Heures supplémentaires : 10 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/00462

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Heures supplémentaires : 10 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/00462
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AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 20/00462 – N° Portalis DBVX-V-B7E-MZ6S

Société FCA MOTOR VILLAGE FRANCE

C/

[Y]

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de LYON

du 17 Décembre 2019

RG : 15/04156

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 10 MAI 2023

APPELANTE :

Société FCA MOTOR VILLAGE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Emmanuelle JALLIFFIER-VERNE de la SELARLU EJV AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

[V] [Y]

né le 25 Mai 1988 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Laurent CRETIN, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Présidente

Nathalie ROCCI, Conseiller

Anne BRUNNER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Mai 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Président, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [V] [Y] a été embauché le 5 octobre 2009 en qualité de conseiller de vente par la société INTERMAP, devenue Motor Village France.

Trois avenants relatifs à la rémunération, au véhicule de fonction et à la carte essence et au lieu de travail ont été signés entre les parties le 1er juillet 2011, le 1er avril 2011 et le 30 septembre 2013.

Par requête du 6 novembre 2015, M. [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de LYON en lui demandant de condamner la société à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaires RTT, jours fériés, dimanches portes ouvertes, permanences midi, formations, dommages et intérêts pour harcèlement moral et dommages et intérêts pour résistance abusive.

Le salarié a été déclaré inapte à son poste de travail par avis du 11 janvier 2016 et a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 22 mars 2016.

Un procès-verbal de partage de voix a été dressé le 7 février 2019.

Au dernier état de la procédure, le salarié a ajouté à ses demandes initiales :

– une demande aux fins de nullité de sa convention de forfait jours et de condamnation de la société à lui verser diverses sommes à titre de rappel d’heures supplémentaires, d’indemnité pour travail dissimulé, de dommages et intérêts pour non-respect du repos compensateur

– une demande aux fins de voir déclarer son licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et condamner l’employeur à lui payer des dommages et intérêts à ce titre.

Par jugement du 17 décembre 2019, la formation de départage du conseil de prud’hommes a :

– dit que la clause de forfait annuel en jours est privée d’effet et inopposable à Monsieur [V] [Y] ,

– condamné la SAS FCA MOTOR VILLAGE FRANCE à verser à Monsieur [V] [Y] les sommes de :

* 17 136 euros à titre de rappels d’heures supplémentaires outre celle de 1 713 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2018,

* 10 000 euros de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral

* 15 500 euros de dommages et intérêts au titre du licenciement nul

– dit que la SAS FCA MOTOR VILLAGE FRANCE devra transmettre à Monsieur [V] [Y] dans le délai d’un mois suivant la notification de la décision des bulletins de salaire conformes à la décision sans que l’astreinte soit nécessaire,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– condamné la SAS FCA MOTOR VILLAGE FRANCE à verser à Monsieur [V] [Y] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la SAS FCA MOTOR VILLAGE FRANCE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile,

– condamné la SAS FCA MOTOR VILLAGE FRANCE aux dépens de la présente instance.

La société FCA MOTOR VILLAGE France a interjeté appel de ce jugement, le 16 janvier 2020.

Elle demande à la cour :

– d’infirmer le jugement en ses dispositions relatives à la convention de forfait et aux heures supplémentaires, ainsi qu’au titre du harcèlement moral et du licenciement nul

en conséquence,

– de constater que la convention de forfait annuel en jours de Monsieur [Y] est valable et lui est opposable

-de rejeter en tout état de cause la demande en paiement d’heures supplémentaires

-de rejeter toutes les demandes formées par M. [Y]

– à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions les sommes éventuellement allouées

– de confirmer le jugement qui débouté Monsieur [Y] du surplus de ses demandes

– de condamner Monsieur [Y] à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile

– de condamner Monsieur [Y] aux dépens.

M. [Y] demande à la cour :

– de confirmer le jugement en ce qu’il a :

– dit que la clause de forfait annuel en jours est privée d’effet et lui est inopposable

– prononcé la nullité du licenciement

– condamné la SAS FCA MOTOR VILLAGE France à lui verser la somme de 17 136 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires ainsi que celle de 1 713 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2018

– dit que la société FCA MOTOR VILLAGE France devra lui transmettre dans le délai d’un mois suivant la notification de la décision des bulletins de salaire conformes à la décision sans que l’astreinte soit nécessaire

– condamné la SAS FCA MOTOR VILLAGE France à lui verser la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– d’infirmer le jugement pour le surplus 

en conséquence,

– de prononcer la nullité de la convention de forfait en jours

– de condamner la société FCA MOTOR VILLAGE à lui verser les sommes suivantes :

* 15 000 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé

* 10 000 euros de dommages et intérêts pour non-respect du repos compensateur

* rappel de salaires RTT :

2010 : 5 x 77 : 385 euros

2011 : 10 x 78 : 780 euros

2012 : 10 x 106 : 1 060 euros

2013 : 10 x 72 : 720 euros

2014 : 10 x 102 : 1 020 euros

2015 : 4 x 86 : 344 euros

* rappel de salaires jours fériés :

2010 : 4 x 77 : 308 euros

2011 : 8 x 78 : 624 euros

2012 : 9 x 106: 954 euros

2013 : 11 x 72 : 792 euros

2014 : 11 x 102 : 1 122 euros

2015 : 6 x 86 : 516 euros

* rappel de salaires dimanches portes ouvertes

2010 : 2 x77 : 154 euros

2011 : (5×2) soit 10 x 78 : 780 euros

2012 : (5×2) soit 10 x 106 : 1 060 euros

2013 : (5×2) soit10 x 72 : 720 euros

2014 : (5×2) soit 10 x 102 : 1 020 euros

2015 : (3×2) soit 6 x 86 : 516 euros

* rappel de salaires permanences midi

2011 : 10 x 77 : 770 euros

2012 : 10 x 78 : 780 euros

2013 : 10 x 106 : 1 060 euros

2014 : 10 x 102 : 1 020 euros

2015 : 10 x 86 : 860 euros

* rappel de salaires formations

20l2 : 4 x 78 : 312 euros

2013 : 3 x 106 : 318 euros

2014 : 1 x 102 : 102 euros

2015 : 3 x 86 : 258

* dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse : 30 000 euros

* dommages et intérêts pour harcèlement moral : 30 000 euros

* dommages et intérêts pour résistance abusive : 5 000 euros

* article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros

– de condamner la société FCA MOTOR VILLAGE, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à lui remettre les bulletins de paie correspondants et régulariser les cotisations afférentes (retraite, chômage etc…)

– de condamner la société FCA MOTOR VILLAGE aux dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 26 janvier 2023.

SUR CE :

Sur la demande de rappel d’heures supplémentaires

Au soutien de son appel, la société fait valoir :

– que le conseil de prud’hommes ne pouvait décider d’office que la convention de forfait était privée d’effet alors que le salarié en demandait la nullité

– que le salarié ne fournit aucun argument au soutien de sa demande de nullité de sa convention de forfait en jours 

– que le salarié était un cadre commercial disposant d’une liberté dans l’organisation de son emploi du temps au sens de la convention collective

– que chaque vendeur est libre d’organiser sa journée de travail durant les heures d’ouverture des sites à la clientèle

– que les vendeurs pouvaient librement organiser entre eux à tour de rôle les permanences entre 12 heures et 14 heures

– que le salarié n’a jamais été soumis à un planning horaire qu’il lui aurait été demandé de respecter à la lettre

– qu’elle s’est conformée aux obligations de l’article 4.06 de la convention collective en matière de suivi de la convention de forfait jours puisqu’elle a mis en place un document de contrôle interne rempli et tenu informatiquement sur la base des déclarations faites mensuellement par les salariés

– que la question de l’organisation du temps de travail et de la charge de travail était abordée chaque année lors des entretiens annuels d’évaluation, sans que le salarié ait fait état de la moindre difficulté 

– que, subsidiairement, le salarié n’a jamais accompli la moindre heure supplémentaire. 

Le salarié soulève à la fois la nullité de la convention de forfait en jours stipulée à son contrat de travail, au motif qu’il ne pouvait lui être appliqué un forfait en jours sur l’année tel que défini par l’article 1.09 f) de la convention collective puisque la société lui imposait un planning et des horaires de présence, donc des horaires de travail prédéterminés, et l’inopposabilité de celle-ci, au motif que la société n’effectuait aucun contrôle des heures travaillées ni de la charge de travail de ses salariés.

****

Aux termes du contrat de travail, il est convenu entre les parties que l’exercice des fonctions de M. [Y] nécessitant une large autonomie dans l’organisation de son emploi du temps, le salarié ayant la capacité de fixer et répartir lui-même le temps nécessaire à la mission qui lui est confiée, il est rémunéré sur la base d’un forfait en jours sur l’année s’établissant à 218 jours pour un droit à congés payés complet et que le salaire mensuel brut est composé d’une partie fixe et d’une partie variable consistant en un intéressement sur les ventes de véhicules automobiles réalisées par le salarié.

Selon l’article 1.09 f) forfait en jours de la convention collective, peuvent conclure une convention de forfait en jours, dont les modalités doivent être indiquées dans le contrat de travail ou un avenant à celui-ci, les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés.

Une fois déduits du nombre total des jours de l’année les jours de repos hebdomadaires, les jours de congé légaux et conventionnels auxquels le salarié peut prétendre et les jours de réduction d’horaire, le nombre de jours travaillés sur la base duquel le forfait est défini ne peut excéder 218 jours.

En vertu de la convention collective, le forfait en jours s’accompagne d’un contrôle du nombre de jours travaillés au moyen d’un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées travaillées ainsi que la qualification des jours non travaillés en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail, établi en deux exemplaires un pour chacune des parties et complété au fur et à mesure de l’année, signé chaque semaine par le salarié puis par l’employeur ou son représentant; en outre, le salarié bénéficie chaque année d’un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel sont évoquées l’organisation et la charge de travail de l’intéressé et l’amplitude de ses journées d’activité, l’amplitude et la charge devant rester raisonnables et assurer une bonne répartition dans le temps du travail de l’intéressé.

En l’espèce, le conseil de prud’hommes a justement relevé, au vu des éléments produits aux débats, que le salarié était soumis à un horaire contraignant imposant sa présence au sein de l’entreprise à des horaires prédéterminés, qu’il était soumis à des instructions définissant en détail l’organisation du service commercial et ses horaires de travail et que toute absence devait être déclarée à la direction et soumise à autorisation.

Par ailleurs, les fiches d’évaluation annuelle et d’entretien professionnel produites pour les années 2011, 2012 et 2013 ne comportent pas de rubrique spécialement dédiée à la charge de travail et ne permettent pas de démontrer que l’employeur a respecté son obligation de vérifier chaque année que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, à l’effet d’assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié.

En effet, les seules rubriques devant être renseignées par le supérieur hiérarchique sont l’attitude générale, les compétences et la performance, tandis que l’entretien professionnel porte sur les points forts, les points à améliorer, l’évolution et la formation.

Il n’est pas mentionné dans le compte-rendu la manière dont est traité le questionnaire rempli par le salarié aux fins de préparer l’entretien individuel d’évaluation en ce qui concerne les conditions de travail, l’organisation des tâches professionnelles et la gestion du temps de travail.

Enfin, le récapitulatif informatique des jours de présence, non daté et établi sur la base des bulletins de salaire qui reprennent chaque mois le nombre de jours ou de demi-journées non travaillés, ne constitue pas le document de contrôle que doit tenir l’employeur dans le cadre du suivi de la convention de forfait en jours tel que prévu par la convention collective.

La convention de forfait en jours signée par le salarié n’est en conséquence ni valable, ni correctement exécutée par l’employeur et le salarié est en droit de solliciter le paiement des heures supplémentaires éventuellement accomplies au-delà de 35 heures de travail par semaine.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte des dispositions de l’article précité et de celles des articles L. 3171-2, alinéa 1er, et L. 3171-3 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Le salarié présente les horaires de travail suivants correspondant aux heures d’ouverture du site auquel il est affecté : 8 h à 12 h et 14h à 19h (9 heures de travail par jour) quatre jours par semaine , 9h à 12h30 et 14h à 19h (8 heures 30 de travail par jour) le samedi, soit 44 heures 30 par semaine, ce qui représente 9 heures 30 supplémentaires par semaine et 38 heures supplémentaires par mois.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en apportant ses propres éléments.

L’employeur explique que les vendeurs disposaient d’une totale liberté pour organiser leur journée de travail durant l’ouverture des sites à la clientèle et pouvaient commencer et finir leur travail à leur convenance, qu’ils pouvaient librement organiser entre eux les tours de permanence entre 12 heures et 14 heures pour les besoins de la clientèle et que les vendeurs ont des jours de présence, mais il n’apporte aucun élément sur les heures de travail réalisées par le salarié.

Il est ainsi établi que le salarié a accompli des heures supplémentaires dont il appartient au juge de fixer le nombre et le montant.

Le calcul présenté par le salarié n’inclut pas l’horaire 12 heures-14 heures.

Toutefois, il ne tient pas compte des périodes de congés payés, d’absence, de formation et de RTT du salarié.

Il convient en conséquence de fixer à 4 heures supplémentaires par semaine le nombre d’heures supplémentaires effectuées par le salarié, soit 188 heures par an.

Le montant de la créance d’heures supplémentaires sur trois ans (la période sur laquelle porte la demande n’étant au demeurant pas précisée) doit être ramené à 6 097 euros et celui de l’indemnité de congés payés afférente à 609,70 euros.

Il y a lieu de confirmer le jugement qui, par des motifs pertinents que la cour adopte, a rejeté la demande d’indemnité pour travail dissimulé et la demande en paiement de dommages et intérêts fondée sur le fait que le salarié aurait été empêché de prendre son repos du fait d’une mauvaise information de l’employeur.

Sur les autres demandes de rappels de salaire : RTT, jours fériés, permanences du midi, dimanches portes ouvertes, formations

Le salarié fait valoir :

– que les absences liées aux jours de RTT, jours fériés, formations, événements familiaux, dimanches « portes ouvertes » et « permanences midi » ont été rémunérées uniquement sur la base du salaire fixe, contrairement aux dispositions conventionnelles

– que la direction de la société n’a jamais respecté le forfait cadre de 218 jours mais a fait travailler ses cadres au forfait 10 jours de plus durant de nombreuses années sans rémunération supplémentaire, puisque dans le calcul du forfait cadre de 218 jours, elle n’a pas déduit les dix jours représentant cinq dimanches travaillés par an en moyenne qui comptent double en vertu de la convention collective, les dimanches étant comptés à 100 % comme jours de repos.

La société fait valoir :

– qu’elle a rappelé lors de la réunion des délégués du personnel du 27 mai 2015 les dispositions du chapitre IV de la convention collective et que les membres du comité d’entreprise et les représentants du personnel ont approuvé le paiement des jours d’absence pour l’ensemble des salariés concernés par des journées de formation, des journées de délégation et des événements familiaux depuis le 1er janvier 2015 sur la base du salaire de référence, lequel est égal à la moyenne des rémunérations correspondant au mois de salaire complet compris dans la période des 12 mois écoulés, à l’exclusion des éventuelles libéralités ou autres gratifications bénévoles, ainsi que de toutes primes non mensuelles lorsque leur montant n’est pas affecté par l’absence du salarié 

– que, concernant les heures travaillées le dimanche et lors de la permanence du midi il n’existe aucun régime d’astreinte et que les heures supplémentaires travaillées et compensées par l’attribution de jours de repos supplémentaires n’ont pas vocation à être indemnisées sur la base des dispositions relatives aux journées d’absence 

– que les « JRTT » n’ouvrent droit à aucune compensation salariale mais à l’attribution de jours de repos calculés en fonction de la durée de travail sur l’année.

****

Le salarié ne prétend pas ne pas avoir pris ses jours de RTT, de telle sorte qu’ils devraient lui être rémunérés. La demande de ce chef doit être rejetée.

Le salarié soutient par ailleurs, d’une part qu’il n’a pas été rémunéré de ses heures de permanence effectuées entre 12 heures et 14 heures (à concurrence de 10 jours par an de 2011 à 2015) , d’autre part que le travail effectué pendant les jours fériés, les jours de formation et les dimanches n’a été rémunéré que sur la base du salaire fixe, sans inclure la rémunération variable, ce qui n’est pas conforme aux dispositions de la convention collective.

– heures de permanence :

Il ressort du courriel du 5 septembre 2014 que M. [Y] devait assurer une permanence de 12 heures à 14 heures le lundi et le mardi.

Le salarié a fait l’objet d’un arrêt de travail à compter du 5 juin 2015 et n’a pas repris le travail ensuite.

Au vu de ces éléments, la demande sera accueillie à hauteur de la somme de 1 000 euros pour les permanences de midi assurées de septembre 2014 à mai 2015 et la société sera condamnée à payer au salarié ladite somme.

– jours fériés, jours de formation, dimanches travaillés

En application de l’article 1.10 b) de la convention collective :

Les vendeurs de véhicules ne pourront pas être à la disposition de l’employeur plus de cinq dimanches par année civile.

Chaque heure travaillée le dimanche sur autorisation accordée par arrêté préfectoral pour une période limitée ouvrira droit, outre le repos prévu par l’arrêté en contrepartie, à une majoration de 100 % du salaire horaire brut de base ou bien, lorsqu’il s’agit d’un vendeur de véhicules itinérant, d’une indemnité calculée comme indiqué à l’article 1.16, s’ajoutant à la rémunération du mois considéré.

Chaque heure travaillée le dimanche sur autorisation exceptionnelle accordée par arrêté municipal ouvrira droit, outre un repos d’une durée équivalente pris dans la quinzaine qui précède ou qui suit le dimanche considéré, à une majoration ou à une indemnité calculée comme indiqué à l’alinéa précédent.

Dès lors qu’en application de la convention collective, chaque heure de dimanche travaillée donne lieu à une contrepartie en repos, dont le salarié ne prétend pas ne pas avoir bénéficié, outre une majoration de 100 % du salaire horaire brut de base, c’est à tort que le salarié soutient que l’assiette de calcul de cette majoration doit inclure la part de sa rémunération variable telle qu’il la mentionne dans son tableau.

Le salarié indiquant lui-même dans ses conclusions que ses dimanches travaillés ont été rémunérés sur la base du salaire fixe, sa contestation n’est pas fondée.

En ce qui concerne la rémunération des jours fériés et des jours de formation, les tableaux produits ne permettent pas de démontrer que la société n’a pas respecté les dispositions de l’article 1.16 b) de la convention collective aux termes desquelles le salaire mensuel de référence est la rémunération, correspondant au travail, que le salarié aurait perçue au cours du mois considéré s’il avait travaillé sans s’absenter et est égal à la moyenne des rémunérations correspondant aux mois de salaire complet compris dans la période des 12 mois écoulés, à l’exclusion des éventuelles libéralités ou autres gratifications bénévoles, ainsi que de toutes primes non mensuelles telles que primes de vacances, 13e mois… lorsque leur montant n’est pas affecté par l’absence du salarié.

La demande en paiement d’un rappel de salaire pour les jours fériés et les jours de formation doit être rejetée.

Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive de la société, dont les moyens de défense sont partiellement accueillis, tandis que certaines demandes du salarié sont rejetées.

Sur le harcèlement moral

Le salarié soutient qu’il a subi durant de nombreux mois des agissements répétés de harcèlement moral ayant eu pour effet de dégrader sévèrement ses conditions de travail et d’altérer sa santé, étant observé qu’il ne rencontrait aucune difficulté avec son employeur jusqu’à l’arrivée du nouveau directeur, M. [H].

Il critique le caractère objectif de l’enquête mené par le CHSCT en faisant valoir qu’elle a été organisée par le directeur des ressources humaines lui-même.

Il fait valoir que les membres du CHSCT ont refusé de l’entendre lors de l’enquête alors qu’il était directement concerné par les problèmes de harcèlement soulevés.

Il expose que ces comportements ont eu de graves conséquences sur sa santé et qu’il a dû s’arrêter pour dépression.

La société fait valoir que :

– aucun élément ne laisse présumer que M. [Y] a été victime d’un harcèlement moral de la part de son supérieur hiérarchique, M. [H]

– les sanctions étaient fondées et justifiées et M. [Y] ne les a jamais contestées, ni n’en demande l’annulation, de sorte qu’elles sont définitives

– les courriels produits sont adressés à l’ensemble des équipes et non au seul M. [Y] et ils contiennent des directives et consignes relevant de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique exprimées en des termes courtois

– elle a modifié les conditions d’utilisation de la carte essence et du téléphone portable appartenant à l’entreprise pour uniformiser ses pratiques internes à l’égard de M. [Y]

– le changement de lieu de travail dans un même secteur géographique conformément au contrat de travail s’analyse en un changement des conditions de travail

– le CHSCT, après enquête, a conclu à l’absence de toute situation de harcèlement moral au sein de l’entreprise.

**** 

Aux termes de l’article L1152-1du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L’article L1154-1, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 applicable à la date de la saisine du conseil de prud’hommes, dispose que, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L1152-1 à L1152-3 et L1153-1 à L1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

En vertu de ce dernier texte, il pèse sur le salarié l’obligation de rapporter la preuve d’éléments précis et concordants ; ce n’est qu’à cette condition que le prétendu auteur du harcèlement doit s’expliquer sur les faits qui lui sont reprochés.

A l’appui de sa demande, le salarié invoque les faits suivants :

1) des avertissements reçus quasiment mensuellement dès l’arrivée de M. [H]

2) une pression constante et l’augmentation importante de ses objectifs de vente afin qu’il ne perçoive plus de prime

3) une mutation sur le site de [Localité 5] pour exiger trois semaines après qu’il retourne sur le site de Vaise ‘en tentant de lui faire signer sous la contrainte un nouvel avenant’

4) les recommandations du médecin du travail qui a refusé toute possibilité de reclassement sur le site de [Localité 5]

5) les attestations du médecin et de la psychologue.

1) M. [Y] a reçu :

– le 1er octobre 2014, une lettre de rappel du directeur au motif que, bien qu’ayant été prévenu par mail le 26 septembre de bien vouloir participer au convoyage le lundi 29 septembre au matin, il ne s’était pas présenté et n’avait pas jugé utile d’avertir de façon valable sa hiérarchie de cette absence

– le 29 décembre 2014, un avertissement au motif qu’il avait passé trois fausses offres la semaine précédente, démontrant ainsi un manque de sérieux et de professionnalisme et une mauvaise foi qui n’a pas lieu d’être en entreprise

– le 26 janvier 2015, une lettre recommandée l’informant que sa carte carburant passait à 1100 litres par an à partir de cette date

– le 9 mars 2015, un avertissement au motif qu’au 4 mars, il avait été constaté qu’il n’avait traité que la moitié des ‘leads’ qui lui avaient été envoyés ‘malgré nos efforts et après de nombreuses relances, vous ne daignez toujours pas traiter l’ensemble des contacts qui vous sont attribués’

– le 7 avril 2015, un avertissement au motif qu’il avait été relevé à plusieurs reprises l’utilisation de la carte carburant pour régler des péages au mois de février, malgré le courrier du 26 janvier dernier lui rappelant que la carte carburant n’a pas à être utilisée pour régler les péages utilisés quotidiennement

– le 7 avril 2015, une lettre de rappel au motif que lors de l’émission du bon de commande d’un véhicule, il avait inscrit la mention ‘si retard de livraison, prêt de véhicule’ alors qu’il n’avait reçu aucune confirmation de son supérieur et qu’il ne pouvait s’engager sur le prêt d’un véhicule sans accord préalable écrit de sa hiérarchie.

2) MM. [B], [O], [J], [S] et [W], salariés de l’entreprise attestent que :

– à partir de la prise de poste sur le site de [Localité 5] le 1er avril 2015, j’ai pu constater à mon niveau qu’à chaque sortie d’entretien entre [V] [Y] et [U] [H], [V] sortait dans un état de pression et de frustration , de plus, à mon niveau, j’ai pu constater que [V] [Y] n’était pas suivi ni accompagné dans ses démarches commerciales et laissé à l’abandon, n’ayant pas de communication avec sa direction (M. [S])

– M. [Y] a subi de vraies pressions de la part de [U] [H] car j’en ai été témoin, j’ai été témoin passif (via téléphone) d’une conversation entre M. [H] et M. [Y], j’ai entendu des mots durs et dégradants (idiot, bête, abruti) . Quand je travaillais encore chez Intermap, j’ai eu une conversation téléphonique professionnelle avec M. [Y] qui pleurait au téléphone suite à un énième entretien avec M. [H] (M. [J])

– j’ai souvent assisté à un comportement menaçant envers M. [Y]. Souvent dans le bureau du directeur, on entendait ‘gueuler’. M. [Y] sortait de l’entretien dépité. Sciemment, M. [H] démontrait beaucoup plus de raideur avec M. [Y] pour l’empêcher d’atteindre ses objectifs (M. [B])

– M. [Y] a été transféré sur le site de [Localité 5] le 1er avril 2015 , en tant que délégué suppléant CE, j’ai plusieurs fois informé la ‘RH’ que M. [Y] se sentait harcelé par la direction (M. [O])

– le directeur m’évoque le cas de [V] [Y] et me dit : ‘moi, des vendeurs que je dois payer avec des salaires garantis, je n’en veux pas’; après un mois passé sur le site de [Localité 5], il somme M. [Y] de retourner dès le lundi sur le site de Vaise, il voulait forcer [V] [Y] à signer un nouvel avenant, sans que ce dernier puisse le lire tranquillement. M. [H] a refusé de lui laisser la feuille. (M. [W]).

Ces attestations démontrent l’existence des pressions alléguées.

En revanche, la fixation intentionnelle d’objectifs inatteignables dans le but de supprimer la prime du salarié ne résulte pas suffisamment desdites attestations et des courriels mensuels fixant les critères de livraison de véhicules, de septembre à décembre 2014 et en janvier 2015, en l’absence d’éléments financiers de comparaison avec des périodes précédentes ou avec d’autres salariés.

3) M. [Y] produit un avenant daté du 1er avril 2015 signé par le seul employeur, stipulant que son contrat de travail est modifié comme suit à compter du 1er avril 2015 : ‘M. [Y] exercera ses fonctions sur le site de [Localité 5]. Toutefois, pour des raisons touchant à l’organisation et au bon fonctionnement de l’entreprise, la société se réserve la possibilité de le muter dans tout établissement présent ou à venir de l’entreprise situé dans la région Rhône Alpes’.

Par courriel du 5 juin 2015 M. [Y] signale à M. [H] que, courant mars 2015, il l’a informé qu’il l’affectait sur le site de [Localité 5], unilatéralement, que le 1er avril 2015, il a commencé à travailler sur le site de [Localité 5], et que, le 24 avril 2015, M. [H] l’interpelle de manière violente, oralement, en le sommant de retourner à Vaise, sans raison apparente, ‘vous m’imposez de signer un avenant pour retourner à Vaise, sans aucune réflexion de ma part et vous refusez que je lise à tête reposée le courrier que vous avez rédigé . Vous me l’arrachez des mains pour éviter que je le garde et vous me parlez vulgairement. Je vous ai envoyé un mail pour vous dire que ce n’était pas normal tout ça d’ailleurs . Le mail est resté sans réponse. Ensuite, vous me transférez encore une fois comme vendeur secteur à compter du 1er juin 2015 (sans aucun accord signé et encore une fois unilatéralement) Sans compter tous les avertissements et lettres de rappel que vous m’avez envoyés. J’ai l’impression que vous vous déchaînez bien sur moi. Je commence sérieusement à saturer psychologiquement et physiquement (…)

Le 26 juin 2015, il envoie une lettre recommandée au dirigeant de l’entreprise, M. [D], dans laquelle il expose que, depuis l’arrivée de M. [H], fin août 2014, il a reçu une multitude d’avertissements qu’il a pris soin de contester, que, pour toute réponse, il a été muté sur le site de [Localité 5] à compter du 1er avril 2015, que, trois semaines après, M. [H] a exigé qu’il retourne sur le site de Vaise en tentant de lui faire signer sur le champ un nouvel avenant et en refusant de lui en remettre une copie. Il ajoute ‘après avoir échangé avec vous sur ces insupportables conditions de travail lors d’un entretien courant avril 2015, vous avez indiqué que vous alliez me faire une proposition. A ce jour, je n’ai aucune nouvelle de votre part.’

4) Le médecin du travail a rendu, lors de la visite de pré-reprise du 22 décembre 2015, l’avis suivant : compte-tenu de l’état de santé du salarié, une inaptitude au poste de travail est envisagée. Je ne vois pas à ce jour de reclassement possible, et, à l’issue de la visite de reprise du 11 janvier 2016 un avis d’inaptitude au poste de travail ‘je ne vois pas à ce jour de reclassement possible (étude de poste et des conditions d travail le 22 juin 2015 et le 5 janvier 2016)’.

5) M. [Y] a été placé en arrêt de travail le 5 juin 2015.

Son médecin traitant, le docteur [L], par certificat du 20 novembre 2015, expose qu’elle l’a arrêté début juin 2015 pour des symptômes évoquant un burn-out. M. [Y] est envahi par son travail, il y pense tout le temps, dort très mal, mange moins, pleure et présente des crises d’angoisse. Un traitement anxiolytique et antidépresseur ainsi qu’une psychothérapie ont été indispensables pour l’aider à se sentir un peu mieux. (…) J’ai dû augmenter le traitement anti-dépresseur ce jour. Les anxiolytiques sont nécessaires quotidiennement.

Le 1er décembre 2015, Mme [K], psychologue clinicienne, certifie recevoir M. [Y] en consultations psychologiques depuis juillet 2015, adressé par son médecin traitant pour un état de souffrance globale et des éléments dépressifs importants, dans un contexte professionnel décrit comme très difficile.

Les faits ci-dessus établis, à savoir plusieurs avertissements et rappels à l’ordre dans un laps de temps réduit, deux mutations en l’espace d’un mois, le passage de la carte carburant à 1 100 litres par an et la suppression du téléphone d’entreprise, ainsi qu’une dégradation de l’état de santé du salarié faisant suite à ces difficultés, pris dans leur ensemble, laissent présumer un harcèlement moral.

En ce qui concerne la limitation de la carte essence et la suppression du téléphone de fonction à compter du 1er janvier 2015, l’employeur justifie sa décision dans sa lettre du 6 janvier 2014 par la nécessité d’assurer l’égalité de traitement entre les vendeurs ‘showroom’.

Il explique au salarié dans sa lettre du 26 janvier 2015 que l’augmentation de la carte carburant n’était pas un avantage gagné au bénéfice de ses résultats et ancienneté mais correspondait à son passage au poste de vendeur secteur nécessitant des déplacements plus importants, que, depuis sa réintégration dans ses fonctions de vendeur ‘showroom’ en octobre 2013, les 1760 litres annuels dont il bénéficie ne se justifient plus.

Il n’explique pas toutefois la raison pour laquelle cette modification intervient plus d’un an après la modification alléguée des fonctions.

Par ailleurs, comme l’a exactement relevé le conseil de prud’hommes, l’employeur n’apporte pas de pièces de nature à démontrer le bien-fondé des avertissements et rappels à l’ordre délivrés au salarié.

M. [D] répond le 6 juillet 2015 aux lettres de M. [Y] des 5 et 26 juin 2015 qu’il souhaite apporter un démenti formel à ses assertions non seulement mensongères mais aussi malveillantes et lui reproche les propos volontairement diffamatoires qu’il s’est cru autorisé à tenir, contre toute attente, alors que vous avez bénéficié jusqu’alors d’une extrême indulgence, (la direction se contentant de vous notifier des lettres de rappel ou des avertissements pour des faits qui auraient pu motiver un licenciement pour faute grave) vous avez cru pouvoir orchestrer un campagne d’opposition systématique à l’encontre de M. [U] [H] et de la direction générale. Dans ce contexte conflictuel dont vous êtes seul à l’origine, M. [U] [H] et moi-même n’avons pu donner suite à la proposition d’évolution professionnelle que nous avions évoquée au mois d’avril dernier (…) ‘.

Or, le contenu des deux correspondances de M. [Y] ci-dessus citées n’apparaît ni diffamatoire, ni outrancier, ni constitutif d’une opposition systématique.

L’employeur ne justifie pas non plus des motifs objectifs qui l’ont conduit à prendre la décision d’affecter M. [Y] sur le site de [Localité 5] le 1er avril 2015, sans son accord, avant de le réaffecter sur le site de Vaise un mois plus tard.

M. [Y] n’a pas été entendu par les membres du CHSCT qui ont pourtant auditionné tous les salariés de l’entreprise, alors que, comme il l’écrit à l’inspection du travail le 22 mai 2016, l’enquête portait essentiellement sur son cas de harcèlement et qu’il avait accepté de venir répondre aux membres du CHSCT mandatées pour mener l’enquête, bien qu’il soit en situation d’arrêt de travail.

Dans ces conditions, c’est à juste titre que le conseil de prud’hommes a dit que M. [Y] avait été victime de harcèlement moral de la part de son employeur et a condamné la société à lui payer des dommages et intérêts en réparation de son préjudice, dont il a exactement apprécié le montant.

Sur le licenciement

Il y a lieu de confirmer le jugement qui, en application de l’article L1152-3 du code du travail, a déclaré nul le licenciement de M. [Y], l’inaptitude du salarié étant la conséquence des faits de harcèlement moral commis à son préjudice par l’employeur.

Le conseil de prud’hommes a cependant quelque peu sous-évalué le préjudice résultant pour le salarié de la perte de son emploi et il convient de porter le montant des dommages et intérêts à la somme de 18 000 euros.

Il convient d’ordonner à l’employeur de remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif des rappels de salaire alloués par le présent arrêt, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette obligation du prononcé d’une astreinte.

La société dont le recours est rejeté pour l’essentiel doit être condamnée aux dépens d’appel et à payer au salarié la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

CONFIRME le jugement, sauf en ce qui concerne le montant du rappel d’heures supplémentaires et celui de l’indemnité de congés payés afférente, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de rappel de salaire au titre des heures de permanence et sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts consécutifs au licenciement nul

STATUANT à nouveau sur ces points,

CONDAMNE la société FCA MOTOR VILLAGE à payer à M. [V] [Y] les sommes suivantes :

– 6 097 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires et 609,70 euros à titre d’indemnité de congés payés afférents

– 1 000 euros au titre des heures de permanence en 2014 et 2015

– 18 000 euros en réparation du préjudice causé par la nullité du licenciement

ORDONNE à l’employeur de remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif des rappels de salaire alloués par le présent arrêt

REJETTE la demande en fixation d’une astreinte

CONDAMNE la société FCA Motor Village France aux dépens d’appel

CONDAMNE la société FCA Motor Village France à payer à M. [Y] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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