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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 20 AVRIL 2023
(n° , 2 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/14298 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEFJ4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 2 février 2021 – Juge des contentieux de la protection d’EVRY-COURCOURONNES – RG n° 11-20-000364
APPELANTE
La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège
N° SIRET : 394 352 272 00022
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
INTIMÉ
Monsieur [B] [P]
né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 6] (92)
[Adresse 2]
[Localité 4]
DÉFAILLANT
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
– DÉFAUT
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société Sogefinancement a émis une offre de crédit personnel d’un montant en capital de 25 000 euros remboursable en 83 mensualités de 358,08 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 5,10 %, le TAEG s’élevant à 5,67 %, soit une mensualité avec assurance de 374,33 euros, dont elle affirme qu’il a été accepté par M. [B] [P] selon signature électronique du 3 avril 2018.
Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Sogefinancement a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.
Par acte du 27 février 2020, la société Sogefinancement a fait assigner M. [P] devant le tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes en paiement du solde du prêt lequel, par jugement rendu par défaut du 2 février 2021, l’a déboutée de toutes ses demandes en paiement contre M. [P] au titre du contrat de crédit du 3 avril 2018 comme de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamnée aux dépens.
Le premier juge a considéré en présence d’un contrat signé par voie électronique que la banque devait fournir un document permettant à la juridiction de s’assurer de la fiabilité du procédé utilisé et qu’il n’était versé aucun élément émanant d’un organisme certificateur et qu’aucun autre document n’était produit qui aurait permis de s’assurer que son éventuel interlocuteur était bien M. [P], aucune pièce d’identité n’étant produite non plus qu’aucun document de solvabilité et qu’en outre les mises en demeure étaient pour l’une revenue avec la mention « destinataire inconnu », pour l’autre avait été délivrée à étude et que M. [P] avait été assigné par acte délivré selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile.
Par déclaration réalisée par voie électronique le 23 juillet 2021, la société Sogefinancement a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 25 octobre 2021, la société Sogefinancement demande à la cour d’annuler le jugement et à tout le moins de l’infirmer et statuant à nouveau de constater que la déchéance du terme a été prononcée, subsidiairement de la prononcer avec effets au 1er août 2019, de condamner M. [P] à lui payer la somme de 25 604,24 euros en remboursement du crédit avec intérêts au taux contractuel de 5,10 % l’an sur la somme de 23 728,38 euros à compter du 2 août 2019 et au taux légal pour le surplus, subsidiairement de la condamner à lui payer la somme de 21 885,36 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 2019 sur le fondement de la répétition de l’indu et en tout état de cause, de la condamner à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.
L’appelante fait valoir que le premier juge ne pouvait soulever d’office une contestation de signature non soulevée par l’emprunteur défaillant, sur la seule base de ce que l’offre de crédit avait fait l’objet d’une signature électronique et alors qu’il ressort que des règlements ont été opérés et que le débiteur n’a formé aucune contestation. Elle ajoute qu’il ne s’agit pas d’un moyen tiré du code de la consommation et requiert ainsi l’annulation du jugement.
Elle invoque le caractère infondé de la remise en question de la signature électronique et rappelle que la signature électronique est parfaitement admise en tant que preuve selon les dispositions des articles 1366 et 1367 du code civil et qu’il s’agit d’ailleurs d’une preuve présumée. Elle indique qu’en l’absence de contestation, elle n’a pas à produire de pièce complémentaire visant à établir la fiabilité de la signature mais qu’elle communique aux débats les documents émis par Idemia, opérateur de signature, constitutifs du dossier de preuve à savoir l’attestation de signature électronique, la chronologie de la transaction, le courrier de la société Idemia explicitant le process de certification de la signature électronique.
A défaut, elle indique que ces pièces constituent des commencements de preuve par écrit, qui sont corroborés par les autres éléments de preuve produits aux débats, notamment les mises en demeure et les prélèvements opérés sur son compte et ce même si certains sont revenus impayés faute de provision ce qui doit être distingué du rejet motivé par la contestation du titulaire du compte.
Elle estime que sa créance est bien fondée à hauteur de 23 728,38 euros et indique que si la cour devait estimer que la preuve du contrat de prêt n’est pas rapportée, elle serait bien fondée à solliciter la condamnation de l’emprunteur au paiement de la somme de 21 885,36’euros en restitution d’une somme perçue indûment (somme versée 25 000 euros à déduire paiements effectués pour 3 114,64 euros).
Aucun avocat ne s’est constitué pour M. [P] à qui la déclaration d’appel a été signifiée par acte du 13 octobre 2021 par acte délivré selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile et les conclusions ont été signifiées par acte du 23 novembre 2021 délivré selon les mêmes modalités.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 28 février 2023.
A l’audience la cour ayant examiné les pièces a relevé que n’étaient pas produits ni le justificatif de domicile ni le justificatif des revenus alors qu’il s’agissait d’un contrat signé électroniquement hors agence, a sollicité la production de ces pièces en cours de délibéré, a soulevé à défaut de production la déchéance du droit aux intérêts faute de vérification suffisante de la solvabilité et a imparti un délai à la société Sogefinancement pour produire les pièces et faire valoir ses observations.
Par note en délibéré envoyée le 4 avril 2023, la société Sogefinancement a indiqué ne pas être en mesure de produire les pièces complémentaires sollicitées. Elle fait valoir que le moyen soulevé ne pouvait conduire à exercer en lieu et place de l’emprunteur une action en répétition d’intérêts précédemment réglés et que le juge ne peut sans statuer ultra-petita, formuler en lieu et place de l’emprunteur une demande de répétition d’intérêts précédemment versés. Elle ajoute que l’affectation des sommes versées a été effectuée en exécution du contrat et conformément au tableau d’amortissement qui en résulte et que les sommes versées par l’emprunteur et affectées contractuellement au paiement des intérêts ne peuvent être réaffectées par le juge au paiement du capital. Elle fait encore valoir que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts contractuels est d’interprétation stricte et ne peut être appliquée en dehors du champ d’application prévu par le texte qui ne prévoit en la matière cette sanction qu’à défaut de production de la fiche de dialogue laquelle est produite.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Il résulte de l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 13 avril 2018 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
Sur l’annulation du jugement
L’appelante soutient que si le juge peut soulever d’office tout moyen résultant de l’application des dispositions du code de la consommation comme l’y autorisent les dispositions de l’article R. 632-1 du code de la consommation, il ne peut en revanche soulever d’office tout moyen que le débiteur pourrait soulever et qui ne relève pas du strict champ d’application des dispositions du code de la consommation. Elle indique que le juge ne pouvait donc présupposer un fait qui n’est pas allégué par le défendeur non comparant, à savoir que celui-ci ne serait pas signataire de l’offre de crédit.
Selon les articles 4 et 5 du code de procédure civile, l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.
Selon l’article 12 du même code, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, et doit donner leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.
En application de l’article 472 du même code, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
En l’espèce, le premier juge a constaté l’absence de comparution du défendeur et a visé les dispositions de l’article 472 du code de procédure civile.
Considérant qu’il n’était pas produit de pièces propres à justifier que M. [P] avait bien signé le document par voie électronique, il a estimé que la société Sogefinancement ne justifiait pas d’une signature électronique sécurisée du contrat obtenue dans les conditions du décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 et n’apportait ainsi pas suffisamment la preuve de la conclusion d’un contrat avec M. [P].
Ce faisant, il ne résulte pas de ces énonciations que le premier juge ait entendu opérer d’office une vérification de signature dans les termes de l’article 287 du code de procédure civile alors qu’il entre dans son office, particulièrement en l’absence de comparution du défendeur à une action en paiement, de vérifier que les conditions d’application des textes invoqués sont remplies et que les pièces produites sont suffisantes à fonder une condamnation, la signature d’un contrat fût-elle électronique, faisant partie intégrante des éléments soumis aux débats. C’est donc en procédant à une analyse des pièces soumises aux débats que le premier juge a rejeté la demande en paiement, sans excéder ses pouvoirs.
Le moyen tendant à l’annulation du jugement est donc infondé.
Sur la preuve de l’obligation
En application de l’article 1353 du code civil en sa version applicable au litige, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Il incombe à chaque partie, par application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
En l’espèce, l’appelante produit aux débats au soutien de ses prétentions, l’offre de crédit établie au nom de M. [P] acceptée électroniquement, un dossier de recueil de signature électronique comprenant une attestation de signature électronique, la chronologie de la transaction, le courrier de la société IDEMIA explicitant le process de certification de la signature électronique, la fiche de dialogue (ressources et charges), la copie de la pièce d’identité, la synthèse des garanties des contrats d’assurance et la notice d’information relative à l’assurance, la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, le résultat de consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, le tableau d’amortissement du prêt, l’historique du prêt et un décompte de créance.
L’article 1366 du code civil dispose que : « L’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’état l’intégrité ».
L’article 1367 alinéa 2 du même code dispose que « lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garanti, dans des conditions fixées par décret en conseil d’État ».
L’article premier du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017, relatif à la signature électronique, énonce que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en ‘uvre une signature électronique qualifiée, et que constitue « une signature électronique qualifiée, une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement dont il s’agit et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié, répondant aux exigences de l’article 29 du règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement ».
En l’espèce, l’appelante produit aux débats le fichier de preuve concernant le contrat litigieux, créé par la société Idemia, prestataire de service de certification électronique pour le compte de Signature électronique de la Société Générale.
Il en résulte suffisamment que dans le cadre de la transaction 191cd93a-8972-4705-91e7-5dc22876ffe3, M. [P] a apposé sa signature électronique le 3 avril 2018 à compter de 11h56 sur l’offre de crédit, la fiche de dialogue, la synthèse des garanties des contrats d’assurance et le document d’acceptation de l’assurance facultative, que les dates et heure de validation sont bien horodatées avec certificat d’horodatage et M. [P] identifié par un code utilisateur. Aucun élément ne vient contredire la présomption de fiabilité du procédé de recueil de signature électronique utilisé telle que prévue au décret susvisé pris pour l’application de l’article 1367 du code civil.
L’historique de compte communiqué atteste du déblocage des fonds au profit de M. [P] le 12 avril 2018, puis du prélèvement du montant des échéances du crédit à compter du 11 mai 2018 sans difficulté jusqu’au 10 janvier 2019 puis avec des rejets faute de provision et des échéances demeurées impayées malgré mise en demeure délivrée le 4 juillet 2019.
L’ensemble de ces éléments établit suffisamment l’obligation dont se prévaut l’appelante à l’appui de son action en paiement. C’est donc à tort que le premier juge a rejeté l’intégralité des demandes de la société Sogefinancement. Partant le jugement doit être infirmé.
Sur la recevabilité de l’action au regard du délai de forclusion
En application de l’article R. 312-35 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Il résulte de l’historique de compte que le premier impayé non régularisé est celui du 10 janvier 2019.
En introduisant son action par acte du 27 février 2020, soit dans le délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé, la banque doit être déclarée recevable en son action.
Sur la déchéance du droit aux intérêts et les sommes dues
La cour a soulevé d’office un moyen susceptible d’entraîner la déchéance du droit aux intérêts, ce dont la banque lui dénie le droit.
Or l’article R. 632-1 du code de la consommation permet au juge de relever d’office tous les moyens tirés de l’application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par la cour étant rappelé qu’en ce qu’il tend à faire rejeter comme non justifiée la demande en paiement du prêteur ayant consenti un crédit à la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts peut être soulevé d’office par le juge en ce qu’il aboutit le cas échéant à limiter la créance dont la banque réclame le paiement. Les conséquences de cette déchéance sont expressément prévues par la loi et la banque n’est pas fondée à remettre en cause ce mécanisme en lui opposant une interdiction de réaffectation des sommes versées.
Le contrat a été signé par voie électronique et donc à distance ce qui n’est pas contesté par la banque.
Dès lors, il résulte des articles L. 312-17, D. 312-7 et D. 312-8 du code de la consommation que la vérification de la solvabilité de l’emprunteur prévue par l’article L. 312-16 du même code est renforcée, le prêteur ou son intermédiaire devant fournir à l’emprunteur une fiche d’informations distincte de la fiche mentionnée à l’article L. 312-12, laquelle doit être conservée par le prêteur pendant toute la durée du prêt et comporter notamment les éléments relatifs aux ressources et charges de l’emprunteur ainsi que, le cas échéant, aux prêts en cours contractés par ce dernier, être signée ou son contenu confirmé par voie électronique par l’emprunteur et faire l’objet d’une déclaration certifiant sur l’honneur son exactitude. De plus lorsque le crédit porte sur un montant supérieur à 3 000 euros, cette fiche doit être corroborée par des pièces justificatives à jour au moment de l’établissement de la fiche d’information, dont la liste, définie par décret est la suivante :
1° Tout justificatif du domicile de l’emprunteur ; et
2° Tout justificatif du revenu de l’emprunteur ; et
3° Tout justificatif de l’identité de l’emprunteur.
L’article L. 341-2 du code de la consommation sanctionne le non-respect de la vérification de solvabilité générale de l’article L. 312-16 du même code par une déchéance du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge et l’article L. 341-3 du même code sanctionne le prêteur qui accorde un crédit sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l’article L. 312-17 par une déchéance totale du droit aux intérêts.
En l’espèce la société Sogefinancement qui produit la fiche de dialogue et la copie de la pièce d’identité ne produit pas les justificatifs de revenus et de domicile et ne démontre donc pas avoir suffisamment vérifié la solvabilité de M. [P] s’agissant d’un crédit conclu hors agence. La déchéance du droit aux intérêts doit donc être prononcée.
La société Sogefinancement produit l’offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l’historique de prêt, le tableau d’amortissement, la mise en demeure avant déchéance du terme du 4 juillet 2019 enjoignant à M. [P] de régler l’arriéré de 2 455,33’euros sous 15 jours à peine de déchéance du terme et celle notifiant la déchéance du terme du 7 octobre 2019 portant mise en demeure de payer le solde du crédit et un décompte de créance.
Il en résulte que la société Sogefinancement se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues.
Aux termes de l’article L. 341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
Il y a donc lieu de déduire de la totalité des sommes empruntées soit 25 000 euros la totalité des sommes payées soit 3 114,64 euros soit une somme due de 21 885,36 euros au paiement de laquelle M. [P] doit être condamné.
La limitation légale de la créance du préteur exclut qu’il puisse prétendre au paiement de toute autre somme et notamment de la clause pénale prévue par l’article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation. La société Sogefinancement doit donc être déboutée sur ce point.
Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.
Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).
En l’espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d’intérêt annuel fixe de 5,10 %. Dès lors, les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal majoré de cinq points ne seraient pas significativement inférieurs à ce taux conventionnel. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l’article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de dire qu’il ne sera pas fait application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier. La somme restant due en capital au titre de ce crédit portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer effectuée simultanément au prononcé de la déchéance du terme soit le 7 octobre 2019 sans majoration de retard.
Sur les autres demandes
Le jugement qui a condamné la société Sogefinancement aux dépens de première instance doit être infirmé sur ce point et M. [P] doit être condamné aux dépens de première instance.
En revanche rien ne justifie de le condamner aux dépens d’appel, alors que M. [P] n’ayant jamais été présent ou représenté, il n’avait pu faire valoir aucun moyen, ayant pu conduire le premier juge à statuer comme il l’a fait et que la société Sogefinancement n’avait pas produit toutes les pièces. La société Sogefinancement conservera donc la charge de ses dépens d’appel ainsi que de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,
Dit n’y avoir lieu à annulation du jugement déféré ;
Infirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté la société Sogefinancement de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce la déchéance du droit aux intérêts contractuels ;
Condamne M. [B] [P] à payer à la société Sogefinancement les sommes de 21 885,36 euros au titre du capital restant dû du prêt avec intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 2019 ;
Ecarte l’application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier’et dit que le taux légal ne sera pas majoré de 5 points ;
Condamne M. [B] [P] aux dépens de première instance et la société Sogefinancement aux dépens d’appel ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
La greffière La présidente