
Le renouvellement ou la prolongation de la période d’essai doit résulter d’un accord exprès des parties et exige une manifestation de volonté claire et non équivoque du salarié ne pouvant être déduite de la seule apposition de sa signature sur un document établi par l’employeur. (cass.soc. 22 septembre 2015, pourvoi n° 14-11.731).
En l’espèce, l’employeur a produit aux débats un courrier du 23 janvier 2019 informant le salarié de sa volonté de voir renouvellement sa période d’essai d’une durée de deux mois, le contrat de travail prévoyant la possibilité d’un renouvellement.
Par un courrier daté du 03 février 2019, signé de M. [Y], avec pour objet’: «’acceptation du renouvellement de ma période d’essai’», ce dernier a clairement confirmé sa volonté claire et non équivoque d’accepter ce renouvellement dans les termes suivants’:
«’Votre sollicitation étant conforme avec nos différents échanges, je prends donc acte que le nouveau terme de ma période d’essai est fixé au 6 avril au soir.’».
M. [Y] ne fait, en effet, qu’affirmer que ce courrier aurait été prérédigé par l’employeur sans produire le moindre élément à ce titre.
Le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté M. [Y] de ses prétentions de ce chef.
Sur la rupture abusive de la période d’essai’:
Aux termes de l’article L.’1221-20 du code du travail, la période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié si les fonctions occupées lui conviennent.
Il ressort des dispositions de l’article L.’1231-1 du code du travail que chacune des parties dispose, en principe, d’un droit de résiliation discrétionnaire du contrat de travail pendant le cours de la période d’essai, sans avoir ainsi à alléguer des motifs de sa décision.
Il est toutefois de principe que, même si la dénonciation de l’essai n’a pas à être motivée, elle peut être abusive lorsqu’elle est fondée sur un motif non inhérent à la personne du salarié.
La rupture abusive de la période d’essai donne droit à une indemnisation du préjudice subi par le salarié.
En l’espèce, par courrier en date du 04 avril 2019, l’association La Remise a notifié à M. [Y] sa volonté de rompre la période d’essai renouvelée.
M. [Y] ne justifie aucunement du caractère abusif de la rupture anticipée de la période d’essai dès lors que ceci ne saurait être déduit du fait que la décision de l’employeur est intervenue deux jours avant la fin de la période d’essai renouvelée.
Par ailleurs, M. [Y] ne fait qu’affirmer, sans viser la moindre pièce dans ses conclusions et pas davantage de produire d’élément utile à ce titre, que la rupture anticipée de la période d’essai est une pratique courante de l’association.
La pièce n°31 de M. [Y] correspondant à une offre d’emploi pour un poste de responsable de l’activité commerciale au sein de l’association avec un dépôt de candidature fixé au plus tard au 30 avril n’est pas visée dans les conclusions et apparaît au demeurant en cohérence avec le fait que l’employeur ait pu chercher une personne pour remplacer le salarié dont il venait de rompre la période d’essai.
M. [Y] met également en avant, dans ses conclusions d’appel, sans viser la moindre pièce, que la rupture de la période d’essai s’est faite dans un contexte de refus de l’employeur de régulariser sa situation contractuelle, sans expliciter à quoi il fait référence, la cour observant que l’ensemble des correspondances produites aux débats par M. [Y], à l’exception des pièces n°29 et 30 relatives au renouvellement de la période d’essai, sont postérieures à la décision de l’employeur de rompre cette période d’essai, en particulier s’agissant des revendications au titre du paiement d’heures supplémentaires et des frais professionnels auxquelles il est fait droit.
Il s’ensuit que M. [Y] ne rapporte pas la preuve suffisante qui lui incombe du caractère abusif de la rupture par l’employeur de la période d’essai, de sorte que le jugement entrepris est confirmé en ce qu’il a débouté M. [Y] de ses prétentions de ce chef.
Sur les demandes accessoires’:
L’équité commande de condamner l’association La Remise à payer à M. [Y] la somme de 1500 euros à titre d’indemnité de procédure, le surplus des prétentions au titre de l’article 700 du code de procédure civile étant rejeté.
Au visa de l’article 696 du code de procédure civile, infirmant le jugement entrepris, et y ajoutant, il convient de condamner l’association La Remise, aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS’;
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi
INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté M. [Y] de ses prétentions au titre du renouvellement irrégulier et de la rupture abusive de la période d’essai ainsi que de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
CONDAMNE l’association La Remise à payer à M. [Y] les sommes suivantes’:
– mille six cent un euros et soixante-neuf centimes (1601,69 euros bruts) à titre de rappel d’heures supplémentaires
– cent soixante euros et dix-sept centimes (160,17 euros) bruts au titre des congés payés afférents
– quatre-vingt-huit euros et trente-deux centimes (88,32 euros) nets à titre de remboursement de frais professionnels
RAPPELLE que les intérêts au taux légal sur ces sommes courent à compter du 15 novembre 2019
DÉBOUTE M. [Y] du surplus de ses prétentions au principal
CONDAMNE l’association La Remise à payer à M. [Y] une indemnité de procédure de 1500 euros
REJETTE le surplus des prétentions au titre de l’article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE l’association La Remise aux dépens de première instance et d’appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière Le Président