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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 9
ARRET DU 06 AVRIL 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/03666 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFJMH
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Janvier 2022 – Tribunal de Commerce de Melun – RG n° 2021L0021/2018J00254
APPELANT
Monsieur [U] [X]
né le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 6] (République du Congo)
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Aimé MOUBERI, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque: 128
INTIMEE
S.E.L.A.R.L. ARCHIBALD
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 4]
Défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 09 février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Sophie MOLLAT, Présidente
Madame Isabelle ROHART, Conseillère
Madame Déborah CORICON, Conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats
MINISTÈRE PUBLIC : représenté lors des débats par Madame Anne-France SARZIER, avocat général, qui a fait connaître son avis.
ARRET :
– par défaut,
– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame Saoussen HAKIRI, Greffière.
**********
M. [U] [X] était le dirigeant de droit de la SARL Caroll Clean Services depuis sa création en novembre 2014, elle exerçait une activité de nettoyage industriel et n’avait aucun salarié. M. [S] est devenu le dirigeant de droit de la société le 13 janvier 2018 selon une assemblée générale extraordinaire dont les formalités n’ont jamais été effectuées au registre du commerce et des sociétés.
Par jugement du 25 juin 2018, sur requête du ministère public, le tribunal de commerce de Melun a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société Caroll Clean Services. Ce même jugement a désigné la SELARL Archibald, prise en la personne de Me [F], en qualité de liquidateur judiciaire.
La date de cessation des paiements a été fixée au 26 décembre 2016, soit 18 mois avant l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.
L’insuffisance d’actif s’élève à 31.757 euros.
Le 21 janvier 2021 le liquidateur judiciaire a assigné M. [X] et M. [S], demandant leur condamnation à une interdiction de gérer d’une durée respective de 2 ans et 1 an.
Par jugement du 12 janvier 2022, le tribunal de commerce de Melun a prononcé à l’encontre de M. [S] et de M. [X] une interdiction de gérer pour une durée de 1 an et a condamné M. [X] aux dépens.
Par déclaration du 11 février 2022, M. [X] a interjeté appel de cette décision.
* * *
Dans ses conclusions d’appelant signifiées par RPVA le 1er avril 2022, M. [X] demande à la cour de :
Déclarer recevable M. [X] en son appel;
Infirmer le jugement déféré en ce qu’il a:
Prononcé une peine d’un an d’interdiction de gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, tout exploitation agricole et tout personne morale, à l’encontre de M. [X] Bertil.
Statuant à nouveau et en tout état de cause,
Mettre hors de cause M. [X] Bertil.
* * *
Bien que régulièrement assignée, la SELARL Archibal, prise en la personne de Me [F], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Caroll Clean Services, n’a pas constitué avocat.
Par avis notifié par RPVA le 12 avril 2022, le ministère public estime que les griefs suivants sont caractérisés : le manque de coopération volontaire avec les organes de procédure, la tenue d’une comptabilité incomplète ou irrégulière, et l’absence de déclaration de l’état de cessation des paiements dans le délai légal.
Le ministère public sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a prononcé une interdiction de gérer à l’encontre de M. [X] pour une durée de 1 an.
* * *
SUR CE,
I Sur la qualité de dirigeant de droit de M. [X]
M. [X] demande l’infirmation du jugement au motif qu’il ignorait l’existence de la société et ne l’a jamais gérée. Il fait valoir n’est qu’il n’a été qu’un gérant de paille, explique avoir découvert l’existence de la société en raison de l’appel de la banque Société générale l’informant du rejet d’un chèque. Il précise que M. [S] détenait seul les codes d’accès du compte bancaire de la société.
Il fait valoir que son frère aîné, M. [S], est le seul gérant de la société depuis sa création, que c’est M. [S] qui s’est présenté au rendez-vous dans le cadre de la procédure d’enquête le 14 juin 2018, invoquant sa qualité de gérant, dont il disposerait depuis l’assemblée générale extraordinaire du 13 janvier 2018, dont il a communiqué le procès verbal.
Il indique n’avoir jamais géré la société et ne pouvait donc pas faire disparaître des documents comptables, tenir une comptabilité, remettre au mandataire judiciaire des documents ou demander l’ouverture d’une procédure collective.
Enfin il fait état d’une usurpation d’identité.
M. [X] considère que n’ayant pas créé cette société, il ne peut être tenu des griefs reprochés et du passif de la société.
Le ministère public souligne que M. [X] était le gérant de droit de la société depuis sa création. Il observe que si l’usurpation d’identité était réelle, M. [X] aurait déposé plainte et pris attache avec le greffe du tribunal afin que l’extrait de Kbis de la société soit modifié.
Il demande à la cour de retenir les griefs d’absence de coopération du dirigeant avec les organes de la procédure, de tenue d’une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière, et d’omission volontaire de déclaration de l’état de cessation des paiements.
Par ailleurs, il soutient que la gérance de paille dont se prévaut M. [X] n’est pas de nature à réduire les sanctions qui découlent d’une liquidation judiciaire mais constitue plutôt une circonstance aggravante.
La cour relève que M. [X] était gérant de droit de la société débitrice, qu’il ne démontre pas que son identité ait été usurpée, de sorte qu’il est susceptible d’être poursuivi au titre des sanctions personnelles, étant précisé, ainsi que l’a relevé le ministère public, que l’existence d’un gérant de fait, véritable maître de l’affaire, dont se prévaut M. [X], n’est pas de nature à réduire les sanctions, mais constitue plutôt une circonstance aggravante.
Sur les griefs à l’encontre de M. [X]
1) Sur le grief d’absence de coopération du dirigeant avec les organes de la procédure
Selon l’article, L. 653-5 5° du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 contre laquelle a été relevé le fait d’avoir, en s’abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement.
Le ministère public considère que ce grief est caractérisé, il rappelle que ni M. [X] ni M. [S] n’ont remis la liste des créanciers et celle des salariés au liquidateur judiciaire malgré ses demandes.
La cour relève que M.[X] , dirigeant de droit à l’époque de l’ouverture de la procédure collective n’a pascollaboré avec le liquidateur judiciaire et, le fait que selon son rapport, M. [S] ait pour sa part collaboré de façon très modérée, ne lui permet pas de s’exonérer de cette obligation, alors même qu’il avait été convoqué par le liquidateur judiciaire. Il convient donc de retenir ce grief.
2) Sur le grief de la tenue d’une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière
Le ministère public fait valoir que ni M. [X] ni M. [S] n’ont produit les documents comptables nécessaires prévus par le code de commerce et ajoute qu’aucun compte annuel n’a fait l’objet d’un dépôt au greffe. Il précise qu’aucune comptabilité n’a été produite dans le cadre de la présente procédure.
[X] ne répond pas sur ce grief.
Selon l’article L. 653-5 6° du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 contre laquelle a été relevé le fait d’avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.
En l’espèce, il résulte du rapport du liquidateur judiciaire que la comptabilité est inexistante, que les comptes annuels n’ont jamais été déposés au greffe et que la TVA n’est plus régularisée depuis janvier 2016.
En sa qualité de dirigeant de droit, M. [X] avait l’obligation de vérifier que la comptabilité était régulièrement tenue, ce qu’il n’a pas fait.
Il s’ensuit que c’est à juste titre que le tribunal a retenu ce grief.
3) Sur le grief de l’omission volontaire de la déclaration de l’état de cessation des paiements
Selon l’article L. 653-8 3° du code de commerce, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l’interdiction de gérer à l’encontre de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation.
Le ministère public fait valoir que M. [X] n’a pas déclaré l’état de cessation des paiements dans les 45 jours prévus, soit le 9 février 2017 et que la procédure collective a été ouverte sur requête du 18 avril 2018 du parquet. Il considère que l’appelant ne pouvait ignorer l’état de cessation des paiements de la société au vu : des cotisations URSSAF non payées du 4e trimestre 2015 et du deuxième trimestre 2016 pour un montant de 7.432,65 euros dont 1.876 euros de cotisations sociales; d’une dettes de 1365,65 euros auprès du service des impôts des entreprises, représentant la cotisation foncière des entreprises des exercices 2015, 2016 et 2017; de l’état des inscriptions et privilèges qui révèle que l’URSSAF a inscrit deux créances le 20 octobre 2016 et le 13 avril 2017 pour un montant respectif de 7.132 euros et de 11.174 euros; de l’absence de déclaration de TVA depuis le 1er janvier 2016, soit plus de deux années avant la date de cessation des paiements et d’un découvert bancaire de plus de 26.000 euros au jour de l’ouverture de la procédure collective.
La cour relève que M.[X] , dirigeant de droit à l’époque de l’ouverture de la procédure collective avait l’obligation de déclarer l’état de cessation des paiements, et il avait nécessairement conscience de cet état de cessation des paiements, puisque les premiers incidents de paiements sont très antérieurs au changement de gérance du 13 janvier 2018, non retranscrit au registre du commerce alors la date de cessation des paiements a été fixée au 9 février 2017.
Il s’ensuit que ce grief sera retenu.
III Sur la sanction
Compte tenu du grief retenu d’absence de tenue d’une comptabilité, il apparaît proportionné de condamner M. [X] à une interdiction de gérer d’une durée d’un an.
Le jugement sera donc confirmé, par substitution de motifs.
IV Sur les dépens
[X] est condamné aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement,
Y ajoutant,
Condamne M. [X] aux dépens d’appel.
Le greffier La présidente