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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 10
ARRET DU 11 MAI 2023
(n° , 1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05080 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCGLC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 19/01168
APPELANTE
Madame [Y] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Jonathan CADOT, avocat au barreau de PARIS, toque : R222
INTIMEE
S.A.R.L. MACOFI Prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Jean-Oudard DE PREVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0502
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Nicolas TRUC, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre
Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre
Madame Carine SONNOIS, Présidente de la chambre
Greffier, lors des débats : Mme Sonia BERKANE
ARRET :
– contradictoire
– mis à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Nicolas TRUC, Président et par Sonia BERKANE,Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE :
Mme [Y] [H] a été engagée par la société Macofi à partir du 13 septembre 2013 en qualité d’assistante administrative. .
Après entretien préalable le 3 janvier 2019, la salariée a fait l’objet d’un licenciement pour faute grave notifié par lettre du 10 janvier 2019 rédigée en ces termes :
‘(…) Je vous informe que j’ai décidé de vous notifier, par la présente votre licenciement pour faute grave.
Les raisons qui motivent cette décision et qui vous ont été exposées lors de l’entretien préalable sont, je vous le rappelle les suivantes :
1. Comportement déplacé non professionnel
Depuis la mi-novembre 2018, j’ai pu constater une nette dégradation de votre comportement ayant pour conséquence une baisse significative de votre implication dans la réalisation de vos tâches. Ces derniers temps vous vous êtes permise de lancer à la cantonade de nombreuses remarques et commentaires sur la qualité de nos clients qui m’ont amené à vous recadrer une première fois.
Le 4 décembre 2018, j’ai été de nouveau amené à vous rappeler à l’ordre à l’issue d’une matinée pendant laquelle vous avez passé votre temps à aller échanger sur des sujets non professionnels avec une de vos collègues.
2. Mise en avant de préoccupations personnelles au détriment de votre travail
Vous avez choisi de bénéficier du plan d’épargne entreprise mis en vigueur au sein de notre société. L’analyse de vos relevés ayant mis en avant une diminution de 300 euros sur la valeur de vos avoirs de votre plan, vous avez passé de nombreuses heures à harceler le conseiller épargne de l’UFF pour obtenir des explications.
L’ensemble de l’équipe a eu une nouvelle fois à supporter vos commentaires et plaintes répétées. Vous avez pris la liberté de m’écrire le 5 décembre 2018 pour vous plaindre de cet état de fait et j’ai personnellement été amené à passer du temps pour retracer l’historique et comprendre les raisons de cette situation.
Cela n’a eu aucun effet sur votre état de nerf puisque le lendemain, soit le 6 décembre 2018, vous avez pris sur votre temps de travail pour m’écrire un nouveau message vous plaignant du message délivré par le conseiller qui, selon vous, vous avait humiliée.
Cette conversation vous a mis dans un tel état que vous n’étiez pas en mesure d’assurer votre travail et avec dû prendre une journée de congé le lendemain.
3. Implication à géométrie variable sur la réalisation de certains travaux et manquements grave au respect de votre hiérarchie
Le 3 décembre 2018, jour de l’arrivée de Mlle [G] au sein de notre société, je vous ai demandé de rajouter son adresse mail sur le photocopieur. Lors de notre changement de prestation de reprographie, j’avais pris le temps de vous expliquer la manipulation et vous avait attribué cette tâche pour toute nouvelle entrée. Ce travail nécessite quelques secondes, voire minutes, en relisant ses notes.
A ma demande, je me suis vu opposé un ‘quand j’aurai le temps’. Au jour de notre entretien, vous ne l’aviez toujours pas fait alors que vous n’êtes pas sans savoir que l’utilisation du scanner sur le photocopieur est indispensable à chacun des salariés pour réaliser son travail efficacement.
Je vous ai également demandé de préparer les factures des sociétés [L] au début du mois de décembre 2018 alors que ce dernier les réclamait depuis plusieurs semaines.
Il m’avait déjà exprimé votre manque de professionnalisme par un courriel en date du 27 novembre 2018. En effet, lors de ses demandes début octobre 2018 d’émission des factures 2017, vous aviez oublié de préparer les factures de cinq entités. Dans l’envoi que vous lui avez adressé pour corriger cet oubli, non seulement vous lui avez adressé l’ensemble des factures 2017 dont la plupart avaient déjà été envoyées, mais il manquait encore 3 des 5 factures restant à effectuer. Vous considériez donc que c’était à lui de faire le tri alors que nous étions en défaut.
Je vous ai immédiatement transféré ce message et votre réponse a été de dire que ce n’était pas grave et que de toute façon ce client est très désagréable et n’a que ce qu’il mérite.
Votre perception des clients ne doit en rien altérer votre professionnalisme.
Ce type de comportement contribue à la dégradation de l’image de notre cabinet et nécessite des temps complémentaires qui ne sont pas sans impact sur la rentabilité de notre société.
4. Attitude irrespectueuse et inqualifiable à l’égard de votre hiérarchie
Le 14 décembre 2018, M. [L] participait à une réunion avec son conseil fiscal dans nos locaux au 5e étage. Cette réunion devant se terminer aux alentours de 9h45, il souhaitait repartir avec ses factures 2018 à l’issue de cette réunion. C’est tout naturellement que je vous ai demandé à 9h05 de préparer instamment les factures pour ce client alors que vous étiez en train de prendre un café et des viennoiseries posées sur un plateau qui occupait une part importante de votre bureau.
Votre réponse été ‘je finis mon petit déjeuner et je m’en occupe’. Je vous ai donc à juste titre répondu que le petit déjeuner, ça se prend chez soi. Cette réponse a déclenché une réaction de violence tant verbale que physique sans commune mesure avec ce que je vous avais dit.
Vous avez commencé à hurler et puis avez balancé votre café dans l’évier des toilettes, et, sans arrêter de hurler, êtes revenue, avez saisi votre plateau, l’avez balancé avec votre viennoiserie sur la cloison en verre contigue à votre bureau.
Vous vous êtes ensuite rendue dans mon bureau et avez continué en me hurlant dessus et tenant des propos irrespectueux à mon égard.
La teneur et la violence, de vos propos étant liée au fait que vous jugiez inadmissible que je vous demande tout simplement de faire votre travail que le client, présent dans nos locaux, attendait alors que vous preniez votre petit déjeuner pendant vos heures de travail.
Vous avez fini par retourner à votre poste de travail mais votre état de nerf a déclenché une crise nécessitant l’intervention des pompiers et un retour chez vous.
Je ne peux tolérer davantage votre manque de professionnalisme, vos actes d’insubordinations, votre agressivité à l’égard de la direction ainsi que vos erreurs.
Votre conduite met en péril le bon fonctionnement du cabinet et votre comportement nuit à l’image de la société Macofi. Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l’entreprise est impossible.
L’absence de toute explication suffisante de votre part lors de l’entretien préalable ne m’a pas permis de modifier mon appréciation des faits qui vous sont reprochés.
Votre licenciement pour faute grave prend effet dès réception de a présente lettre, et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans préavis ni indemnité (…) ».
Le conseil de prud’hommes de Paris, saisi par Mme [H] en contestation de la rupture de son contrat de travail le 11 février 2019, a, par jugement du 12 juin 2020, notifié le 19 juin 2020, statué comme suit :
Requalifie le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse
Condamne la société Macofi à verser à Mme [Y] [H] les sommes suivantes:
– 5 853,16 euros bruts au titre de l’indemnité légale de préavis
– 4 024,04 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement
– 1 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Déboute Mme [Y] [H] du surplus de ses demandes
Déboute la société Macofi de sa demande d’article 700 du code de procédure civile
Condamne la société Macofi aux entiers dépens.
Mme [Y] [H] a interjeté appel de cette décision par déclaration de son conseil au greffe de la cour d’appel de Paris le 27 juillet 2020.
Selon ses dernières conclusions remises et notifiées le 4 octobre 2022, l’appelante soutient devant la cour les demandes suivantes ainsi exposées :
Déclarer Mme [Y] [H] recevable et bien fondée en son appel ;
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris en date du 12 juin 2020 en ce qu’il a condamné la société Macofi à verser à Mme [Y] [H] les sommes suivantes:
* 5 853,16 euros bruts à titre d’indemnité légale de préavis, en application des
dispositions de l’article L 1234-1 du code du travail ;
* 4 024,04 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement, en application des dispositions des articles R 1234-1, R 1234-2 et R 1234-4 du code du travail ;
Dire et juger que ces sommes porteront intérêts légaux à compter du 13 février 2019, date de la convocation de la société Macofi devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes de Paris, ces intérêts étant capitalisés par application des dispositions de l’article 1154 du code civil ;
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris en date du 12 juin 2020 en ce qu’il a condamné la société Macofi à verser à Mme [Y] [H] la somme de 1 000 euros nets à titre d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Dire et juger que cette somme portera intérêts légaux à compter du 12 juin 2020, date du jugement du conseil de prud’hommes de Paris, ces intérêts étant capitalisés par application des dispositions de l’article 1154 du code civil ;
Infirmer pour le surplus le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 12 juin
2020 et, statuant à nouveau :
Dire et juger que le licenciement de Mme [Y] [H] est, à titre principal, nul et, à titre subsidiaire, dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamner la société Macofi à payer à Mme [Y] [H] les sommes suivantes :
– 6 309,36 euros bruts à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires de janvier 2016 à décembre 2018, soit trois années, en application des dispositions sur la prescription triennale de l’article L 3245-1 du code du travail ;
– 630,94 euros bruts à titre de rappel d’indemnité de congés payés sur rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ;
Dire et juger que ces sommes porteront intérêts légaux à compter du 13 février 2019, date de la convocation de la société Macofi devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes de Paris, ces intérêts étant capitalisés par application des dispositions de l’article 1154 du code civil ;
Condamner la société Macofi à payer à Mme [Y] [H] les sommes suivantes :
– 25 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, en application des dispositions des articles L 1152-1 à L 1152-3 du code du travail ;
– A titre principal,
– 77 000,00 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, en application des dispositions des articles L 1152-1 et L 1152-2 du code du travail : (3.226,58 euros x 24 = 77 437,92 euros arrondis à 77.000,00 euros). Subsidiairement, 77 000,00 euros nets à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application des dispositions de l’article L1235-3 du code du travail ;
– 30 000 euros nets à titre d’indemnité pour violation des droits de Mme [Y] [H] au plan d’épargne pour la retraite collectif (P.E.R.C.O.) ;
– 1 000 euros nets à titre d’indemnité pour violation des droits de Mme [Y] [H] au plan d’épargne entreprise (P.E.E.) ;
– 2 000,00 euros nets à titre de dommages et intérêts pour défaut de portabilité, pendant un an après la rupture du contrat de travail, de la couverture de mutuelle santé et prévoyance;
– 8 000,00 euros nets à titre d’indemnité en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;.
De dire et juger que ces sommes porteront intérêts légaux à compter de l’arrêt à intervenir, ces intérêts étant capitalisés par application des dispositions de l’article 1154 du code civil;
De condamner la société Macofi aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de ses dernières conclusions remises et notifiées le 7 novembre 2022, l’intimée demande à la cour de :
A titre principal
Juger que le licenciement de Mme [H] est justifié par une faute grave ;
Juger que Mme [H] n’a pas fait l’objet d’un harcèlement moral et qu’elle ne fournit aucun élément à l’appui de sa demande d’heures supplémentaires ;
Juger que ses demandes sont toutes injustifiées dans leur principe et dans leur montant ;
En conséquence
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 18 juin 2020 en ce qu’il a débouté Mme [H] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, du harcèlement moral, des PEE et PERCO, et de la portabilité ;
A titre incident,
Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Macofi de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse et condamné la société Macofi à payer les sommes suivantes :
– 5 853,16 euros bruts à titre d’indemnité légale de préavis,
– 4 024,04 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement,
– 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– les entiers dépens
Débouter Mme [H] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;
A titre subsidiaire,
Vu l’article L. 1235-3 du code du travail,
Reduire ses demandes à de plus justes proportions ;
En tout état de cause ;
Condamner Mme [H] à verser à la société Macofi la somme de 3 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
L’ordonnance de clôture de l’instruction a été prononcée le 9 novembre 2022.
Il est renvoyé pour plus ample exposé aux conclusions des parties visées ci-dessus.
Sur ce :
I) Sur les heures supplémentaires
Selon l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Mme [H] sollicite le paiement d’un rappel d’heures supplémentaires d’un montant brut de 6 309,36 euros sur la période de janvier 2016 à décembre 2018, soutenant qu’elle effectuait 8 heures supplémentaires par mois, l’employeur lui ayant demandé, alors que son horaire quotidien était 9 h – 17 h avec une pause déjeuner d’une heure, de rester au moins deux fois par mois jusqu’à 21 heures (ses dernières conclusions page 16).
Mais il sera observé que la salariée ne fournit ni pièce dont il pourrait être déduit qu’il lui était demandé de travailler jusqu’à 21 heures, ni décompte ou relevé de ses horaires précisant, notamment, les jours et semaines au cours desquels elle aurait été amenée à accomplir des heures supplémentaires, ce qui ne met pas l’employeur en mesure de répondre utilement à la réclamation en fournissant ses propres éléments.
Faute d’élément suffisamment précis pouvant faire présumer la réalité d’heures supplémentaires accomplies et non payées, le rejet des réclamations à ce titre sera confirmé.
II) Sur le harcèlement moral
Selon l’article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Lorsque survient un litige relatif à l’application des article L 1152-1 à L 1152-3 et L 1153-1 à L 1153-4 du code du travail, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Dans la partie discussion de ses dernières conclusions d’appel, Mme [H] soutient (page 21) avoir été victime de harcèlement moral, ayant détérioré son état de santé, imputable à son employeur, qu’elle tient pour démontré par « les pièces versées aux débats » mais sans préciser lesquelles, parmi les 153 qu’elle produit, ni explicitement indiquer les éléments de faits démontrés par lesdites pièces pouvant en faire supposer l’existence.
Dans la partie « exposé des faits » de ses écritures (page 7), la salariée évoque une surcharge de travail et des réflexions désobligeantes ou humiliantes de M. [B], son supérieur hiérarchique, notamment le 14 décembre 2018 et produit six attestations de salariés ou tiers (Mmes et M. [N], [A], [G], [W] et [O]) ainsi que de nombreux documents médicaux relatifs à une dégradation de sa santé, notamment psychologique, à partir du mois de décembre 2018.
Mais l”examen des documents produits ne permet pas de retenir la réalité d’attitudes ou réflexions désobligeantes imputables aux supérieurs hiérarchiques de Mme [H], notamment de M. [B], pouvant être tenues pour un fait harcelant, que ne rapportent pas de façon convaincante les attestations susvisées.
Si celles-ci évoquent un malaise de Mme [H] sur son lieu de travail le 14 décembre 2018, elles ne permettent cependant pas de retenir que la cause en serait des propos ou une attitude inconvenante ou harcelante de M. [B] : la circonstance que dernier ait pu dire dit à la salariée qui buvait un café et mangeait un croissant pendant ses heures de travail qu’il convenait de déjeuner au domicile et non dans les locaux professionnels, ne traduisant pas, aux yeux de la cour, un usage abusif de son autorité hiérarchique.
Aucun des messages ou correspondances produits, adressés à Mme [H], ne contient par ailleurs des propos pouvant être interprétés comme abusifs et enfin les documents médicaux dont se prévaut la salariée ne comportent aucune constatation directe sur sa situation professionnelle dont pourrait être déduite l’existence d’une situation de harcèlement moral.
En l’état de ces éléments, pris dans leur ensemble, aucun fait pouvant faire présumer un tel harcèlement ne sera retenu.
Le rejet des demandes de Mme [H] relatives au harcèlement et à la nullité de son licenciement sera confirmé.
III ) Sur les motifs du licenciement
Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Il incombe à 1’employeur d’établir la réalité des griefs qu’il formule.
La lettre de licenciement, sus-reproduite et qui fixe les termes du litige, reproche à
Mme [H] les comportements fautifs suivants ci-après analysés :
1) un comportement déplacé non-professionnel
L’employeur évoque une dégradation du comportement de la salariée depuis la mi-novembre 2018 et une baisse d’implication, caractérisées par des remarques et commentaires sur les clients ou des échanges répétés sur des sujets non-professionnels.
Il produit deux courriels de clients (Mme [V] et M. [L] – pièces 18 et 19) évoquant des erreurs commises et d’une façon générale la mauvaise qualité de son travail, l’attestation du salarié [E] [C] (pièce 12) indiquant qu’il a pu « (‘) constater que Madame [K] passait beaucoup de temps à échanger avec ses collègues sur des sujets non professionnels qui pouvaient aller jusqu’à perturber l’ambiance de travail. Notamment au début du mois de décembre 2018 nous avons longuement profité du drame que représentait pour elle la perte de 300 euros sur son plan épargne entreprise » ainsi qu’une autre attestation figurant dans les productions de Mme [H] rapportant qu’elle aurait dit à une collègue en riant, près de la photocopieuse, « heureusement que tu es noire sinon ta phrase aurait été mal interprétée » (pièce 49).
Mais ces pièces objectivent insuffisamment les griefs reprochés en raison de leur imprécision (attestation de vM. [C]) ou ne présentent pas de garanties d’objectivité ou d’impartialité suffisantes, s’agissant notamment des courriels de clients, celles-ci seront écartées.
En outre l’appelante se prévaut d’attestations de salariés de l’entreprise non dépourvues de crédibilité démentant toute perturbation dont elle serait à l’origine (Mmes et MM. [D], [F], [A], [X] et [I] ‘ pièces 33, 34, 49, 51 et 100).
En l’état de l’ensemble de ces éléments, le grief sera écarté.
2) une mise en avant de préoccupations personnelles au détriment de son travail
Ce comportement fautif n’est étayé par aucun document probant justificatif ou attestation convaincante.
3) Une implication à géométrie variable quant à la réalisation de certains travaux
L’examen des documents produits par l’employeur qui n’évoquent pas les tâches confiées à Mme [H] et ne permettent pas d’en avoir un aperçu exhaustif, ce qui n’autorise aucune vérification de l’insuffisante implication invoquée. Ce grief ne sera pas non plus retenu.
4) un manquement grave au respect de sa hiérarchie et une attitude irrespectueuse et inqualifiable envers sa hiérarchie
Pour illustrer ce comportement fautif la société Macofi évoque dans ses conclusions d’appel :
– le refus de Mme [H], sur un ton agressif et irrespectueux, d’ajouter une nouvelle adresse mail dans le photocopieur le 3 décembre 2018,
– son refus, le 14 décembre 2018, du fait qu’elle prenait un petit déjeuner, d’établir des factures attendues de longue date par un client puis son attitude agressive et disproportionnée envers M. [B] lui ayant alors dit que le petit déjeuner devait se prendre à la maison et non pas dans l’entreprise.
L’employeur se prévaut de l’attestation du salarié [E] [C] (sa pièce 12) ainsi rédigée :
« Le 14 décembre 2018 j’ai été témoin des faits suivants Mme [H] est arrivée autour de 9 h 00 heures. Un peu avant 9h10 M. [B] lui a demandé de faire un travail pour un client de l’entreprise qui était en rendez-vous car ce jour-là dans les locaux du cabinet Macofi à l’étage du dessus. Mme [H] qui s’était préparée un café, l’avait posé sur un plateau avec une viennoiserie et la mangeait ,lui a répondu je prends mon petit-déjeuner et je m’en occupe.
M. [B] lui a répondu que le petit déjeuner se prend à la maison déclenchant ainsi une réaction extrêmement violente de sa part, Mme [H] après avoir vidé son café aux toilettes en hurlant à balancer le plateau sur lequel était encore sa viennoiserie tout en criant je vais faire vos factures. Elle est ensuite rentrée dans le bureau de M. [B] à continuer à lui hurler dessus en lui tenant des propos irrespectueux violents et agressifs. Elle lui reprochait de lui avoir demandé de faire son travail et qu’elle trouvait scandaleux qu’on lui demande de ne pas prendre son petit déjeuner au bureau. M. [B] a essayé de calmer Mme [H] et elle à l’infini par retourner à son poste. Elle a fait une crise qui s’est calmée par la venue des pompiers. Elle est ensuite rentrée chez elle ».
Mme [H] tient cette attestation pour mensongère mais celle-ci sera sera retenue dès lors que la plainte pénale pour faux relativement à cette attestation dont elle a pris l’initiative a été classée et que la réalité de l’incident, à la suite duquel elle a été placée en arrêt de travail et dont la nature professionnelle n’a pas été reconnue, n’apparaît pas sérieusement discutable et est par ailleurs explicitement évoqué par les attestations des salariées [A], [G] et [N] dont elle se prévaut.
Ces dernières évoquent le ton agressif et virulent de M. [B] avec lequel il se serait adressé à Mme [H] pour lui demander de retourner travailler mais il s’agit d’appréciations qui ne sont objectivées par aucun propos précisément rapporté.
Il convient également d’observer que la description des faits par M. [C] n’est aucunement en contradiction avec les attestations des autres salariés qui les invoque
(M. [W], M. [Z], Mme [N], M. [O] ‘ pièces 58, 73,74,75).
Si le premier reproche tenant au refus sur un ton agressif et irrespectueux d’ajouter une nouvelle adresse mail dans le photocopieur le 3 décembre 2018 n’est démontré par aucun élément probant, en revanche, l’attitude agressive, irrespectueuse et démesurée de Mme [H] le 14 décembre 2018 envers son supérieur hiérarchique que la cour tient pour suffisamment établie (cf paragraphe supra), caractérise une faute disciplinaire compromettant la poursuite du contrat de travail et les relations professionnelles dans l’entreprise, eu égard notamment à sa petite taille et qui justifiait la rupture du contrat de travail mais sans pour autant faire obstacle à l’exécution d’un préavis.
Le jugement prud’homal ayant dit que le licenciement reposait sur un motif disciplinaire justifié et accordé à Mme [H] des indemnités de préavis et de licenciement dont les montants ne sont pas discutés en cause d’appel, sera ainsi confirmé.
V) Sur la demande en dommages et intérêts pour violation des droits à la retraite collective
A l’appui de sa demande en réparation, Mme [H] reproche à l’employeur de ne jamais l’avoir informée de la mise en place d’un plan épargne pour la retraite collective (PERCO) le 3 décembre 2012 et dont elle n’a appris incidemment l’existence qu’à l’occasion d’un courriel de la DIRECCTE le 17 janvier 2019, ce défaut d’information ne lui ayant pas permis d’y souscrire.
Mais l’employeur verse aux débats un formulaire intitulé « versements volontaires au PERCO » (pièce 24 de l’employeur) signé par Mme [H] le 25 septembre 2014 et mentionnant qu’elle ne souhaite pas effectuer de versement volontaire, document établissant suffisamment qu’elle avait bien connaissance de l’existence du plan de retraite dont elle n’a pas souhaité bénéficier.
Il ne saurait donc être retenu une perte de chance, imputable à l’employeur, de bénéficier dudit plan, ce qui conduit à confirmer le rejet de la demande en dommages-intérêts à ce titre.
VII) Sur la demande en dommages et intérêts au titre du plan épargne entreprise (PEE)
Mme [H] sollicite le paiement d’une indemnité de 1 000 euros du fait qu’elle a souscrit au plan d’épargne entreprise qui a été mis en place le 3 décembre 2012 sans jamais avoir reçu la moindre information lui permettant de choisir des supports d’investissement qui étaient décidés par le dirigeant de l’entreprise.
Il conviendra cependant de retenir, même à admettre une insuffisante information communiquée à la salariée quant au fonctionnement du plan épargne entreprise qu’elle ne justifie d’aucun préjudice matériellement réparable en lien avec le manque d’ information invoquée.
Le rejet de cette réclamation sera également confirmé.
VIII) Sur la couverture de mutuelle santé prévoyance
L’appelante sollicite le paiement de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de portabilité pendant un an après la rupture du contrat de travail de la couverture mutuelle santé et prévoyance. Elle fait valoir que la rupture de son contrat de travail n’a pas été portée à la connaissance du gestionnaire de la mutuelle santé prévoyance ce qui lui a fait perdre la possibilité d’obtenir le remboursement de frais médicaux.
Il sera néamoins relevé que les documents produits n’établissent aucunement que Mme [H] ait été privée de prestations de la mutuelle ou du remboursement de soins médicaux au délà d’un retard de prise en charge mentionné par les correspondances produites (pièces 95,96 et 104 99 et 111).
Le rejet de la demande en dommages-intérêts, faute de tout préjudice démontré, sera ainsi confirmé.
IX) Sur les autres demandes
La décision prud’homale sera confirmée en ce qu’elle a accordé à Mme [H] 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité n’exige pas cependant de faire à nouveau application de ces dispositions en cause d’appel.
La société Macofi sera tenue des dépens de première instance. En revanche, les dépens de l’instance d’appel seront supportés par Mme [H].
PAR CES MOTIFS
La cour :
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes en toutes ses dispositions et y ajoutant:
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Rappelle que les indemnités de préavis et de licenciement porteront intérêts au taux légal à compter du 13 février 2019, date de réception par l’employeur de sa convocation devant le conseil de prud’hommes et que les intérêts échus pourront être capitalisés conformément à l’article 1343-2 du code civil ;
Rejette toute autre demande ;
Dit que la société Macofi sera tenue des dépens de première instance mais qu’en revanche les dépens de l’instance d’appel seront supportés par Mme [H].
LA GREFFIERE LE PRESIDENT