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COUR D’APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°
DU : 26 Avril 2023
N° RG 22/00167 – N° Portalis DBVU-V-B7G-FXYM
VTD
Arrêt rendu le vingt six Avril deux mille vingt trois
Sur APPEL d’une décision rendue le 04 novembre 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND (RG n° 21/00353)
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller
Madame Virginie DUFAYET, Conseiller
En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
La société FLOA anciennement dénommée BANQUE DU GROUPE CASINO
SA immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 434 130 423 00446
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentants : Me Laurie FURLANINI, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
(postulant) et la SELARL BLG AVOCATS, avocats au barreau de ROANNE (plaidant)
APPELANTE
ET :
Mme [N] [L] épouse [F]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentant : la SCP PORTEJOIE e ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/001519 du 01/04/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)
INTIMÉE
DÉBATS :
Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, à l’audience publique du 23 Février 2023, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame THEUIL-DIF, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.
ARRET :
Prononcé publiquement le 26 Avril 2023 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte d’huissier en date du 29 juin 2021, la SA Floa anciennement dénommée la SA Banque du Groupe Casino a fait assigner Mme [N] [F] née [L] devant le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand aux fins d’obtenir la condamnation de la défenderesse au paiement d’une somme totale de 7 973,29 euros outre intérêts au taux contractuel de 5,05 % à compter de la mise en demeure, au titre d’un contrat de prêt crédit renouvelable d’un montant maximum de 6 000 euros souscrit le 15 février 2019 et signé par voie électronique.
Elle sollicitait subsidiairement, en cas de prononcé de la déchéance du droit aux intérêts, que la condamnation soit assortie des intérêts au taux légal avec majoration de 5 points, en limitant cette sanction aux intérêts échus et non payés, et en outre la capitalisation des intérêts.
Par jugement réputé contradictoire du 4 novembre 2021, le tribunal a débouté la SA Floa de l’ensemble de ses demandes.
Le tribunal a considéré que si l’organisme auquel la SA Floa avait eu recours était habilité à authentifier des signatures comme service de confiance, l’acte litigieux, qui ne comportait pas de référence permettant de le rattacher au fichier de preuve rapportant l’acte matériel de signature électronique, devait être considéré comme n’ayant pas valablement été signé numériquement.
La SA Floa a interjeté appel de cette décision le 14 janvier 2022.
Par conclusions signifiées et déposées le 23 juin 2022, l’appelante demande à la cour, vu les articles 1103, 1104, 1231-1, 1902 du code civil, L.311-1 et suivants du code de la consommation, de :
– réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 novembre 2021 par le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand ;
– statuant à nouveau :
– condamner Mme [N] [F] née [L] à lui payer les sommes suivantes, arrêtées au 8 juin 2021 :
* Capital restant dû 6 671,69 euros
* Intérêts 423,54 euros
* Assurance 344,32 euros
* Indemnité conventionnelle 533,74 euros
Total 7 973,29 euros
outre frais et intérêts de retard au taux contractuel de 5,05 % à compter de la mise en demeure et jusqu’à parfait paiement ;
– débouter Mme [N] [F] née [L] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– ordonner la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
– condamner Mme [N] [F] née [L] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;
– dire que, dans l’hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le Jugement à intervenir, l’exécution devra être réalisée par l’intermédiaire d’un Huissier de Justice, le montant des sommes retenues par l’Huissier, en application de l’article R444-55 du code de commerce et son tableau 3-1 annexé, devra être supporté par le débiteur, en sus de l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l’article L111-8 du code des procédures civiles d’exécution ne prévoyant qu’une simple faculté de mettre à la charge du créancier les dites sommes.
Par conclusions signifiées et déposées le 16 mai 2022, Mme [N] [F] née [L] demande à la cour de :
– confirmer le jugement ;
– en conséquence, débouter la SA Floa de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner la SA Floa à lui payer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
La procédure a été clôturée le 2 février 2023.
MOTIFS :
Aux termes de l’article 1366 du code civil, l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.
Selon l’article 1367, la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte (…).
Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.
Aux termes de l’article 1er du décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017, la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée jusqu’à preuve contraire lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique qualifiée.
Est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement (UE) n°910/2014 du 23 juillet 2014,et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement.
La SA Floa produit une offre de contrat de crédit renouvelable qu’elle a émise le 15 février 2019 au nom de Mme [F] [N] [L] née le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 7], dont l’adresse est [Adresse 4], crédit d’un montant maximum autorisé de 6 000 euros. Le document mentionne en dernière page : ‘contrat signé électroniquement’. Il porte un n° de dossier : 1055877.
La SA Floa, pour prouver la signature électronique de Mme [L], présente un ‘fichier de preuve’ établi par la société DocuSign, prestataire de service de certification électronique.
Aux termes de ce document, ce fichier de preuve permet d’attester de la signature électronique du document par le signataire désigné ci-après : ‘[N] [F] ([Courriel 8] a signé le 15 février 2019 10:35:12 CET – référence de la transaction associée 2FNETHE0-SERVID01– -20190215103327-CQP3MVV2WJREQ202″
Il est notamment relaté que le signataire s’est authentifié sur la page de consentement en saisissant le code qui lui a été transmis automatiquement par le service Protect&Sign par SMS au numéro de téléphone [XXXXXXXX01] et que le service a vérifié l’égalité entre le code saisi par l’utilisateur et le code transmis.
Par ailleurs, figure en dernière page du fichier de preuve le numéro de dossier du contrat de prêt : 1055877, permettant ainsi de rattacher le contrat au fichier de preuve.
De surcroît, si la signature électronique n’est pas une signature électronique qualifiée au sens des dispositions précitées, et ne bénéficie donc pas de la présomption de fiabilité, il convient d’observer que la banque produit en outre les documents qui lui ont été remis par le signataire du crédit litigieux, à savoir :
– copie de la carte nationale d’identité au nom de l’intimée,
– bulletin de paye de novembre 2019,
– un relevé d’identité bancaire,
– une facture EDF,
tous ces éléments corroborant l’identité de l’emprunteur et l’adresse de son domicile.
Au moyen de ces éléments de preuves complémentaires, la SA Floa démontre la réalité et la fiabilité de la signature électronique donnée par Mme [L] le 15 février 2019.
Le dépôt de plainte de l’intéressée à l’encontre de son ex-compagnon qui aurait usurpé son identité, résultant d’un courrier au procureur de la République en date du 14 octobre 2021et d’une audition par les services de police du 24 janvier 2022 reprenant les éléments dénoncés dans le courrier adressé au procureur, n’est assorti d’aucun autre élément. Il n’est pas justifié des suites données à cette plainte, outre le fait que Mme [L] fait état d’un autre crédit souscrit le 14 juin 2019 dont les fonds ont été versés sur un compte ouvert auprès de l’établissement Carrefour Banque.
La SA Floa présente par ailleurs les autres pièces suivantes : les documents contractuels établis en février 2019, la preuve de la consultation du FICP, la fiche de dialogue revenus et charges, la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, la mise en demeure avant déchéance du terme par LRAR du 21 août 2020, et après déchéance du terme par LRAR du 24 novembre 2020, ainsi qu’un historique du compte.
Au vu de ces éléments, la créance s’établit comme suit au 24 novembre 2020 :
– capital restant dû : 6 671,69 euros
– intérêts de retard : 242,62 euros
– assurance : 344,32 euros.
soit une somme de 7 258,63 euros outre les intérêts au taux contractuel de 5,05 % sur la somme de 6 671,69 euros à compter du 24 novembre 2020.
La capitalisation des intérêts générant pour l’emprunteur un surcoût prohibé par les dispositions de l’article L.312-38 du code de la consommation, la demande de la banque à ce titre sera rejetée.
L’indemnité conventionnelle de 8% apparaît manifestement excessive au regard de l’économie globale du contrat et du préjudice effectivement subi par la banque. Elle sera réduite à la somme de 10 euros.
Mme [L] sera condamnée au paiement de ces sommes, le jugement étant infirmé en ce qu’il a débouté la SA Floa de sa demande à ce titre.
– Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Partie succombante, Mme [L] sera condamnée aux dépens, sans qu’il y ait lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et sans qu’il y ait lieu de lui faire supporter le droit proportionnel mis à la charge du créancier par l’article R444-55 du code de commerce relatif au tarif des huissiers de justice.
Les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe ;
Infirme le jugement déféré ;
Statuant à nouveau:
Condamne Mme [N] [F] née [L] à payer à la SA Floa, anciennement dénommée Banque du Groupe Casino, au titre du contrat de crédit renouvelable n°1055877 souscrit le 15 février 2019 :
une somme de 7 258,63 euros outre les intérêts au taux contractuel de 5,05 % sur la somme de 6 671,69 euros à compter du 24 novembre 2020 ;
une somme de 10 euros au titre de l’indemnité conventionnelle, avec intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2020 ;
Dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [N] [F] née [L] aux dépens de première instance et d’appel, sans qu’il y ait lieu de lui faire supporter le droit proportionnel mis à la charge du créancier par l’article R444-55 du code de commerce relatif au tarif des huissiers de justice;
Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle.
Le greffier, La présidente,