LC/IC
[F] [H]
C/
[U] [Z]
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L’IMMEUBLE [Adresse 4]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
1ère chambre civile
ARRÊT DU 02 MAI 2023
N° RG 21/00980 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FYAC
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : jugement du 27 avril 2021,
rendu par le tribunal judiciaire de Dijon – RG : 18/01386
APPELANTE :
Madame [F] [H]
née le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 2] (21)
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Alain RIGAUDIERE, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 102
INTIMÉS :
Madame [U] [Z]
née le [Date naissance 3] 1988 à [Localité 2] (21)
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Frédéric TELENGA, membre de la SELARL BJT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 11
LE SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE [Adresse 4], représenté par Me [M] [S], administrateur provisoire de la copropriété, désignée par ordonnance du 16 décembre 2022 rendue par le tribunal judiciaire de Dijon
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Alexis JANIER, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 131
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 28 février 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre,
[U] BAILLY, Conseiller,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller, qui a fait le rapport sur désignation du Président,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT, Greffier
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 02 Mai 2023,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [F] [H] est propriétaire d’un appartement situé au 1er étage d’un immeuble soumis au régime de la copropriété, [Adresse 4], depuis août 2006.
Mme [U] [Z] est propriétaire de l’appartement du rez-de-chaussée depuis 2010. Elle a réalisé avec l’aide de son père, d’importants travaux de rénovation comprenant notamment la suppression de toutes les cloisons en briques plâtrières puis la modification du cloisonnement en 2011.
Au début de l’année 2016, Mme [H] a fait le constat de l’apparition de fissures dans son appartement.
Les désordres ont évolué et selon rapport daté du 3 octobre 2016, la société Les Charpentiers de Bourgogne a relevé de nombreux désordres sur les structures horizontales et verticales dans l’appartement.
Par acte du 8 novembre 2016, Mme [H] a sollicité en référé l’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire.
Mme [C] a été désignée en qualité d’expert judiciaire par ordonnance du 6 décembre 2016 et a déposé son rapport le 18 septembre 2017.
Par acte du 14 mai 2018, Mme [H] a fait assigner Mme [Z] devant le tribunal de grande instance de Dijon à l’effet de voir engager sa responsabilité.
Le syndicat de copropriété de l’immeuble du [Adresse 4] a également été attrait à la procédure.
Consécutivement à l’expiration du mandat confié à l’agence Immolys par l’assemblée générale du 3 septembre 2020 et en l’absence de syndic de copropriété depuis mars 2022, Mme [H] a sollicité par requête la désignation d’un administrateur provisoire.
La SELARL AJRS, en la personne de Maître [M] [S], a été désignée aux fins de représenter le syndicat de copropriété de l’ensemble immobilier du [Adresse 4] par ordonnance de M. le président du tribunal judiciaire de Dijon du 16 décembre 2022.
Par jugement du 27 avril 2021, le tribunal judiciaire de Dijon a :
‘ Sur la prise en charge du coût des travaux de reprise des parties commune
– constaté que Mme [H] [F] a initié la demande du syndicat des copropriétaires en la matière,
– rappelé toutefois que Mme [Z] [U] n’est responsable des désordres qu’à hauteur de 50%, le syndicat des copropriétaires l’étant à hauteur de 50%,
– condamné Mme [U] [Z] à payer au syndicat de copropriété la somme de 14 197,07 euros au titre du coût des travaux de reprise des parties communes,
‘ Sur les demandes propres à Mme [H] [F], condamné Mme [U] [Z] à payer à Mme [F] [H] :
– la somme de 18 112,83 euros TTC au titre du coût des travaux de second ‘uvre outre indexation selon l’indice BT 01 (valeur septembre 2019),
– et celle de 4 664 euros au titre des frais de relogement, déménagement, réaménagement,
‘ Sur la demande d’appel en garantie de Mme [Z] au sujet des travaux, condamné le syndicat des copropriétaires, pris en la personne de son syndic, à prendre en charge 50 % de la somme de 18 112,83 euros TTC, outre indexation précitée, le condamnant au besoin à payer ladite fraction à Mme [Z],
‘ Sur les travaux à exécuter par le syndicat des copropriétaires, condamné le syndicat de copropriétaires, pris en la personne de son syndic, à exécuter les travaux de reprise des parties communes, tels que préconisés par l’expert dans son rapport du 18 septembre 2017,
‘ Ordonné l’exécution provisoire,
‘ Condamné Mme [Z] [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], pris en la personne de son syndic, aux dépens, lesquels comprendront les frais et honoraires d’expertise judiciaire, à hauteur de 50% pour Mme [Z], 50% pour le syndicat des copropriétaires, avec distraction au profit de Me Rigaudière,
‘ Condamné Mme [Z] à payer à Mme [H] la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘Rappelé que le copropriétaire, qui, à l’issue d’une instance judiciaire l’opposant au syndicat, voit sa prétention fondée par le juge, est dispensé, même en l’absence de demande de sa part, de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires,
‘ Débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
Par déclaration au greffe du 22 juillet 2021, Mme [F] [H] a relevé appel de ce jugement en ce qu’il a :
– réparti la responsabilité des désordres entre le syndicat des copropriétaires et Mme [U] [Z] à proportion de 50 % chacun,
– rejeté sa demande visant à voir condamner Mme [Z] à prendre en charge l’intégralité du coût des travaux de reprise des parties communes,
– rejeté sa demande d’indemnisation à hauteur de 4.345,08 euros au titre des travaux,
– rejeté sa demande d’indemnisation au titre de la perte de valeur de son bien immobilier
– limité le coût des travaux de reprise des embellissements à la somme de 18 112,83 euros outre indexation.
Au terme de ses conclusions d’appelante n°4 notifiées par voie électronique le 7 février 2023, Mme [F] [H] demande à la cour, au visa des articles 9 et 15 de la loi du 10 juillet 1965, et1240 du code civil, de :
– La déclarer recevable et bien fondée à son appel,
En conséquence,
– Infirmer le jugement rendu le 27 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Dijon en ce qu’il a :
* Retenu un partage de responsabilité des désordres entre le syndicat de copropriété de l’immeuble du [Adresse 4] et Madame [U] [Z] à proportion de 50 % chacun,
* Rejeté sa demande visant à voir condamner Mme [U] [Z] à prendre en charge l’intégralité du coût des travaux de reprise des parties communes,
* Rejeté sa demande d’indemnisation à hauteur de 4 345,08 euros au titre des travaux indispensables omis par l’expert judiciaire,
* l’a déboutée de sa demande d’indemnisation au titre de la perte de valeur de son bien immobilier consécutivement aux travaux des parties communes à hauteur de 28 000 euros,
* Limité le coût des travaux de reprise des embellissements à la somme de 18 112,83 euros outre indexation selon indice BT 01 ‘ valeur septembre 2019,
* Retenu une somme de 4 664 euros au titre des frais de relogement, déménagement et stockage des meubles de Mme [H],
Statuant à nouveau et y ajoutant,
– Déclarer Mme [U] [Z] entièrement responsable des désordres affectant son appartement,
– Condamner Mme [U] [Z] à prendre en charge l’intégralité du coût des travaux de reprise des parties communes préconisés par Mme [C] correspondant à la somme globale de 34.057,04 euros TTC selon devis Les Charpentiers de Bourgogne du 1er février 2022, outre indexation selon indice BT 01 (valeur février 2022), et du coût des travaux complémentaires sur renforcements selon devis Les Charpentiers de Bourgogne du 2 février 2022 correspondant à la somme de 5 163,13 TTC, outre indexation selon indice BT 01 (valeur février 2022),
– Dire que Mme [U] [Z] conservera à sa charge le coût de reprise de ses parties privatives consécutivement aux travaux de renforcement du plancher haut du rez-de-chaussée, dont le montant a été évalué à 2 337,77 euros TTC,
– Condamner Mme [U] [Z] à lui payer :
– la somme de 20 950,72 euros TTC au titre des travaux de remise en état de son appartement selon devis [V] du 16 février 2022, outre indexation selon l’indice BT 01 (valeur février 2022),
– la somme de 47 925 euros correspondant à la perte de valeur de son appartement consécutivement à la mise en place de poutrelles métalliques de renforcement du plancher haut,
– la somme de 5 900,40 euros au titre du déménagement, emménagement, relogement et stockage des meubles,
– Confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
– Condamner Mme [U] [Z] à lui payer la somme de 4 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner Mme [U] [Z] aux entiers dépens lesquels comprendront les frais et honoraires d’expertise judiciaire et dont le recouvrement s’effectuera comme prescrit par les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Au terme de ses conclusions d’intimé et d’appel incident notifiées par voie électronique le 4 février 2023, Mme [U] [Z] demande à la cour, au visa des dispositions des articles 14 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 et 1240 du code civil, de :
A titre principal :
‘ Réformer le jugement du tribunal judiciaire de Dijon du 21 avril 2021 en ce qu’il :
‘ a rappelé qu’elle n’est responsable des désordres qu’à hauteur de 50 %, le syndicat des copropriétaires l’étant à hauteur de 50 % ;
‘ l’a en conséquence condamnée à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], représenté par son syndic, la somme de 14 197,07 euros TTC ;
‘ l’a condamnée à payer à Mme [H] [F] les sommes de :
– 18 122,83 euros TTC au titre de ses travaux de second ‘uvre, outre indexation selon, l’indice BT 01 (valeur septembre 2019) ;
– 4 664 euros TTC au titre de ses frais de relogement, déménagement, réemménagement.
‘ l’a condamnée avec le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], pris en la personne de son syndic, aux dépens, lesquels comprendront les frais et honoraires d’expertise judiciaire, à hauteur de 50 % pour Mme [Z], 50 % pour le syndicat des copropriétaires, avec distraction au profit de Me Rigaudière;
‘ l’a condamnée à payer à Mme [H] [F] la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau,
‘ Dire et juger que l’immeuble du [Adresse 4]) est atteint d’un vice de construction préexistant,
‘ Dire et juger que ce vice est à l’origine des différents préjudices subis par les copropriétaires du bien immobilier sis [Adresse 4], dont ceux subis par Mme [H],
‘ Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4]) à réaliser, à ses frais, l’ensemble des travaux préconisés par l’expert,
‘ Débouter Mme [H] de l’ensemble de ses demandes formées à son encontre, et l’inviter à mieux se pourvoir notamment vis-à-vis du syndicat des copropriétaires,
A titre subsidiaire :
Si par extraordinaire, la cour venait à rejeter l’argumentation soutenue à titre principal,
‘ Rejeter l’intégralité des demandes de réformation du jugement du 27 avril 2021 formulées par Mme [H] en cause d’appel ;
‘ Rejeter l’intégralité des demandes de réformation du jugement du 27 avril 2021 formulées par le syndicat des copropriétaires au titre de son appel incident ;
‘ Confirmer en conséquence le jugement du 21 avril 2021 du tribunal judiciaire de Dijon en ce qu’il :
‘ a retenu qu’elle n’est responsable des désordres qu’à hauteur de 50 % ;
‘ L’a condamnée à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], représenté par son syndic, uniquement la somme de 14 197,07 euros TTC ;
‘ a condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], représenté par son syndic, à prendre en charge 50 % de la somme de 18 112,83 euros TTC, outre l’indexation précitée payée par Mme [Z] à Mme [H],
‘ a condamné ce dernier, au besoin, à payer ladite fraction à Mme [Z] [U],
‘ a retenu le chiffrage réalisé par l’expert judiciaire, qui a évalué le coût des travaux de reprise des parties communes à la somme de 28 394,14 euros,
‘ a rejeté la demande de Mme [H] visant à la voir prendre en charge la somme complémentaire de 4 345,08 euros en sus du coût de reprise des parties communes retenu par l’expert judiciaire,
‘ a rejeté la demande de Mme [H] visant à lui voir verser la somme de 28 000 euros au titre d’un prétendu préjudice esthétique,
‘ Réformer le jugement du 27 avril 2021 du tribunal judiciaire de Dijon uniquement en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme [H] [F] la somme de 4 664 euros TTC au titre de ses frais de relogement, déménagement, réemménagement », et en ce qu’il l’a condamnée à verser 3 500 euros à Mme [H] sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile.
‘ Et statuant à nouveau,
‘ Soit la condamner à payer à Mme [H] 50 % de la somme de 4 664 euros au titre de ses frais de relogement, déménagement, réemménagement, soit 2 332 euros, et 50 % de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, soit 1 750 euros, en la déboutant pour le surplus ;
‘ Soit condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], représenté par son syndic, à prendre en charge 50 % des sommes de 4 664 euros et de 3 500 euros, et, au besoin, à payer ladite fraction à Mme [Z] [U].
A titre infiniment subsidiaire,
Si par extraordinaire la cour venait à faire droit aux demandes de réformation de Mme [H],
‘ Condamner le syndicat des copropriétaires à la relever et garantir de l’ensemble des condamnations qui seraient prononcées à son encontre.
En tout état de cause,
‘ Condamner le syndicat des copropriétaires à la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;
‘ Condamner tout succombant à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Au terme de ses conclusions d’intimé et d’appel incident notifiées par voie électronique le 26 janvier 2023, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4], représenté par Me [S], administrateur provisoire de la copropriété, demande à la cour, au visa des articles 1240 du code civil, 15 de la loi du 10 juillet 1965, de :
– Infirmer le jugement rendu le 27 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Dijon,
– Dire et juger Mme [U] [Z] entièrement responsable du préjudice subi par Mme [F] [H], et par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4],
– Condamner Mme [U] [Z] à prendre en charge l’intégralité du coût des travaux de reprise des parties communes préconisés par Mme l’expert, évalué à la somme de 5 163,13 euros + 34 057,03 euros = 39 220,16 euros.
– Débouter Mme [U] [Z] de sa demande de partage de responsabilité,
– Débouter Mme [H] de sa demande tendant à l’obliger à réaliser sous astreinte les travaux de renforcement des planchers hauts du rez-de-chaussée et du premier étage.
– Condamner Mme [Z] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner Mme [Z] aux entiers dépens incluant notamment les frais d’expertise.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour un exposé complet de leurs moyens.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 09 février 2023.
Sur ce la cour,
I/ Sur l’origine des désordres et les responsabilités encourues
Pour obtenir la condamnation de Mme [Z] à réparer seule les désordres affectant les parties communes et privatives survenus en suite des travaux accomplis chez elle, Mme [H], à l’instar du syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4], soutient que si l’intéressée n’avait pas procédé à la destruction des cloisons de son appartement, aucun désordre ne serait survenu sur le plancher haut du rez de chaussée de sorte que son action est la cause exclusive des dommages aux parties communes et privatives, ce que conteste Mme [Z].
En application de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, chaque copropriétaire use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne pas porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble, ce que rappelle le règlement de copropriété de l’immeuble dont s’agit en son article 4.
Comme l’indique l’appelante qui recherche la responsabilité extra contractuelle de Mme [Z], le copropriétaire engage sa responsabilité lorsqu’il cause un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage.
De son côté, en vertu de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.
Il résulte du rapport d’expertise judiciaire déposé en septembre 2017 que Mme [H] a subi les désordres suivants dans son appartement :
– des fissures de cisaillement sur les murs du salon et de la salle à manger,
– des espaces entre les plinthes et le plancher dans le couloir, l’entrée, la cuisine, la salle de bains et le salon,
– des fissures verticales dans la salle à manger,
– un décollement des joints de faïence entre le mur et le plancher à l’entrée de la salle d’eau.
Tel que l’ont relevé les premiers juges, il a été mis en évidence que les premières fissures sont apparues dès 2011, les grosses fissures de cisaillement se sont formées en fin d’année 2015 et début 2016, tandis que de nouvelles fissures étaient en cours d’apparition au moment de l’expertise et que l’affaissement du plancher est très marqué, ce phénomène ayant rapidement évolué au cours de l’année 2016 et poursuivant son évolution.
Il n’est pas contesté que l’apparition des désordres fait suite aux travaux de démolition des cloisons du rez-de-chaussée, Mme [Z] considérant toutefois que la cause exclusive de ces derniers provient d’un vice de construction.
L’expert a expliqué que ces désordres correspondent à un affaissement général du plancher bois du premier étage lié à un sous-dimensionnement des solives et à une section inappropriée des entraits de fermes situés dans le plancher du deuxième étage.
A l’issue de ses constatations et des sondages des planchers, il a pu confirmer que dès la construction du bâtiment, la conception de la charpente, en particulier la dimension trop faible des entraits des fermes situés au deuxième étage a conduit à la mise en charge des cloisons du 1er étage puis que la mise en compression de ces cloisons s’est transmise à celles du rez-de-chaussée.
Il a précisé qu’en l’absence de déstabilisation du plancher haut du RDC, eu égard à la suppression des cloisons de briques supposées non porteuses mais servant toutefois de raidisseur du plancher haut du RDC, la stabilité des éléments structurels n’aurait pas été mise en cause tout en ajoutant que sans la faiblesse des bois de charpente du plancher du second étage, les descentes de charges sur les cloisons de l’appartement du premier étage ne se seraient pas produites, ce phénomène ayant amplifié la fissuration des cloisons et l’affaissement du plancher du premier étage lorsque Mme [Z] a supprimé sans étude préalable et sans précautions l’ensemble des cloisons de son appartement.
Il en a logiquement conclu que les désordres provenaient d’un ensemble d’éléments créant un déséquilibre général et successif de toute la structure horizontale de l’immeuble, estimant que la suppression de toutes les cloisons en briques du RDC était principalement à l’origine des désordres mais que la faiblesse de départ de la conception de la charpente du dernier étage intervenait également pour partie dans les causes des désordres, estimant finalement à parts égales la responsabilité de Mme [Z] et du syndicat des copropriétaires.
Il s’évince de ces éléments parfaitement analysés par les premiers juges, que c’est bien l’action conjuguée de Mme [Z] en ce qu’elle a supprimé les cloisons de son appartement et celle du vice de construction d’origine de l’immeuble, qui ont causé les dommages, la suppression des cloisons ayant révélé la faible dimension des entraits de charpente.
Si au fil du temps, tel que le rappelle Mme [H], les cloisons avaient pu devenir porteuses ou à tout le moins servaient de raidisseur du plancher haut du rez-chaussée et que l’immeuble avait acquis un état d’équilibre, cette situation n’a pas eu pour effet de compenser totalement le vice de construction affectant le bâtiment.
Au demeurant, et compte tenu de la date de construction de l’immeuble qui remontait aux années 1930, Mme [Z], qui a reconnu ne pas avoir pris de précaution lors de la démolition des cloisons, a manqué de prudence en s’abstenant de soumettre ses travaux de démolition à un professionnel averti, causant ainsi un trouble aux autres copropriétaires excédant les inconvénients normaux de voisinage.
Le vice de construction, dont doit répondre le syndicat des copropriétaires, conjugué à l’action de Mme [Z] ayant conduit aux désordres litigieux, c’est de manière parfaitement légitime que les premiers juges ont retenu la responsabilité de chacun d’eux dans une proportion justement fixée à hauteur de 50% chacun.
II/ Sur les demandes d’indemnisation
1/ Sur les travaux de remise en état des parties communes
Il convient de relever, à titre liminaire, que le droit de Mme [H] d’initier l’action du syndicat des copropriétaires aux fins de voir réparer les parties communes n’est pas discuté.
L’expert a préconisé le renforcement des planchers haut du rez-de-chaussée et du 1er étage pour un coût global de 28 394,14 euros TTC, selon devis de l’entreprise des Charpentiers de Bourgogne, montant qui n’est pas discuté.
Mme [H] demande l’actualisation de ce montant selon nouveau devis de la société les Charpentiers de Bourgognes en date du 1er février 2022.
Toutefois, Mme [Z] ayant exécuté le jugement déféré en versant les sommes mises à sa charge, cette demande ne saurait prospérer dès lors que Mme [H] pouvait entreprendre les travaux de remise en état.
Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.
Mme [H] souhaite voir ajouter à ce montant le coût de travaux complémentaires tenant au remplacement du châssis d’une fenêtre, la création d’un linteau métallique et la modification d’un placard.
Les premiers juges ont rejeté cette demande faute d’élément d’appréciation au motif qu’elle n’avait pas été soumise à l’expert judiciaire.
Or, par courrier en date du 24 septembre 2019, la société Les Charpentiers de Bourgogne indique que les deux difficultés suivantes n’avaient pas été repérées lors des opérations d’expertise :
– la fenêtre de la cuisine qui est toute hauteur de sorte qu’il n’y a pas de linteau susceptible de recevoir l’appui de la poutre et vu la retombée de la poutre de renforcement, cette fenêtre ne pourrait plus s’ouvrir (‘) il faut remplacer le châssis existant par un (châssis) moins haut et créer un linteau métallique,
– l’autre poutre, dans le séjour, tombe dans une partie du placard mural, lui aussi toute hauteur.
Ces difficultés sont parfaitement corroborées par les photographies des lieux produites aux débats.
Le coût de ces travaux complémentaires a été actualisé selon devis de la même société du 2 février 2022 et s’établit désormais à la somme de 5 163,13 euros TTC.
Il convient donc d’infirmer le jugement déféré et de faire droit à la demande de Mme [H] sur ce point en condamnant Mme [Z] à payer au syndicat des copropriétaires intimé la somme de 2 581,56 euros TTC, outre indexation selon indice BT 01 valeur février 2022.
2/ Sur les travaux de remise en état de l’appartement de Mme [H] et la réparation de ses préjudices
– Sur le coût des travaux de second oeuvre :
L’expert judiciaire a chiffré le coût des travaux de second oeuvre à la somme de 18 112,83 euros.
C’est ce montant qui a été retenu par le tribunal, outre indexation sur l’indice BT 01 valeur septembre 2019.
Mme [H] produit un nouveau devis actualisant le coût des travaux de second oeuvre selon devis de l’entreprise [V] en date du 16 février 2022 à hauteur de 20 950,72 euros qu’elle demande à la cour de retenir outre indexation sur l’indice BT 01 valeur février 2022.
La encore, alors qu’il n’est pas contesté que Mme [Z] a exécuté sa part de condamnation au titre du premier jugement, ce dernier doit être confirmé en ce qu’il a retenu la somme de 18 112,83 euros tel que préconisée par l’expert judiciaire au titre des travaux de second oeuvre mais infirmé, tel que réclamé, en ce qu’il a retenu une indexation sur l’indice BT 01 valeur septembre 2019 alors que le rapport d’expertise judiciaire a été déposé en septembre 2017 de sorte que statuant à nouveau sur ce point, c’est cette dernière valeur qui sera retenue.
Alors que la responsabilité dans la survenance des dommages a été partagée en deux entre le syndicat et Mme [Z], c’est à juste titre que les premiers juges ont condamné le syndicat à prendre en charge 50% de la somme de 18 112,83 euros, mais leur décision doit être infirmée sur l’indexation retenue qui sera fondée sur la valeur de l’indice en septembre 2017.
– Sur le coût du déménagement, relogement et emménagement :
En application des articles 562 et 901 du code de procédure civile, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et qui sont mentionnés dans la déclaration d’appel, cet acte fixant le périmètre de l’appel qui ne peut pas être étendu par le dispositif des conclusions.
Si Mme [H] sollicite au terme de ses dernières écritures une somme majorée de 5 900,40 euros au titre des frais de déménagement, relogement et emménagement, force est de constater qu’elle n’a pas critiqué le jugement sur ce point dans sa déclaration d’appel.
Aussi, cette demande doit être déclarée irrecevable.
– Sur la décote du lot de Mme [H]
Mme [H] soutient que son appartement subira une décôte consécutivement à la mise en place de poutrelles métalliques au niveau du plancher haut du 1er étage tandis que Mme [Z] répond que la preuve d’un préjudice esthétique n’est pas rapportée alors que le poutrelles seront habillées par un caisson en plaques de plâtre.
L’expert judiciaire a estimé la décote de la valeur de l’appartement à 20% en suite des travaux.
Le tribunal a rejeté la demande de Mme [H] au motif que le préjudice esthétique resté très subjectif dès lors que les travaux n’étaient pas réalisés et qu’il était prévu dans le devis de restauration un habillage des poutrelles.
Après avoir missionné M. [P], expert en estimation immobilière, Mme [H] réclame désormais une somme de 47 500 euros de ce chef, l’expert ayant appliqué une décote de 22,50% sur une estimation du bien en décembre 2022 à 213 000 euros.
Ce faisant, s’il est constant que les poutrelles qui seront mises en place au plafond de l’appartement de Mme [H] seront habillées par un caisson, il n’en demeure pas moins qu’elles auront nécessairement un impact visuel et donc inesthétique quand bien même les plafonds sont plus hauts dans les constructions des années 1930, impact engendrant une décote sur la valeur du bien qui sera toutefois compensée partiellement par les travaux d’amélioration de la structure de l’immeuble.
Cette décote doit être justement indemnisée par l’allocation d’une somme de 5 000 euros.
III/ Sur les demandes accessoires
Le jugement déféré est confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles non compris dans les dépens.
Il convient de prévoir que les dépens seront supportés par moitié entre Mme [H] et Mme [Z] à hauteur de cour.
L’équité conduit à ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare irrecevable la demande de Mme [H] tendant à l’augmentation de l’indemnité qui lui a été allouée par le jugement dont appel au titre des frais de déménagement, relogement, emménagement,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a :
– retenu la valeur de septembre 2019 au titre de l’indice BT 01 pour la condamnation de Mme [Z] à payer à Mme [H] la somme de 18 112,83 euros TTC au titre des travaux de second oeuvre, ainsi que pour la condamnation du syndicat,
-débouté Mme [H] de ses demandes d’indemnisation au titre des travaux complémentaires et au titre de la perte de valeur de son bien immobilier en suite des travaux,
Statuant à nouveau sur ces points et ajoutant,
Dit que la condamnation de Mme [U] [Z] à payer à Mme [F] [H] la somme de 18 112,83 euros TTC au titre des travaux de second oeuvre, sera assortie de l’indexation selon l’indice BT 01 (valeur septembre 2017),
Dit qu’il en sera de même pour la condamnation du syndicat à payer à Mme [U] [Z] 50 % de cette somme,
Condamne Mme [U] [Z] à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4], représenté par Me [S], administrateur provisoire, la somme de 2 581,56 euros TTC, outre indexation selon indice BT 01 (valeur février 2022) au titre des travaux complémentaires sur renforcements,
Condamne Mme [U] [Z] à payer à Mme [F] [H] la somme de 5 000 euros en indemnisation de la perte de valeur de son appartement en suite des travaux,
Dit que les dépens d’appel seront partagés entre Mme [F] [H] et Mme [U] [Z] à hauteur de 50% chacune, avec application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Rigaudière conseil de Mme [H],
Déboute les parties de leur demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,